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Le grand chantage de Noël
Le grand chantage de Noël
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Livre électronique307 pages4 heures

Le grand chantage de Noël

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À propos de ce livre électronique

S’il y a bien une chose qu’Ivy Winters déteste cordialement au point de devenir la version féminine du Grinch, c’est bien la saison de Noël. Ivy déteste Noël de ses cinq sens : des chansons aux films ; des décorations aux lumières, en passant par les plats et les boissons typiques, il n’y a pas une seule chose qui trouve grâce à ses yeux ! Une enfance solitaire et extrêmement dure, passée à prendre soin de soi et de sa soeur Misha, rêveuse et hyper-positive, l’a rendue rebelle et insolente et lui a laissé une antipathie immodérée pour les festivités de décembre, et pour le gouvernement. Nicholas Jensen serait un homme normal, s’il n’était pas une star de cinéma célèbre dans tout l’univers connu, et capable de déclencher un ouragan hormonal d’un simple battement de cil ; il partage son temps entre Los Angeles et New York et s’apprête à passer Noël de manière tranquille, et peut-être un peu ennuyeuse d’ailleurs, mais ses plans vont partir en fumée quand une tornade d’humour sarcastique et pessimiste va débarquer dans sa vie, sous le nom d’Ivy. Mais qu’est-ce qui peut bien avoir mis sur la route du bel acteur, à la vie en apparence parfaite, une cyber-activiste au casier judiciaire long d’un kilomètre, avec les fédéraux en permanence sur ses talons, qui a l’habitude d’inventer des mots et possède un bagage émotionnel assez gros pour remplir un Boeing 747 ? Et pourquoi sont-ils obligés de passer le mois de décembre au milieu de nulle part, dans la froide, enneigée et minuscule ville d’Havenford, Connecticut ? Un chantage, bien sûr, et une petite fille à sauver dans une comédie romantique, divertissante et pleine d’entrain, sur ce qu’il NE faut absolument PAS faire pendant la période de Noël.  

LangueFrançais
ÉditeurL. D. Blooms
Date de sortie11 avr. 2020
ISBN9781071538456
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    Aperçu du livre

    Le grand chantage de Noël - L. D. Blooms

    Prologue

    New York, décembre 2010

    « Ça ne va pas bien se passer, Misha », Ivy jeta un coup d’œil en biais à l’agent du FBI qui se trouvait à sa droite, droit comme un pilier dans sa veste à deux mille dollars, les bras croisés sur sa poitrine musclée, puis elle souffla en direction de l’agent de la National Security qui se penchait en avant à chacun de ses mouvements, comme s’il s’attendait à ce qu’elle s’échappe.

    Qu’elle s’échappe alors qu’elle était menottée à une chaise. Dans une pièce pleine de policiers. Ridicule.

    Un flic la regardait de travers, secouant la tête comme pour dire : « Quel gâchis ! » et elle détourna le regard pour se concentrer sur le visage inquiet de sa sœur. « Rien ne va jamais bien, tu comprends ? Pas pour nous… »

    Misha avança d’un pas, ses grands yeux bleus rendus encore plus grands par la consternation, une auréole de perfection angélique bordée de boucles dorées, rendue visible par les soupirs de désirs lancés par les hommes qui croisait son regard plein de douceur. Non pas qu’elle s’en aperçoive, sa sœur n’était pas du genre à remarquer ces choses-là. « Mais bien sûr que tout ira bien, petite sœur. Ne t’inquiète de rien, on trouvera une solution. Ces gentils messieurs veulent juste que tu collabores et que tu leur dises comment tu as fait pour passer le pare-feu du Département de la Défense, d’accord ? »

    M. FBI fit oui de la tête avec détermination.

    « Je suis sûre que si tu leur expliques comment les choses se sont passées, ils comprendront qu’il s’agit d’un malentendu, » dit Misha avec un sourire à la Blanche Neige.

    Ivy ferma les yeux pendant un instant, en se massant l’arête du nez de ses doigts. « Mon Dieu, pas une autre attaque de Janeitite, Misha ! Je t’en prie ! »

    M. NSA resserra le nœud de sa cravate vert sapin, pourtant impeccable. Vous devriez écouter votre sœur, Mlle Winters. Il est de votre intérêt de coopérer avec nous. 

    Occupez-vous de vos affaires… on sait tous les deux que vous bluffez. Vous pouvez me garder ici toute la nuit et vous n’aurez toujours aucune preuve me reliant à l’attaque, Ivy fixa attentivement les minuscules motifs colorés qui traversaient la cravate de l’agent. Des petits paquets cadeau verts et rouges. Des saletés de cadeaux de Noël, elle ne pouvait pas y croire. 

    Même ce succédané d’Arnold Schwarzenegger n’est pas immunisé contre l’irrésistible appel des fêtes. Absurde. Maudit décembre !

    Un petit sourire s’afficha sur les lèvres de l’énergumène du FBI. Je constate que vous ne vous précipitez pas pour clamer votre innocence.

    Ivy haussa les épaules et allongea ses pieds chaussés de Doc Martens devant elle. Pourquoi devrais-je clamer mon innocence pour quelque chose pour lequel vous ne pouvez pas m’inculper directement ?

    M. NSA grogna. Vous êtes gonflée ! Ce sont les petits punks comme vous qui ruinent la démocratie !

     Ivy éclata de rire. Mais il sort de l’usine lui ou quoi ? L’attaque informatique que vous attribuez à mon groupe présumé, à ce que je sais, a été faite pour divulguer des informations justement en faveur de la démocratie, et c’est vous les pingouins républicains qui pensez qu’il existe des citoyens de première classe et de seconde classe, les premiers ayant tout le pouvoir et les autres bien tenus à l’écart !

    M. FBI ricana. Arrêtez de vous dépeindre en championne de la justice, vous n’êtes rien d’autre qu’une hackeuse, une fauteuse de troubles qui s’amuse à se moquer du Gouvernement des États-Unis d’Amérique !

    Ivy le regarda droit dans les yeux, un sourcil en accent circonflexe et le menton fièrement tendu vers l’homme. Prouvez-le !

    M. FBI et M. NSA échangèrent un regard furtif, incapables de cacher la colère qu’ils ressentaient de se voir ainsi coincés dans cette impuissance forcée. Il n’y avait rien qu’ils puissent faire pour prouver son implication et ils en étaient parfaitement conscients. 

    Ivy était malheureusement très douée pour effacer ses traces, cela ils le savaient, tout comme elle le savait aussi.

    Misha porta une main à son visage et se couvrit les yeux en inclinant la tête dans une cascade de boucles douces, la voix réduite à un murmure exaspéré. Ivy ! Pour l’amour du ciel, restons calmes ! C’est tout simplement un malentendu !

    Sa sœur leva les yeux au ciel en secouant légèrement la tête. "Mish, s’il te plaît, tu pourrais ôter tes lunettes roses une seconde et regarder le monde tel qu’il est ? Ces messieurs veulent clairement me piéger en parfaite violation de mes droits sans, je répète, sans preuve avec seulement pour base un casier judiciaire acquis avant ma majorité et donc secret, et dont eux-mêmes ne peuvent pas voir le contenu, le tout parce que quelqu’un – et je ne dis pas que c’est moi – leur a prouvé que leur précieux système de sécurité informatique pouvait être neutralisé.  Au lieu de vous lamenter, vous devriez remercier les hackers qui montrent les défauts de leurs pares-feux à vos admirables ingénieurs !"

    M. FBI laissa échapper un rire moqueur. « Oh, excusez-moi, Mlle la diplômée du MIT, si nos ingénieurs ne sont pas préparés à se défendre contre une attaque antipatriotique de cette portée ! Je suis sûr que notre gouvernement ne vous était pas complètement antipathique quand il a fourni à quelqu’un comme vous les bourses d’études nécessaires pour réussir vos diplômes !"

    Ivy le fusilla du regard, ses yeux noisette plein d’indignation. Quelqu’un comme moi ? Que voulez-vous dire ? Et pour votre information, la bourse d’études qui m’a permis de faire le MIT provenait d’un fond pour étudiants issu d’une ONG. 

    Misha la regarda avec l’air d’un chiot à qui on aurait marché sur la queue, embarrassée par l’air évidemment désapprobateur des agents. Pour une fois, Ivy, pour une seule fois, tu pourrais éviter de faire des polémiques ! Je suis sûre que l’agent Benson ne voulait pas t’offenser. Allons, gardons la tête froide.

    M. NSA acquiesça, car il savait que s’il voulait recommencer à collaborer avec la hackeuse à l’avenir, il devrait fermer les yeux sur son attitude irritante et rebelle.  Il n’y avait rien de pire qu’une nuisance qui était en même temps un atout, et qu’il ne fallait pas se mettre à dos pour le bien du Pays.

    Ivy la regarda et laissa tomber, car elle ne pouvait pas faire grand-chose : sa sœur ne comprenait pas et ne comprendrait jamais. Son interprétation du monde serait toujours pleine de fleurs, d’arcs-en-ciel et de chatons, qu’importe si la société lui démontrait quotidiennement le contraire. Elle n’était pas sûre que ce soit un bien ou un mal pour Misha, mais c’était évidemment sacrément irritant pour ceux qui la côtoyaient et qui devaient faire face tous les jours – brutalement – à une réalité bien différente de celle tout en rose qu’elle s’obstinait à imaginer.

    Comme l’avait insinué pas très subtilement l’agent Benson, il y avait une différence à ne pas sous-estimer entre ceux qui étaient comme eux et ceux qui étaient comme elle.

    Après tout, qu’avaient-elles été, elle et sa sœur, pour la société après la mort de leurs parents ?

    Rien de plus qu’un poids dont il fallait se défaire à tout prix.

    Personne n’avait voulu d’elles, deux petites filles de deux et six ans restées seules au monde après un tragique accident qui les avaient laissées orphelines.

    Personne ne les avait assez aimées, personne n’avait considéré la possibilité de faire de la place dans leur vie à deux petites filles innocentes. Et dire que leurs parents, bien que privés de famille proche, avaient plein d’amis et de cousins !

    Ils leur avaient tous tourné le dos et les avaient laissé se perdre dans les méandres du Système.

    Personne ne s’était soucié d’elles.

    Personne n’avait jamais vraiment pris soin d’elles. 

    Dire que leur enfance avait été dure était un euphémisme.

    Ballottées de famille d’accueil en famille d’accueil, et d’institution en institution, quelquefois ensemble – si elles avaient de la chance – mais souvent séparées, elles avaient bien vite connu l’indifférence et l’injustice.

    Personne n’avait jamais voulu les prendre dans leurs bras et les considérer comme faisant partie de la famille. Les familles d’accueil étaient seulement des collecteurs de chèques de pensions avides, qui profitaient du système et qui devenaient des parents temporaires uniquement pour être plus tard éligibles à l’adoption d’un nouveau-né.

    Ils semblaient tous apparemment vouloir des enfants, mais même elle, à deux ans, était déjà de la marchandise avariée.

    Elles avaient vécu à la dure toutes les deux et elles devaient se trouver heureuses de ne pas avoir connu pire, car elles savaient bien qu’il y avait une myriade d’enfants qui ne pouvaient pas en dire autant.

    Elles avaient grandi en espérant souvent être invisibles et en regrettant souvent de ne pas vraiment l’être.   

    Bien sûr, il y avait bien des assistantes sociales qui faisaient bien leur métier et qui essayaient vraiment de leur trouver un foyer, mais elles se comptaient sur les doigts d’une main et souvent, elles se faisaient remettre à leur place par leurs supérieurs hiérarchiques ou bien elles perdaient la foi devant les mauvais traitements perpétuellement dénoncés par leurs petits protégés.

    Elles avaient connu la faim et la peur, la tristesse et la désolation et enfin, elles avaient appris à ne pouvoir vraiment compter que sur elles-mêmes.

    Le monde pouvait vraiment être un endroit brutal pour deux petites filles seules et il pouvait même devenir encore pire pour deux petites filles curieuses et intelligentes, mais sa sœur avait quand même décidé de tout voir en rose, tout le temps.

    Les deux sœurs avaient réagi de manière différente au chagrin et à la solitude. Ivy était vite devenue une enfant indépendante et méfiante, peu encline à s’ouvrir et dont l’intelligence hors du commun n’avait fait qu’empirer sa défiance et inciter son esprit rebelle à la dissidence. Elle n’avait jamais eu de véritables amis en dehors de sa sœur et de Charlotte – une petite fille, orpheline comme elles, qu’elle avait connu au collège – et rien ne l’enthousiasmait à part les ordinateurs : elle avait toujours eu une curiosité innée pour le fonctionnement des objets complexes.

    Misha, au contraire, avait projeté sa propre insécurité et son chagrin d’avoir toujours été rejetées, dans une image d’elle toute en douceur et en affection, suivant une inclination personnelle déjà généreuse et ouverte par nature. Elle avait toujours pris soin d’elle, faisant la maman même si elle n’avait que quatre ans de plus qu’elle, et protégeant sa petite sœur du mieux qu’elle pouvait, mais elle n’avait jamais permis à la brutalité de la réalité d’effleurer son âme et elle s’était réfugiée dans un monde fait de livres et de rêves dans lequel il n’y avait que des happy ends. 

    Au début, Ivy avait cherché à la comprendre, à prendre en compte sa façon différente de voir les choses, mais cela n’avait jamais été facile pour elle et avec les années, cela s’était avéré de plus en plus difficile.

    Leurs rapports avaient commencé à se détériorer à seize ans, quand elle était entrée au MIT avec une bourse d’étude spéciale pour suivre le programme de la faculté d’informatique et que Misha avait décidé de dédier sa vie à l’instruction des enfants, suivant un double cursus universitaire à Yale en pédagogie et sciences de l’éducation : elle n’avait alors pas très bien pris sa décision de consacrer ses capacités à la piraterie informatique.

    Misha était perpétuellement souriante et bien disposée envers tout le monde, même quand le monde lui donnait des coups et les oubliait, tandis qu’Ivy ne faisait que se mettre en colère un peu plus : il lui semblait parfois porter sur ses épaules leur colère à toutes les deux. 

    Même maintenant, alors qu’elles étaient adultes, les choses n’avaient pas changé et bien qu’Ivy aimait vraiment sa sœur, parfois elle ne pouvait pas faire autrement que d’avoir du ressentiment envers elle.

    Comment pouvait-elle continuer à ne voir que le bien dans son prochain, à tout prix, après tout ce qu’elles avaient vécu ces vingt dernières années ?

    L’agent Tucker, massif, se mit à genoux devant elle et l’arracha à ses pensées. Il se pencha vers elle et prit ce qu’il crut probablement être une attitude empathique et compréhensive. Mlle Winters, soyons clairs, ni nous, ni vous, ne voulons passer le reste de la soirée ainsi ; cela ne convient à personne, vous êtes d’accord ? Après tout, nous sommes à une semaine de Noël. Donnez-nous quelque chose… un nom et nous vous laissons partir, on met tout ça derrière nous, qu’en dites-vous ? et juste pour être sûr que le message soit bien reçu, il l’accompagna d’un sourire de bon garçon.

    Non, mais je n’y crois pas, il me sort la carte Noël et après ? Il va me chanter We are the World, we are the children ? Mauvaise pioche, mon ami !

    Ivy se mit debout en faisant tinter les menottes qui la retenaient au siège par l’un de ses poignets ; elle ne pouvait pas croire qu’ils pensent vraiment qu’ils allaient la pousser à trahir HeckHack, car la protection du groupe était sa mission numéro un. Gentil policier et méchant policier ? Vraiment ? Bon, finissons-en avec ce cinéma, car ça ne prend pas avec moi et j’en déduis que si vous en êtes réduits à ces petits jeux, cela signifie que vous ne pouvez rien faire sans mes aveux et, comme vous savez très bien que vous n’en obtiendrez pas, même dans un million d’années, que diriez-vous de m’enlever ces menottes, afin que je puisse rentrer chez moi ?!

    M. FBI prit de nouveau la parole, la bouche réduite à une ligne, la voix dure. Je crains que cela ne soit pas possible, Mlle Winters.

    Le mobile d’Ivy se mit à vibrer dans le sac à main de sa sœur ; la jeune femme le sortit et l’examina avec impatience pour voir qui l’appelait, certainement perturbée par le fait d’interrompre impoliment – selon ses principes extraterrestres, du moins – la conversation en cours. Avant de parler, elle s’éclaircit la gorge et remit ses cheveux derrière son oreille. C’est Charlotte… ils arrivent.

    Game Over, les enfants ! Vous avez entendu ? Mon amie, mademoiselle Calvin, sera là d’un moment à l’autre et avec elle, mon avocat. Vous pouvez rester là et attendre son arrivée, comme ça vous pourrez lui donner votre nom et votre matricule, pour la plainte pour abus de pouvoir que j’entends déposer à la fin de ce sympathique intermède, ou bien nous rentrons tous à la maison et on oublie tout ? Comme vous l’avez si bien dit, agent Tucker, c’est bientôt les fêtes, Ivy dédia aux deux hommes un sourire diabétique, digne de sa sœur, en inclinant la tête vers les menottes. Alors, qu’en dites-vous ? On les ouvre ?

    M. FBI et M. NSA se regardèrent en silence et secouèrent simultanément la tête, l’un avec une mâchoire si rigide qu’il aurait fallu un pied de biche pour la desserrer et l’obliger à parler, et l’autre avec un grincement de dents tellement atroce qu’Ivy imaginait déjà le sourire de son dentiste, car avec une telle habitude son patient aurait pu lui financer un paquet de croisières autour du monde.

    Vous jouez avec le feu, mademoiselle, si l’on peut dire, dit M. FBI en faisant signe à un policier pour qu’il lui enlève les menottes.

    Ivy rit intérieurement. Il n’a pas le courage de me les enlever lui-même le pauvre ! 

    Elle jeta un coup d’œil à Misha, qui étudiait ses chaussures avec passion, vit qu’elle ne trouvait pas ça drôle du tout et soupira, exaspérée.

    Enfin libérée des menottes, la jeune femme se massa le poignet et remercia l’agent de police à voix basse. Partons, Misha, Charlotte nous attend…

    M. NSA se mit devant elle, lui bloquant la vue de son torse musclé. On se reverra, Mlle Winters, n’en doutez pas…

    L’homme était si grand qu’Ivy dut faire deux pas en arrière pour pouvoir le regarder en face. Oh, je n’en doute pas du tout, mais je tiens à vous rappeler que recourir à l’intimidation n’est pas très reluisant, lui dit-elle en souriant, puis elle se dirigea vers le couloir. 

    L’agent se passa une main sur le visage.  Bientôt, vous ou quelqu’un de votre groupe commettrez une erreur et alors la musique ne sera plus la même, mademoiselle.

    "Hmm… alors, ça j’en doute ! Agent Tucker, Agent Benson…", la jeune femme fit un signe de tête à chacun et passa le seuil du poste de police en vitesse, mais pas assez vite pour ne pas entendre les timides excuses et les souhaits pour les fêtes que sa sœur adressait aux agents.

    Une journée entière sous pression avec Dupont et Dupond n’avait pas trop entamé sa patience – au fond, elle avait l’habitude – mais l’attitude perpétuellement conformiste et docile de Misha, ah, c’était bien la chose qui pouvait lui faire péter un plomb ! 

    Malgré la neige fine comme du sable qui tombait drue du ciel, elle ne mit pas longtemps à repérer la berline de Charlotte dans le parking ; elle remarqua qu’elle était dans une zone clairement réservée à la maréchaussée et elle éclata de rire tandis qu’elle la saluait rapidement, d’un signe de tête. Son amie était rangée des voitures à présent, mais de temps en temps son esprit d’activiste subversive se payait une petite rébellion. Ivy s’appuya contre un mur à l’aide de l’une de ses Docs et chercha dans les méandres de son sac ethnique multicolore quelque chose pour domestiquer ses boucles brunes psychopathes.

    Misha la rejoignit dehors.  Tu dois vraiment être aussi impolie, Ivy ?

    Elle se retourna pour regarder sa sœur, un élastique à cheveux à la main et sur le visage une expression qui indiquait que celle-ci devait avoir une deuxième tête qui lui avait poussé ; même celle d’une princesse Disney incapable de voir le mal dans le monde. Moi ? Impolie ? Misha ! Ces deux débiles m’ont arrêtée sans aucun motif !

    Sans aucun motif ? Vraiment ?!

    Ivy leva les yeux au ciel, "Mais tu es de quel côté ? Tu sais bien ce que je veux dire ! Ils n’avaient pas de preuves que c’était nous ! Pas de preuve égale pas de juste cause ! Ils n’auraient même pas dû venir me chercher chez moi, et encore moins me séquestrer dans un poste de police toute la journée !"

    Misha laissa échapper un soupir.  Mais ils ont été gentils, non ? Ils m’ont permis de rester avec toi —

    Seulement parce qu’ils espéraient que cela m’inciterait à avouer…, Ivy commença à frotter se deux mains l’une contre l’autre afin de ne pas geler, la température étant plutôt basse même pour une soirée hivernale à New York.

    Ils nous ont fait apporter à manger ce que nous voulions—, Misha qui était prête pour toutes les occasions, sortit deux paires de gants de son sac : l’une en polaire fuchsia pour elle et l’autre en laine noire pour sa sœur.

    Une vaine tentative pour se mettre dans tes bonnes grâces et me faire avouer…, Ivy accepta les gants avec un sourire reconnaissant, mais avant de pouvoir les mettre, ils tombèrent par terre, dans un tas de neige sale. Super ! Tout se ligue contre moi aujourd’hui ! Je hais le mois de décembre !

    Ou bien ils voulaient juste être sympas, non ?, Misha secoua ses boucles blondes pour les libérer des flocons de neige qui s’y accrochaient.

    Sympas ? Ils m’ont gardée menottée à la chaise pendant quatre heures comme si j’étais une terroriste, ou une serial killer ! Misha, je t’en prie, réfléchis ! Pourquoi tu t’obstines à nier la réalité ? Ivy attacha furieusement ses cheveux en une queue de cheval mal faite. Dans les boucles de sa sœur, les minuscules cristaux glacés pouvaient ressembler à des perles artistiquement réparties, mais si elle ne faisait rien pour sa tignasse, elle aurait bientôt l’aspect d’un chat persan errant tombé dans un les égouts.

    Pourquoi tu ne peux pas voir les choses comme moi, Ivy ?!

    "Parce que les choses ne sont pas comme tu les vois, Mish. D’une part, il y a la dure vérité et de l’autre ta réalité édulcorée à la Jane Bennet !¹"

    Eh bien, merci ! Tu sais à quel point j’aime ce personnage, je suis contente que tu me compares à elle, Misha sourit, déjà prête à enterrer six pieds sous terre la hache de guerre ; hache qu’Ivy au contraire brandissait à la moindre provocation.

    "Mais ce n’était pas un compliment ! Enfer et damnation ! Tu ne vois même pas que je viens de t’insulter ! Il est temps que tu grandisses et que tu laisses derrière toi l’Ile qui n’Existe Pas², petite sœur.  Accepte-le, tu ne peux pas me demander d’ignorer la réalité et de me mettre la tête dans le sable !"

    Et toi au contraire tu peux me demander de changer mon opinion sur le monde comme si de rien n’était ? fait extraordinaire, Misha haussait la voix et son front d’habitude si lisse se plissait.

    "Ton opinion sur la réalité n’est que du déni ! Tout doit être rose et mignon dans le monde de Misha et je suis fatiguée d’être la seule à nous défendre contre tous les trucs moches qui nous entourent, tandis que tu ne fais que t’excuser pour tout et pour rien ou que tu essaies de tout résoudre avec des paroles magiques : Oh, je suis sûre qu’il s’agit d’un malentendu ! Réveille-toi ! Ce monde n’est pas fait sur mesure pour chacun d’entre nous. La réalité est une chose objective… il n’y a qu’un monde, Misha, et en général il prend la tête, arrête de te faire des illusions !"

    Seulement quand arrêteras de tout voir en noir ! Moi au moins je m’efforce de voir le côté positif des choses !

    Eh bien, accroche-toi bien à ton côté positif, moi je suis trop occupée à vivre dans le vrai monde pour te tenir compagnie ! Je n’en peux plus de ton optimisme, Ivy remit l’anse de son sac sur son épaule et s’en alla vers le parking.

    Pourquoi tu fais ça, Ivy… toutes les deux, nous sommes notre seule famille, nous ne devrions pas nous chamailler pour des choses aussi stupides !, Misha s’avança vers elle les yeux pleins de larmes.

    Ivy souffla pour enlever la neige qui se collait à son visage. On ne devrait pas, mais on finit toujours par se disputer et le fait que tu préfères vivre dans les nuages est alarmant, pas stupide.

    Misha vint à elle et lui prit la main.  Ivy, ça suffit… que diraient papa et maman s’ils nous voyaient nous disputer comme ça ?!

    Rien… ils ne diraient rien ! Papa et maman sont morts, Mish… et moi je ne me rappelle même pas à quoi ils ressemblaient ! La jeune femme regretta ses paroles dès qu’elles sortirent de sa bouche, mais il était déjà trop tard.

    Misha se recula d’un coup comme si on l’avait poussée et ses yeux se remplirent de larmes, tandis qu’elle poussait un énorme soupir. Tu sais ce que je te dis, alors ? Peut-être, peut-être bien que c’est moi qui en ai ras-le-bol de ta négativité, Ivy !

    Elle aurait pu s’excuser pour cette dernière phrase – et elle aurait dû, car elle savait bien à quel point sa sœur tenait au souvenir de leurs parents –

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