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Mon Éden: Roman jeunesse
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Mon Éden: Roman jeunesse
Livre électronique138 pages1 heure

Mon Éden: Roman jeunesse

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À propos de ce livre électronique

Erwan a 16 ans et vient de perdre une moitié de lui. Sa sœur jumelle, Éden, s’est suicidée. Il souffre terriblement et s’éloigne de ses parents, du psychologue, de ses copains, de son lycée. Terrassé par la culpabilité qui s’ajoute à sa crise d’adolescence, Erwan ne peut s’empêcher de ressasser les souvenirs. Il découvre le journal intime d’Éden, dont il ne soupçonnait même pas l’existence…

À PROPOS DE L'AUTEURE

Professeur d’anglais en collège puis en lycée, Hélène Duvar est fascinée par le pouvoir des mots, quelle que soit la langue. Elle aime raconter et transmettre des histoires depuis toujours – sous forme de bandes dessinées, de poèmes, de nouvelles, de sketches, de chansons ou de romans. Passionnée de théâtre et de musique, elle partage sa vie entre la Sarthe, dont elle est originaire, et la Seine-et-Marne, où elle travaille.
LangueFrançais
ÉditeurLe Muscadier
Date de sortie15 avr. 2021
ISBN9791096935789
Mon Éden: Roman jeunesse

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    Aperçu du livre

    Mon Éden - Hélène Duvar

    soutien.

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    première

    partie

    Le ciel était bleu. Le ciel était bleu, comme il l’est toujours lors de ces chauds matins d’été, et je me souviens d’Éden qui m’avait pris sur ses genoux sur la balançoire, et on était montés très haut, si haut que j’avais cru qu’on allait passer par-dessus le toit de notre maison.

    Le ciel était bleu. Le ciel était bleu, et j’avais six ans, et les oiseaux chantaient, et je tendais mes mains pour attraper la vie, la vraie, et la garder nichée au creux de mes paumes, petite sphère brûlante de lumière.

    Aujourd’hui tout est sombre et triste et fade. Je n’aime pas ma chambre. Je n’aime pas mon père, je n’aime pas ma mère, et des envies sinistres de noyer mon chien me prennent parfois.

    Je rumine ma colère en marchant des heures loin de mon quartier, sur les routes, dans les bois et à travers les champs, qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige. Je m’en fiche pas mal, j’adore la nature, la nature est mon amie, mon unique amie, et j’aime être seul avec elle. Je peux revenir trempé et crotté, ça ne fait rien, je prends une douche et hop ! c’est fini. Lavé, l’affront. L’affront à l’autorité maternelle, prêtresse superbe siégeant sur l’autel des sacrifices ménagers.

    Tu parles. J’ai envie de casser les murs quand elle me surprend – et à dire vrai elle me surprend toujours – à rentrer sur la pointe de mes baskets, mes baskets toutes sales de bouses de vache ramassées sur la route, la route où je suis parti pour mes escapades.

    « Où tu étais, encore ? Je te préviens, c’est toi qui nettoies !… Tu es toujours parti… Parfois, on se demande à quoi tu sers ! »

    Oui, c’est vrai ça, à quoi je sers ? Je pourrais décider d’en finir, moi aussi – ouvrir la fenêtre de ma chambre, me prendre une chute de plusieurs mètres dans la tronche, et puis basta ! c’est bon, c’est fini, on n’en parle plus. Adieu Maman, adieu Papa.

    Mais non. Ça me glace les os. N’allez pas croire que je suis comme toutes ces cruches qui se taillent les veines pour un oui ou pour un non…

    Un, je ne suis pas une fille – ça me ferait trop mal ! – et deux, je ne chiale jamais.

    Sauf quand je ne peux pas me retenir. Sauf quand je rêve d’Éden qui m’apparaît dans un cercle de lumière noire, je ne peux pas la reconnaître, et tout ce que je sens c’est sa souffrance, sa souffrance infinie, emmêlée à la mienne, comme si nous n’étions qu’un, comme si nos corps se confondaient, et que nos douleurs se faisaient écho. Et, pour ainsi dire, c’est comme ça que nous sommes nés, confondus, emmêlés. Fusionnels.

    Ça arrive à tout le monde de perdre un proche. Oui, d’accord. Mais Éden, ce n’était pas seulement un proche. C’est honteux de la réduire à ça, à un article (qui plus est, indéfini) associé à un lamentable nom commun. Indéfini et commun sont les mots les plus mal choisis pour définir Éden et ils me fichent en rogne. Alors ne les utilisez jamais devant moi. Ces mots sont à bannir de notre vocabulaire.

    Et mince, ça y est, ça me reprend !

    J’ai une boule dans la gorge. Circulez, il n’y a rien à voir. Dégagez, laissez-moi tranquille. Je vous avais bien dit que j’étais nerveux.

    * *

    *

    J’ai respiré bien fort et bien longtemps, comme on m’a déjà dit de le faire des millions de fois.

    Ça va mieux, je me suis calmé.

    Mais je régresse ; je suis étalé de tout mon long sur le canapé et je broie du noir.

    Message de Jérémy pour me rappeler qu’il joue son match demain à 14 heures. Vaine tentative de sa part pour me faire sortir de chez moi ; j’y suis, j’y reste.

    Oh mais ça ne te ferait pas de mal de sortir, Erwan, tu es toujours avachi, tu ne vas même plus à l’entraînement.

    Oh non, pas ça. Pas la voix de mon père dans ma tête, s’il vous plaît. J’ai assez de soucis comme ça.

    Bon.

    Ce n’est pas le tout mais, dans la vie, il faut prendre de grandes décisions. Je me reprendrais bien une part de brioche, moi. Avec du Nutella. Oui, je sais, c’est gras. Allez savoir pourquoi, d’ordinaire c’est toujours les trucs les plus gras qui me consolent.

    La télé est allumée dans le salon. Je vais dans la cuisine et me prépare mon petit goûter. La télé déverse des conneries en tous genres dont environ 99,9 % de la population française se fiche royalement. Qui a divorcé, qui a couché avec qui, qui a fait une sextape… ce n’est pas la vraie vie, tout ça. Les paillettes, la folie de la renommée, l’image hypocrite que se donnent les stars.

    La vraie vie et ses problèmes, moi, je crois en avoir bouffé assez. Assez pour me rendre compte à quel point le bonheur est éphémère.

    La preuve, quand je regarde par la fenêtre, je ne vois même plus les arcs-en-ciel. Je ne fais plus attention à rien, ni aux sourires sur les visages ni aux chants des oiseaux.

    Ma brioche est prête mais, tiens, je n’ai même pas envie de la manger. Je la repose sur le bord de l’évier.

    Je suis écœuré.

    Si même la bouffe ne me console plus, ça devient grave.

    Éden, elle, n’était pas gourmande.

    J’avais l’impression qu’elle se privait un peu de tout – de nourriture, de sommeil, de son propre plaisir – pour se concentrer sur le bien-être des autres. Elle vivait pour les autres.

    Elle se faisait souvent avoir parce qu’elle était trop gentille, elle avait tant de choses à donner sans jamais rien attendre en échange ; rien ne la rendait plus heureuse que les gens qui la remerciaient en souriant.

    Une fille parfaite, en somme. Du moins, au début.

    * *

    *

    Un éclair me surprend ; mon regard se dirige vers la fenêtre. Il y a de l’orage. Et de la pluie filasse.

    Il ne manquait plus que ça.

    J’aimerais que les soucis glissent sur moi comme l’eau glisse sur les carreaux.

    Sans dommage.

    J’attrape mon agenda dans mon vieux sac à dos pourri. Lundi : DS de maths. Mardi : carte de géo à rendre. Les maths et la géo, mes matières préférées. Je sens que je vais passer le plus beau week-end de ma vie.

    Non, je rigole.

    Je laisse les pages défiler, et je me retrouve à la dernière page de l’agenda, une page toute colorée avec des dessins et une écriture de fille. Éden.

    L’agenda atterrit à l’autre bout du salon en manquant de dégommer le bocal de ce crétin de poisson rouge. Jérémy serait fier de voir que je n’ai pas perdu la main.

    Je ne pouvais pas garder l’agenda entre mes doigts une seule seconde de plus. Il m’aurait brûlé, je crois. Tout ce qui me ramène à Éden me brûle.

    Des brûlures qui cicatrisent mal.

    Pourquoi c’est elle qui est partie ? C’était moi, l’ado à problèmes. Erwan le boulet. Ça a toujours été moi. Elle avait de bonnes notes à l’école, moi moins. Elle était d’un tempérament calme et docile, moi j’étais rebelle et passionné. Elle pouvait passer des heures à jouer aux échecs, je détruisais les manettes des jeux vidéo en les balançant contre le mur comme une brute dès que j’avais perdu une partie.

    Les gens étaient toujours d’accord pour dire : « Éden réussira » – moi y compris. Et pour dire : « Erwan aura plus de difficultés » – moi y compris.

    Pourtant, je ne lui en voulais pas. Je vous jure ! C’était une fille qui avait du mérite, je n’étais pas jaloux d’elle.

    J’étais jaloux des autres.

    Il ne fallait pas qu’une autre fille la regarde de travers, ou qu’un gars lui fasse une crasse. Je ne supportais pas ça. C’était une fille bien, et je ne voulais pas qu’elle s’attire des problèmes comme moi. Son côté pur, je voulais le préserver, pour me préserver moi, nous préserver nous. C’était ce qui nous restait de l’innocence de l’enfance, ce truc si beau et si pur, cette facette d’Éden, mon Éden. Je sais, ça a l’air bête comme ça, mais c’était vraiment ce que je pensais à l’époque. À l’époque où tout a mal tourné, je veux dire.

    * *

    *

    JOURNAL D’ÉDEN

    À l’extérieur

    À l’intérieur

    J’ai peur. 100000000000011D0000008911147DDE4A29F5EC.jpg

    Terreur du Néant

    En s’immisçant dedans.

    Comme un étau serrant mon cœur

    Une vague de froid qui m’oppresse

    Un courant invisible qui me broie

    Met mon âme et mon corps aux abois.

    Ramassée dans l’ombre de moi-même

    De rage et d’impuissance

    Je compte et rabâche mes peines

    Mon ventre hurle à mort ma peur de l’errance.

    Ce mal piétine notre adolescence

    Il nous a arrachés à notre enfance

    Écrasant nos désirs innocents.

    Je n’attends que ma délivrance

    Je prends ma revanche sur le temps qui brise mon allant.

    La première fois que j’ai lu ce poème, en le découvrant dans le journal intime qu’elle avait tenu quelques mois, ça m’a fait l’effet d’un coup de couteau dans le ventre.

    J’ai pleuré en ressortant ça du coffre où je garde tous nos souvenirs, à elle et moi.

    En ce temps-là, j’étais insouciant, j’étais loin d’imaginer ce qui allait arriver.

    Éden ne savait pas encore ce qu’elle allait devenir et

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