“Les Italiens ne voyagent pas. Ils émigrent”, chantait Paolo Conte. Durant l’hiver 1954, “le plus froid du XXe siècle”, Elena Polsinelli quitte sa petite ville natale du Latium pour suivre son mari, Cesare Benacquista, avec leurs quatre enfants, en France, à Vitry-sur-Seine, banlieue populaire du Val-de-Marne et bastion communiste. À 60 ans, après trente ans de fiction, Tonino, leur fils, nous livre, dans Porca Miseria, un récit du réel. “Pour la première et sûrement la dernière fois, je raconte une histoire vraie, la mienne et celle de mes parents, l’histoire d’une émigration familiale. Avant de explique-t-il. Seul membre de la fratrie né en France, le jeune Tonino grandit ballotté entre le mal du pays de sa mère, les rêves brisés de ses frère et sœurs et un père ouvrier taiseux qui noie cette “” dans l’alcool. Pourtant, dans son “cabinet de curiosités” on ne sombre jamais dans le pathos, ni le misérabilisme. Il revient avec justesse et fantaisie sur ses souvenirs d’enfance, sur son parcours d’autodidacte, sa conquête de la langue française et de l’écriture qui l’ont sauvé des affres du réel. L’enfant qui s’ennuyait à l’école, s’est réfugié très tôt dans son imaginaire, nourri du cinéma néoréaliste italien, de films, BD et de contre-culture américaine, mais aussi de musique rock, de Cavanna, Gotlib et Goscinny, plutôt que de Flaubert, Maupassant ou Balzac. Il s’interroge avec une gouaille jouissive sur le chemin atypique d’un enfant issu d’une famille d’illettrés, et qui a échappé à la reproduction sociale pour devenir un éminent romancier et scénariste, obéissant, peut être, à l’ultimatum de ses professeurs d’école:
“L’AMÉRIQUE A NOURRI MON IMAGINAIRE”
Feb 23, 2022
9 minutes
Vous lisez un aperçu, inscrivez-vous pour lire la suite.
Démarrez vos 30 jours gratuits