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Accompagnement de formation individualisé en milieu de travail: Récits de coachs, mentors et compagnons
Accompagnement de formation individualisé en milieu de travail: Récits de coachs, mentors et compagnons
Accompagnement de formation individualisé en milieu de travail: Récits de coachs, mentors et compagnons
Livre électronique355 pages4 heures

Accompagnement de formation individualisé en milieu de travail: Récits de coachs, mentors et compagnons

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À propos de ce livre électronique

La formation individualisée gagne en popularité. Dans les milieux de travail, il n’est plus rare de voir des employés d’expérience agir comme coach, mentor ou compagnon auprès de leurs pairs. Cette popularité grandissante de la formation individualisée en milieu de travail suscite plusieurs questionnements. En quoi l’accompagnement individualisé est-il pertinent ? Peut-on prétendre que l’accompagnement participe à humaniser la formation ? Comment, de façon concrète, une personne devient-elle coach ou mentor au sein de son organisation ? Par quels moyens développe-t-elle sa compétence ? Quelles stratégies emploie-t­-elle ? Les formateurs-­accompagnateurs offrent-ils une formation de qualité ? Agissent-ils tous de façon éthique ?

Pour répondre à ces questions, les auteures s’appuient sur divers tra­vaux de recherche et présentent des études de cas réalisées auprès de formateurs-­accompagnateurs dans différents domaines tels que la santé, le textile, l’aéronautique et la finance. L’ouvrage comporte neuf récits de personnes décrivant leur parcours général, leur expérience d’accompagnement et leurs manières de faire lors de cette expérience. Il permet au lecteur, en lui révélant les véritables aléas du travail de formateur-­accompagnateur, de comprendre le contexte de formation dans lequel agit le mentor ainsi que ses réalités concrètes.

Destiné aux praticiens et aux gestionnaires de la formation, le présent ouvrage expose les motifs expliquant l’intérêt actuel pour l’accompagnement individualisé en milieu de travail. Il décrit la pratique de cet accompagnement ainsi que ses principaux enjeux. En plus d’offrir des pistes de réflexion, il propose des conseils pour agir de façon responsable et réfléchie.
LangueFrançais
Date de sortie24 mai 2017
ISBN9782760546851
Accompagnement de formation individualisé en milieu de travail: Récits de coachs, mentors et compagnons

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    Aperçu du livre

    Accompagnement de formation individualisé en milieu de travail - Brigitte Voyer

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    Introduction

    Dans les milieux de travail, la fonction de formation connaît un essor important. Devenir formateur ou formatrice n’est plus, comme autrefois, une profession méconnue ni une fonction exercée dans l’ombre. Grâce au développement des politiques publiques et des législations vouées à la formation continue dans plusieurs sociétés, les organisations de travail sont encouragées à développer les compétences de leurs employés et à contribuer activement à l’insertion en emploi. Même si plusieurs estiment que la formation tout au long de la vie n’est pas encore parvenue à se déployer dans son plein potentiel, il reste que dans un nombre grandissant d’organisations, les projets de formation sont vus comme essentiels pour stimuler l’innovation et la performance au travail.

    Pour permettre le développement de la main-d’œuvre, l’insertion en emploi et la rétention du personnel, les organisations ne comptent pas uniquement sur la contribution de spécialistes de la formation ni seulement sur l’expertise externe. Les organisations s’appuient également sur leurs employés, auxquels ils confient la transmission du savoir. Choisis selon différents critères, notamment l’expérience, la compétence et l’aptitude à la communication, ceux-ci ont alors la responsabilité de former leurs pairs. Nombreux sont les employeurs, probablement influencés par des pratiques de formation très en vogue, qui font appel à la formation individualisée. Pour diverses raisons, ils privilégient ce type d’approche à la formation de groupe. Ils demandent ainsi à des employés d’accompagner d’autres employés, et d’agir à titre d’accompagnateurs, de coachs, de mentors ou de compagnons, pour les aider à développer les compétences requises. Aujourd’hui, quelles que soient les appellations utilisées, on ne peut que constater la grande popularité de ces pratiques d’accompagnement.

    Face à cette popularité grandissante, certains manifestent un véritable intérêt pour le caractère proprement individualisé de la formation, alors que d’autres expriment des inquiétudes ou soulèvent des questionnements. De notre côté, le constat d’une grande valorisation de la formation individualisée exerce une fascination et suscite, surtout, une volonté de mieux comprendre ce qui se profile derrière l’intérêt grandissant des milieux de travail pour cette pratique.

    Cet ouvrage reflète notre volonté d’observer plus attentivement l’accompagnement entre pairs, démarche qui consiste pour une personne d’expérience à aider un collègue de travail moins expérimenté ou un nouvel employé à acquérir ou à développer des compétences.

    L’ouvrage s’adresse à deux types de lecteurs: les praticiens de la formation d’une part, et les gestionnaires de formation et autres spécialistes du domaine d’autre part. Tout d’abord, il veut intéresser les formateurs – les novices tout autant que les plus expérimentés – qui souhaitent former leurs pairs sous le mode de l’accompagnement individualisé en milieu de travail. Notre propre expérience dans le domaine de la formation, d’abord sur le terrain, et ensuite, à titre de formatrices, de formateurs et de chercheures en milieu universitaire, nous a permis d’observer que plusieurs personnes sont à la recherche de modèles. Aussi, nous avons constaté que les formateurs aiment écouter le récit de situations concrètes au sujet d’expériences d’accompagnement, comme le coaching ou le compagnonnage. Nous l’avons constaté dans les cours que nous donnons à l’université et lors de nos participations à des congrès professionnels. Nous pouvons dire que de nombreuses personnes s’intéressent aux descriptions de pratique. Constatant ainsi que les praticiens de la formation cherchent à s’inspirer de personnes d’expérience et qu’ils sont souvent avides d’exemples concrets, nous avons eu l’idée d’offrir des témoignages de formateurs-accompagnateurs qui ont bien voulu partager avec nous leur expérience.

    Ainsi, cet ouvrage est d’abord présenté dans l’esprit d’offrir à la première catégorie de lecteurs visés – les praticiens de la formation – une lecture relatant des expériences concrètes pour qu’ils puissent s’identifier, nous l’espérons, au travail de formateur-accompagnateur. En offrant des récits d’expérience, nous souhaitions en quelque sorte stimuler la fonction imaginative des praticiens. Nous estimons, en effet, qu’il s’agit d’une fonction essentielle qui ne devrait pas être sous-estimée comme appui au développement professionnel. En effet, les récits d’expérience aident généralement les personnes à se projeter dans les diverses possibilités offertes par leur travail et participent au développement de leur identité professionnelle.

    L’ouvrage est destiné, en second lieu, à des gestionnaires de la formation et à d’autres professionnels spécialisés dans la conception de projets de formation. Dans les organisations de travail, les personnes qui démarrent habituellement les projets de formation ou qui en assurent la planification et la conception doivent soutenir les employés qui ont pour rôle d’accompagner les individus dans leur apprentissage. Les gestionnaires et les professionnels de la formation ont une responsabilité particulièrement cruciale puisqu’ils sont en position de proximité avec les dirigeants d’organisation en plus de jouer, bien souvent, le rôle de coordonnateur des différentes actions dans la réalisation des projets de formation. Véritables garants de la démarche d’un projet, ils se doivent de connaître comment se vit l’expérience des formateurs-accompagnateurs sur le terrain. Ce livre a donc été pensé pour eux également, sachant qu’ils préparent, forment, encadrent, évaluent, etc., les praticiens.

    Précisons d’entrée de jeu que notre intention ne consiste pas tant à offrir des récits de pratiques d’accompagnement exemplaires qui feraient office de modèles à suivre. Notre volonté consiste plutôt à chercher à révéler la pratique d’accompagnement de formation du point de vue de celui qui l’exerce. Cet ouvrage ne cherche donc pas à faire des prescriptions qui seraient basées sur un modèle de référence, mais plutôt à présenter des exemples et à montrer la diversité des possibilités offertes par l’accompagnement en milieu de travail. Ainsi, nous souhaitons que nos lecteurs constatent qu’il existe différentes manières de faire, chacune comportant ses avantages, ses contraintes et ses limites. Cette lecture pourrait également leur faire découvrir que, malgré le caractère de souplesse de l’accompagnement individualisé, les employés qui accompagnent leurs pairs n’agissent pas dans l’improvisation. Ils verront – nous le souhaitons – la complexité et la richesse de la formation individualisée et l’importance de s’approprier avec patience et réflexion ce rôle d’accompagnateur qui consiste à aider les autres à développer et à déployer leurs compétences au travail.

    Ce livre comprend quatre parties. La première partie jette les bases de ce travail en présentant des concepts propres à la pratique d’accompagnement individualisé, les enjeux liés à cette pratique, un bref exposé de l’évolution de cette approche au fil du temps et des motifs qui contribuent à la populariser aujourd’hui, ainsi que les principes de base qui devraient guider les acteurs impliqués dans ce type d’accompagnement. La deuxième partie décrit la conception de base des auteures et les principaux repères ayant servi à la démarche d’enquête. La troisième partie, quant à elle, est vouée à la présentation de récits d’expérience de neuf formateurs-accompagnateurs, chacun suivi d’une histoire qui illustre une situation vécue avec un apprenant. Chaque histoire est commentée par les auteures, qui mettent en lumière les aspects positifs de la pratique et ceux qui devraient être améliorés. Enfin, dans une quatrième partie, les auteures proposent, dans une perspective plus générale, les défis que peuvent rencontrer les formateurs-accompagnateurs dans leur pratique. Cette dernière partie complète les réflexions en exposant quelques défis qui se posent pour la pratique en milieu de travail et que nous formulons sous forme de conseils, conseils qui se veulent utiles sans être prescriptifs.

    CHAPITRE 1 /

    Définitions, principes et exigences

    Avant de prendre connaissance des récits des personnes qui ont partagé leur expérience d’accompagnement, vécue pour aider à former leurs pairs, il importe de chercher à saisir la nature de cette approche et d’exposer notre définition de l’accompagnement de formation individualisé. C’est ce que nous nous employons à faire dès la première section. À la suite de cette définition, nous verrons que l’accompagnement de formation individualisé se présente sous différentes formes, et que l’existence d’une panoplie de définitions préoccupe plusieurs auteurs intéressés à ce domaine (section 1.2). Sans que lui soit dressé un panorama complet des multiples appellations, le lecteur pourra être sensibilisé au problème sémantique qui se pose dès lors qu’il est question d’accompagnement. Dans les sections suivantes, nous jetons un bref regard sur l’évolution de la popularité de l’accompagnement individualisé, surtout dans le contexte du Québec, regard qui se tourne ensuite vers les motifs à la base de l’intérêt pour l’accompagnement individualisé dans le contexte actuel. En effet, dans les sections 1.3 à 1.5, nous posons les questions suivantes: comment expliquer l’intérêt actuel pour l’accompagnement individualisé? Comment expliquer qu’une telle attention pour la formation individualisée puisse traverser, non pas uniquement le monde des entreprises, mais également d’autres sphères de la société? Quel rôle joue l’État, par la voie politique et la voie législative, dans le développement de ce type d’accompagnement? De même, nous nous demandons: est-il possible que des préoccupations d’ordre social ou culturel puissent expliquer la popularité actuelle de l’accompagnement? Comment expliquer que plusieurs chercheurs s’inquiètent des orientations humanistes dont se réclament certaines approches d’accompagnement individualisé en milieu de travail, comme le coaching ou le mentorat? Leurs inquiétudes sont-elles justifiées? Sur quelles bases justifient-ils l’appel à la vigilance à l’égard de cette approche de formation de plus en plus employée dans les entreprises? Reconnaissant la pertinence de faire appel à une pratique d’accompagnement qui témoigne d’une position responsable et d’un acte réfléchi, nous présentons, après avoir indiqué les avantages et les inconvénients de l’accompagnement de formation individualisé (section 1.7), quelques-uns des principes qui nous apparaissent essentiels pour aider les accompagnateurs en milieu de travail à bien s’orienter dans leur rôle de formation auprès de leurs collègues (section 1.7).

    1.1 /L’accompagnement de formation individualisé: une définition

    Cet ouvrage est consacré à l’accompagnement de formation individualisé, considéré ici comme une démarche au sein de laquelle un formateur cherche à favoriser les apprentissages d’une personne en tenant compte de la singularité de ses besoins, de ses demandes et de son parcours, tout en s’ajustant aux spécificités de sa situation et à la dynamique de la relation.

    Ce qui distingue l’accompagnement de formation individualisé de la formation de groupe, c’est principalement que la démarche de l’accompagnateur est axée sur la situation particulière d’une personne. En effet, le formateur pratiquant dans un cadre conventionnel oriente ses interventions en s’appuyant sur des contenus de cours, généralement planifiés, et en visant une cible commune qui concerne l’ensemble des membres du groupe. Dans ce type de formation, une bonne part de l’attention du formateur est portée sur la dynamique de groupe (Beillerot et Solar, 2011) alors que le formateur-accompagnateur qui œuvre en mode individualisé destine ses actions à une situation individuelle en adaptant ses échanges et ses interactions selon ses particularités et l’évolution des apprentissages de la personne.

    Or, désigner ce type de démarche formative est plus complexe qu’il n’y paraît au premier abord. Aussi, il nous importe d’indiquer la pertinence des trois mots qui composent le terme «accompagnement de formation individualisé» privilégié dans cet ouvrage.

    Au sens premier, accompagner signifie «se joindre à quelqu’un pour aller où il va en même temps que lui» (Paul, 2002, p. 43). Alors, l’accompagnement consiste à suivre la personne dans une direction qui est donnée, en partie, par cette dernière. Dans cette perspective, l’amorce – ou le point de départ – de la démarche est signifiée par la personne qui veut apprendre. Même si le rôle du formateur consiste à accompagner, ce n’est pas lui qui a nécessairement le rôle central ni le rôle dominant. Si l’on se fie au sens premier, c’est la personne accompagnée qui joue le rôle prépondérant, puisque c’est elle, par son lien avec le projet ou la situation spécifique, qui donne la direction du projet.

    La notion d’accompagnement de formation individualisé comprend un deuxième terme, formation, qui précise la visée fondamentale recherchée. Cela est important, car le terme accompagnement est employé dans plusieurs sphères et peut viser différents buts. En effet, ne parle-t-on pas souvent de l’accompagnement des personnes en fin de vie, de l’accompagnement comme aide à la décision ou encore, de l’accompagnement pour le transport des personnes handicapées? Ainsi, nous précisons qu’il s’agit d’un accompagnement de formation pour souligner que la démarche, ici, vise à favoriser des apprentissages.

    Enfin, le terme accompagnement de formation dit individualisé est utilisé pour spécifier qu’il n’est pas destiné à un groupe. Dans ce livre, la personne qui accompagne veut individualiser sa formation au sens d’une démarche qui particularise, qui distingue, ou qui caractérise ses interventions en considérant la situation d’une personne avec des traits singuliers.

    Ce sont tous ces éléments qui nous ont amenées à définir l’accompagnement de formation individualisé, tel que nous l’avons fait au début de cette section, par son caractère englobant, sa visée de développement des apprentissages et la prise en compte de la singularité des besoins de la personne et, surtout, des spécificités de la situation concernée. Comme nous serons amenées à l’exposer plus amplement ultérieurement, ce type de démarche est désigné sous différentes appellations d’usage commun telles que: le compagnonnage, le coaching, le mentorat, l’entraînement à la tâche, le tutorat, le jumelage ou le parrainage.

    Pour encore mieux situer l’accompagnement de formation individualisé, précisons également ce qu’il n’est pas (encadré 1.1).

    ENCADRÉ 1.1 /Ce que n’est pas l’accompagnement de formation individualisé

    Individualisation ne signifie pas personnalisation de la formation, car il ne s’agit pas principalement de valoriser le statut de personne ou la nature proprement humaine de l’individu qui apprend ni de l’associer à sa qualité de personne morale en opposition à celle d’objet ou d’instrument. Le caractère individualisé de l’accompagnement cherche plutôt à souligner l’intention d’adapter l’intervention au caractère distinctif de la situation de la personne accompagnée pour apprendre.

    Individualisation de la formation n’est pas synonyme de différenciation pédagogique, un modèle de pratique qui reconnaît et valorise la diversité des profils et des besoins des apprenants adultes et suggère aux formateurs ou aux enseignants de varier les moyens pour favoriser l’apprentissage. Le formateur qui s’appuie sur ce modèle reconnaît la diversité des personnes au sein d’un groupe d’apprenants, ce qui l’incite à mobiliser les ressources, les moyens et les stratégies les plus appropriés pour aider ces personnes dans leurs apprentissages en les guidant vers la réussite de leur projet de formation (Prud’homme, 2007).

    Accompagner n’est pas seulement une méthode de formation, c’est une démarche au sens où c’est une manière de conduire et de faire progresser une personne vers un but. Alors qu’une méthode est une «façon de faire» qui concerne «l’ordre de réalisation concrète des activités» (Legendre, 2005, p. 877) bien circonscrites dans le temps, comme lorsqu’un formateur prépare une simulation ou lorsqu’il fait une présentation magistrale, une démarche est un processus plus continu.

    1.2 /L’accompagnement: du mentorat au compagnonnage, une grande diversité de formes

    Aujourd’hui, diverses appellations servent à désigner l’aide qu’une personne expérimentée peut apporter à une autre personne dans l’apprentissage d’un métier ou d’une profession. Les termes employés pour nommer un accompagnement de formation individualisé sont si nombreux qu’il devient difficile de s’y retrouver. L’un des termes les plus populaires lorsqu’il s’agit de parler d’accompagnement en situation de travail est celui de coaching. Mais, selon les milieux et les situations, les termes mentorat, compagnonnage ou parrainage sont également très populaires. Or, est-ce que chacune de ces appellations renvoie vraiment à une pratique particulière? L’intervention de coaching diffère-t-elle de celle pratiquée par un mentor? Le compagnonnage comporte-t-il ses particularités?

    Le grand dictionnaire terminologique (Office québécois de la langue française, 2012) met en garde ses lecteurs de ne pas confondre les différents termes souvent associés à l’accompagnement, à la formation individuelle ainsi qu’aux diverses fonctions de conseil. Un tour d’horizon de différentes définitions, employées dans des écrits en langues française et anglaise publiés au cours des dernières années, révèle bel et bien la grande variété du sens attribué à chacun des termes. D’ailleurs, de nombreux chercheurs font mention d’ambiguïtés, alors que certains (Frétigné et Trollat, 2009; Paul, 2002, 2003 et 2004) se sont consacrés à l’exercice des définitions, souhaitant ainsi mieux situer le véritable sens de chacune de ces appellations. Tout comme nous l’avons fait, ils ont répertorié plusieurs appellations en usage et ils ont tenté de déterminer la spécificité de chaque approche. Le tableau 1.1 fournit quelques définitions des termes mentorat, coaching, compagnonnage, tutorat et parrainage, repérées dans des études scientifiques, dans des guides pratiques ainsi que sur des sites d’organismes spécialisés. Bien qu’il ne s’agisse que d’un bref panorama, le tableau de définitions ci-dessous (1.1) permet de constater que nous sommes loin d’un consensus et que la dénomination à privilégier pour désigner ce type de formation n’est pas encore clairement établie.

    TABLEAU 1.1 /Quelques définitions

    L’imprécision au sujet du champ sémantique des pratiques d’accompagnement a été soulignée par bon nombre de chercheurs. C’est ainsi, que Haggard et al. (2010), des chercheurs experts du mentorat, ont examiné une quarantaine de définitions qui ont été utilisées dans des textes publiés depuis 1980. Ils ont montré que les études sur le mentorat couvrent une vaste étendue de situations qui ont souvent peu en commun. Ainsi, le mentorat peut désigner autant une relation entre pairs d’une même organisation que l’accompagnement d’un consultant externe ou l’assistance d’un superviseur. Voyant également qu’il s’agit de situations issues de cadres informels ou formels, ces chercheurs préconisent alors une utilisation plus précise du terme mentorat (Haggard et al., 2010). Face au constat de l’imprécision sémantique, leur position diffère de celle de Kram (1988), experte reconnue mondialement dans le domaine qui a publié de nombreux travaux de recherche sur le mentorat. Celle-ci adopte plutôt une conception très ouverte du mentorat puisqu’un mentor peut être un collègue de travail du protégé tout comme être en position d’autorité professionnelle à l’égard de son mentoré (Ragins et Kram, 2007, p. 5).

    Dans la même veine, plusieurs ouvrages publiés sur le coaching (Delivré, 2013; Hily-Lang et Gellman, 2002), terme certainement le plus utilisé actuellement en milieu de travail, s’emploient à répertorier les définitions. Plusieurs constatent que le terme est accolé à des idées très générales telles que le développement, la performance, la réussite ou le bien-être personnel. D’autres encore, tels que Fatien (2008), relèvent une grande variation des contextes et des motifs d’utilisation du coaching, soulignant les limites et les dangers portés par de telles ambiguïtés. De toute évidence, il n’y a pas plus consensus au sujet de la signification exacte du coaching qu’il n’y en a avec le terme mentorat.

    Une telle imprécision n’est évidemment pas exclusive aux approches d’accompagnement de formation individualisé. On observe la même situation depuis longtemps avec d’autres notions du domaine de la formation, comme avec le terme employabilité (Chené et Voyer, 2000) ou celui d’autoformation (Dumazedier, 2002). L’imprécision des notions permet notamment aux personnes d’anticiper et d’interpréter largement les situations, ce qui a pour effet de leur donner la possibilité d’y associer aisément des situations différentes les unes des autres. Mais devant tant d’imprécision, que doivent faire les praticiens? Lorsqu’ils accompagnent leurs pairs, comment peuvent-ils nommer ce qu’ils font? Sur quelles bases choisissent-ils un terme plutôt qu’un autre?

    Selon Delivré (2013), chacun devrait d’abord résister à la tentation de prétendre que sa propre définition fait autorité et plutôt s’employer à formuler le sens personnel qu’il accorde à sa propre pratique. Cela signifie que chaque coach, mentor ou compagnon devrait présenter clairement sa propre conception de sa pratique, formuler ses intentions de la même manière tout en s’assurant surtout de toujours limiter ses interventions à son champ d’expertise (Delivré, p. 30 et 46). Il pourrait également être sage pour le praticien de respecter la culture de son milieu en se référant à des termes en usage dans l’activité professionnelle ou le secteur d’activité de travail concerné.

    Pour ceux qui s’intéressent à l’accompagnement du point de vue de la recherche, le problème est de taille. Comment situer la spécificité d’une pratique sans terme adéquat? Quel terme privilégier pour identifier, décrire et éclairer des pratiques observées sur le terrain? Pour nous, en tant que chercheures soucieuses de la précision du vocabulaire, le problème reste entier. Si, de prime abord, il s’avérait tentant pour nous de situer la spécificité de chaque approche, de chercher à trouver le noyau particulier à chacun des termes et de délimiter précisément les caractéristiques distinctives de chacun, nous avons vite réalisé qu’il s’agissait d’un vaste chantier qui dépassait largement l’intention de l’ouvrage. D’autres avant nous s’y sont déjà employés. Dans cette perspective, Paul (2002) repère six démarches d’accompagnement en jugeant qu’il n’y a pas de forme unique, mais plutôt un portrait éclaté de démarches qui se présente comme une nébuleuse, comme cela est représenté dans la figure 1.1.

    FIGURE 1.1 /Nébuleuse de l’accompagnement

    Source: Paul, 2003.

    Frétigné et Trollat (2009) se sont également prêtés au jeu. Ils montrent que la plupart des écrits avancent des définitions de manière normative – qui désigne la nature de la pratique – ou uniquement de manière prescriptive – pour dicter les façons de faire – sans que les auteurs ne se préoccupent véritablement de la réalité des faits empiriquement observables.

    Il est possible que l’imprécision sémantique autour de l’accompagnement formatif incite les chercheurs intéressés à la pratique de formation entre pairs en milieu de travail à recourir à des notions encore plus englobantes. C’est ce que nous sommes portées à constater à la lumière des lectures d’études qui discutent de formation en milieu de travail (workplace training), comme le font Harris, Simons et Bone (2000), qui s’intéressent au travail des personnes qui, elles, se désignent comme coachs, facilitateurs ou mentors.

    C’est en tenant compte de cette situation d’ordre sémantique qu’il nous est apparu approprié de nous intéresser à différentes formes d’accompagnement de formation individualisé, en nous référant à un terme aussi englobant que celui d’accompagnement de formation individualisé, qui parvient à identifier un noyau commun à l’ensemble des approches. Dans ce livre, nous nous intéressons donc à des démarches de différentes formes – le mentorat, le coaching, le compagnonnage et le parrainage –, tout en reconnaissant que chacune des appellations choisies, par chaque personne ayant fait le récit de leur expérience n’est pas exempte d’ambiguïté. Devant cette imprécision dans l’utilisation des termes, que nous avons constatée autant sur le terrain que dans les écrits scientifiques, nous ne pouvons qu’adopter une posture distanciée et critique tout en faisant preuve d’ouverture.

    1.3 /La tendance à individualiser la formation: une réponse à un malaise social?

    Depuis au moins les trois dernières décennies, le rôle de coach, mentor, compagnon et autres types d’accompagnateur a fortement gagné en popularité. Dans des domaines aussi divers que le sport, l’éducation familiale, la santé ou le monde du travail, de plus en plus de personnes cherchent le soutien d’autrui pour les assister dans leur développement personnel ou professionnel ou encore, pour les aider à résoudre un problème concret.

    De l’avis de plusieurs, la demande d’accompagnement individualisé traduit un profond malaise social qui révèle un sentiment généralisé de solitude et un besoin de personnaliser les rapports humains. Dans une société à évolution rapide, où les problèmes sont de plus en plus complexes, les adultes auraient davantage besoin d’accompagnement pour affronter leur situation personnelle. Ce nouveau contexte social a été décrit dans plusieurs ouvrages publiés depuis le début des années 2000, avec des titres évocateurs: Une société du risque sur la voie d’une autre modernité (Beck, 2001), L’individu hypermoderne et

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