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La haine a de beaux jours devant elle !: Roman
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La haine a de beaux jours devant elle !: Roman
Livre électronique164 pages2 heures

La haine a de beaux jours devant elle !: Roman

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À propos de ce livre électronique

Des destins et des vies qui se croisent et s'éloignent, au fil du temps et des événements de la vie.

« … Sophie passait les repas à compter les points. Alain n’aspirait qu’à soulager la misère du monde. Gérard regardait la situation avec pragmatisme. Le pays traversait les plus grandes difficultés, il n’y avait plus de place économique pour des réfugiés, les Français devaient penser à eux-mêmes, une question de préférence de la misère nationale. »
« – Il y a des montagnards près du refuge, tu les vois ?
Il n’y avait que la pelouse miteuse bordant le parking du supermarché, mais Marcel Lechat a acquiescé, son père avait besoin de refuge. »

Écrit de septembre 2018 à août 2019, ce roman déroule le fil d’existences qui se télescopent, à la recherche d’elles-mêmes. Le dénouement éclaboussera ces rêves qui les regardent de haut.

Ce roman nous présente la vie de plusieurs familles en France, traversant les épreuves de la vie et se réjouissant face aux bonnes nouvelles. Des personnages attachants qui vous feront explorer des nouvelles facettes de la vie.

EXTRAIT

Lechat a quitté le bureau, bégayant une formule de politesse. Il aurait aimé décocher une réplique cinglante, mais il passait sa vie à ne pas répondre.
Il vivait au milieu de ses semblables dans une succession de silences, une couverture pour passer inaperçu. Marcel se réfugiait au milieu de ses articulations mutiques. Il s'était marié avec Christiane afin d'éviter les questions, et dans son élan il avait fait deux enfants, un garçon et une fille, afin de mettre les apparences de son côté.
De nouveau, il a regardé sa montre. Il a vérifié autour de lui, mais pas de Rodolphe à l'horizon. Il avait plus de chances d'assister à une tempête de neige qu'à l'arrivée du fossoyeur. Il a essuyé sa nuque en sueur avant d'empoigner une pelle. Une fine pluie s'est mise à tomber. Il a essuyé les gouttes qui dégoulinaient sur son front.
Marcel avait creusé à une profondeur d’un mètre cinquante lorsque Rodolphe est arrivé essoufflé parmi les tombes égayées de fleurs dont les morts profitaient dans un renouvellement éternel.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Manuel Verlange a passé son enfance à Nantes, France. Après ses études, il est parti enseigner la langue française à Tokyo puis en Belgique. Il vit actuellement près de Bruxelles, où il travaille à l’écriture de ses romans.
LangueFrançais
ÉditeurEncre Rouge
Date de sortie6 nov. 2019
ISBN9782377892853
La haine a de beaux jours devant elle !: Roman

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    La haine a de beaux jours devant elle ! - Manuel Verlange

    cover.jpg

    Cet ouvrage a été composé par les Éditions Encre Rouge

    img1.jpg ®

    7, rue du 11 novembre – 66680 Canohes

    Mail : contact.encrerouge@gmail.com

    ISBN papier : 978-2-37789-284-6

    Manuel Verlange

    La haine a de beaux jours devant elle

    Roman

    Roman publié aux Éditions Encre Rouge :

    Pauvres de nous ! Paru en mai 2019.

    *

    Chez d'autres éditeurs :

    Vue sur mère. Paru en septembre 2018.

    Secrets de Minuit. Recueil de poèmes. Épuisé.

    "... Je m'éloignai. J'avais hâte de ne plus être là,

    à la merci de cet accent,

    de cette médiocrité qui finissait par devenir grandiose,

     et par engluer le monde entier dans sa petitesse. "

    Les Racines du ciel.

    Romain Gary.

    Rodolphe est arrivé essoufflé parmi les tombes égayées de fleurs dont les morts profitaient dans un renouvellement éternel. Longtemps les chrysanthèmes avaient été tendance, mais cette année les lys affichaient une belle percée.

    ⸺  Tu es en retard. Tu es toujours en retard. Comment tu réussis ça ?

    Maximilien le fixait. Il s'est essuyé le front. Maximilien suait en permanence, c'était l'époque. Il avait commencé dans la vie par s'appeler Maximilien Katz, puis s'était transformé en Max pour finir en Marcel Lechat, toujours l'époque. Les employés de la mairie savaient qu'il était juif, mais ils l'aimaient bien et lui pardonnaient.

    ⸺  ... Ma bagnole, elle a refusé de démarrer.

    Rodolphe a soupiré.

    ⸺  J'ai dû attraper un bus, ensuite mon badge ne passait pas à l'entrée du cimetière.

    Pour accéder au cimetière municipal, il fallait présenter un badge. Des grilles électriques avaient été mises en place par la mairie, les profanations se multipliant ces dernières années.

    ⸺  Je te rappelle qu'on a un enterrement à 10:00. Il est 9:30. Creuse.

    Marcel a indiqué la pelle à Rodolphe qui perdait le peu de temps qui restait à s'exaspérer :

    ⸺  C'est la batterie. Pourtant je l'ai changée il y a huit ans, ils vendent des batteries pourries, je parie que c’est fabriqué en Chine.

    ⸺  La pelle. Le macchabée ne va pas s'enterrer tout seul.

    Rodolphe n'a pas répliqué. Marcel ne le croyait pas, personne ne le croyait jamais. Il a creusé le sol réfractaire, comme si la terre durcissait à l'idée d'avaler des morts supplémentaires. Le cimetière était un ventre bourré à craquer. Un jour, il vomirait des cadavres qui gicleraient dans tout le quartier. Un projet d'extension avait été voté, mais son application piétinait à cause d'un camp de roms.

    ⸺  Magne-toi, les pompes funèbres vont débarquer.

    Marcel s'est retourné, levant les yeux au ciel. Rodolphe l'exaspérait avec ses pelletées déjà fatiguées avant de commencer.

    ***

    Enfant, Rodolphe ne s'était pas rêvé fossoyeur. Sa passion c'était le violon. Il avait fait le conservatoire avant de rater les examens. Des profs aigris et méprisants l'avaient exclu, cependant lui croyait en son destin de violoniste et s'acharnait à faire de la musique.

    Les profs du conservatoire lui inspiraient de la pitié. Des ratés, sinon ils ne seraient pas tombés dans l'enseignement. Ils s'étaient imaginés chefs d'orchestre, compositeurs adulés, concertistes virtuoses emportés sous les ovations de salles debout. Pour se retrouver donnant des cours dans des locaux sentant les rêves froids.

    Rodolphe avait déménagé trois fois en raison de l'admiration des voisins. A plusieurs reprises, la police avait déboulé à une heure du matin, pour tapage nocturne. Finalement, il avait emménagé dans un pavillon à l'écart de la ville, près des pistes de l'aéroport.

    Mais la musique reconnaîtrait les siens et bientôt Rodolphe entrerait dans la lumière.

    ***

    ⸺  Maximarcel Lekatz ?

    ⸺  Lechat. Marcel.

    ⸺  ... Lechat. Excusez-moi.

    Le chef du service Culture et Espaces verts de la mairie a eu ce geste embarrassé. Il était nouveau, il avait lu le dossier de Marcel rapidement.

    Il lui a tendu le planning de la semaine. Les morts étaient en plein boum, il fallait s'organiser. Les corps s'empilaient à la morgue mais comme répétait Raphaël Pic, le responsable des cadavres :

    ⸺  C'est rare que la viande froide s'impatiente.

    Marcel a examiné le document avant de demander :

    ⸺  Vous avez des nouvelles pour l'assistant qu'on m'a promis ? Votre prédécesseur m'a dit que c'était en cours.

    ⸺  C'est en cours.

    Le chef de service a jeté un regard épuisé sur la pile de dossiers.

    Le fossoyeur a quitté le bureau en silence. La mairie faisait son possible, mais c'était difficile d'engager du personnel de nos jours. Les bons candidats manquaient, pourtant la municipalité offrait un CDI et des primes. Le taux de chômage augmentait mais les travailleurs se raréfiaient.

    La mairie allait dans le bon sens, pratiquant la préférence nationale. Seulement, engager des employés français depuis plusieurs générations, des chrétiens, c'était le parcours du combattant. Le service du personnel s'arrachait les cheveux. Tenir ses promesses électorales et respecter les engagements compliquait la vie de l'équipe en place, mais le courage politique a un prix.

    Marcel s'est appuyé à la vitre de la morgue.

    ⸺  Entre-temps, les fosses ne se creusent pas, le retard s'accumule.

    Raphaël Pic a répondu dans un soupir de fatalité :

    ⸺  Les clients meurent de plus en plus vieux, c’est le progrès. Ils prennent leur temps et après tout doit être réglé en deux clics. La culture Internet. Les morts ne supportent plus d'attendre.

    Il a secoué la tête.

    ⸺  Ne t'inquiète pas, je les garde au frigo. La mairie finira par te trouver quelqu'un. J'ai entendu qu'ils allaient proposer cinq jours de congés supplémentaires et une double prime à Noël.

    ⸺  Si déjà j'avais Rodolphe à plein temps...

    ***

    Rodolphe connaissait Djamel de loin. Depuis que ce voisin avait acheté une Renault Megane Intens 140CV, Rodolphe le regardait autrement. Sa bagnole à lui totalisait plus de 190.000kms, et consommait plus de diesel et d'huile qu'un food truck. Il aurait aimé acheter la Renault, mais il n'avait pas les moyens.

    Ce n'était pas grave, le violon restait sa priorité, mais une voiture neuve l'aurait aidé à arriver à l'heure au cimetière. Rodolphe ne demandait pas grand-chose, vivant en mode économie. Année après année, il voyait son pouvoir d'achat sur la pente savonnée par le gouvernement. Son salaire stagnait. Les prix s'envolaient. Il votait à chaque élection, seulement rien ne changeait. S'il avait pu, il aurait fait gilet jaune sur les Champs Élysées, mais il avait violon le samedi.

    La vérité était que Rodolphe devait remplacer son sèche-linge et sa cuisinière, le couple d’électro-ménager avait fêté leur trentième anniversaire. Il aurait aimé changer aussi la télé, et partir en vacances dans un pays all inclusive. Des années qu'il n'était pas parti. Le travail. Tous les jours. Un boulot pénible. Qui n'a pas été fossoyeur ne peut pas se rendre compte à quel point c'est un travail de forçat.

    Fatigué, Rodolphe a repris sa pelle. La fosse n'allait pas se creuser toute seule. Il y avait un enterrement à 10:00, un second à 11:00 et un troisième à 13:30. Les gens mouraient tous en même temps alors qu'ils auraient pu faire un effort pour répartir le boulot.

    Quelques gouttes de pluie sont tombées. Une lueur d'espoir a scintillé dans la grisaille de Rodolphe. Une bonne pluie et il avait le droit de se réfugier dans le local technique, c'était le règlement. Il était équipé d’une machine à café et un frigo avec des bières. Il attendrait que la pluie cesse. La terre serait plus grasse, les pelletées plus molles.

    Seulement la pluie a renoncé à lui venir en aide, il ne pouvait compter sur personne. Une poignée de gouttes timides n'a rien changé à la terre brunâtre, quelques corolles vite disparues.

    Rodolphe a continué de creuser, tentant de se raccrocher à quelque chose de positif. Il avait un concert ce soir avec son groupe de musiciens, dans une chapelle de Chatou. Ensuite, ils mangeraient une pizza et boiraient du chianti. Après, il irait chez Vanina et ils feraient l'amour.

    ***

    Marcel Lechat était marié et avait deux enfants pour rentrer dans les statistiques. Il avait essayé d'en avoir 1,96, mais cela n'avait pas marché, personne n'est parfait.

    Il habitait un immeuble discret derrière le cimetière. Trois chambres, une cuisine, une salle de bains, une terrasse donnant sur un rideau d'arbres qui masquait la rue, une transparence de film plastique. Marcel avait la visibilité en horreur. Dans la salle à manger s'alignaient des meubles que l'on trouvait partout et des photos de la tour Eiffel, de la cathédrale de Strasbourg et des alignements de Carnac, aucun risque d'identification.

    Il jouait au foot tous les dimanches. Il se fondait dans l’équipe des joueurs, rassuré par cette fraternité enveloppante. Dès qu'il avait le ballon, il le repassait sans perdre une seconde.

    Sa femme, Christiane, travaillait au service de la voirie. Elle s'occupait des factures, des camionnettes et de la peinture blanche pour les passages piétons. Elle était invisible derrière des piles de dossiers, un trait de caractère que Marcel appréciait.

    Il était employé à la mairie depuis trente-deux ans. Il avait connu quatre maires qui ne l'avaient pas remarqué, il priait pour que cela continue. Son travail était toujours bien fait malgré le manque de personnel, les fosses étaient creusées et les morts reposaient en paix.

    La seule manifestation que Marcel Lechat ne maîtrisait pas, c'était cette sudation âcre qu'il sentait poisser et qu'il haïssait avec un sentiment de honte.

    Marcel avait une explication pour la plupart des situations en transpiration, se désespérant d'y croire lui-même. La chaleur. Un plat trop épicé. Le match de foot. En hiver, ça devenait plus compliqué. Il devait prétexter le chauffage trop fort ou une fièvre soudaine. Marcel ne sortait jamais sans un déodorant en poche, ni un flacon d'eau de toilette. Il était le fossoyeur le plus parfumé de la commune.

    Un après-midi, deux femmes nettoyaient une tombe. Lui se trouvait deux sépultures plus loin, cimentant une croix. L'une des femmes avait chuchoté :

    ⸺  Antoine a toujours été soigné, je sens encore son eau de toilette alors qu'il est décédé depuis cinq ans !

    Chaque dimanche, Marcel et sa femme allaient déjeuner chez ses beaux-parents. Ils habitaient une villa modeste en banlieue. Marcel faisait un crochet pour éviter la rue de la synagogue. Il prétextait la chaussée en travaux. Christiane se taisait, fixant la route devant elle.

    Le rosbif du dimanche était invariablement accompagné de pommes de terre rissolées, de haricots verts et d'une salade trop vinaigrée. La viande était toujours trop cuite. Marcel se sentait en confiance grâce à cette tradition de mastication hebdomadaire à douze heures quarante-cinq pétantes.

    ***

    Rodolphe a défait son col, il avait joué une série de morceaux qui allaient avec un nœud papillon. Ce soir, il avait commis un nombre raisonnablement élevé de fausses notes, mais le public avait applaudi et ses collègues n'avaient fait aucune remarque. Les fausses notes de Rodolphe finissaient par s'intégrer aux partitions.

    ⸺  Tu viens manger une pizza à la Dolce Vita ?

    ⸺  Bonne idée !

    Rodolphe a ôté son costume pour se glisser dans un jean.

    Le quintet a pris place à une table sous une fresque écrasante de Pompéi. Jean-François, le contrebassiste, a commandé une bouteille de chianti. Plus tard, il en commanderait une deuxième puis une troisième. La musique donnait soif. Rodolphe a choisi une escalope milanaise avec des frites.

    Le patron, Domenico, est venu boire un verre à leur table, il a offert la grappa. Il affectionnait ces musiciens fidèles à son restaurant. Une bande qui aimait rire et chanter, comme lui.

    Une fois Domenico reparti en cuisine, Jean-François a murmuré :

    ⸺  Sympa, ce gars-là. Il est italien mais il est chez nous depuis longtemps, et puis c'est un travailleur et il est catholique.

    Il a fini son verre de chianti.

    ⸺  Ouais, mais il fait bosser un noir au noir à la plonge, et le pizzaïolo provient un peu du Bangladesh.

    Sébastien a échangé un regard avec Jean-François.

    ⸺  Les charges, comment tu veux qu'il

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