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Le goût de l'autre
Le goût de l'autre
Le goût de l'autre
Livre électronique243 pages1 heure

Le goût de l'autre

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À propos de ce livre électronique

Un roman aux frontières des mondes, des genres, de l’être. À les traverser ou à rester sur sa rive.
Le destin croisé de deux femmes, entre Paris et Tokyo, où chacune explore les limites, les forces de l’amour. De la passion au deuil. Du désir à l’amnésie, en passant par l’attente, l’absence, un trop plein de présence, jusqu’à atteindre ce seuil où pas même l’imaginaire aurait pu leur murmurer.
La douceur ou la douleur du réel. Avoir aimé à perdre, à retrouver, sans en savoir plus.
LangueFrançais
Date de sortie3 oct. 2017
ISBN9782312055312
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    Le goût de l'autre - Michèle Gautard

    cover.jpg

    Le goût de l’autre

    Michèle Gautard

    Le goût de l’autre

    LES ÉDITIONS DU NET

    126, rue du Landy 93400 St Ouen

    © Les Éditions du Net, 2017

    ISBN : 978-2-312-05531-2

    À Joachim,

    « Dans quelques années, quand je t’aurai oubliée,

    et que d’autres histoires comme celle-là,

    par la force encore de l’habitude, arriveront encore,

    je me souviendrai de toi comme de l’oubli de l’amour même.

    Je penserai à cette histoire comme à l’horreur de l’oubli. »

    Marguerite Duras

    De la fenêtre de sa chambre d’hôtel Jochen Böhme regardait tomber la pluie

    Les gouttes glissaient le long de la paroi de verre

    Il pensait à la scène qu’il allait tourner

    À quelle distance du personnage poser sa caméra

    Arrêt sur image

    Cette fois il la tenait

    Gros plan

    Les traits de l’homme s’y prêtaient

    Ses films s’ancraient dans la réalité du monde

    Véracité

    Il s’y efforçait

    Ligne de conduite aux contours sinueux

    Altérée par endroits

    Il savait subtilement gommer les frontières

    Hors champ

    Tout pouvait se passer

    Chaque film prenait sa source dans la même émulsion

    Intarissable matière

    Les mystères de l’univers

    L’icône qu’il était devenu arpentait le globe

    Sans relâche

    Ce qu’il en ramenait n’avait rien de nouveau

    Mais sa lecture suffisait pour satisfaire son public

    Sa voix se faisait l’écho des gouffres les plus profonds

    Son imaginaire donnait du relief aux plaines

    Son souffle révélait les hauteurs vertigineuses de l’Himalaya

    Être à la page de la vie terrestre

    Il fallait suivre le courant de la fonte des glaces

    Le cycle infernal des ouragans

    Des tremblements de terre

    Et autres tsunamis

    Montrer avec la même force

    La transhumance humaine

    Sur les hauts plateaux

    Les anciens devaient toujours aller plus haut

    L’homme moderne

    Mercantile

    Repoussait sans cesse leurs limites

    Nostalgie des temps passés

    Les coutumes s’ancraient dans les cœurs

    Même les plus altérés

    De bouche en bouche l’histoire humaine se tissait

    L’image tentait de la fossiliser

    La vie résistait

    Les observatoires poussaient sur les montagnes les plus sacrées

    Il filmait

    Évolution technologique sur fond de décor ethnique

    Il engrangeait

    La flûte de pan criait du haut des montagnes sa souffrance

    Il enregistrait

    En Europe

    On aimait bien cette musique surannée

    L’âme des anciens crevait les écrans du prime time

    Auguste nature

    Il fallait la préserver

    On venait tout juste de le comprendre

    Il leur offrait une tribune

    Difficile de raconter leur histoire en si peu de temps

    Le sien était compté

    L’antenne n’attendait pas

    Il fallait mettre en boîte

    45’ de matière

    Pas plus

    Qui pourrait entendre leurs cris derrière ce verre opaque

    Ils n’avaient pas fait tout ce chemin

    Mené toutes ces luttes

    Pour pareille mascarade

    Lui aussi avait fait un long voyage pour parvenir jusqu’à eux

    Les premiers se mettaient à parler

    Les autres suivaient

    Il était satisfait

    Flux incessant

    Les images dégoulinaient des téléviseurs

    Les siennes s’y mêlaient

    À cette heure de grande écoute

    On ne reculait devant rien

    Lui aussi avait ses guerres tribales

    Ses libres échanges faisaient bonne audience

    On était à l’autre bout du monde

    En plein repas

    Par moment

    Les bouches s’arrêtaient de mastiquer

    Les verres restaient en apesanteur

    Foyers percale

    Satin

    Ou polyamide

    Tous écoutaient la parole du chef de clan

    Champ contre champ

    La science reprenait la place de son temps

    Les assiettes et les verres se vidaient

    L’indien des hauts plateaux

    Il s’en servirait plus tard

    Avant le dessert

    Tenir en haleine

    Il y avait tant d’autres images devant lesquelles ils pourraient finir leur repas

    Le temps lui avait donné gain de cause

    Il avait peu à peu trouvé son public

    Chaque semaine il s’invitait à leur table

    À présent qu’il les tenait

    Ne jamais décevoir

    La flamme de son regard était devenue un label

    Battements de cils

    Sourire

    À peine esquissé

    La fossette marchait à tous les coups

    Ne pas en abuser

    Elle lui servait dans les moments difficiles

    Filmer

    Sans jamais s’arrêter

    Les pauses étaient des failles

    Le public s’y engouffrait

    Une image passait

    D’instinct il la suivait

    S’entichait de nouveaux visages

    La réponse à leurs rêves

    À leur imaginaire

    Leur somnifère

    Pour sortir de l’ordinaire

    L’autel du prime time n’épargnait personne

    Depuis la nuit des temps les temples s’érigeaient

    Les icônes se succédaient

    Les rituels se substituaient

    Les gloires se diluaient

    Ceux qui perduraient gagnaient quelques siècles

    Parfois un ou deux millénaires

    Les foules aimaient les corps qui s’exposaient pour elles

    Vies brisées au sommet d’une gloire illusoire

    Tous rêvaient d’éternité

    *****

    La pluie continuait de tomber

    Jochen s’accrochait à l’image de celui qu’il allait filmer

    L’homme devait parler

    Son témoignage

    Capital

    Le convaincre lui avait demandé grande énergie

    Tout ce temps

    Ne pas l’anéantir pour un effet de style

    Être à l’écoute

    Une fraction de seconde et l’instant de vérité échappait

    S’évaporait

    Laissant une infime trace de buée sur la pellicule

    Brise d’une parole zéphire

    Murmurée

    Peut-être même jamais prononcée

    La buée devenait larme

    Non

    Ce n’était pas de la fiction

    Gouttes de pluie déferlaient sur la vitre

    L’une d’elles

    Un peu plus grosse

    S’arrêta à hauteur de regard

    Elle glissa lentement le long de la paroi de verre

    S’étira

    Se dédoubla

    Il hésita

    Il choisit de suivre la plus petite

    Dans cette infime matière il cherchait à entrevoir le reflet d’un nouveau plan

    Une fraction de seconde

    Il détourna le regard

    Une autre goutte arriva à vive allure

    Absorbant celles qu’il venait de suivre

    Une odeur de parfum envahit soudainement la pièce

    Non

    Elle n’allait pas revenir

    Troubler une nouvelle fois son œuvre

    Violaine

    Ma Violaine

    Sa longue chevelure brune

    Ses yeux d’un vert céleste

    Iridescents

    Inhabituelle lueur

    Vertigineuses profondeurs

    Un court instant

    Ils s’étaient posés sur lui

    Ce temps avait suffi

    Ses lèvres terre de Sienne se dessinaient sur la vitre

    Violaine

    Une folle envie de t’embrasser

    De poser ma main sur tes joues poudrées

    Cet artifice me rassurait

    Tu étais comme les autres

    Que s’est-il passé ?

    Tes couleurs artificielles se sont peu à peu diluées dans les battements d’un cœur

    À finir par l’entendre

    Je ne suis pas fait pour ce genre de partition

    J’ai traversé volcans et autres ouragans

    Neiges polaires et déserts brûlants

    Toi

    Tu n’es rien en comparaison

    De toutes ces luttes

    Infime plaisir

    Dans ma vie d’homme

    Non

    Ne t’en va pas

    J’ai besoin de toi

    Ma Violaine

    Ma chimère

    Comme une encre blanche

    Tu effaces tout

    Un baume

    Une déchirure

    Singulière tissure

    Un état intérieur

    Où jamais je ne m’aventure

    Un reflet de ce que je ne suis pas

    Et que ta simple réalité me pousse à vouloir devenir lorsque je suis à tes côtés

    Fragment salvateur

    Dévastateur

    Il me faut t’oublier

    Mes contours n’ont pas d’au-delà

    Tu m’absorbes

    Tu me reconstitues

    Une entité qui me pulvérise

    Brise mes fondamentaux

    Moi qui croyais si bien me connaître

    Intérieur

    Grand trou noir

    Prêt à engloutir tout ce que j’ai bâti

    Emouvantes retrouvailles que furent pourtant ces instants de grâce passés auprès de cet inconnu qui portait mes traits

    À tes côtés

    Il s’épanouissait

    La peur de ne plus me retrouver

    Fuir

    Nos veines sont si friables

    Lorsque les sentiments

    Un besoin de sentir la terre ferme

    Avec toi

    Si aérienne

    À parfois me donner l’envie

    Peut-être une autre vie

    Je me ressaisis

    L’amour s’invente des royaumes

    Que seul l’imaginaire

    Par moments

    Une impression

    Avant toi

    Rien de tout cela

    Distance

    Ma vie reprend

    Peu à peu

    Elle t’efface

    Enfin je redeviens

    Mais mon corps se souvient

    Si la douleur trop aiguë

    Je laisse une autre femme me distraire

    Je t’y cherche à la lisière

    Seule mon œuvre

    À te faire disparaître

    Totalement

    Le rationnel redonne à l’homme le sens de sa gravitation

    La pellicule t’aspire

    Je t’ai rencontrée trop tard

    Un autre temps aurait peut-être

    Oui peut-être

    Paradoxale

    Mystérieuse

    La nature humaine nous rattrape

    Désir inopiné

    Venir te retrouver

    En toi j’oublie tous mes serments

    Ne plus jamais prendre le risque d’une seule

    Aussi différente soit-elle

    Toutes finissent par conduire au même point

    Celui qu’elles façonnent pour nous engloutir

    Chacune veut étirer l’instant

    Le transformer en son éternité

    Trouver l’issue

    Qui va nous rendre à nous-mêmes

    Solitude

    Parfois elle rend lâche

    Gagner du temps

    Elles vont bien finir par céder

    Nous quitter

    Tous les bras se valent lorsque l’on s’arrête à l’entrée du cœur

    L’amour se grime dans les courbes du plaisir

    Volupté à recouvrer la foi

    Le temps des chairs traversées

    D’une femme l’autre

    À ériger nos défenses

    Leurs empreintes

    Un bandeau sur nos yeux

    Nous croyons parfois en reconnaître

    Nous avons déjà eu cette sensation

    Ou quelque chose qui lui ressemble

    Rester à la surface

    Il y a tant de femmes prêtes à se donner pour d’autres

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