Madeleine comment ?: Roman autobiographique
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À propos de ce livre électronique
J’étais à l’aube de l’adolescence et d’étranges pensées prenaient naissance dans ma tête. De plus en plus d’images et de scénarios prenaient forme dans mon esprit. Ce fut une période de ma vie faite de rêves extravagants où j'imaginais cette mère qui m’avait mise au monde. J’étais persuadée qu’un jour, elle allait venir me chercher, je la voyais naturellement très belle, jeune, élégante, intelligente, je l’idéalisais.
Ce récit autobiographique touchant débute en 1936 lors de la conception de Madeleine et suit les souvenirs d'une femme convaincue pendant longtemps du retour de sa mère, une figure maternelle idéalisée à bien des égards...
EXTRAIT
Le temps était arrivé où l’on ne pouvait plus dissimuler ma présence. Je devenais indésirable, j’avais été conçue illégitimement. L’enchantement procuré par les congés payés a fait place à une torture quotidienne quant à mon devenir.
Au fil des mois les jours s’assombrissaient. Ma venue intempestive ne plaisait pas à tout le monde. Mon bien-être s’en ressentait car ma mère me serrait si fort pour me dissimuler que je ne pouvais plus respirer. Je voulais plutôt croire :
— As-tu peur de me perdre ?
C’était certainement par amour, car elle me parlait avec toujours des mots très tendres et elle pleurait aussi très souvent. Son angoisse était si forte, que je la ressentais également. Je désirais rester le plus longtemps possible avec elle, j’aurais voulu arrêter le temps.
Je pressentais que cette période resterait les plus beaux jours de ma vie.
La faute apparut au grand jour.
La libération des femmes était encore loin d’être arrivée.
L’allégresse vécue par ma mère grâce aux premiers congés payés allait avoir des conséquences dramatiques sur le déroulement de sa vie future ainsi que sur la mienne.
Le déshonneur pour toute la famille allait remplacer l’euphorie des premières semaines. Dans un premier temps il fallait à tout prix cacher le plus longtemps possible le fruit du péché vis-à-vis de l’entourage.
— Comment affronter cette épreuve ?
J’avais un mauvais pressentiment.
— Ma mère ne voulait pas de moi !
Je croyais être le fruit du bonheur, eh bien non ! J’étais l’objet du malheur !
J’étais comprimée à tel point que j’étouffais, mais j’étais avec elle et c’était le principal.
— Je suis dans ton ventre, je fais partie de tes entrailles, je suis ta chair, je suis ton sang, tu es ma mère, qu’on le veuille ou non.
Ces liens, personne ne pourra nous les enlever.
— Je ne veux pas te quitter !
Cependant la pression était de plus en plus forte, je me sentais non désirée par ma mère et par son entourage. À la surprise générale, je pris la décision de sortir le plus tôt possible. Je quittais ce nid douillet avant son terme.
Mon arrivée totalement imprévue, inattendue, a été un véritable cataclysme pour ma mère, une arrivée fracassante sans tambour ni trompette, mais quel bruit !
À PROPOS DE L'AUTEUR
Madeleine Michèle a pu enfin ouvrir son coeur après cinquante années de souffrances inhumaines et de déchéance de sa personnalité. Elle s'est mise à nue, il n'a pas été facile d'avouer ses fautes au grand jour. Sa vie est un combat hors du commun par sa durée et par sa volonté de fer pour découvrir enfin la vérité.
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Aperçu du livre
Madeleine comment ? - Madeleine Michele
Première partie
Chapitre 1
La naissance
! 1936 l’arrivée des congés payés !
Ma mère n’est pas prête de les oublier les congés payés de 1936,
C’était impensable :
— Des congés et en plus payés !
La liesse était générale, la joie totale. Ce fut une innovation sociale majeure, toute une partie de la population allait partir en vacances, découvrir la mer.
De plus, la libération de la femme prenait son envol, mais ce ne fut pas sans peine car très vite ces femmes « libérées » furent assimilées à des femmes légères, à des minettes, à des nymphettes, à des femmes entretenues et furent surnommées des gigolettes
Pour beaucoup de Français, ce fut une immense joie, un déferlement inimaginable vers les lieux de vacances. Les trains étaient bondés, pour accéder à l’intérieur des wagons, dans de monstrueuses bousculades les gens passaient même par les fenêtres. Le voyage se faisait dans des conditions difficiles, mais le bonheur était tel que rien ne pouvait les arrêter. Le rêve devenait enfin la réalité, les cartes postales de l’époque peuvent encore en témoigner :
— J’ai vu la mer !
— J’ai vu les vagues !
— J’ai vu la plage l
— J’ai vu les bateaux
La découverte était totale, c’était un émerveillement, un véritable enchantement.
On riait et on pleurait en même temps tellement on était heureux. Pour l’occasion on faisait la fête, on se réunissait, on allait enfin pouvoir partir, voyager et se laisser aller à des débordements, oublier pour un temps ses soucis.
Une nouvelle société s’inventait et les femmes se libéraient.
En particulier pour ma mère, car il était devenu commun de se faire conter fleurette et difficile de résister à ces tentations. Les aventures de vacances étaient souvent éphémères.
Madeleine s’en souviendra toujours puisque c’est à cette époque que je fus conçue dans la joie et l’allégresse.
Moi, je ressentais ce bonheur communicatif, j’étais si bien dans le ventre de ma mère, je me faisais toute petite, de peur de déranger comme si j’avais déjà un pressentiment.
Mais qu’est-ce que j’étais bien ! Il faisait chaud et je m’épanouissais joyeusement. Je m’imprégnais de sa chaleur, de sa douce voix, de son sang qui coulait dans mes veines, je respirais son odeur, une odeur de chèvrefeuille qui ne m’a jamais quitté.
Ma mère était une jeune fille très belle, j’en suis certaine. Tout se passait à merveille, nous étions toutes les deux heureuses et complices. Un lien indestructible, me semble-t-il, nous liait.
Eh bien non ! Je n’avais pas le droit au bonheur d’être aimé davantage.
Le temps était arrivé où l’on ne pouvait plus dissimuler ma présence. Je devenais indésirable, j’avais été conçue illégitimement. L’enchantement procuré par les congés payés a fait place à une torture quotidienne quant à mon devenir.
Au fil des mois les jours s’assombrissaient. Ma venue intempestive ne plaisait pas à tout le monde. Mon bien-être s’en ressentait car ma mère me serrait si fort pour me dissimuler que je ne pouvais plus respirer. Je voulais plutôt croire :
— As-tu peur de me perdre ?
C’était certainement par amour, car elle me parlait avec toujours des mots très tendres et elle pleurait aussi très souvent. Son angoisse était si forte, que je la ressentais également. Je désirais rester le plus longtemps possible avec elle, j’aurais voulu arrêter le temps.
Je pressentais que cette période resterait les plus beaux jours de ma vie.
La faute apparut au grand jour.
La libération des femmes était encore loin d’être arrivée.
L’allégresse vécue par ma mère grâce aux premiers congés payés allait avoir des conséquences dramatiques sur le déroulement de sa vie future ainsi que sur la mienne.
Le déshonneur pour toute la famille allait remplacer l’euphorie des premières semaines. Dans un premier temps il fallait à tout prix cacher le plus longtemps possible le fruit du péché vis-à-vis de l’entourage.
— Comment affronter cette épreuve ?
J’avais un mauvais pressentiment.
— Ma mère ne voulait pas de moi !
Je croyais être le fruit du bonheur, eh bien non ! J’étais l’objet du malheur !
J’étais comprimée à tel point que j’étouffais, mais j’étais avec elle et c’était le principal.
— Je suis dans ton ventre, je fais partie de tes entrailles, je suis ta chair, je suis ton sang, tu es ma mère, qu’on le veuille ou non.
Ces liens, personne ne pourra nous les enlever.
— Je ne veux pas te quitter !
Cependant la pression était de plus en plus forte, je me sentais non désirée par ma mère et par son entourage. À la surprise générale, je pris la décision de sortir le plus tôt possible. Je quittais ce nid douillet avant son terme.
Mon arrivée totalement imprévue, inattendue, a été un véritable cataclysme pour ma mère, une arrivée fracassante sans tambour ni trompette, mais quel bruit !
Arrivée d’autant plus surprenante que l’on ne m’attendait que bien plus tard.
Il fallait avouer la faute mais aussi sauver les apparences, cacher l’enfant de la honte.
Le lieu fut choisi par ma mère ou par ses proches, une de ces adresses très répandues à l’époque, à l’abri des regards, spécialisé pour préserver l’anonymat, le domicile d’une sage-femme à Paris dans le dix-huitième arrondissement. Ce lieu était tenu par Célestine JOURNO, originaire d’Algérie, gardienne des secrets, et très autoritaire.
— Pourquoi cet endroit ?
Mystère !
— Le choix du lieu avait-il un rapport avec ma famille ?
— Était-ce un pur hasard ou cet endroit avait-il été au contraire prévu d’avance ?
D’autant plus mystérieux, que l’accouchement était payant, puisque privé.
Qui a réglé ? Ma mère était supposée mineure et orpheline.
Ma naissance déchaîna de funestes passions. La joie de ma mère fut de courte durée et laissa la place au déchirement, au désespoir, au désarroi, à la haine, à des conflits énormes. Cela déclencha une véritable tempête auprès de ceux qui avaient décidé que je ne ferais jamais partie des leurs.
J’étais l’œil d’un énorme cyclone. Il y avait autour de moi beaucoup de gens qui s’agitaient sans que je ne comprenne pourquoi. Il y avait beaucoup de cris, des hurlements, les pleurs de ma mère. Elle paraissait si faible, si vulnérable face à ce tribunal odieux, qui allait décider pour elle, il fallait obéir sans discuter.
Tous ces gens parlaient fort, je cherchais ma mère :
— Où est-elle ?
J’avais tellement peur face à tous ces personnages hostiles, je ne comprenais pas ce qui se passait, mais dans mon subconscient je savais que le pire allait arriver !
Cet atroce dilemme dura huit longs et interminables jours mais aussi trop cours pour apprécier l’attachement de ma mère.
Naturellement l’avantage tourna en faveur des « méchants ».
Des propos mal attentionnés à mon égard me faisaient terriblement peur.
— Que va-t-on faire de ce petit être ?
— Va-t-on l’éliminer ?
— Ah, non ! On est humain, quand même !
— Va-t-on l’effacer ?
Il fallait trouver une issue.
De mon côté, je savourais les derniers instants de bonheur d’être près de ma mère, je savais que les jours m’étaient comptés.
J’étais là et bien là, si mignonne avec ces grands yeux verts, déjà une touffe noire de cheveux bouclés et surtout ce petit nez retroussé.
Malgré tout, je n’avais pas réussi à les séduire.
Effectivement après huit jours de débats acharnés une solution fut trouvée. Il fut décidé de m’effacer comme un coup de crayon que l’on efface avec une gomme, comme si je n’avais jamais existé. Ils furent intraitables et mon destin bascula d’un coup de baguette magique, je n’existais plus, je n’avais jamais existé !
Le verdict tombe :
— Abandon !
J’entendais :
— Comment va-t-on l’appeler ? Il faut choisir un nom.
— Madeleine ?
— Andrée ?
— Michèle ?
— Marguerite ?
— Pourquoi pas Jeanne ?
La valse des prénoms tournait comme un manège sans fin, une valse ininterrompue, une valse à 1 000 temps, comme disait Jacques BREL. Un manège qui ne s’arrête jamais dans ma petite tête d’enfant :
— Que se passe-t-il ?
Une étrangère décide :
— Ce sera Madeleine
Une autre répond :
— Oui ! Mais Madeleine comment ?
Puis un autre dit :
— Michèle
Ce fut décidé :
— Elle s’appellera « Madeleine MICHELE ! »
— Pourquoi m’avoir donné ces deux prénoms ?
— Madeleine ? Est-ce le nom ou le prénom de ma mère ?
— MICHELE est-ce le second prénom, est-ce celui de son amoureux ou d’un membre de sa famille ?
Mystère ! J’avoue que je préfère Michèle à Madeleine que j’ai définitivement occulté.
L’angoisse était à son paroxysme lorsque je quittais la maternité, le premier février 1937. Je fus emmenée par ma mère :
— Où m’emmènes-tu ?
Je m’accrochais désespérément car j’avais compris que c’était les derniers moments que je vivais à son contact.
Effectivement, elle m’emmenait pour me déposer à l’Hospice de Saint Vincent de Paul, établissement ou l’on emmenait tous les enfants abandonnés, pour ensuite les envoyer à l’Assistance Publique, qui est aujourd’hui, la Direction de l’Action Sociale de l’Enfance et de la Santé, ma vie allait basculer, on allait m’enlever une partie de moi-même, la chair de ma chair, j’allais être amputée, on allait m’arracher à ma mère !
Je devenais un numéro le : matricule 250818
*
À partir de cet instant, j’étais un objet, une marchandise, j’étais fichée. J’étais devenue une chose insignifiante, un animal marqué au fer rouge, le n° 250818 que je n’oublierai jamais.
Cela me fait penser à ce que l’on fait subir à ces animaux que l’on emmène à l’abattoir et qui hurlent à la mort avant d’être abattus, car ces pauvres bêtes sentent leur dernière heure arriver
Je pense que c’est exactement ce qui s’est passé, lorsque ma mère m’a emmené à l’Hospice de Saint Vincent de Paul, ce terrible premier jour de février 1937 où l’on m’a affublé de deux prénoms ridicules Michèle Madeleine.
Un semblant d’identité complètement fausse que j’ai dû accepter toute ma vie.
Un vrai faux !
Ma mère m’avait habillée pour la circonstance d’une magnifique robe en dentelle garnie de rubans de satin. Tout en déversant un torrent de larmes, elle était pourtant bien