Dans les coulisses d'un mensonge
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Aperçu du livre
Dans les coulisses d'un mensonge - Mourad Bellaanaya
Dans les coulisses d’un mensonge
Mourad Bellaanaya
Dans les coulisses d’un mensonge
LES ÉDITIONS DU NET
22 rue Édouard Nieuport 92150 Suresnes
© Les Éditions du Net, 2013
ISBN : 978-2-312-00894-3
New York, s’éveille!
New York.
Après une nuit chaotique, la ville se réveil doucement. Son rythme cardiaque s'intensifie, à mesure que le débit de taxi jaune circule, de plus en plus, dans ses artères. Il en va de même pour ses habitants, qui dans une mécanique journalière, donnent à la machine sa cadence.
La végétation de Central Park est disposée à recevoir tous le dioxyde de carbone des new-yorkais, en échange d'une fraîcheur matinale et d'une bonne dose d'oxygène.
La machine est bien huilée. Les marcs de café s'entassent dans les corbeilles. La vapeur des expresso, ristreto, macchiato, décaféine, se déversent dans les gobelets en carton, sous une pression colossale. Ces gobelets, qui se déchargent de toutes responsabilités, si le café venait à vous brûler la langue. L’adrénaline augmente à chaque café servi et gorgé de ce nectar. Les montres, aux poignets et sur les cellulaires, rappellent à l'ordre. Le temps presse. Des rendez-vous pour certains, la pointeuse pour d'autres, aucun moyen d’échapper à ce patron mental, que joue le Temps.
À travers les conduits, la machinerie réclame davantage de puissance. Encore et toujours plus de puissance et ainsi fournir cette énergie, que New York réclame pour ses habitants.
Une force motrice, sans laquelle, rien ne pourrait se faire normalement.
La pièce de monnaie
Du tohu-bohu de la rue, ne transparaissait que les silhouettes des passants, dont rien ne les distingués. Les uns agglutinés aux autres, tel un banc de chinchards, ils nagent dans les fleuves de goudron, aux rives architecturées de béton et d’acier.
La cloche signale un client. Une femme, d'allure élégante, entra, en même temps que le bruit assourdissant de la rue, qui l'accompagna.
La porte se referma, derrière elle. La cloche sonna et se tut.
Le nuage de discutions dispersé, pendant un bref instant, s'étend à nouveau dans la salle. Cette femme aux cheveux roux, ramenait l'automne en cet été. Je la regardais se déplacer, dans ce décor devenu soudain pétri, sans effleurer la moindre personne, qu'elle croisa. Elle se dirigea vers le comptoir, dans une danse gracieuse, sans fond musical.
– Jam ! Faut qu'on y aille, on est en retard ! dit Ed, tout en enfilant sa veste.
– Jam ! T'es sourd ou quoi ?
– Comment ? Euh... Oui ! dit-t-il, d'un air confus et désorienté.
– On n’a pas le temps de rêver mon pote, on doit aller travailler !
Jam engloutit son café froid, d'une traite.
– Dis-moi Jam ! Tu as payé le p'tit déjeuner ?
– Non ! ...Euh … Toi appel un taxi et moi je vais payer ! dit-il, le regard en direction du comptoir.
Les deux hommes s’exécutèrent sur le champ. Jam se dirigea vers la caisse, pressant le pas, sa serviette en faux cuir sous son bras, les mains moites comptant la monnaie. Près de la caissière, la femme aux cheveux roux se trouvait là, de dos, la main enfouit dans son sac à mains. Désespérément, elle cherche un objet. Son expédition semble escarpée. Dans un geste maladroit, elle renversa son sac, et fit tomber des pièces fugitives, aussitôt parterre. Certaines arrivent à s'échapper, d'autres se couchent. Avec célérité, elle se pencha, et ramassa les pièces à sa portée. Brusquement, elle se retourna, puis sortit du café.
L'automne fit place à l'été.
– Monsieur ! Votre ticket, s'il vous plaît ! dit la caissière.
– Pardon ?... Euh, oui ! Merci ! dit Jam, saisissant son ticket, la vue fixée sur le gobelet de café, abandonné sur le carrelage du Starbucks Coffee.
Oubliant son ami Ed, son boulot, lors d’un cours instant, il se tenait devant la boisson, qui appartenait à la femme aux cheveux roux. Une pièce de cinq cents, provenant du sac à main, se retrouva, aussitôt, dans la poche de Jam.
*
* *
Le piétinement incessant des semelles, sur la moquette synthétique d'un bleu usé, électrifie l'atmosphère. Un orage se fait sentir.
Il pleut.
Dehors, le ciel gris foncé, découpe les tours d'immeubles en strate de lumière. Les taches d'obscurité, sur la façade de verre et d'acier, démasquent les absents à leurs postes. Les taches sombres proviennent d'une journée de repos, une partie de tennis entre cadre ou un arrêt maladie.
Au vingt-septième étage, il y a un plateau de bureau immense et tendu, baignant dans une lumière artificielle de néons en série. Une répétition de bureaux ouverts, tel des cases, s'accolent dans un rythme de rime fade et monotone. Les cases s'étalent vers un horizon presque infini, mise en scène par le reflet des pans de vitrages verticaux. Dans ce décor de géométrie pure, on assistait à un élevage de nœud de cravate sur pattes.
Le bourdonnement d'abeilles, au miel stérile, joue aux échecs sur le plafond en damier de plâtre et de néons. Il y a toujours un vainqueur en fin de journée ; le silence.
Quelque part dans cette atmosphère de travaille. Posé sur un bureau blanc, se trouve une tasse en grès, avec inscrit sur l'émail blanc : Jam. La tasse réfléchit une image défigurée, de son visage. Il est assis, blotti sur sa chaise à roulette, les yeux contemplant cette pièce de cinq cents. Les dossiers empilés autour de son ordinateur, lui semblait une affaire déjà classée. Ce petit bout de métal, qui n'avait pour seul valeur, l'inscription gravée sur l'une de ses faces, l’emmène dans un imaginaire lointain.
« Quelle histoire pourrait raconter cette pièce de monnaie, si elle avait la parole ? pensait-il. Combien de lieux a-t-elle visité, avant d'arriver dans ma main ? A-t-elle rencontré des personnalités célèbres, ou pas ? Qu'a-t-elle vu ? Quel secret connais-tu ? Pourrais-tu me parler de la femme aux cheveux roux ? Parle-moi ! »
La valse de Grand Central Station
Sur un mur, est accrochée une reproduction, grand format, d'une aquarelle de Delacroix, au Maroc. Les couleurs du tableau contrastent avec celles de l'appartement, dans lequel vit Jam. À l'opposé du tableau, se trouve l'unique fenêtre de la pièce. Elle cadre sur le pont de Brooklyn et de Williamsburg. En dehors de cela, l'appartement de trois pièces, ne raconter plus rien de personnel. Les murs peints à mi-hauteur en gris et le reste en blanc. Le mobilier, provenant de chez Ikea, se décline dans une gamme de matériaux lisse, rouge bordeaux. Le sol, un parquet bois vieillis, est conservé en l’état, sous peine de payer un supplément au propriétaire de l'immeuble.
7 h 00. Depuis que je travail, mes journées sont une répétition, un enchaînement de gestes quotidien, communément appelé : la routine. Ma routine démarre par une douche. Puis l'habillement. Pas de temps à perdre, mes vêtements sont organisés par jour. La chemise, cravate, pantalon du lundi, et cela jusqu'au vendredi.
7 h 30. La cafetière, programmée la veille, s'allume. La présentatrice de CNN, déverse les informations, en même temps que le thermos se remplit de café.
Fin du flash-info. Jam dépose dans le levier, sa tasse, avec un fond de café et du sucre mal mélangé.
La météo du jour, étale des nuages et du soleil sur une carte, tandis qu'il enfile ses chaussures, soigneusement cirées. « Aujourd'hui, soleil avec risque de pluie en fin de journée ! » s'échappe de la télévision. Le parapluie s'invite dans sa serviette, en faux cuir. Les clés dans sa poche, il repose la télécommande de la télévision, après l'avoir éteinte.
Le trajet est bien rodé. Je me rends à la station de métro Marcy Avenue. Je prends la ligne M, franchis Williamsburg Bridge, pour regagner Manhattan. Arrivé à Broadway-Lafayette Street, je change de ligne, pour le numéro six, direction la station 42 street / Grand Central.
Habituellement, je m'arrête avant d'atteindre Grand Central station. Mais, parfois, il m'arrivait d'y faire un détour.
*
* *
Métro plissé d'aluminium venant de droite.
Métro plissé d'aluminium venant de gauche.
Voyageur et voyageuse se mélangent sur le quai, dans un ballet d'anonyme, lorsque les portes automatiques s'ouvrent avec synchronisme.
Les escaliers mécaniques donnent le tempo. Chaussure de ville ou de sport, modèle chic ou classique, chaque pas est une note qui dans la masse, résonne au travers de la musique. Les tunnels aux toits courbes jouent les tambours. Le son est chaleureux par la foule, froid par la pierre des couloirs. Il s’estompe dans les venelles, de l'instrument de musique. Silence et murmure se compriment dans les coulisses voûtés.
Chut ! Le ballet commence !
Cadre, ouvrier, flâneuse, touriste, policier, voyageuse, s'improvisent danseur ou danseuse, dans le hall monumental de la gare de Grand Central. Le décor est à la hauteur du spectacle. La danse en solo ou en couple, sans soliste, prend de l'ampleur à chaque entrée en piste. Le destin de chacun glisse dans une valse,