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Enfants de la déconstruction: Portrait d'une jeunesse en rupture
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Enfants de la déconstruction: Portrait d'une jeunesse en rupture
Livre électronique185 pages2 heures

Enfants de la déconstruction: Portrait d'une jeunesse en rupture

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À propos de ce livre électronique

Dans un monde en pleine mutation, dans lequel sont prônés l'individualisme, la compétition et la surconsommation, comment est-ce que la jeunesse occidentale peut-elle se reconstruire et bâtir un monde meilleur ?

La déconstruction marque la fin des grandes idéologies et la naissance d'une génération face à l'apogée d'un capitalisme libéral insécurisant. Comment la jeunesse d'aujourd'hui peut-elle relever les défis majeurs du siècle ? De la déshumanisation d'un monde bientôt dirigé par les algorithmes à l'émergence inéluctable de la robotisation et de la réalité virtuelle, les auteurs, dans cet essai sans filtre, analysent les mutations de la jeunesse occidentale. Ils s'interrogent sur sa relation aux anciens, abordent les questions de la religion, du rapport à la croyance, la notino d'identité et la place réservée à la jeunesse dans une société où la compétition exacerbée amène à un individualisme effrené. Ils abordent le thème de la surconsommation, d'une certaine vacuité des relations humaines, ainsi que l'apparition de tensions sociales qui ne manqueront pas de surgir violemment dans notre pays. Les auteurs définissent trois étapes-clés de la vie de toute enfant de la déconstruction : me faire, m'aimer, me battre, puis, devant une situation générale pour le moins anxiogène, prônent avec espoir trois remèdes pour reconstruire : la Terre, la Culture et les Sciences.

Les auteurs nous offrent un regard synthétique et critique sur plusieurs dimensions de notre société : religion, politique, consommation, habitudes de vie... Ils proposent aussi des solutions pour se réinventer et se définir un nouvel idéal d'humanité.

EXTRAIT

Traditionnellement, quand un jeune homme s’intéressait à une jeune personne, il la découvrait, comprenait ce qu’elle aime, l’abordait librement et rivalisait d’originalité ou de timidité pour la séduire. Dans le cadre d’une application, la rencontre se cantonne à un format où le physique va prendre toute la place de l’être. On ne peut croire au coup de foudre d’une photo Instagram ou tomber en admiration devant la logorrhée d’un tweet. Ce n’est plus le ton de la voix, la douceur du regard ni les vibrations de la peau qui permettront de s’aimer, mais un portail numérique, standardisé et identique contenant six photos de plain-pied. Un programme nous conseille de sourire, d’être avec des amis ou de ne pas mettre trop d’animaux.

À PROPOS DES AUTEURS

Paul Melun grandit à Bordeaux son père est agriculteur biologique et sa mère orthoptiste. Durant ses études secondaires, il découvrira l’engagement politique en prenant la tête de la contestation de la réforme des retraites de 2010 dans son lycée. Admis à Sciences Po Bordeaux, il concrétise ses désirs d’engagement en prenant la présidence de l’UNEF, syndicat étudiant. Durant ces années, il se rapproche de la politique en conseillant plusieurs élus. Diplômé de Sciences Po, Paul rejoint l’ESSEC afin d’y compléter sa formation et d’engager une carrière dans le secteur privé. Désormais Consultant en stratégie à KPMG, il est en parallèle membre du bureau du club D12 à Paris.

Jérémie Cornet grandit à Paris dans une éducation catholique. Il suivra une éducation secondaire à la campagne, en Charente (Angoulême) et sera interne au Lycée du Futuroscope. Après une classe préparatoire littéraire au Lycée Clémenceau de Nantes il rejoint Sciences Po Bordeaux pour se spécialiser en Affaires Publiques. Enfin, il termine ses études au programme Grande École de l’ESSEC avec une spécialisation en Big Data. Féru de technologie, il est employé chez IBM en Conseil en Stratégie Blockchain et Intelligence Artificielle il a aussi été membre et président de plusieurs associations et fondateur d’une entreprise sur le marché de l’art.
LangueFrançais
ÉditeurMarie B
Date de sortie16 oct. 2019
ISBN9791093576732
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    Aperçu du livre

    Enfants de la déconstruction - Paul Melun

    Avant-propos

    À vingt-quatre et vingt-cinq ans, nous sommes les enfants de la déconstruction. Moins de trente ans, c’est l’âge de cette génération qui est née à la toute fin du XXe siècle et qui fera la moitié du XXIe, l’observer c’est contempler l’avenir.

    Les enfants de la déconstruction ne sont pas la totalité d’une génération, ils sont une tendance, un mouvement, une influence sur la jeunesse occidentale.

    Les parents des enfants de la déconstruction sont eux-mêmes l’achèvement d’un processus de déconstruction. N’ayant pas connu la guerre, ils sont nés après 1945 et ont tous, à différentes échelles, participé à faire de l’Occident ce qu’il est aujourd’hui. Ils ont voulu la liberté. Ils se sont affranchis de certaines normes, règles, traditions, qui pour plusieurs étaient immuables depuis des siècles. Pour gagner la liberté, il leur a fallu déconstruire les préjugés, les rigidités du passé, en mai 1968, puis un peu plus chaque décennie ils ont refermé les portes du passé. Principalement issus des milieux aisés, urbains et culturels, ils ont apporté à la France de nouveaux codes. D’abord marginaux, militants, ils sont devenus admis socialement pour n’être plus que la nouvelle norme d’aujourd’hui. Si certains n’ont pas été les fers de lance de ce mouvement, car trop ruraux, peu favorisés ou conservateurs, ils ont fini par s’y intégrer de façon assumée ou à leur insu.

    Le mouvement de déconstruction a été théorisé, par ses détracteurs comme par ses défenseurs. La notion de déconstruction connaît une acception très large. Elle apparaît avec les premiers traducteurs et exégètes heideggériens, mais est véritablement conceptualisée par Derrida dans la grammatologie comme un phénomène d’analyse critique du discours et du sens des mots. Le fondateur du concept le définit comme suit : « Une opération portant sur la structure ou l’architecture traditionnelle des concepts fondateurs de l’ontologie ou de la métaphysique occidentale. » S’opère ainsi une rupture philosophique avec les grands piliers de la pensée occidentale. Ce n’est pas une destruction pure et simple de certains principes sempiternels, mais un travail de remise en cause concurrentielle des fondements de notre société. Le phénomène de déconstruction s’est particulièrement développé avec l’essor de la philosophie post-moderne aux États-Unis et a irradié l’ensemble des universités et écoles de pensée européennes du XXe siècle. Si elle émane généralement de quelques individus, cette pensée impacte toutes les couches sociales.

    Ce sont les descendants de cette mécanique philosophique complexe et composite qui vivent aujourd’hui dans l’Occident du XXIe siècle. Dans cet ouvrage, nous faisons le choix de placer la focale sur cette génération. Là où leurs parents furent acteurs de la déconstruction, eux naissent dépossédés du corps sémantique et intellectuel du concept. Ils sont les dépositaires d’un héritage qui les dépassent. C’est pour cela que nous les nommons « enfants de la déconstruction ». Ils ne sont pas, bien sûr, un groupe parfaitement homogène, leur hétérogénéité est même constitutive de leur définition.

    Chaque enfant de ce siècle hérite du phénomène de déconstruction. Plus qu’une catégorie sociale, culturelle ou géographique, l’idée « d’enfants de la déconstruction » est un concept. C’est la mise en lumière de l’influence d’une école de pensée qui s’exerce à différents niveaux, mais sur l’ensemble d’une génération. Tous les enfants du XXIe siècle sont, à divers degrés, les enfants de la déconstruction.

    Parmi eux, certains s’imprègnent et s’incarnent pleinement comme continuateur du phénomène par leurs pratiques passives et actives. En un mot, ils l’avalisent. Ils constituent l’épicentre du phénomène de déconstruction. Souvent urbains, connectés à la mondialisation et tertiarisés, ils occupent une place clé dans l’espace social occidental et français. Ils sont la figure de proue du navire amiral de la déconstruction qui draine avec lui bien d’autres jeunes Occidentaux. Entre quinze et trente ans, tous sont les sujets de la déconstruction, maïeuticiens ou victimes, qu’elle enchante ou désole, elle n’épargne aucun de ses enfants.

    L’espace culturel, médiatique et numérique mondialisé est au cœur de cette influence de la pensée de la déconstruction. Nous-mêmes, certainement intégrés par notre âge et notre statut à ce mouvement de déconstruction, avons tenté, certainement moins que nous ne le voudrions, de trouver un prisme objectif à nos recherches afin de livrer une vision de la jeunesse occidentale au XXIe siècle.

    Un malaise traverse notre génération qui, en dépit de tous ses relais de communication, demeure divisée aux plans géographiques, culturels et sociaux. Ce ne sont plus les moyens qui font défaut à la rencontre, mais des cloisons qui se dressent entre les uns et les autres se cantonnant au chemin tracé de leur existence.

    Ce malaise, nous souhaitons le mettre aux nues dans ce livre, non pour jeter l’opprobre sur nos contemporains, mais pour mieux le dépasser. Comprendre le malaise de cette génération revient à le décomposer selon trois temps qui régissent son existence, c’est ainsi que nous progresserons dans cet ouvrage ; « me faire, m’aimer, me battre ».

    Cette jeunesse se construit dans son rapport aux autres et à l’existence. Elle s’aime artificiellement pour pallier une construction trop fragile, trop anxiogène. Inachevée, elle se divise et s’affronte.

    Ce livre ne se veut pas un travail de recherche, mais un essai pour comprendre notre temps et partager nos espérances. Nous œuvrerons ici à dresser un portrait de la jeunesse française, avec ses doutes, ses craintes et ses nouvelles passions.

    Jeunes et inconnus, donc libres d’assumer nos idées que la bienséance dilue souvent, nous décidons de partager avec nos lecteurs une vision parfois sombre de notre génération à laquelle nous formulons nos vœux d’espoir.

    Me faire

    CHAPITRE I

    Machine et algorithmes :

    la relation par le contrat

    « Maudissant la foule qui me vole

    L’homme qu’elle m’avait donné

    Et que je n’ai jamais retrouvé »

    Édith Piaf

    Du bal populaire à la valse des profils Tinder

    Des bouches de métro se répandent des flots de travailleurs, de touristes, d’étudiants tous pressés par l’intérêt commun de satisfaire aux attentes de leurs pairs et de leur temps. L’homme n’est plus rare. Il est un commun que l’on trouve à chaque étage, dans chaque rue, derrière chaque porte. Un jeune qui passe dans un village de quelques habitants est une chance, un trésor pour une autre jeune personne qui s’ennuie en jouant avec ses rêves. Aldo Orsenna, isolé sur le rivage des Syrtes, voit en Vanessa la promesse d’exister réellement¹. À Paris, Bordeaux, Lille, c’est une banalité, presque une tare d’exister. L’individu est une plaie, un enfer concurrentiel plus qu’une possibilité de découvrir, de penser. Comment ne vouloir, alors, défendre son pré carré physique et refuser la rencontre fortuite de l’autre qui, sinon commun, peut-être, comme le disent les journaux du soir, un pervers, un marginal ou tout simplement un pauvre, un exclu ? La passante de Charles Baudelaire, rendue superbe par son aspect éphémère, est aujourd’hui à deux clics sur une application de rencontres dont les algorithmes permettent de retrouver des individus que l’on vient de croiser.

    Inquiète, méfiante, incomplète, notre jeunesse n’est confortable que dans l’intimité du foyer. Les lieux publics sont source de tension et d’inquiétude dans l’effervescence de la ville. Pétries d’un besoin naturel de confort dans une urbanité où les individus sont entassés, les jeunes générations se fuient. Ce malaise social ponctue chaque pas des enfants de la déconstruction quand les limites de sa propriété sont franchies. La rencontre devient complexe. Les barrières de classe, de genre et d’origine s’intensifient. La génération urbanisée si éduquée, si rapide, si cosmopolite vit chaque rencontre impromptue comme un risque. L’étape charnière de l’existence par soi dans le groupe est bouleversée par de nouvelles mutations sociétales.

    Le capitalisme ne pouvant se cantonner ni à l’endogamie ni à la solitude, les campus américains vont se faire promoteurs d’applications et sites sociaux dès le début des années 2000². Le palliatif de l’outil algorithmique va repenser les armures de l’intimité. Ce n’est plus le hasard, mais la machine qui va choisir et inspecter ses futurs interlocuteurs. Notre jeunesse ne pouvant plus se satisfaire des rencontres classiques de la rue, du bal, du travail, trouve la technologie confortable dans son rôle d’entremetteur rationnel. Un nouveau contrat va s’ériger entre individus dont les huissiers sont des signatures électroniques, et les juges des algorithmes.

    Le temps des poèmes, des lettres parfumées et de l’aval des parents est dépassé. Pour l’enfant de la déconstruction, la plénitude s’appelle Badoo, Tinder, Wyylde³. La rencontre est prémâchée. La machine fait pour nous une présélection déshumanisée sur critères sociaux, physiques, monétaires et utilitaires. Pour pouvoir s’approcher, l’inconnu passe par un ensemble d’étapes allant du renseignement de ses informations personnelles, à l’analyse des valeurs morales dignes des douaniers les plus zélés de JFK⁴.

    Traditionnellement, quand un jeune homme s’intéressait à une jeune personne, il la découvrait, comprenait ce qu’elle aime, l’abordait librement et rivalisait d’originalité ou de timidité pour la séduire. Dans le cadre d’une application, la rencontre se cantonne à un format où le physique va prendre toute la place de l’être. On ne peut croire au coup de foudre d’une photo Instagram ou tomber en admiration devant la logorrhée d’un tweet. Ce n’est plus le ton de la voix, la douceur du regard ni les vibrations de la peau qui permettront de s’aimer, mais un portail numérique, standardisé et identique contenant six photos de plain-pied. Un programme nous conseille de sourire, d’être avec des amis ou de ne pas mettre trop d’animaux⁵. Les relations sont un portefeuille de profils dans lesquels sont sélectionnés les plus plastiques puis les plus drôles dans leurs messages. Rimbaud ou Proust sur Tinder n’ont que peu de chances face aux muscles hypertrophiés d’un ambitieux en école de commerce.

    Déléguer sa vie

    Dans la société de la vérification, ce n’est plus la spontanéité qui fait l’attirance, le charme, la sympathie dans les rapports humains. Ce monde désenchanté marche au pas de la raison, de la sécurité et de la mesure. On vérifie l’individu au travers de son profil avant de s’intéresser à lui, on scanne l’utilisateur au lieu de sonder son cœur. L’humanité, ce supplément d’âme propre à chacun qu’une machine ne saurait traduire, ne passe qu’après. La note sociale, présente et consultable, fait office de loi. Chaque souffle de notre jeunesse est sous le joug d’une poignée d’étoiles sur Google.

    En technicisant les rapports, l’homme et la femme s’éloignent un peu plus de leurs derniers attributs naturels. Contrairement au chat, à l’ours, au poisson, l’homme parachève de rationaliser ses rencontres et ses amours futurs. L’apogée de cette déconstruction de l’état de nature décrite par Rousseau dans le Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes est consommé. Par ces algorithmes, le jeune pourra dresser une liste de critères quantifiables et juger de son attractivité ou de sa mise au rebut⁶.

    En 2016, un algorithme Microsoft de machine learning⁷ est testé sur Twitter. Le but est de voir comment un robot, « Tay », vierge de toute idée, ne possédant que la connaissance des mots, va s’enrichir du savoir universel que l’homme échange continuellement. Ce robot apprend à mesure que les utilisateurs publient du contenu. En deux heures, l’intelligence artificielle tenait des propos nazis, racistes et sexistes si bien que Twitter a dû supprimer Tay et ses tweets. Cette dystopie questionne l’abandon de nos capacités cognitives au profit de décisions simplifiées par l’algorithme. Quitter les derniers reliquats de l’état de nature, est-ce si bon ? Certes les décisions sont plus rapides. On nous promet d’éviter les profils des moches, « des ploucs », « des beaufs » ou des pauvres. On nous évite de « perdre du temps ». Mais à quel prix ? L’enfant du siècle accepte de se voir confisquer son droit au premier regard. L’algorithme peut varier, utiliser nos données, considérer un comportement comme marginal et l’exclure au point d’annihiler tout retour possible, mais qu’importe tant qu’il rassure.

    L’homme est artificiellement plus fort, mais individuellement plus faible. Cette nouvelle rationalité numérique n’est pas un eugénisme, c’est une moyennisation. Aucune main invisible ne vient essayer de construire des individus plus performants. Loin de rendre l’individu scanné plus raisonné ou plus intéressant par sa sélection, il tend vers une profonde grégarité.

    Si, pour plaire, il suffit d’effectuer une matrice de corrélation statistique ou une régression linéaire⁸ et voir quels comportements plaisent à quelle audience, pourquoi s’en priver ? Loin d’une transition vers la maturité, le confort numérique plonge les enfants de la déconstruction dans un besoin d’assistanat perpétuel. Ne créant plus, ne sachant plus, il singe. Les enfants de la déconstruction se regardent et se miment pour ne finir qu’en catalogue de jambes bronzées au soleil et de chatons maladroits. Ce panurgisme voulu et inconscient va permettre de nettoyer cette nouvelle Babylone digitale de toutes ses aspérités. Contrairement aux mendiants et marginaux que nos villes aimeraient tant dissimuler, il est aisé de supprimer des textes dérangeants et des comportements divergents sur Internet. De cette nouvelle cité artificielle, où règnent le bon sens et la codification, sont exclus ceux qui pourraient la déranger.

    Une peur lucrative

    Menace perpétuelle pour les utilisateurs d’applications sociales, cette technologie est traversée de fraude, d’usurpation et de perversion. Pléthore sont les ouvrages de prévention, les messages et les images incitant à la méfiance ou à la

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