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Gestes d'Auguste
Gestes d'Auguste
Gestes d'Auguste
Livre électronique236 pages3 heures

Gestes d'Auguste

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À propos de ce livre électronique

Auguste, premier enfant du couple Marie-Joseph mène une vie qui, selon lui, a été façonnée par son père. Au cours de son existence il a rendez-vous avec l'avenir. Son objectif : vite terminer ses études afin d'assurer à ses frères et sœurs une meilleure éducation et surtout offrir à ses parents une mort heureuse. Malheureusement, il échoue dans les bras de sa voisine qui devient son épouse et fonde sa propre famille alors qu'il est en route pour le Baccalauréat. Il gagne l'amour et perd son diplôme.

 

Devenu père d'enfants, Auguste réussira-t-il à assurer à ses parents une mort – comme on le dit là-bas - avec voitures, fleurs et couronne ? À la mort de sa mère, il devient l'écuyer de son père et décide de quitter l'eau d'ici pour l'accompagner dans l'au-delà.

 

« Ce que vous allez découvrir dans ce roman c'est l'alternance du singulatif et du répétitif : le narrateur-conteur relatera une fois ce qui s'est passé plusieurs fois ; il racontera surtout plusieurs fois ce qui s'est passé une seule fois. Ressassements, réitérations, redites, répétitions littéraires traduisent l'obsession du romancier ; bien plus, ils renvoient aux structures littéraires de la tradition orale africaine. D'ailleurs, le narrateur rappelle sans cesse qu'il n'est pas romancier mais conteur ».

 

Extrait de la préface
Dr. Luc Fotsing (PhD)

LangueFrançais
Date de sortie28 mars 2022
ISBN9781005197209
Gestes d'Auguste
Auteur

Jean Pierre Makosso

Sorti de l'école traditionnelle et familiale, scolarisé à l'école des blancs, Jean Pierre Makosso, dans son parcours pragmatique a pu écouter et observer. Tout au long de sa scolarité, il a bien vite affiché son goût pour le verbe. Il choisit de s'affirmer dans le théâtre, suivant une formation à Pointe-Noire, sa ville natale et cela pendant des années. Il fit ses premières apparitions dans de grandes oeuvres théâtrales où il occupa toujours des rôles principaux puis dirigea, après sa première tournée en Europe, un groupe de jeunes comédiens amateurs. Évoluant dans la Compagnie de théatre Punta-Negra, il effectua plusieurs voyages hors de son pays d'origine, le Congo-Brazzaville. Après sa dernière tournée mondiale en 1996, il ouvrit à Pointe-Noire un centre culturel francophone dénommé Espace Océan, centre de formation et d'encadrement des enfants et des jeunes à la tradition congolaise et à la culture franco-africaine qu'il dirigea jusqu'à l'an 2000. En 2001, il finit par élire résidence en Colombie britannique au Canada, plus précisement dans la ville de Gibsons sur la côte du soleil à quarante minutes de Vancouver.

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    Aperçu du livre

    Gestes d'Auguste - Jean Pierre Makosso

    Jean Pierre Makosso

    Gestes d’Auguste

    par Muän Mâ M’kayi

    First published by Editions Dedicaces 2022

    Copyright © 2022 by Jean Pierre Makosso

    DU MÊME AUTEUR :

    La voix du conteur

    Le cri du triangle

    Œuvres humaines

    Human Works

    Il était une fois…ce jour-là

    Le monde est un champ de proverbes

    Zoe

    Francophonîquement vôtre

    Rien

    Assis sur les genoux de ma mère

    Tous les droits sont réservés. Aucune partie de cette publication ne peut être reproduite, stockée ou transmise sous quelque forme ou par quelque moyen que ce soit, électronique, mécanique, photocopie, enregistrement, numérisation ou autre sans l’autorisation écrite de l’éditeur. Il est illégal de copier ce livre, de l’afficher sur un site Web ou de le distribuer par tout autre moyen sans permission.

    Publié par les Editions Dédicaces.

    Copyright © Jean Pierre Makosso, 2022

    First edition

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    Publisher Logo

    À Auguste Makosso Mavoungou, mon frère aîné,

    Qui dort entre mon père et ma mère,

    Choyé par mes sœurs Bernadette et Brigitte Makosso

    Là-bas à Yanga !

    À ses enfants : Carmen, Arise, Anouchka, Harchevick, Arvin

    Et à leurs mères : Marie-Jeanne et Annie

    La terre tourne… et nous…

    Auguste et moi… on raconte !

    Muän Ma M’kayi

    Rien, 2018

    Contents

    Préface

    1. Le Geste Auguste du Seigneur

    2. Le Geste Auguste du Sauveur

    3. Le geste auguste du semeur

    4. Le geste auguste du souffleur

    5. Geste auguste du conteur

    Dernier geste du premier

    Préface

    Que vous suggère le titre de ce livre ? À quoi vous attendez-vous en ouvrant ce dernier ? À découvrir les hauts faits d’un personnage historique ou légendaire qui s’appellerait Auguste ? Ne vous méprenez pas sur les procédés, les motifs et les techniques de l’ironie et de déroute au cœur de l’œuvre littéraire de Jean Pierre Makosso Muän Ma M’kayi. Contrairement à ce que pourrait laisser présager la titrologie, l’auteur déplace l’ossature du roman de l’extraordinaire des personnages, des situations ou de l’intrigue, vers le banal : on a ici affaire à un roman populaire.

    Makosso fait du banal, de l’anodin, de la nuit, du mystère, du folklore, de la rue, de la place du marché, de la mer, de la plage, des couleurs, des sons, des odeurs, du malheur, les éléments essentiels de l’esthétique littéraire des Gestes d’Auguste. Il ne s’agit pourtant pas d’un roman populiste ou misérabiliste, non ! L’auteur ne prend pas le pli des clichés souvent entretenus au sujet des littératures africaines. Au contraire, « avec [c]e roman populaire : le banal n’est plus banal. Le roman populaire procède ainsi à une héroïcisation du quelconque » (Jean-Claude Vareille, 1994 : 243). Le banal n’est ni le vide ni le chaos, il est le quotidien, le vital, l’essentiel inéluctable. Dans cette perspective, chaque personnage du roman de Makosso, quelle que soit son insignifiance, est susceptible, vous allez le constater, de passer au premier plan et de devenir le principe organisateur de l’action. De même, chaque motif littéraire exploré est susceptible de donner au texte entier toute sa signification. La logique interne des récits c’est la recherche, de la part de chaque héros, des valeurs considérées comme authentiques, que cette recherche soit faite dans la tradition judéo chrétienne, dans la tradition islamique, ou dans les traditions culturelles africaines.

    Ce que vous allez découvrir dans ce roman c’est l’alternance du singulatif et du répétitif : le narrateur-conteur relatera une fois ce qui s’est passé plusieurs fois ; il racontera surtout plusieurs fois ce qui s’est passé une seule fois. Ressassements, réitérations, redites, répétitions littéraires traduisent l’obsession du romancier ; bien plus, ils renvoient aux structures littéraires de la tradition orale africaine. D’ailleurs, le narrateur rappelle sans cesse qu’il n’est pas romancier mais conteur.

    L’enjeu principal du livre que vous allez explorer repose sur le fait que face à un leadership étatique en crise, caractérisé en général par sa démission de son rôle régalien, Makosso a compris la nécessité de repenser la ville de Pointe-Noire en particulier, le Congo en général, en redonnant l’importance au peuple d’en-bas (Jean-Marc Ela, 1998) afin de poser les bases d’une véritable anthropologie de la quotidienneté congolaise. Les espaces de la banalité évoqués plus haut (la plage, la rue, la place du marché par exemple) deviennent de nouveaux sites où la culture (dans le sens dynamique du terme) s’énonce. C’est dans ces espaces d’une richesse insoupçonnée que se conçoivent des stratégies de mobilisation populaire et des processus du changement social. C’est que les laissés-pour-compte résistent à la tentation de la résignation et de la fatalité. Confrontés à l’abandon et à l’adversité, ils mobilisent tout leur potentiel de créativité et d’inventivité pour tenter sinon de vivre, du moins de survivre. Tel est le sens de ces propos du narrateur qui semblent bien résumer le récit : « Et même quand c’est dur, tout est pur et il y a toujours une issue ».

    Dr. Luc Fotsing (PhD)

    Littératures et Cultures Francophones

    1

    Le Geste Auguste du Seigneur

    Assis dans le présent, je cherche dans le passé le souvenir de moi-même, je fouille dans ma pensée, qui suis-je ?

    Muän Ma M’kayi, Francophonîquement vôtre

    Je m’appelle Muana Tossu et je vais dire une chose. Je veux dire, je vais te dire une chose. Je ne sais pas si je vais réussir à juste dire une chose. Je suis un conteur qui commence toujours par une bonne chose et termine par une meilleure en passant par une mauvaise.

    Disons donc que je vais en dire une – encore faut-il que je m’en tienne à une, ce qui serait facile si je réussissais à éviter tous les tournants et tous les crochets et me contenter juste de la chose dont j’ai bien envie de parler… la chose utile.

    Mais même là je suis certain que j’irai dans les moindres fragments et, comme chaque fragment en appelle un autre, alors j’aurai devant moi un millier de fragments et chaque fragment aimerait savoir comment il a échoué là à mes pieds et je me mettrai donc à inventer tout un gros tas de choses pour lui expliquer la plus importante ; du coup j’aurai un amas de choses futiles à raconter. Parti d’une, je me retrouverai sous un tas d’immondices… c’est-à-dire de choses inutiles. Et ça, c’est de la fiction… mais moi, ce n’est pas la fiction qui m’intéresse.

    Ce qui m’intéresse c’est une chose : le Geste auguste du Seigneur et ça, ce n’est pas de la fiction.

    Alors…

    Traversons !

    Jusqu’où ?

    Au temps.

    * * *

    Je fais une traversée céleste.

    Terrestre plutôt, pas angélique, non, ce serait trop ambitieux, trop rêveur…

    Tellurique oui, dans le temps.

    En route vers le passé, je vais à la recherche d’Auguste.

    Je n’ai aucun indice, aucun signe, aucune trace. Aucune race. Aucune place.

    À part sa face dans mon encéphale comme un bout de pain qu’on garde dans son armoire.

    Un petit trésor sinon, rien d’autre.

    Mais j’y vais quand-même. Le temps m’emmène quand bien même je me perds. Oui, j’y vais tout de même à la recherche de quelque chose qui apparaîtrait là-bas, au loin ! Dans ce petit coin qu’on ignore encore. Je la trouverai cette chose, je ne prendrai aucune pause, je la trouverai bien cette chose-là ! Aussi minime, aussi féminine ou masculine, aussi traditionnelle soit-elle, je la trouverai, cette cause là-bas, au loin, dans ce petit coin où j’y discerne déjà quelque chose. Une petite dose de savoir. Aussi dérisoire soit-elle : un souvenir, une énigme, une devinette, une fable, une citation, une récitation, un vers, une rime, une accolade, une nouvelle, un conte…

    Un soupir… le soupir matinal d’Auguste !

    Ah ! Le temps m’emporte.

    Et j’y trouve quelque chose que je peux bien manipuler.

    Magicien de la bonne sorcellerie et qui sait parler aux fantômes et aux ancêtres.

    Allez exécution ! Sortez de vos tombes !

    Qui vous a dit d’aller sous ces gouffres ? Il vient d’arriver. Souffle.

    Celui qui ressuscite les morts. Celui qui est :

    Le chemin. La vérité. La vie.

    Réveillez-vous ! Et que sonne la trompette. Ne chantez plus :

    « Il est né le divin enfant

    Jour de gloire aujourd’hui sur terre… »

    Mais plutôt :

    « Il est parmi nous l’adulte des cieux

    Celui qui fait danser nos morts… »

    Voilà, souffle la chanson ; ne t’étouffe plus, ne souffre plus…

    Bien au contraire, respire !

    Je suis ici à présent…l’embranchement. Le centre de toutes choses. Je suis à la recherche d’une étincelle…d’une étreinte qui ferait jaillir une flamme qui me permettrait enfin de ressusciter l’illustre Auguste.

    Un mouvement.

    Tiens, juste un geste ! Je suis à la recherche d’un geste auguste.

    Alors à ce moment-là je réussirai peut-être à lui faire dire n’importe…

    Quoi ?

    Que dira-t-il ?

    Que sais-je !

    Dira-t-il ce que je sais ou saura-t-il dire ce que je dis ? Que Dieu n’existe pas par exemple… ça c’est ce que je sais.

    Mais Auguste me dira que Dieu existe réellement et qu’il ne vit plus au Congo qu’il a quitté depuis belle lurette à cause de…

    De quoi ?

    Qu’importe, Dieu vit à l’étranger comme tout le monde.

    Et il n’est pas noir.

    Quel mensonge !

    Renier sa race humaine à cause…

    Qu’importe !

    Tout bêtement parce que le Noir est pauvre, ce n’est pas moi qui le dis, c’est Jésus.

    « Heureux les pauvres car ils verront Dieu »

    Et Jésus lui-même, ne l’est-il pas ?

    « Il n’a même pas un endroit où poser sa tête. Vagabond sans domicile fixe ! »

    Quelqu’un l’a dit avant moi.

    N’est-ce pas la pauvreté ça ?

    Dieu son père n’a rien d’autre à part le ciel, la terre et tout ce qu’il y a entre les deux. Il n’a pas un compte en Suisse, il n’a pas de dollars américains ou canadiens, il ne contrôle pas l’hydrocarbure, l’or et l’argent lui appartiennent mais il faut crever à en mourir pour l’avoir, cet or, ça ne tombe pas du ciel, ceux qui peuvent l’extraire ne sont que des enfants sans force puisqu’ils ont faim et Jésus, son fils, ne nourrit plus la multitude.

    Même quand le monde vit une crise sanitaire et alimentaire, il ne débourse rien.

    « Laissez venir à moi les petits enfants ! »

    Crève, et attends le jugement dernier.

    Ou encore :

    « Je te le dis, ce soir même, tu seras avec moi au paradis ! »

    Mais avant tout, crève !

    Pauvres d’esprit. Quel montage !

    Mais j’ai faim…

    Et les autres… où iront-ils ?

    Eh bien, en enfer…

    Et que ça ne rêve pas mais que ça crève parce qu’il n’y a plus de place pour tout le monde.

    Mensonge.

    Nous irons tous au paradis grâce à Jésus, ou nous irons tous en enfer à cause de Satan.

    La terre chauffe. Elle crève aussi, alors, nous crèverons tous à moins que les enfants n’arrivent à temps pour la sauver.

    Dieu n’est pas corrompu.

    Pauvre Jésus ! Ayant compris qu’Il ne pouvait pas être prophète chez lui, Il s’est exilé, Lui aussi.

    Doux Jésus, pauvre en argent, riche d’essence !

    Oui tout ça, je sais qu’Auguste me le dira. Il raconte bien Auguste. Il raconte bien parce qu’il est sage et quiconque est sage partage.

    Riche d’intelligence aussi Auguste !

    Et quand il se met à partager, même moi je ne peux pas le taire, vénérable Auguste quand il partage nul ne peut l’arrêter.

    Il me dira aussi qu’il est riche, qu’il a un fleuve, un lac, une mer, un beau jardin et une grande forêt qui s’étendent jusqu’à l’horizon, éclairés par la lune, les étoiles et le soleil et que ses parents cultivent et moissonnent leur nourriture.

    Tout ce qu’il mange est biologique et délicieux, puisque préparé au feu de bois et toutes les créatures animales et végétales qui vivent dans sa forêt et dans son jardin sont tous de très bons artistes et de très bons musiciens qui jouent toutes sortes de musique jour et nuit : du croassement d’un crapaud au barrissement d’un éléphant, de la plainte du moineau au chant du rossignol puis de la poésie du colibri jusqu’à la verve du perroquet. Ses voisins et eux vivent d’une amitié sincère et d’un amour réciproque. Ils sont tous connectés à la vie, au soleil, à l’eau, à l’air, aux champs, aux animaux, à leurs ancêtres et à leurs familles.

    À un Dieu aussi.

    * * *

    Céleste Auguste !

    Je le rencontre dans un passé très récent. Un passé qui date d’hier. Je suis tombé par hasard comme ça sur une photo en noir et blanc. Cette photo est tombée du livre que je tenais dans mes mains : ces fruits si doux de l’arbre à pain de l’écrivain Tchicaya U Tam’si. Elle est tombée comme ça, sans crier gare, comme une frêle fourmi dans mon bol de riz à la sauce de noix de palme.

    J’admire la photo. Le ciel est noir. La nature est noire : palmiers cocotiers touffus, aux palmes s’entremêlant et « tohu-bohuant ». Auguste aussi, vois-tu comme ici, sa mère : Grande, Forte et Noire. Même l’immense mer derrière lui vois-tu ? Noir le reflet des nuages gris dans la vaste bleu marine. Noire aussi cette fine pluie aux gouttelettes argentées qui tombe sur cette boue noire.

    Auguste a un sourire blanc. Éclatant. Un vrai diamant. Grâce à ses dents. Blanches. Et puis sa dent en or. Scintillante. Sinon tout est noir.

    À part Carmen…

    Amen !

    Pure enfance !

    Carmen, c’est sa première née. Comme lui. Aînée. Qui vient de naître.

    Bon, voilà, je fais un bond en avant, au lieu de suivre le cours de l’histoire comme un poisson docile suivant le cours du fleuve ! Je vous avais bien prévenu, je suis un conteur qui commence par une chose et termine par une autre en passant par deux choses.

    Bon, revoilà, on fera le rebond plus tard pour reprendre le cours de l’histoire. Ce n’est qu’un faux bond de toute manière, un faux plongeon, on y reviendra très vite d’ailleurs sans que vous ne vous rendiez compte qu’il y a eu un faux bond.

    Carmen !

    Amen ! Elle vient juste de naître.

    Tel père, telle fille. Il lui donne le nom de sa mère. Sa mère jubile. Mais pas à l’annonce de la grossesse.

    À la naissance de Carmen, elle sourit et danse des deux pieds.

    À l’annonce de la grossesse, elle s’éclate.

    De colère.

    Amère.

    Elle s’en prend à Auguste qui broute l’herbe là où il est attaché.

    – Ton nez ne pouvait-il pas aller fouiner ailleurs, mouton ?

    Non !

    – Est-ce un mouton aussi, mon père ?

    La réaction de sa mère est imminente. Elle tranche :

    – Ton père à moi fut un inconnu jusqu’à ce que lui et son père, au mien, se présentèrent. Et nous nous envolâmes libres et bénis. T’en prendre à la voisine d’à côté sans le consentement de son géniteur, mon fils, en voilà un crime. Un complot.

    – Amère ma mère, soupire Auguste, crime contre qui ?

    – Moi, ton père, tes frères, tes sœurs, ta voisine Yama, ses parents…Trahison. Tu n’es qu’un petit ruminant délinquant…

    Et Auguste prophétise :

    – Ne me juge point mère, regarde autour de toi tous ces enfants que tu as eue avec père, il y a parmi eux des fous, des prisonniers, des voleurs, y en a qui erreront sur les plages désertes.

    Auguste s’affale sanglote puis se lève.

    Il attend.

    Il laisse passer le temps et le temps lui dit que ce ne fut ni un crime ni un complot.

    Ce fut sa première-née…

    Carmen !

    Amen !

    – Céleste, dit son père, mon fils tu viens d’accomplir le geste auguste du Seigneur.

    Auguste prend Yama et quitte sa mère son père.

    Il exécute un deuxième geste. Un garçon lui est né.

    Il lui donne le nom de son père.

    On est proche de la multiplication. De la renaissance aussi. Loin du complot.

    Jamais deux sans trois.

    Puis, une fille.

    À qui il donne le nom de Arise

    Arise en anglais qui veut dire : Lève-toi, debout, sois prête !

    Ce fut sa famille.

    Pas un crime.

    La croissance.

    La loi de la multiplication.

    L’élévation

    Auguste est prêt pour l’ascension. Il se tient bien debout. Il prend de la hauteur.

    * * *

    Il est comme son père, Auguste ! Il multiplie. Et il sourit dans le silence. Son père aussi.

    « Ah moi, saint Joseph» murmure-t-il si souvent, ce père d’Auguste !

    C’est ainsi qu’il se fait appeler lui-même.

    « Saint Joseph, pur et sans faute comme le silence. »

    Toujours silencieux. Auguste aussi. Méditatifs, les deux. Comme une science occulte leur silence, ils y vouent un grand culte. Fidèles. Deux bons croyants du même sang. Ce sang qui coula tout le long de la croix jusqu’au mont Golgotha. Complices de leur silence et du contact immédiat de leurs deux vies. Ils sont très proches et il n’existe aucune défiance entre les deux. Bien au contraire, une sorte de confiance dans leur mode de vie. Occupés à écouter leur propre silence qu’ils vénèrent. Ils écoutent quand les autres se taisent. Les yeux clos, ils observent à travers la prunelle de leurs yeux. On croirait de l’indifférence. Prunelle de couleur pleine de vie. Il faut

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