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L'Ange exterminateur
L'Ange exterminateur
L'Ange exterminateur
Livre électronique459 pages5 heures

L'Ange exterminateur

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À propos de ce livre électronique

Ils se croyaient puissants. Ils pensaient que leurs crimes écologiques resteraient impunis. La peur est sur le point de devenir leur pire ennemie.
Un enfant albinos aux pouvoirs intrigants, un ancien soldat d'élite qui hérite d'une fortune et une agente secret britannique dans la tourmente… à la poursuite du tueur le plus mystérieux de tous les temps : on l'appelle l'Ange exterminateur.
Qui sont ces étranges enfants, porteurs de particules de lumière pure incluses depuis leur naissance dans leur ADN, qui terrorisent tellement certains membres bien informés de plusieurs gouvernements qu'ils sont traqués et enlevés pour être parqués dans des centres très spéciaux ? Certains les appellent "les Enfants-Anges"...
Un thriller sur fond d'écologie et qui flirte avec le surnaturel et la physique quantique. Le lecteur est transporté depuis les Highlands d'Écosse à l'Himalaya et des Rocheuses canadiennes à l'Afrique.
LangueFrançais
ÉditeurSAGA Egmont
Date de sortie30 avr. 2024
ISBN9788727027654
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    Aperçu du livre

    L'Ange exterminateur - Frédéric Zumbiehl

    L’Ange exterminateur

    Image de couverture : Shutterstock

    Copyright © 2023 Frédéric Zumbiehl et SAGA Egmont

    Tous droits réservés

    ISBN : 9788727027654

    1ère edition ebook

    Format : EPUB 3.0

    Aucune partie de cette publication ne peut être reproduite, stockée/archivée dans un système de récupération, ou transmise, sous quelque forme ou par quelque moyen que ce soit, sans l'accord écrit préalable de l'éditeur, ni être autrement diffusée sous une forme de reliure ou de couverture autre que dans laquelle il est publié et sans qu'une condition similaire ne soit imposée à l'acheteur ultérieur.

    www.sagaegmont.com

    Saga est une filiale d'Egmont. Egmont est la plus grande entreprise médiatique du Danemark et appartient exclusivement à la Fondation Egmont, qui fait un don annuel de près de 13,4 millions d'euros aux enfants en difficulté.

    « Ce livre est dédié à Iqbal Masih », jeune militant pakistanais vendu comme esclave à quatre ans, assassiné à douze, à cause de son combat mondial contre l’esclavagisme des enfants...

    « L’obéissance aveugle en l’autorité est le plus grand ennemi de la vérité. »

    Albert Einstein

    PROLOGUE

    Château de Dunnar, région du West Lothian, Écosse, une heure du matin…

    Une nuit froide, sans lune, plongeait la lande dans une obscurité presque totale.

    Aucune lumière n’émanait du château, aucun bruit ne venait troubler cette terre désolée, à l’exception peut-être d’un léger souffle de vent humide charriant des bancs de brume en provenance du Firth of Forth adjacent.

    L’Être surgit sans un bruit de la forêt et se dirigea vers le château comme s’il flottait au-dessus du sol spongieux, tel un spectre sorti des limbes.

    Christopher Neil, malgré l’heure tardive et ses quatre-vingts ans, était encore assis à son bureau, tout au sommet du donjon central. Il avait passé une épaisse robe de chambre en laine sur son pyjama de soie car le feu dans la cheminée avait bien du mal à réchauffer les vieilles pierres ancestrales ; l’automne s’était bien installé dans cette région du monde où même l’été était froid.

    Sur le bois précieux du bureau recouvert d’un épais sous-main de cuir patiné, il avait étalé la carte montrant l’emplacement du futur champ pétrolifère qu’il avait décidé d’exploiter, en toute illégalité pour le moment car il était situé dans une réserve marine. Mais il avait bon espoir.

    PDG d’une compagnie pétrolière de taille moyenne, il avait néanmoins réussi à en maximiser la rentabilité grâce à un flair infaillible pour trouver les bons gisements, ce qui lui avait valu autant de respect que de jalousie de la part de ses concurrents.

    Quant à ses actionnaires, ils lui faisaient une confiance totale depuis longtemps.

    Lever de très importants fonds pour ce nouvel investissement ne poserait aucun problème. Son armée d’avocats et ses alliances multiples étaient déjà engagées sur ce champ de bataille énergétique et financier, luttant âprement.

    Encore que, cette fois, ce ne serait pas aussi simple. Les Russes et les Chinois étaient eux aussi sur l’affaire, et il faudrait jouer serré pour les coiffer au poteau et s’accaparer le plus gros morceau, soit un gisement de plus de deux cents milliards de barils.

    Néanmoins, ce projet étant le point d’orgue de sa carrière, il y accordait personnellement toute son attention. Ainsi, il ressassait pour la énième fois le plan d’exploitation récemment mis au point dans le plus grand secret par son équipe d’ingénieurs, traquant la moindre erreur qui aurait pu se glisser dans les calculs pourtant faits et refaits maintes fois.

    Mais on ne parvenait pas au sommet de sa profession sans une rigueur quasiment maniaque.

    Deux cents milliards de barils…

    Le chiffre était colossal, et les bénéfices seraient en rapport.

    Le couronnement d’une vie dédiée au pétrole.

    Le vieillard s’offrit l’un de ses rares sourires, qu’il ne réservait qu’à lui-même d’ailleurs.

    C’est alors qu’il entendit un bruit étrange derrière lui.

    Intrigué, il se leva lentement de son fauteuil et s’approcha de la haute fenêtre s’ouvrant dans le mur orienté à l’Ouest, pour l’heure isolée derrière de grandes tentures pourpres afin de maintenir la chaleur dans la pièce.

    Le bruit recommença, une sorte de grincement, comme si quelqu’un cherchait à en forcer l’entrée.

    C’était impossible, la pièce était située à plus de vingt mètres de hauteur et le mur extérieur était totalement lisse.

    Personne ne peut passer par là ! pensa le vieil homme en un éclair.

    Christopher Neil recula lentement vers la porte sans quitter la fenêtre des yeux.

    C’est alors que l’incroyable se produisit : la tenture commença à bouger ; quelqu’un tentait d’entrer !

    Il se détourna promptement, marchant rapidement vers la porte du bureau, son instinct lui hurlant de fuir. Mais tout à sa hâte, il se prit un pied dans l’épais tapis et chuta lourdement au sol. Une onde de douleur parcouru son vieux corps, mais il n’en tint aucun compte : il devait sortir de là ! Il rampa vers la porte, distante de cinq mètres, incapable de se relever mais mû par une énergie décuplée par la panique.

    Un souffle glacé envahit soudain la pièce.

    Il se figea.

    Ce qui était entré était juste derrière lui.

    Une terreur ancestrale primale le submergea alors totalement.

    Tétanisé, incapable du moindre mouvement, Christopher Neil sentit la Chose s’approcher de lui. Il aurait voulu s’enfoncer dans le sol, disparaitre, il aurait tout donné, toute sa fortune, son pouvoir, tout ce qu’il possédait, juste pour avoir la possibilité d’arrêter ça. Mais c’était impossible. Alors, il tenta de nier la réalité, mit les mains sur sa tête, enfouit son visage dans l’épais tapis tout en fermant les yeux de toutes ses forces.

    Mais ce qui était dans la pièce avec lui en avait décidé autrement.

    Il sentit une force glacée le retourner lentement sur le dos.

    Il crispa ses poings sur son visage pour ne pas voir, mais ses bras furent violemment écartés par cette même force et ses paupières s’ouvrirent malgré lui.

    Alors, il vit.

    Et sa raison défaillit.

    Tout à sa folie, il ne sentit même pas l’intense douleur qui avait envahi son torse.

    Et son coeur s’arrêta.

    CHAPITRE 1

    Quelque part sur la côte nord de l’Écosse...

    Tom Neil gara le vieux Land Rover Defender directement sur la lande bordant la grève. Il descendit du véhicule et s’avança sur la plage.

    Un vent puissant venant du large glissait sur l’océan gris, chassant devant lui un mur de nuages bas et sombres qui ne tarderaient pas à atteindre le rivage. La brume de mer serait là d’ici moins d’une demiheure et noierait tout d’un voile opaque, rendant toute progression parmi les rochers difficile, voire dangereuse.

    Tom enfila une épaisse veste de toile beige et s’éloigna parallèlement à l’océan, grimpant la pente ardue qui menait au sommet de la falaise, slalomant entre les gros rochers noirs qu’on aurait dit déposés là par quelque géant de la mythologie écossaise.

    Arrivé au sommet, il continua sa progression vers l’Est, vacillant sous les bourrasques de vent.

    L’air frais chargé d’embruns lui faisait du bien ; il le respirait à plein poumon, se gorgeant avec avidité de cette humidité froide après tous ces mois passés dans le désert.

    Un an en Afghanistan. Un an de combats incessants au sein des Forces Spéciales britanniques.

    Et puis la tragédie.

    Il n’était rentré que depuis deux mois, et sa vie avait continué de basculer.

    Sa femme l’avait quitté, emmenant avec elle treize années de vie commune.

    Elle n’avait pas supporté ses états d’âme, ni les nuits pleines de cauchemars et de larmes. Elle avait besoin d’une épaule solide et de sexe après tous ces mois de séparation, qu’il n’avait pu lui donner à son retour. Le stress post-traumatique et son état semi-dépressif perdurant, elle était allée chercher du réconfort ailleurs.

    Il ne lui en voulait pas. Il n’était plus l’homme qu’elle avait aimé. Lui-même ne se reconnaissait plus.

    La nature humaine est ainsi faite que l’alchimie entre les êtres, mêmes proches, peut basculer en un clin d’oeil.

    Le cri aigu d’un pétrel le tira de ses réflexions. Il leva la tête, observa quelques instants l’oiseau qui jouait avec les courants aériens, puis s’arrêta et tourna les yeux vers l’océan.

    Une déchirure dans la couche nuageuse laissa un bref instant le soleil iriser les flots sombres d’une bande miroitante, vite absorbée par la nébulosité ambiante. Plus au large, le banc de nuages se rapprochait rapidement ; la brume serait bientôt là.

    Tom repris sa marche le long de la falaise, en même temps que le fil de ses pensées.

    Il allait donner sa démission de l’armée. Vingt années d’aventures sur lesquelles il allait tirer un trait, mais c’était salutaire, il le savait au fond de lui. Il était grand temps qu’il change de vie.

    Mais pour faire quoi ? Il avait besoin de temps pour y penser.

    Et de solitude aussi.

    Maintenant, il allait en avoir…

    Les premiers bancs de brume touchèrent la grève, en contrebas, avant d’escalader la falaise, poussés par le vent. La lande fut noyée en quelques minutes et Tom n’y vit plus à cinq mètres. Il sortit son smartphone de sa poche, activa le GPS et rebroussa chemin.

    Moins d’un quart d’heure plus tard, il remontait dans son 4x4.

    Il resta là un moment, à regarder le brouillard, l’esprit vide. Puis il démarra le moteur et fit lentement demi-tour. Il reprit la piste par où il était venu, puis s’engagea sur la petite route qui menait au village où il avait loué une maison.

    Mais il n’avait pas envie de rentrer chez lui, de s’enfermer entre quatre murs pour ruminer à nouveau de sombres pensées.

    Tom bifurqua à l’embranchement suivant et mit le cap vers l’intérieur des terres, vers les Highlands qu’il aimait tant. Se plonger en pleine nature pour quelques jours lui ferait le plus grand bien. Il avait tout son matériel de couchage à l’arrière, ainsi qu’un peu de nourriture et d’eau, cela suffirait.

    Il roula plusieurs heures sur de petites routes sinueuses qui tournaient entre les montagnes verdoyantes et les lacs.

    Le brouillard avait disparu, de sorte qu’il pouvait admirer le paysage grandiose qui s’offrait à lui. Ces immenses collines rocheuses, recouvertes en partie d’une herbe rase et d’humus, creusées de vallées sans fin, l’avaient toujours fasciné. Il s’en dégageait une beauté brute, comme si le temps n’avait pas eu de prise sur cette géologie primaire, d’un autre âge.

    Au bout d’un moment, il aperçut le chemin qu’il cherchait et s’y engagea, laissant le 4x4 suivre machinalement la piste qui serpentait à flanc de colline vers le coeur des Highlands.

    Il roula ainsi une bonne heure sans rencontrer âme qui vive, s’arrêtant pour ouvrir et refermer sporadiquement quelques barrières à moutons qui entravaient le chemin.

    Puis il gara le Land Rover en bord de piste, enfila un petit sac à dos contenant quelques affaires et entreprit de suivre un étroit sentier escarpé qui filait à flanc de montagne vers un sommet distant de plusieurs kilomètres.

    Tom marchait à grands pas, habitué à se déplacer à pied rapidement sur de longues distances. Sauf que cette fois, c’était sans un lourd sac à dos et son arme.

    Arrivé à mi-pente, il fit halte, non par fatigue, mais pour observer le paysage qui s’offrait à lui dans une splendeur sauvage. Il s’appuya contre un gros rocher gris à moitié couvert de mousse et resta là, un moment, à admirer le panorama. Sur sa droite, une autre vallée s’ouvrait sur des kilomètres, un petit ruisseau serpentant au milieu. Un camaïeu de vert s’étendait jusqu’à l’horizon, où les montagnes semblaient se succéder sans fin.

    Tom s’apprêtait à repartir lorsqu’un bruit insolite le mit soudain en alerte. Il reconnut bientôt le son caractéristique d’un rotor d’hélicoptère. Sur le qui-vive, il sut que c’était pour lui avant même d’apercevoir l’appareil qui volait bas entre les montagnes. Celui-ci, un gros Chinook militaires à deux rotors, remontait la vallée dans sa direction. Son premier réflexe fut de se cacher, puis il pensa à son téléphone portable et sut que cela ne servirait à rien.

    Et en effet, il fut vite repéré. L’appareil bifurqua soudain droit sur lui, ralentit et se posa cent mètres devant, en travers de la piste, ses roues de part et d’autre du chemin reposant dans l’herbe rase. La portière latérale s’ouvrit, un jeune sous-officier sauta à terre et se dirigea vers lui en le saluant.

    – Commander Neil, j’ai ordre de vous ramener au château de Dunnar !

    – Pourquoi ça, sergent ?

    – Je ne sais pas, monsieur.

    – Et d’où vient cet ordre ?

    – Du cabinet du ministre, monsieur.

    – Vous voulez dire…du cabinet du ministre de la Défense ?

    – Non monsieur, du ministre de l’Intérieur. Nous avons reçu l’ordre de vous retrouver le plus vite possible et de vous amener à Dunnar, c’est tout ce que je sais, monsieur !

    Tom suivit le jeune soldat, grimpa dans l’hélico à sa suite et s’assit à ses côtés sur l’un des bancs de toile. Le militaire lui passa un casque radio qu’il coiffa promptement.

    – Mon Land Rover est en bas !

    – Oui, on l’a vu en venant. On enverra quelqu’un vous le ramener chez vous, ne vous inquiétez pas !

    Le Chinook décolla dans un hurlement de turbines, prit de la hauteur, s’inclina et plongea dans la vallée en accélérant.

    Tom regardait le paysage défiler par le hublot.

    Le château de Dunnar… Le fief de son grand- père.

    Cela faisait des années qu’il ne l’avait pas vu.

    En fait, il avait plus ou moins coupé les ponts avec ce vieux salopard.

    Qu’est- ce qu’il pouvait bien lui vouloir de si urgent ?

    Et le ministre de l’Intérieur… Qu’est- ce qu’il venait faire là-dedans ?

    Tom laissa ses pensées vagabonder un moment, puis ferma les yeux et vida son esprit tandis que le lourd hélicoptère fonçait vers le sud de l’Écosse.

    CHAPITRE 2

    Tanzanie, réserve du Serengueti…

    Diana Kane conduisait le Toyota Land Cruiser un peu trop vite sur la piste défoncée, mais l’heure était à l’urgence.

    À ses côtés, Mizengo, l’un des responsables des Park Rangers qu’elle avait embarqué pour cette mission, ne disait rien mais n’en menait pas large ; elle le voyait à sa façon de se cramponner à la poignée de maintien.

    À l’arrière, sur les banquettes latérales, quatre autres Rangers se tenaient comme ils pouvaient tandis que le 4x4 rebondissait sur les ornières à plus de quatre-vingts kilomètres-heure.

    La piste filait en direction de l’ouest, où un groupe de braconniers avait été repéré, et chaque minute de gagnée sauverait des animaux.

    Le braconnage, l’un des pires fléaux d’Afrique pour la préservation animale, sévissait un peu partout, notamment dans les parcs nationaux, où la faune était abondante.

    Les éléphants et les rhinocéros étaient principalement visés pour leurs défenses et cornes, mais également les girafes depuis qu’une légende laissait croire que leur chair pouvait guérir du VIH.

    Sur le marché asiatique perdurait une autre légende, celle que l’ivoire avait des vertus aphrodisiaques, de sorte qu’il valait plus cher que l’or, ce qui générait un énorme trafic qui, à terme, finirait par éradiquer totalement ces deux espèces.

    Les gouvernements africains avaient pris la mesure du drame et organisé la riposte en armant les gardes des parcs et en les faisant entrainer par d’anciens militaires, principalement américains et australiens.

    Diana faisait partie de ces soldats ayant trouvé un nouveau sens à leur vie.

    À sa démobilisation cinq ans auparavant, de retour d’Irak, elle n’avait plus trouvé sa place dans la société bien normalisée américaine. Ancienne Park Ranger dans le Montana, sa terre d’origine, elle ne se voyait plus s’occuper de hordes de touristes, débarquées par bus entiers sur les parkings des Visitor Centers, qu’il fallait canaliser et surveiller comme le lait sur le feu. Elle avait besoin de sa dose d’adrénaline, mais surtout, d’une cause plus noble.

    Un soir de déprime dans son petit appartement de Great Falls, en surfant sur le Net, elle avait découvert que plusieurs ONG avaient été récemment montées par d’anciens vétérans afin de proposer leur expérience militaire à des pays africains pour la protection animalière.

    Le lendemain, Diana donnait sa démission et prenait un vol pour Dar es Salam.

    – Diana, on approche du lac, lança Mizengo en désignant une large déclivité devant eux.

    – OK, je me gare.

    Diana ralentit la course du Toyota et parqua celui-ci à l’ombre d’un grand acacia dont les longues branches s’étendaient à quelques mètres au-dessus du sol.

    Aussitôt, les Rangers sortirent et s’étirèrent.

    Diana, pendant ce temps, attacha ses longs cheveux auburn en une savante queue de cheval afin qu’ils ne se prennent pas dans les branches, puis grimpa sur le toit du Land Cruiser et commença à escalader l’arbre, une paire de jumelle autour du cou. Mizengo la suivit bientôt. Ils montèrent le plus haut possible et s’allongèrent chacun sur une branche parallèle, presque à l’horizontale.

    – Tu vois quelque chose ?

    Diana observait la plaine en contrebas, s’étendant sur des kilomètres jusqu’au lac Victoria, qui occupait tout l’horizon à l’ouest.

    – Non, rien.

    Diana tendit les jumelles à Mizengo, qui observa à son tour. Au bout d’un moment, celui-ci murmura d’une voix blanche.

    – Je les vois. Deux éléphants. Des mères avec leurs petits. Ils viennent vers nous.

    – Ce n’est pas normal.

    – Non, le vent souffle vers elles, elles ont dû nous sentir, et pourtant…

    – Les braco… Ils les rabattent ! ça veut dire que… Merde !

    Diana arracha les jumelles des mains de Mizengo et se retourna à cent quatre-vingts degrés pour regarder derrière eux. Et ce qu’elle vit lui coupa le souffle.

    – On s’est jetés dans la gueule du loup !

    – Combien ?

    – J’en compte une dizaine ! Ils sont à environ deux kilomètres et ils approchent.

    – On n’est pas assez nombreux, faut qu’on se tire d’ici ! lança Mizengo.

    Joignant le geste à la parole, il redescendit de l’arbre à toute vitesse.

    Diana le suivit plus lentement et, lorsqu’elle arriva au sol, Mizengo avait déjà mis ses compagnons au courant de la situation.

    Ils avaient l’air effrayés et Diana ne pouvait leur en vouloir. Les braconniers étaient sans pitié envers les Park Rangers et n’hésitaient pas à les tuer. Ils avaient encore récemment perdu trois de leurs camarades, abattus d’une rafale de Kalachnikov en plein buste. Elle les avait découverts une semaine plus tard – enfin, ce que les vautours et les hyènes avaient laissé – pas très loin d’ici.

    Le crime était resté impuni, comme la plupart du temps, et en cet instant, elle se dit qu’il pourrait bien s’agir de la bande qui les avaient assassinés. Auquel cas, elle et ses hommes pourraient peut-être remédier à cette injustice. À condition qu’ils veuillent bien rester.

    – Si on s’en va, ils vont tuer deux mères et leurs petits, dit calmement Diana en les fixant l’un après l’autre.

    – Vous avez tous une famille, moi pas. Si vous voulez partir, je comprendrai, poursuivit-elle.

    Mizengo regarda cette jeune femme qu’il avait appris à respecter, puis à aimer durant ces dernières années. Elle leur avait appris toutes ses connaissances militaires, n’épargnant pas sa peine. Grande, belle, mince et musclée, avec ce visage hiératique que surmontait cette tignasse rousse, elle avait tout d’une walkyrie, même le courage. Elle était prête à affronter seule plus de dix braconniers armés de kalachnikov pour sauver les éléphants.

    – J’ai mon Falkor, je peux y arriver seule, ajouta-t-elle, en désignant l’énorme fusil d’assaut semi-automatique de calibre 300 Winchester Magnum qui trônait dans son rack à l’arrière du Land Cruiser, sorte d’AR-15 dopé aux hormones, capable d’atteindre son but à plus de mille mètres. Et elle avait maintes fois démontré, aux entrainements, qu’elle savait diablement bien s’en servir.

    C’était à lui, Mizengo, chef des Rangers, de prendre la décision.

    Il regarda ses compagnons un à un. Malgré la peur, il lut la détermination dans leurs regards, la vaillance de Diana les ayant galvanisés.

    – On reste, dit-il. Je suppose que tu as un plan ?

    – Oui, j’ai un plan, répliqua-t-elle en allant récupérer son arme dans le véhicule, bientôt imitée par les autres Rangers. Eux n’avaient que des AR-15 basiques, mais néanmoins précis et efficaces jusqu’à trois cents mètres.

    – Voilà ce qu’on va faire… expliqua Diana.

    Mizengo et trois autres Rangers étaient partis à la rencontre des éléphants afin de les faire dévier de leur chemin qui les amenait droit sur le gros de la troupe des braconniers. Ils étaient chassés par des rabatteurs, mais probablement beaucoup moins nombreux, peut-être deux ou trois hommes seulement. Ils allaient s’en occuper, Diana n’était pas trop inquiète ; elle les avait bien formés et Mizengo avait la tête sur les épaules.

    Quant à elle, elle était restée près du Land Cruiser avec le cinquième Ranger, Jakaya, un jeune homme pas très sûr de lui mais consciencieux. Il était chargé de surveiller les alentours pendant qu’elle serait à l’affût dans l’arbre.

    Elle s’était allongée sur une grosse branche horizontale qui s’étendait à quatre mètres du sol dans la direction des assaillants et avait calé le fût de son arme sur un gros noeud dans le bois. Elle observait, au travers de sa puissante lunette Schmitt et Bunder, la progression de la dizaine de braconniers qui n’étaient maintenant plus qu’à mille deux cents mètres d’après son télémètre. Elle ajusta le réglage pour une distance de mille mètres et reprit sa veille.

    Diana était une guerrière dans l’âme. Tuer pour protéger sa vie ou celle des autres ne lui posait pas de problème insurmontable. Bien sûr, s’il y avait une autre solution, elle l’envisageait. Mais dans ce cas précis, ce serait difficile. Leurs adversaires étaient en surnombre, équipés d’armes de guerre, et n’hésiteraient pas, eux, à s’en servir pour tuer.

    C’est eux ou nous, sans compter les éléphants, pensa Diana. Et puis, l’idée de venger ses compagnons lui caressait aussi l’esprit.

    Lorsque l’homme de tête arriva à mille mètres, elle centra le réticule sur sa poitrine et pressa doucement la détente. La détonation roula dans la plaine comme un coup de tonnerre tandis que l’homme visé s’écroulait en arrière comme sous l’effet d’un coup de poing géant. Ses camarades, qui n’avaient pas encore entendu le bruit du tir à vitesse tri-sonique, distance oblige, eurent un instant de flottement que Diana mit à profit. Elle plaça son réticule sur l’homme le plus proche et pressa à nouveau la détente. Le système d’amortissement du recul faisait bien son effet et, malgré sa puissance, l’arme permettait un tir rapide sans désaxer. Diana eut le temps d’abattre un troisième homme avant que les autres ne comprennent ce qui se passait et se jettent au sol.

    Une rafale de kalachnikov passa loin au-dessus de l’arbre, mais Diana avait eu le temps de repérer la lueur du coup.

    Elle plaça la croix de sa lunette dessus et tira une quatrième fois. Elle vit un corps allongé faire un soubresaut et se figer sur le côté.

    Quatre, souffla-t-elle.

    Les six autres s’étaient éparpillés à plat ventre dans les hautes herbes. Ils avaient dû repérer sa position, surtout le Land Cruiser, mais elle était largement hors de portée de leurs armes. L’un des hommes tira quand même quelques coups mais les balles s’abattirent à plus de cinquante mètres devant elle.

    Cette fois, elle n’avait pas vu la lueur de départ, mais les herbes bouger. Elle centra le réticule dessus et fit feu. Le Falkor vibra entre ses mains. Elle vit dans sa lunette l’homme se soulever du sol et retomber en bougeant. Il était touché. Elle décida de ne pas l’achever, les cris d’un blessé étant toujours démoralisants pour ses camarades.

    Diana balaya la zone du regard, mais les herbes ne bougeaient plus. Apparemment, les cinq autres avaient compris que remuer, c’était mourir. Elle inséra un nouveau chargeur et reprit sa veille.

    C’était maintenant un jeu de patience jusqu’à la nuit. À moins que l’odeur du sang n’attire des prédateurs, auquel cas, cela risquait d’être intéressant. Plusieurs braconniers avaient été tués par des lions ces derniers mois, et ce n’était que justice.

    Une heure passa avant que les premiers rugissements ne se fassent entendre. Diana sortit ses jumelles, dont le champ de vision plus large permettait de couvrir plus de terrain que sa lunette. Il lui fallut un petit moment avant de les repérer. Ils venaient par l’arrière, à contrevent ; trois lions et une lionne. Elle reposa ses jumelles et reprit sa position de tir. Elle allait devoir jouer serré pour protéger les félins car les braconniers ne se laisseraient pas dévorer sans se défendre.

    Les lions se séparèrent, continuant d’avancer en ligne de front. Deux cents mètres devant eux, les herbes commencèrent à bouger. Les braconniers devenaient nerveux et tentaient de jeter un oeil en arrière pour les repérer.

    Diana se retint de tirer, elle ne voulait pas effrayer les lions. Pas encore.

    Les prédateurs avaient repéré leurs proies et accélérèrent, passant au trot, puis à la course. Un premier braconnier, n’y tenant plus, se redressa, prêt à tirer. Diana l’abattit d’une balle dans le dos. La détonation n’eut aucun effet sur les félins. Excités par l’odeur du sang, la chasse était lancée et ils ne ralentirent même pas, fonçant sur leurs proies à plus quatre-vingts kilomètres- heure.

    Diana tua un dernier braconnier qui s’était retourné pour faire feu. Les autres eurent un instant d’hésitation qui leur fut fatal ; les lions se jetèrent sur eux.

    Fascinée, Diana observa les malheureux se faire dévorer vivants en quelques instants.

    Perché sur le toit du Toyota, Jakaya surveillait les lions à la jumelle. En principe, il ne risquait rien, les félins étaient à un kilomètre de là et bien occupés à festoyer. Mais d’autres pourraient venir, attirés par l’odeur du sang ; aussi, il avait pour consigne de rester sur ses gardes et de se réfugier à l’intérieur du 4x4 en cas de danger.

    Diana était partie à la recherche de Mizengo et ses acolytes depuis une bonne demi-heure, et il attendait leur retour avec impatience tout en espérant que les choses se soient bien passées pour eux. Son soulagement fut grand lorsqu’il aperçut enfin leurs silhouettes se découper dans les hautes herbes.

    Apparemment, ils ramenaient aussi deux prisonniers. Il descendit du Land Cruiser et se dirigea vers eux.

    – On en a tué un et ceux-là se sont rendus, expliqua Mizengo en désignant les deux hommes qui marchaient tête baissée, les bras attachés dans le dos par des colliers rilsan.

    – Et les éléphants, demanda Jakaya ?

    – Ils sont sains et saufs, répondit Mizengo avec un large sourire.

    Ils grimpèrent à bord du 4x4, les prisonniers assis à même le sol.

    Diana démarra, puis lança le véhicule en hors-piste, directement dans la savane.

    – On va aller récupérer leur camion, lança-t-elle. Ils l’ont laissé à l’est près d’un point d’eau.

    Il leur fallu trente minutes pour parvenir à l’endroit indiqué par les braconniers survivants. Diana gara le Land Cruiser à côté d’un vieux Mercedes 1924 LS au capot arrondi et à la peinture totalement défraichie, parqué à l’ombre d’un acacia.

    Le point d’eau était situé à une centaine de mètres en contrebas et un troupeau de gnous s’y abreuvait.

    Diana s’apprêtait à descendre lorsque l’un des prisonniers l’apostropha.

    – Ne lui enlevez pas le sac, il fait des choses avec ses yeux.

    – Quoi ? lança Diana en se retournant vers lui. Qu’est- ce que tu as dit ?

    Mais le braconnier avait de nouveau baissé la tête et était retourné à son mutisme.

    Diana et Mizengo descendirent et s’approchèrent du gros véhicule.

    – De quoi il parlait ? souffla-t-elle tout en sortant doucement le Glock neuf millimètres de son étui de cuisse, une arme qui ne la quittait jamais.

    Mizengo fit un geste d’impuissance et s’approcha de la cabine. Diana se mit en position de tir deux mètres plus loin et Mizengo ouvrit brusquement la portière.

    Personne.

    Un bruit résonna soudain dans la benne. Mizengo arma son AR-15 et braqua son arme vers la ridelle. Ils firent un large tour vers l’arrière, prêts à tirer. Diana jeta un oeil en premier et eut un instant d’hésitation en découvrant l’occupant de la benne. Elle rengaina son arme et sauta à bord.

    Un jeune garçon blanc était assis au sol, des fers passés à ses chevilles reliées à une chaine attachée à un anneau soudé dans le plancher. Ses bras étaient également liés dans le dos. Il portait un sac de jute sur la tête.

    – Bonjour, je suis Park Ranger. Je suis là pour t’aider, n’aie pas peur.

    Elle retira doucement le sac pour découvrir un étrange visage pâle dont les yeux clairs la fixaient d’une façon hypnotique.

    Le garçon était un albinos d’environ sept ou huit ans.

    – Salut, moi c’est Diana ! fit-elle en s’agenouillant devant lui. Et toi ?

    – Élam, répondit le garçon d’une voix chaude et profonde.

    – Qu’est- ce que tu fais là, Élam ?

    – Ma famille croit que je suis un enfant sorcier, alors ils m’ont vendu.

    – Oh…je suis désolée !

    – Ne le sois pas. Ils ont raison.

    CHAPITRE 3

    Cimetière de Dean, Édimbourg…

    Hormis le discours du pasteur, l’enterrement de Christopher Neil se fit dans un silence quasi sépulcral. Personne de ses proches pour lui offrir une oraison funèbre, comme si sa mort était un soulagement pour tous ceux le connaissant.

    Un vent froid charriant des odeurs d’humus et de feuilles en décomposition glissait dans les allées sinistres du cimetière et s’infiltrait sous les vêtements.

    Tom Neil remonta machinalement le col de son manteau tout en observant le cercueil de son grand-père, porté par quatre hommes, entrer dans le caveau familial. Sa soeur Deborah suivit, mais pas lui. Elle lui jeta un regard froid et réprobateur avant de pénétrer dans la crypte.

    Autour, s’agglutinait une foule silencieuse, vêtue comme il le fallait de noir, principalement des hommes et des femmes de la direction de la compagnie pétrolière, quelques notables de la ville aussi ; en tout, une petite trentaine de personnes.

    Tom n’avait jamais été proche de son grand père. Et comment aurait-il pu l’être ?

    S’il existait des hommes sans âme sur

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