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La vie, une si belle invention ?: Roman
La vie, une si belle invention ?: Roman
La vie, une si belle invention ?: Roman
Livre électronique382 pages5 heures

La vie, une si belle invention ?: Roman

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À propos de ce livre électronique

Le récit de toute une vie, une vie de vélaqua.

Vava est un vélaqua qui parle.
Qu’est-ce qu’un vélaqua me direz-vous ! C’est sans réelle importance, car il ne sera que votre guide pour vous parler de son père et des moments incroyables qu’il a passés à ses côtés pendant la croisière de toute une vie. Une vie riche en amours, une vie riche de passions, une vie marquée par la disparition, l'absence.
Vous rirez, vous pleurerez, mais vous ne sortirez pas de ce roman exempt de quelques traces d’amour.

Découvrez sans plus attendre un roman original et plein d'émotions sur une vie riche et bien remplie.

EXTRAIT

Cette époque d’après mai 68 paraissait très étrange, les événements de cette année-là étant maintenant lointains mais les mentalités avaient beaucoup évolué. Par exemple, beaucoup de femmes libéraient de plus en plus leurs seins et leur corps sur les plages, au grand bonheur de la gent masculine évidemment. Concernant la section spéciale dont faisait partie mon père, les diverses prestations avaient repris dans toute la France cette année-là et le regard de la gent féminine avait effectivement changé au passage des gymnastes de la Garde Républicaine défilant dans les villes et les villages tous muscles sortis, avec écusson tricolore de la GRP cousu sur les maillots blanc immaculé au milieu des pectoraux, souvent accompagnés par la fanfare du coin ou des environs avant la prestation prévue. Il n’était pas si rare de voir à présent quelques clins d’œil appuyés, certaines femmes aspirant fortement à la troisième mi-temps en les regardant défiler au pas : ambiance badine et quelque peu inouïe, aussi curieuse que trépidante et si plaisante à vivre.

A PROPOS DE L'AUTEUR

Yves Coffournic est un inventeur : inventeur technique mais aussi inventeur des mots. Ceux qu’ils vous proposent ici sont sans nul doute quelquefois dérangeants mais toujours inspirés par la beauté de la vie malgré ce qu’il nous faut endurer pour la traverser.
LangueFrançais
Date de sortie19 oct. 2018
ISBN9782378772253
La vie, une si belle invention ?: Roman

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    Aperçu du livre

    La vie, une si belle invention ? - Yves Coffournic

    Prologue

    L’histoire que je vais vous conter est celle d’un homme, d’un homme tout simplement. Enfin, quand je dis, simplement, ce n’est pas tout à fait vrai car mon histoire, ah oui c’est de moi qu’il s’agit, bien que commune est aussi incroyable.

    Pour raconter au mieux mes péripéties, j’ai demandé à mon fidèle Vava de m’aider en vous guidant dans les méandres de ma pauvre tête. Vava me connaît aussi bien que si je l’avais fait, c’est dire ! Vous, vous le découvrirez au fil des pages et il deviendra votre compagnon comme il l’est pour moi depuis si longtemps.

    Dans ce roman, vous rencontrerez tour à tour des militaires, des assureurs, des inventeurs, des hommes d’affaire et tant d’autres encore. Mais, par-dessus-tout, vous serez les témoins de l’amour, celui que chacun de nous cherche jour après jour en espérant le garder à ses côtés pour la vie.

    Vous rirez de mes blagues, et de celles de Vava, mais vous serez tristes de mes déconvenues et terrassés de mes malheurs.

    La vie quoi, qui est, je peux le dire aujourd’hui, une si belle invention !

    Juin 1973

    Le Capitaine de Gendarmerie Léo, commandant l’escadron motocycliste de la Garde Républicaine de Paris, ne souhaitant plus voir la tête de mon père décida de le faire disparaître de sa vue durant quelque temps en l’expédiant en congé de récupération en ce début juin. Pas si mal comme punition. Papa prit alors quinze jours de repos pour retourner en province et se laver les méninges en attendant une probable offensive en retour de permission à la caserne et une suite certainement compliquée.

    Pour prendre du plaisir, il prit sa moto personnelle : une Laverda 1000, une Italienne mythique (3 cylindres, fourche Ceriani et freins à disque à l’avant, rare pour l’époque), seul espace véritable de liberté, d’autant plus que la limitation de vitesse n’existait pas encore sur les routes. Époque dangereuse et dévoreuse de pilotes, il faut le reconnaître mais aussi bénie pour un fou de mécanique comme mon père.

    Annabelle et Kiki le rejoignirent sur place en voiture.

    C’est si bon d’oublier le capitaine, c’est si bon de retrouver la famille, c’est si bon de retrouver « son pays » natal, c’est si bon de retrouver la mer…

    La première semaine de vacances en permission est maintenant sérieusement entamée. Après déjeuner, Annabelle étant occupée auprès de sa mère, Papa lui indique qu’il va faire un tour avec la moto.

    Comme d’habitude, Annabelle lui chante : « Fais attention ! »

    Bien sûr que Papa fait attention ! Il a toujours su maîtriser les situations compliquées dans son travail de « gendarme acrobate », au sein de cette formation, malgré quelques chutes sans conséquence.

    Papa décide de se faire plaisir : « pleins gaz » sur la voie rapide. Le moteur ronfle comme une horloge italienne en prenant aux tripes le pilote : les 12 cylindres d’une Lamborghini pâliraient de jalousie à l’entendre. Il tourne la poignée davantage, chaque tour de roue plus rapide augmente proportionnellement l’ouverture du robinet d’adrénaline et les frissons du plaisir, une sublime extase submerge alors mon père.

    « C’est prêt ? » demanda Laurent à la pimpante secrétaire du garage Albert Lalande.

    — Je pense que oui, répondit Sylvie avant de poursuivre :

    — Passez voir Albert à l’atelier.

    Laurent s’y rendit sans se faire prier. Il connaissait de longue date Albert, son garagiste préféré et ami. Ils avaient, depuis tout jeune, fait de nombreuses virées ensemble, souvent bien arrosées où le sol devenait mouvant avec l’impression étrange de marcher au-dessus de leurs chaussures et où les arbres traversaient parfois la chaussée devant la voiture.

    « Tu vas m’assassiner de combien encore cette fois ? lança Laurent à son ami.

    – Tais-toi donc, en attendant la facture viens, on va prendre un verre au bureau.

    – Non, je repasse demain, je suis déjà en retard pour ma livraison de cet après-midi, répliqua Laurent, foncièrement désireux de s’échapper pour affaire pressante.

    – Tu as bien 5 minutes, n’exagères pas ! déclara Albert en lui saisissant le bras et l’entraînant » dans son bureau.

    Ils s’installèrent face à face tandis qu’Albert plaçait une bouteille de Whisky au trois quarts pleine (leur pêché mignon réciproque) au milieu du bureau après avoir retiré quelques documents « gênants ».

    Les deux amis commencèrent à échanger allègrement.

    Une demi-heure et plusieurs verres plus tard, Laurent tenta de se lever mais n’y parvint finalement qu’au ralenti, comme dans un film animalier pour détailler un mouvement complexe ou équivoque :

    — Bon, je te laisse, faut vraiment que je me casse…

    — C’est surtout toi qu’est un peu cassé !

    Les deux amis éclatèrent de rire et s’embrassèrent avant de se séparer.

    Laurent monte en voiture avec quelques petites difficultés, sort par la vaste porte arrière du garage, puis rejoint doucement l’entrée donnant sur la voie rapide.

    Se sentant dans une douce torpeur, il s’arrête scrupuleusement à la limite du bord de la chaussée. Il regarde d’abord à gauche une poignée de secondes : personne.

    Puis, désireux de traverser la voie rapide en face de lui pour ne pas perdre de temps à aller tourner plus loin au rond-point suivant, il regarde cette fois à droite également une poignée de secondes : un véhicule arrive mais il le juge assez éloigné… il embraye et se lance vivement pour ne pas gêner l’automobiliste tout en conservant son regard tourné vers lui.

    Dès le premier mètre engagé, dans un bruit de déflagration assourdissant, un OVNI percute l’avant de son véhicule, passe par-dessus le capot avant, puis disparaît de sa vue.

    La tête de Laurent heurte assez fortement le montant de la portière gauche alors que l’avant de son véhicule est déplacé de plusieurs mètres sur le côté droit et reste planté au milieu de sa voie de circulation… Il est sonné, tant par le choc que par l’alcool.

    Il sort en titubant de son véhicule, regarde hébété l’avant de son véhicule entièrement laminé.

    Albert accourt avec le personnel du garage, tous ayant entendu une explosion.

    — Oh la la, oh la la ! balbutie Laurent qui aperçoit une forme sur la route à une quinzaine de mètres de son véhicule.

    En s’approchant avec Albert, ils constatent qu’il s’agit d’une puissante moto sans personne.

    Celle-ci, posée sur le côté, est entièrement écrasée sur l’avant, seule la roue arrière est intacte… elle dégage de la chaleur et une odeur indéfinissable, l’essence coule doucement du réservoir endommagé et entièrement cabossé, le moteur est éteint, sans doute bloqué, l’aiguille du compteur de vitesse est figée sur 178 km/h… tout est si calme après cette déflagration…

    — Où est le pilote ? hurle Albert.

    — Mais où est le pilote ? répète Laurent d’un ton monocorde.

    À cinquante mètres de là environ, de l’autre côté du terre-plein rempli d’herbes folles, deux véhicules sont arrêtés en sens inverse.

    Les passagers de ces véhicules semblent s’agiter en levant les bras le long du fossé bordant leur voie de circulation sans que Laurent ni Albert puissent apercevoir exactement ce dont il s’agit, la scène étant en partie cachée par une petite haie étant également implantée par endroits sur la partie centrale de la voie rapide.

    Les deux amis s’y précipitent et découvrent le corps d’un motard, semi-recroquevillé et inerte dans le fossé herbu asséché.

    Son visage est en partie enfoui dans le foin et son casque bleu clair est fendu du haut en bas sur le côté. Son blouson en tissu est déchiqueté en plusieurs endroits comme s’il venait de passer dans une moissonneuse-batteuse et son pantalon en toile, déguenillé, laisse apparaître de nombreuses plaies sanguinolentes sans être ruisselantes, presque cautérisées par les brûlures occasionnées lors du frottement du motard sur le bitume rugueux de la voie express.

    « Il est mort » déclarent à plusieurs reprises les passagers des véhicules à l’arrêt qui, pour certains, semblent tout savoir sans rien avoir vu, surtout pour ceux arrivés 5 minutes après l’accident.

    — Vous avez vu ? Il a percuté le véhicule… là-bas… à plus de 50 mètres.

    — Il ne devait pas rouler doucement !

    — Ils sont tous fous avec leur engin de mort.

    — Si ça se trouve, il avait bu.

    Albert quitte la scène et revient alors rapidement vers son personnel attendant au bord de la route devant l’établissement :

    — Sylvie, appelle la police et les pompiers, il y a un motard qui vient de se faire tuer, on ne sait pas s’il est tout seul.

    Puis il repart avec d’autres personnes à la recherche d’un éventuel passager du pilote le long du fossé mais sans succès.

    Il attire alors Laurent à part :

    — ça va toi, tu n’es pas blessé ?

    — Non non, c’est bon… je ne l’ai pas vu arriver… j’avais pourtant regardé à gauche mais le temps que je regarde à droite, il m’a percuté, se lamenta-t-il.

    — Tu parles d’un con avec sa moto, renchérit Albert.

    — Ouais, mais je suis dans la merde… je suis déjà tombé pour conduite en état d’ivresse l’année dernière, répliqua Laurent qui commençait à comprendre la gravité de son geste et surtout les futures retombées radioactives le concernant.

    — Viens prendre un jus de tomate avant qu’ils n’arrivent… il paraît que ça fait diminuer la dose d’alcoolémie.

    Papa a l’impression d’être allongé confortablement dans de la ouate… il se sent bien… il a chaud… il a froid… puis… il a chaud… il pense être réveillé mais il n’arrive pas à ouvrir les yeux… il entend des cris lointains… plus rien maintenant… puis, à nouveau une voix assourdie : « Il est mort ».

    « Mais je ne suis pas mort… Oh ! … Qui me parle ? » s’exclame-t-il mais aucun son ne peut sortir de sa bouche… il essaie encore mais ses paroles refusent toujours de se formuler, seul sort un gémissement… l’angoisse monte et s’installe… « Mais parlez-moi donc ». Un grand silence l’enveloppe… « Hè ! ». Mais pourquoi son bras ne veut-il donc pas se lever… une détresse incommensurable le submerge alors… il tente de résister sans succès… il sombre alors totalement.

    Mon père vient de passer du coma stade 1 au stade 2 à la suite de son accident de moto.

    Quelques minutes plus tard arrivent les pompiers qui, constatant la gravité des blessures du motard et du pronostic vital engagé, appellent le SAMU pour une assistance immédiate et un transport en l’état.

    Ils sont suivis très rapidement par les services de police qui s’empressent de sécuriser les lieux pour éviter le suraccident et refouler les badauds avides de sensations fortes et d’histoires tragiquement vraies à raconter le soir en famille ou au bistrot.

    Avril 2017

    Bonjour, je m’appelle Vélaqua…

    Bon, ça fait un peu début de lettre de motivation inachevée ou première intervention dans un groupe d’anonymes à problèmes divers plus ou moins repentis mais, j’ai tellement envie de te raconter mon histoire en espérant secrètement qu’elle puisse te faire kiffer un max.

    Ah pardon… c’est vrai… mes parents me disent que je ne suis pas toujours poli, que je tutoie facilement et que je parle trop « comme maintenant » ce n’est pas faux… désolé, je vais donc vous vouvoyer mais dommage… j’ai l’impression que l’on s’éloigne un petit peu l’un de l’autre !

    Je suis né (e) d’une mère bonne sœur défroquée et d’un père flic proxo et… mais non, je rigole… mais je m’appelle bien Vélaqua, Vava pour les intimes et pour vous aussi, si vous le souhaitez.

    Si je viens de répéter le nom de Vélaqua, ce n’est pas pour un début de radotage inquiétant mais tout simplement parce que je viens d’en entendre quelques-uns parmi vous (pour ceux, probablement, qui ne me connaissent pas encore) prononcer difficilement mon nom… vous avez bien dit : « Vé-la-CA » ? Dites simplement : « Vé – la – QUOI », OK, vous y êtes !

    Ce nom, dont je reste fier (très fier, même) vient des mots « Vel » pour vélo + « aqua » pour eau (en latin apparemment ou peut-être pas) mais finalement, on s’en fiche complètement… et d’avance, je ne vous en tiens pas rigueur.

    Vous aurez aussi remarqué au passage, si vous suivez bien, le mot « né(e) » dans le texte ?!

    Certes, je ne suis pas fort en littérature comme vous pourrez aisément le constater à me lire mais cela ne m’empêche pas d’écrire de temps en temps dans un langage plus conventionnel que les SMS ou les tweets pour bien me faire comprendre.

    Revenons au mot « né(e) ». Alors oui, j’ai une position incertaine dans ce domaine dans la mesure où je n’ai pas véritablement de sexe : genre escargot insomniaque qui se réveille le matin après une nuit bien « à-rosée ».

    En réalité, je suis tout simplement « hétéromo » vous trouverez peut-être ça un peu lessive et encore moins dans le dictionnaire de français (et c’est dommage), mais c’est tout ce que j’ai à vous offrir pour mon cas véritablement particulier.

    En effet, je suis de par ma conception : ni hétéro, ni homo… un peu comme un ange ou mon cousin Pinocchio : c’est-à-dire fabriqué de bois et de ficelles.

    Pour ma part, mon père a remplacé les ficelles par des chevilles et des vis, à chacun sa croix !

    Dans certains pays où il existe un article défini spécifique à ce sujet, on me placerait probablement dans la catégorie des « choses », à la troisième personne et pourtant, s’ils savaient…

    Je ne parle pas, certes, mais j’écoute et j’observe !

    Donc, sous système de détermination YXY bien spécifique et peu connu surtout, mon père pense que possédant deux Y et un X, je suis logiquement plus un garçon qu’une fille et déclare simplement à tout le monde : « Le » Vélaqua.

    Il a raison et moi j’adore sustenter de ma selle « thermodynamique » (comme disent les ingénieurs) le bool des meufs… mais le postérieur des mecs ne me glace pas d’effroi pour autant. Je vais avoir 18 ans dans quelques jours… je n’en rajouterai pas davantage…

    Parlons un peu maintenant de ma famille si vous le voulez bien ; je les adore même s’ils sont « attachiants » au possible comme la plupart des parents sur notre Terre.

    Mon père, Nathan Kervanec, breton pure souche, est un grand bricoleur devant l’éternel, comme mon grand-oncle Gepetto (le père de Pinocchio, vous vous souvenez ?) que je n’ai malheureusement pas connu.

    Papa n’est pas seulement passionné par le bricolage, croyez-moi… je vous laisse le découvrir par vous-même. Certains le trouvent génial, d’autres complètement allumé, bref, on essaiera de faire une moyenne honorable si possible !

    Si on le prend par le bon bout, on obtient quasiment tout de lui car il reste un humaniste forcené… et si c’est par le mauvais… aie, ça ne le fait pas… d’autant qu’il a la tête un peu près du bonnet, voire très près, le tout arrosé d’un poil de provoque, voire un gros poil.

    Trois choses lui font rapidement « monter la chaudière en température » : l’injustice flagrante et revendiquée ; la connerie imaginative et indécrottable ; le manque de respect concernant l’intégrité de l’individu, surtout s’il s’agit de viol mais vous comprendrez bientôt pourquoi.

    Une grande philosophie toute simple, voire simpliste, l’anime en permanence : « Qui risque rien n’a rien… » en oubliant, sciemment et/ou inconsciemment que, parfois… « Qui risque tout n’a plus rien du tout » !

    Ma maman d’adoption, Annie, est certainement une (très jolie) sainte pour nous supporter tous les deux depuis si longtemps.

    J’ai aussi trois demi-sœurs : Christèle, Sandrine et Béatrice ; Kiki et Dine du côté de mon père et Béa du côté de ma mère.

    Quand je suis né, Papa venait de prendre sa retraite : grosse différence d’âge entre nous… et pourtant : « il a bon pied bon œil, le bougre », un bon vivant en somme, parfois je l’envie totalement.

    Bien que ce parchemin reste au demeurant l’histoire de ma vie et de ma destinée, je me dois, pour qu’il ne se sente pas un peu rejeté, de vous raconter « en (très) gros » son parcours… d’autant que l’idée de ma conception lui est venue lorsque lui-même était encore jeune… il y a donc quelques siècles !

    J’ai pourtant un peu honte de le dire ainsi car il est toujours jeune… mon « Papa à moi » !

    Je vous le livre tel quel.

    Septembre 1965

    À dix-huit ans… tiens, mon âge ! … plus intéressé par les meufs (qui le lui rendent bien), le sport et le bricolage en tous genres que par les textes de nos brillants écrivains ; il est mis à la porte du collège Saint-Joseph à Chateaubriand [dernier bastion scolaire restant du nord au sud de la Bretagne (bien qu’en bas, la frontière ne soit encore pas trop bien définie) où il a été admis aimablement, après supplication de ses parents et contre forte rémunération de leur part bien entendu, au motif d’avoir enfermé de colère un certain temps, voire un temps certain et sans en avertir personne, une brave bonne sœur dans la chambre froide des cuisines de l’établissement… pour avoir refusé à cet élève, aussi sympa que « chiant puissance 10 », une ration supplémentaire de crème dessert dont il raffolait.

    Qui, appartenant à la sphère parentale, ne préférerait pas dire que sa progéniture est ingénieur à Grenoble, voire agronome, ou commandant de bord chez EasyJet, voire Air France, plutôt que ramasseur de feuilles mortes usagées même en « Chef » au jardin des plantes de sa ville ou vendeur de « chnouf » en bas de l’immeuble bien que cette dernière profession n’existât pas encore à l’époque.

    Donc, même après avoir pris une bonne claque comme il était également courant et de rigueur à l’époque si l’on était mauvais élève, ses pauvres parents se demandaient bien ce qu’ils allaient en faire… mais pas lui.

    En effet, dans les années 60, si l’on expurge les quelques aléas de la vie, il n’existait quasiment que des chômeurs par vocation. Il n’était donc pas bien difficile de s’assumer pécuniairement.

    Ainsi, on va le voir déménageur, agent SNCF, livreur de pinard, dessinateur à la craie sur le trottoir (seulement par beau temps), DJ de « surboum », batteur dans un groupe minable mais si merveilleux… et j’en passe.

    En réalité, lorsqu’un job l’ennuyait, devenait trop répétitif ou s’il s’accrochait avec le chef ou le patron, il le quittait plus vite que la lumière.

    Et puis un jour, je dirais même un beau jour pour la circonstance, tout à fait par hasard comme bien souvent, un événement allait changer le cours de sa vie.

    En effet, la prestigieuse formation des Moniteurs de la Garde Républicaine de Paris effectua une superbe représentation dans son fief en Bretagne… territoire encore indépendant dans ces années-là comme vous le savez certainement et dont je vais taire le lieu exact… par pudeur pour ses autochtones à bonnets rouges.

    Gymnaste lui-même depuis tout petit, sportif dans l’âme, dans le corps et dans l’esprit, il venait de découvrir en deux heures de spectacle exceptionnel… son futur métier. Mais sachant que rien n’est véritablement simple, il fallait avoir effectué son service militaire avant de pouvoir entrer dans la vie active et d’autant plus en Gendarmerie.

    Pas un problème pour Papa : il devance aussitôt l’appel et se retrouve ainsi expatrié à la base aérienne 123 de Bricy, tout près d’Orléans.

    Il va alors découvrir avec circonspection quatre choses essentielles : la discipline, la hiérarchie, l’aviation… et le marché noir.

    En ce qui concerne la première : c’est pour lui un monde totalement inconnu qui lui saute à la face dans une sorte d’agression cosmique. Durant cette incarcération volontaro-obligatoire de 18 mois, il connaîtra des punitions diverses dont je vous passe les détails.

    Concernant la deuxième : il apprit assez facilement, que la hiérarchie s’établissait ainsi : tout en haut, on trouve les Officiers Supérieurs (les « négriers »), puis en descendant d’échelon, les Officiers subalternes (en attente permanente toute leur vie et supportant tout pour passer « négrier »), puis les Sous-Officiers (les esclaves des Officiers), puis tout en bas, les « biffins », aussi appelés de temps en temps ou par compassion « hommes de troupe » (les esclaves – des esclaves – des esclaves en somme) dont il faisait partie.

    Pour la troisième concernant l’aviation… en s’envoyant réellement en l’air : c’est la découverte de moments d’extase féérique où, à ses yeux, le temps était soudain universellement décompté en minutes de jouissance permanente.

    La quatrième découle naturellement de la troisième : en effet, se trouvant « employé » au magasin d’habillement de la base (meilleure planque à part chauffeur du Colonel), il contribuera nettement à une amélioration radicale de la dotation annuelle en fringues des personnels navigants… au désespoir de son sergent-chef qui avait toujours des erreurs lors des inventaires. En retour, il se faisait ainsi beaucoup d’amis et d’heures de vol en accompagnant les pilotes dans certaines missions ; tout en participant, durant des week-ends entiers, à de nombreux sauts avec l’équipe sportive parachutiste de la base.

    Lorsque la quille arriva, Papa déclara à ceux qui voulaient l’entendre (dans la mesure où, le connaissant si bien après l’avoir supporté 18 mois, personne n’y croyait) qu’il allait en Gendarmerie… mais juste pour faire du sport !

    Plusieurs mois après, suite à sa demande, la convocation pour l’examen d’entrée en Gendarmerie est arrivée. Il a mis une cravate, geste toujours compliqué pour lui et s’est présenté à la brigade du coin. Un gradé rondouillard et probablement copain avec la divine bouteille vu l’état de son nez, faisait probablement partie des ronqueus de la brigade.

    Le gradé grognon l’interrogea :

    — Quelle arme souhaiteriez-vous choisir si vous êtes accepté ?

    — La section gymnastique de la GRP (Garde Républicaine de Paris), répliqua immédiatement mon père.

    L’œil du gradé s’ouvrit un peu plus, quitte à se déformer et la feuille de papier lui échappa presque des mains :

    — Mon pauvre ami, soyez déjà gendarme, après quoi on verra si vous êtes apte à rejoindre l’élite.

    Silence de mon père, ce n’était pas la peine d’agacer un peu plus ce brave homme qui allait lui faire passer l’examen et qui poursuivit :

    — Vous avez le certificat d’études ?

    — Non, j’ai uniquement le BEPC et je suis parti de l’école avant le bac.

    — D’accord, voici le test, vous avez une heure.

    Papa n’eut aucune difficulté à rédiger le document « niveau certificat d’études ».

    En rendant sa copie, il n’avait véritablement pas idée du fonctionnement de ce corps qu’il allait probablement intégrer : c’était en réalité exactement comme à l’armée un an plus tôt… mais en pire !

    Bref, nous allons donc considérer qu’il est tombé un jour en Gendarmerie comme une call-girl qui aurait soudain choisi le couvent par intime conviction ou pour expier éventuellement un pécher inavouable... pas plus !

    Juillet 1967

    Quelques semaines plus tard, Papa recevait sa convocation pour intégrer l’école de gendarmerie de Chaumont avec environ 120 autres futurs « camarades ».

    Le comité d’accueil fut rude.

    Dès l’arrivée, frais débarqué du vieux bus gendarmerie « bleu bégonia fatigué » ayant récupéré une partie des postulants à la gare SNCF, le groupe fut accaparé par un gradé qui, déjà par son physique, laissait paraître une aptitude certaine à la course à pied :

    — Laissez vos affaires sur place, descendez la veste et suivez-moi !

    Ainsi, au débotté ou plus exactement en chaussures de ville et pantalon droit, voire endimanché pour certains, et jeans pour mon père, il a fallu suivre le Chef ou tenter de le suivre pour certains sur douze kilomètres et en courant. Au retour, les pieds ne savaient plus comment ils s’appelaient, plusieurs des camarades non plus.

    Le soir même, une dizaine de conscrits repartaient sans états d’âme… dans « le civil ».

    Le lendemain, en route pour la récupération du « déguisement » gendarmerie ; treillis, casque lourd, casque léger, fusil MAS 36, brodequins, gamelle en étain et tenue de survêtement.

    La parfaite tenue du bidasse type, seule différence (quand même de taille), ils étaient tous futurs « Sous-Officiers » et, rappelez-vous le tableau d’avancement, ils allaient ainsi devenir de simples esclaves au service exclusif de la Caste dominante et à fort pouvoir de reproduction (comme vous le savez) des Officiers.

    Le jour suivant, nouvelle course d’une dizaine de kilomètres. De retour au campement, toujours en godillots et en treillis, suite à sa demande qui avait été transmise à qui de droit, on fait venir mon père au gymnase où l’attend, l’adjudant René Badbit, entraîneur de la section gym de la GRP.

    Papa se mit au garde-à-vous dans une attitude réellement impeccable (trop fort le père !).

    L’adjudant l’observa de haut en bas et lui demanda :

    — Vous souhaitez intégrer la section gym de la GRP ?

    — Tout à fait mon adjudant !

    — OK, piquez un équilibre en force.

    Mon père s’exécuta et développa sur-le-champ un superbe équilibre en force en se retrouvant les mains en bas et les godillots bien hauts dans le ciel attendant, presque tranquillement, qu’on lui demande d’atterrir.

    — OK, je vous prends, vous pouvez redescendre.

    Plus de dix ans de pratique gymnique laissent quelques traces.

    Son rêve se réalisait : faire du sport, du sport et encore du sport, au sein de cette prestigieuse équipe tout en étant payé pour le faire, exactement comme les footballeurs professionnels, mais sans la même paye.

    Les mois de « formation gendarmerie » passèrent doucement. Il avait trouvé le filon pour éviter les corvées du samedi en intégrant, comme batteur (un de ses anciens jobs rappelez-vous), la section musique en charge des bals effectués par la Gendarmerie dans différents endroits le samedi soir.

    C’était d’ailleurs aussi amusant qu’instructif à voir : en effet, pratiquement à chaque bal, les mêmes filles circulaient en recherche active auprès des futurs gendarmes. Avec la sécurité de l’emploi du fonctionnaire, les « maîtresses » de maison en devenir venaient faire leur marché parmi la gent masculine qui, accessoirement, pourrait servir de mari par la suite. Les bougresses savaient pertinemment qu’à part quelques futurs défroqués comme mon père, lorsque l’on « entre » en Gendarmerie, on entre dans les ordres. Pour les plus perspicaces de ces dames, elles préféraient attendre le bal des futurs officiers de Gendarmerie à Melun pour tenter de s’en taper un tout de suite au grade supérieur car, à caste supérieure, conditions de vie supérieure par la suite, prestations supérieures, reconnaissance environnementale supérieure, etc.

    Après quelques mois de contraintes diverses et diversement appréciées ou consenties… de techniques de combat avec quelques instructeurs prétentieux qui profitent du self défense pour vous en mettre une en « loucedé » si vous êtes un peu trop prolixe dans leurs cours… de textes de loi appris par cœur jusqu’à en vomir… de combats de rue (pardon : d’opérations de maintien de l’ordre) fictifs contre les « camarades » déguisés en faux manifestants pas vraiment représentatifs… de jolies meufs amoureuses de beaux uniformes dans l’un desquels se glissait sans conviction tous les matins mon père… le jour de gloire venait d’arriver.

    Papa était devenu « gendarme » !

    Toute la promotion 1968

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