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L’abbé Délétoile: Et autres nouvelles
L’abbé Délétoile: Et autres nouvelles
L’abbé Délétoile: Et autres nouvelles
Livre électronique79 pages56 minutes

L’abbé Délétoile: Et autres nouvelles

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À propos de ce livre électronique

Le thème du voyeurisme se faufile entre les pages de ce recueil qui peut se lire comme une initiation teintée de fraîcheur et d’humour : une jeune narratrice effarée par les frasques de l’abbé Delétoile et troublée ailleurs d’avoir surpris des ébats amoureux. Ou bien encore son père, émoustillé comme un jeune homme d’avoir assisté, à son corps défendant, à une scène de vie très intime.

Quant au lecteur, son privilège est de pouvoir lorgner, par le trou de la serrure, ce que l’un des personnages de ce recueil définit quelque part comme : “ Le fabuleux spectacle de la vraie vie.”

À PROPOS DE L'AUTEURE

Christine Arquembourg est née dans le nord de la France où elle a grandi jusqu’à sa majorité. À vingt ans, elle épouse un Suisse rencontré à Londres et réside depuis à Berne. Parallèlement à l’éducation de ses deux enfants, elle a repris des études de lettres jusqu’à l’obtention d’un doctorat à Fribourg en Suisse et enseigné la littérature française et romande à l’université.
LangueFrançais
Date de sortie24 juin 2020
ISBN9782889491780
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    Aperçu du livre

    L’abbé Délétoile - Christine Arquembourg

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    Table des matières

    Du même auteur

    DISPARU

    UNE LETTRE IMPOSSIBLE À ÉCRIRE

    À TON TOUR, FILS

    CARNETS D’OR, SUITE

    FERNANDE

    LA GARDIENNE DU SQUARE DE L’IMPASSE

    SCÈNE DE COUPLE

    APRÈS LA RUPTURE

    LES LEÇONS DE PIANO

    Cet ouvrage a été converti par

    Christine Arquembourg

    L’ABBÉ DELÉTOILE

    et autres nouvelles

    Du même auteur

    – Les péchés capiteux, roman

    5 Sens Editions, 2016

    À tous ceux qui m’ont aimée

    Il s’appelait l’abbé Delétoile et cela ressemblait déjà à une plaisanterie. Car si l’étoile de cet ecclésiastique brillait, c’était au ciel de la grivoiserie et même de la franche grossièreté.

    Grâce à Dieu, ce prêtre ne desservait pas notre paroisse mais celle de villages avoisinants. Et nous savions que, le dimanche, il terrorisait ses paroissiens en les apostrophant nommément du haut de la chaire. Il n’hésitait pas à leur prédire l’enfer pour avoir « forniqué comme des bêtes ». Et de fournir des détails scabreux tout droit venus des secrets chuchotés dans le confessionnal ou de l’imagination de l’abbé. À force, les malheureuses victimes des foudres de l’abbé Delétoile avaient fini par prendre leur parti des imprécations et autres anathèmes sortis de la bouche de leur curé. Ils s’étaient habitués à cela et à bien d’autres incongruités d’un prêtre que le Très-Haut, un jour de distraction, leur avait, par malheur, attribué.

    De temps à autre, il lui arrivait de débarquer chez nous à l’improviste, un peu avant midi. Mon père que l’originalité de ce personnage hors normes amusait lui lançait alors avec bonhomie :

    – Alors l’abbé, on vous fait rajouter un couvert ?

    – C’est pas d’refus, mon brave.

    Nous, les enfants, dans notre prime jeunesse, nous étions alors relégués pour le repas à la cuisine. Ma mère – contrainte au silence par l’état ecclésiastique de l’abbé Delétoile – exécrait franchement tout le comportement de cet individu. Elle craignait aussi que nos jeunes oreilles ne soient contaminées par les plaisanteries douteuses de Monsieur le curé. Petits, nous pensions qu’il ressemblait à un ogre, tout prêt à avaler l’un de nous. Plus tard, lorsque je découvris les peintures de Breughel, je trouvais qu’avec ses traits grossiers et ses affreuses grimaces, l’abbé Delétoile ressemblait à l’un ou l’autre de ces personnages effrayants.

    Si la tenue dont il était revêtu attirait l’attention, c’était d’abord par la bizarrerie de ce qu’il portait aux pieds. Toujours chaussé de sabots noirs remplis de paille en guise de chaussettes, cet étrange prêtre ne les quittait que pour dire la messe. Mais toujours à regret. Quant au reste du vêtement, il était à l’avenant. Une soutane noire pleine de taches graisseuses et portée à même le corps. Par les nombreux boutons manquants et qu’il n’avait demandé à personne de remplacer, on pouvait voir le torse très velu de Monsieur le curé. Il se le grattait de temps à autre mais surtout les jours de grande chaleur. Il semblait, dans ces moments-là, s’acharner furieusement contre un ennemi imaginaire :

    – Vous avez des puces, l’abbé ? lui demandait alors gentiment Papa.

    – Penses-tu ! J’ai même pas d’chien. Mais quand y fait chaud, j’aime mieux dormir dans l’foin qu’ dans mon lit. C’est pour ça qu’ça gratte.

    Quant à ses larges mains d’ouvrier en plein chantier, elles étaient pour le moins crasseuses. C’étaient de vrais battoirs avec de gros doigts aux ongles mal coupés et en deuil perpétuel.

    Un jour que ma mère, en prévision du repas, lui avait proposé :

    – Monsieur le curé, voulez-vous vous laver les mains avant de passer à table ?

    Il les avait alors contemplées de pile et de face, sincèrement ahuri :

    – Mais pourquoi diable faut-y que j’les lave si elles sont propres ?

    Je me souviens particulièrement de ce jour-là parce que l’abbé Delétoile qui ne s’adressait à table qu’à Papa, n’avait pas cessé, depuis le début du repas, de dévider des plaisanteries plus graveleuses les unes que les autres. Avec un rire gras et tonitruant en guise d’accompagnement. Et tandis qu’il parlait, il malaxait la mie des deux morceaux de pain dont il s’était servi. J’observais, avec beaucoup d’intérêt, cette boulette qui roulait sous les doigts de l’abbé. Elle devenait aussi grosse qu’une balle de ping-pong mais couleur béton. Puis tout à coup ma mère, désireuse de mettre fin à ces propos de corps de garde, se tourna vers moi. Elle me tendit la corbeille de pain vide :

    – Peut-on demander à la cuisine d’y remettre un peu de pain ?

    L’abbé sembla enfin s’apercevoir de la présence de ma mère pourtant assise à ses côtés. Il lui offrit alors son infâme boulette grise en disant :

    – Tenez, si vous voulez du pain, y a qu’à prend’ mes

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