Découvrez des millions d'e-books, de livres audio et bien plus encore avec un essai gratuit

Seulement $11.99/mois après la période d'essai. Annulez à tout moment.

Mélodie gourmande à Guérande: Les enquêtes gourmandes d’Arsène Barbaluc - Tome 8
Mélodie gourmande à Guérande: Les enquêtes gourmandes d’Arsène Barbaluc - Tome 8
Mélodie gourmande à Guérande: Les enquêtes gourmandes d’Arsène Barbaluc - Tome 8
Livre électronique284 pages3 heures

Mélodie gourmande à Guérande: Les enquêtes gourmandes d’Arsène Barbaluc - Tome 8

Évaluation : 0 sur 5 étoiles

()

Lire l'aperçu

À propos de ce livre électronique

Une intrigue bretonne détonante pour l'inspecteur gastronomique !

Une vieille légende du rock sauvagement assassinée et un cadavre retrouvé près des remparts secouent la tranquille cité de Guérande. Arsène Barbaluc, venu pour aider un ami qui vient d'ouvrir un restaurant, va devoir déployer tous ses talents pour découvrir l'assassin. Entre des héritiers envieux et dépressifs, des parties de cache-cache et quelques secrets de famille, le célèbre inspecteur gastronomique devra jouer une partition sans fausse note, sous peine de composer une mélodie mortelle...

Retrouvez, en musique, le fameux Arsène Barbaluc dans le 8e tome de ses enquêtes gourmandes !

EXTRAIT

Ils s’étaient installés dans le coin bar. Trubert s’activait devant le percolateur. Barbaluc sortit des tasses.
— Tu as l’air réjoui, ce matin, s’amusa Trubert.
—C’est ta femme de ménage qui m’amuse.
— Laquelle ?
— Sabine Maloye.
— Je ne l’imaginais pas en comique troupier.
—Elle est persuadée qu’il y a un fantôme dans le grenier.
—Encore ! Cela fait deux fois qu’elle me raconte ces âneries. Je n’ai jamais vu quelqu’un d’aussi superstitieux, d’aussi crédule. Je suis certain qu’elle y croit, en plus !
— Mais je n’ai pas compris qui était ce fantôme.
— Ian Lister-Jones. Il habitait la maison voisine. Celle qui a un mur mitoyen avec la nôtre. Il a été assassiné en début d’année. D’après les gendarmes, c’est un cambriolage qui a mal tourné.
—J’y suis. Tu m’en as parlé. C’est l’ancien leader du groupe Myst of Dreams ?
— Exactement.

CE QU’EN PENSE LA CRITIQUE

Éditions Bargain, le succès du polar breton. – Ouest France

J'ai aimé les personnages et l'intrigue mais aussi l'univers gastronomique dans lequel nous sommes plongés. - mijue, Babelio

À PROPOS DE L’AUTEUR

Christophe Chaplais, né en 1965, vit à Grenoble et partage son temps libre entre la Bretagne et la côte catalane. Auteur de la série des "Arsène Barbaluc", il allie gastronomie et affaires criminelles. Intrigue aux petits oignons, personnages à la sauce aigre-douce, rebondissements entre la poire et le fromage, rien de tel pour vous concocter un suspense qui ne manque pas de piment.

À PROPOS DE L'ÉDITEUR

"Depuis sa création en 1996, pas moins de 3 millions d'exemplaires des 420 titres de la collection « Enquêtes et suspense » ont été vendus. [...] À chaque fois, la géographie est détaillée à l'extrême, et les lecteurs, qu'ils soient résidents ou de passage, peuvent voir évoluer les personnages dans les criques qu'ils fréquentent." - Clémentine Goldszal, M le Mag, août 2023
LangueFrançais
Date de sortie26 juil. 2017
ISBN9782355503269
Mélodie gourmande à Guérande: Les enquêtes gourmandes d’Arsène Barbaluc - Tome 8

En savoir plus sur Christophe Chaplais

Auteurs associés

Lié à Mélodie gourmande à Guérande

Titres dans cette série (10)

Voir plus

Livres électroniques liés

Mystère pour vous

Voir plus

Articles associés

Catégories liées

Avis sur Mélodie gourmande à Guérande

Évaluation : 0 sur 5 étoiles
0 évaluation

0 notation0 avis

Qu'avez-vous pensé ?

Appuyer pour évaluer

L'avis doit comporter au moins 10 mots

    Aperçu du livre

    Mélodie gourmande à Guérande - Christophe Chaplais

    I

    FRITURE D’ÉPERLANS À LA FLEUR DE SEL

    Arsène Barbaluc s’étira longuement. La journée précédente avait été fatigante, mais l’inauguration du Sainte-Hélène avait été un succès. Il était content pour ses amis Geoffrey et Hélène Trubert. Il les connaissait depuis de nombreuses années. Cela faisait presque trente ans qu’il côtoyait Geoffrey au sein de l’équipe du Gastronome Français. Ils avaient commencé tous deux comme inspecteurs gastronomiques, puis Geoffrey avait accepté de devenir rédacteur en chef du mensuel Le Gastronome, complément indispensable du guide pour tout passionné de cuisine. Lorsqu’ils étaient encore célibataires, les deux hommes avaient mené la vie. Ils ne comptaient plus les nuits de fête, les conquêtes féminines et les gueules de bois matinales. Puis Arsène avait rencontré Judith et Geoffrey s’était marié avec Hélène.

    Il y avait toujours des fêtes, mais elles étaient différentes et… plus calmes.

    À cette évocation, Arsène Barbaluc esquissa un sourire. Il se leva et ouvrit les volets de sa chambre. Il frissonna. Pour un mois de mai, l’air était frais. Le ciel bas sur Guérande laissait échapper une petite bruine désagréable. En face, le parking était presque désert. Comme à son habitude, il passa sous la douche d’abord tiède puis froide. Alors qu’il se rasait, il pensa à Judith restée à Paris, qui devait se préparer pour aller à son travail. Dimanche prochain, elle le rejoindrait et ils partiraient pour deux semaines de vacances en Bretagne puis en Irlande.

    Les liens entre Arsène Barbaluc et Geoffrey Trubert s’étaient encore resserrés après leur aventure du côté d’Aix-en-Provence¹. Cette aventure avait bien failli coûter la vie à Geoffrey Trubert qui avait gardé depuis une légère claudication. Alors quand, il y a un peu plus d’un an, le rédacteur en chef du Gastronome lui avait expliqué qu’il avait décidé de changer de vie, Barbaluc avait été surpris et un peu triste.

    Geoffrey et son épouse avaient décidé d’ouvrir un hôtel-restaurant à Guérande. C’est Hélène qui connaissait la région depuis son enfance et avait fait les premières recherches. C’est elle qui avait trouvé cette vieille bâtisse en pierre du XIXe siècle, à deux pas des remparts et de la porte Saint-Michel. En quelques mois, sous la houlette d’Hélène, ils avaient transformé les bâtiments en un hôtel de charme de très bon niveau. Geoffrey s’était occupé de la partie restaurant.

    Arsène Barbaluc avait été très heureux que son ami fasse appel à lui pour les derniers réglages et l’établissement définitif de la carte. Il avait au cours de ces derniers mois fait plusieurs allers et retours entre Paris et Guérande.

    Le patron du Gastronome Français, André Gibon avait même accepté de donner à son plus fidèle inspecteur gastronomique deux semaines de congés supplémentaires afin qu’il aide Geoffrey. Lui-même était venu, deux jours avant l’inauguration, prêter main-forte. Il n’était reparti que la veille au soir pour Paris. Ainsi la semaine précédant l’inauguration du Sainte-Hélène, Arsène Barbaluc avait pu être à côté de ses amis.

    Arsène Barbaluc, tout en s’habillant, repensa à cette première journée. Le restaurant avait affiché complet et quelques chambres étaient déjà occupées. Ce dimanche s’annonçait sous les meilleurs auspices. « Finalement », pensa l’inspecteur gastronomique, « Geoffrey ne s’est peut-être pas trompé… Sa chef semble être à la hauteur. »

    Arsène Barbaluc avait eu un peu de mal avec Magali Krommel. La jeune chef danoise recrutée par le patron du Sainte-Hélène, avait un peu dérouté l’inspecteur gastronomique. Sa manière de cuisiner, ses choix, sa façon de diriger sa brigade l’avaient surpris.

    Mais il devait bien reconnaître que les résultats étaient là. Alors qu’elle n’avait pas trente ans, elle avait déjà un joli savoir-faire et une belle marge de progression.


    1 Voir Le calisson jusqu’à la lie, même auteur, même collection.

    II

    MYSTÈRE GLACÉ ET DAME BLANCHE

    Alors qu’il refermait sa chambre, il entendit bougonner au bout du couloir. La femme de ménage semblait de méchante humeur.

    — Alors Sabine, vous n’avez pas l’air dans votre assiette, ce matin ?

    — Il y a encore des traces près de la porte du grenier, affirma Sabine Maloye en désignant le couloir opposé. C’est pareil presque tous les matins. À croire qu’il y a quelqu’un qui se promène la nuit dans les combles.

    — Qui voulez-vous qui se balade la nuit dans le grenier ? Je ne vois pas Geoffrey ou Hélène s’adonner à ce genre d’activité.

    — Oh, pour ça non ! Moi je crois que c’est le fantôme du hippie qui s’est fait assassiner dans la maison d’à côté.

    — Bien sûr ! Et l’Ankou va venir vous chercher une de ces prochaines nuits, se moqua Barbaluc.

    Sabine Maloye se signa en bougonnant et remit en marche son aspirateur.

    Au bas de l’escalier, Arsène Barbaluc tomba sur Geoffrey Trubert.

    — As-tu pris ton café ? lui demanda le patron du Sainte-Hélène.

    — Non.

    — Je t’accompagne, un petit noir me fera du bien aussi.

    Ils s’étaient installés dans le coin bar. Trubert s’activait devant le percolateur. Barbaluc sortit des tasses.

    — Tu as l’air réjoui, ce matin, s’amusa Trubert.

    — C’est ta femme de ménage qui m’amuse.

    — Laquelle ?

    — Sabine Maloye.

    — Je ne l’imaginais pas en comique troupier.

    — Elle est persuadée qu’il y a un fantôme dans le grenier.

    — Encore ! Cela fait deux fois qu’elle me raconte ces âneries. Je n’ai jamais vu quelqu’un d’aussi super-stitieux, d’aussi crédule. Je suis certain qu’elle y croit, en plus !

    — Mais je n’ai pas compris qui était ce fantôme.

    — Ian Lister-Jones. Il habitait la maison voisine. Celle qui a un mur mitoyen avec la nôtre. Il a été assassiné en début d’année. D’après les gendarmes, c’est un cambriolage qui a mal tourné.

    — J’y suis. Tu m’en as parlé. C’est l’ancien leader du groupe Myst of Dreams ?

    — Exactement.

    — Je me souviens que, quand j’étais jeune, j’aimais bien…

    — …Moi aussi, je pense même que j’ai dû emballer sur certains de leurs succès. Mais tu sais, depuis quelques années, leurs vieux tubes sont de nouveau à la mode. C’est étonnant comme les jeunes d’aujourd’hui s’intéressent à la musique des années soixante-dix et quatre-vingts !

    — Tu le connaissais ? l’interrogea Barbaluc en sirotant son café noir sans sucre.

    — Bonjour bonsoir, pas plus que ça. C’était un homme discret, qui menait une vie tranquille. D’après ce que je sais, il était malade. Un cancer, je crois…

    — Et l’assassin a été retrouvé ?

    — Pas à ma connaissance. D’après un des gendarmes dont j’ai embauché les filles…

    — Qui ça ?

    — Lætitia et Amélie Le Gouer. Eh bien, d’après leur père, il s’agirait d’une bande nantaise. Mais pour le moment, ils n’ont rien de sérieux. À mon avis, ils n’ont pas classé l’affaire, mais j’ai l’impression qu’ils ont mis l’enquête en veilleuse. Veux-tu un autre café ?

    — Avec plaisir.

    La voiture du restaurant entra dans la cour. Magali Krommel et son adjoint revenaient du marché. De loin, la jeune femme leur fit un signe de la main. Le percolateur lâcha sa vapeur. Trubert poussa une tasse de café brûlant vers l’inspecteur gastronomique en fredonnant une mélodie.

    — Ça c’est des Myst of Dreams.

    — C’était bien quand même, soupira Arsène Barbaluc en repensant à sa jeunesse. J’aurais bien aimé le connaître, ton Ian Lister-Jones.

    — Je pense qu’on aura le reste du groupe à partir de ce soir à l’hôtel.

    — Comment ça ?

    — Tu imagines que le règlement de l’héritage d’un tel personnage ne doit pas être chose aisée. Le notaire les réunit à partir de demain. Ils débarquent ce soir.

    — Combien sont-ils ?

    — Une petite dizaine, ils m’ont réservé huit chambres et le petit salon pour dîner, toute la semaine.

    III

    ASSIETTE D’ÉTRILLES AU COURT-BOUILLON

    La matinée fut agitée. La femme du sommelier téléphona pour informer que son mari avait été hospitalisé dans la nuit pour une péritonite aiguë. Geoffrey Trubert n’eut pas d’autre solution que de demander à son ami Arsène de le remplacer. Barbaluc avait les connaissances nécessaires tant sur le vin que sur la manière de le servir. Sans compter qu’il avait participé activement à la création de la cave. Le temps de s’acheter un costume adéquat, il en emprunta un à Julien Tacconais, le chef de rang qui avait à peu près sa corpulence.

    Finalement, le déjeuner se déroula parfaitement bien. Après des premières minutes particulièrement stressantes, Arsène Barbaluc s’en sortit très bien et réussit à se détendre. Le Sainte-Hélène afficha complet et plusieurs clients désirèrent féliciter la chef qui, à la fin du repas, vint faire le tour des tables.

    Le dernier client parti, Geoffrey Trubert rassembla toute l’équipe et leur offrit une coupe de champagne.

    — Mes enfants, si nous continuons comme hier et ce midi, notre avenir est assuré. Une nouvelle fois, je lève ma coupe à notre travail… mais je vous préviens, ce ne sera pas champagne chaque midi. Là, c’est juste un encouragement.

    Geoffrey avait toujours su créer un esprit d’équipe. Cela avait déjà été le cas quand il était devenu rédacteur en chef du Gastronome. Une nouvelle fois, il avait su donner une âme à son entreprise. Hélène et lui s’étaient disputés devant Barbaluc quand Trubert avait décidé que son équipe, y compris le chef de rang et ses serveurs, devaient être présents à temps plein, un mois avant l’ouverture. Il ne s’était pas trompé. L’équipe était déjà rodée.

    Quelques rires s’ajoutèrent au sourire quand Geoffrey se tourna vers Barbaluc, le verre levé.

    — À toi aussi, mon cher Arsène. En tant que sommelier, tu ne t’en es pas trop mal tiré et ta main n’a pas tremblé.

    — J’ai perdu au moins trois kilos…

    — Maintenant, quand tu jugeras un sommelier, tu le verras d’un œil différent, ironisa Hélène Trubert. Je n’ose imaginer un client qui te fasse un reproche.

    — Je ne crois pas… commença l’inspecteur gastronomique, agacé car interrompu par des voitures qui pénétraient sur le parking du Sainte-Hélène.

    — Les affaires reprennent, lança Geoffrey Trubert en s’éloignant avec sa femme pour accueillir les nouveaux arrivants.

    Chacun finit sa coupe et repartit vaquer à ses occupations.

    Magali Krommel et Arsène Barbaluc regardaient par la baie vitrée les héritiers de Ian Lister-Jones débarquer. En passionné d’automobiles qu’il était, Arsène Barbaluc admira la Lynx Eventer immatriculée en Grande-Bretagne, qui manœuvra pour se parquer à côté de sa vieille Volvo. Un homme, mince, de grande taille, les cheveux blancs sur les épaules, la soixantaine et à l’allure de dandy en descendit. D’un geste machinal, l’homme chercha à défroisser son costume à la coupe impeccable.

    Il fit le tour du break de chasse Jaguar pour ouvrir la portière à une femme du même âge, grande et char-pentée.

    — Je crois qu’il s’agit de Peter Buckland, le batteur qu’on surnomme Linus, annonça Magali Krommel.

    — Vous le connaissez ?

    — Mon père est fan des Myst of Dreams.

    — Quel âge à votre père ?

    — À peu près le vôtre, je pense…

    — C’est-à-dire ?

    — Cinquante-trois ans.

    Arsène Barbaluc fit la moue. Il avait tendance à oublier ses cheveux grisonnants et son âge.

    — Celui qui descend de la BMW c’est Pascal Bacconière, dit Helmer, le guitariste. Lui composait la musique et Lister-Jones les paroles.

    — Vous êtes une véritable encyclopédie.

    — Je n’ai pas eu le choix. Depuis que j’ai dit à Daddy que les Myst of Dreams allaient séjourner à l’hôtel, j’ai eu droit à leur vie en long et en large, soupira Magali Krommel en levant les yeux au ciel. J’ai ordre de faire signer des autographes et si jamais je ne les lui envoie pas…

    Pascal Bacconière, petit, râblé, totalement chauve, les yeux cachés par des lunettes noires rondes, ouvrait le coffre pour que le personnel de l’hôtel puisse prendre les bagages. Il était accompagné de deux femmes. La première, belle femme d’une soixantaine d’années, avança avec prestance, faisant crisser ses talons sur le gravier de la cour. La seconde prit le bras de Bacconière. Une petite femme, un peu boulotte, au visage grave et triste. Un autre couple les rejoignit.

    — Et eux ?

    — Je ne sais pas. Je ne connais que les musiciens.

    — Ils ne sont pas que deux tout de même…

    — Non, il y avait Lister-Jones, le chanteur guitariste, Pascal Bacconière, guitariste et clavier, Peter Buckland, le batteur, et Régis Jeantot, le bassiste qui est mort d’une overdose à la fin des années quatrevingt-dix.

    À côté des classiques berlines allemandes modernes, le regard de Barbaluc fut attiré par une superbe Mercedes Pagode parfaitement restaurée. Un homme d’une quarantaine d’années, cheveux légèrement grisonnants, de taille moyenne, presque maigre, en sortit nerveusement. Pantalon clair et moulant, chemise cintrée, petite sacoche en bandoulière, il houspilla le groom qui n’allait pas assez vite à son goût.

    — C’est qui cette caricature ?

    — Je ne sais pas. Ce n’est pas un musicien, précisa Magali Krommel.

    IV

    FLAN AUX TROIS LÉGUMES

    Dans l’après-midi, Arsène Barbaluc s’éclipsa pour aller chercher deux costumes afin d’assurer sa mission de sommelier. Pour le soir, Geoffrey s’occuperait de la salle et Barbaluc et la jeune Tamara Sandaire seraient mis à la disposition unique du petit salon qu’occuperaient les héritiers de Ian Lister-Jones. Arsène Barbaluc trouvait finalement la situation amusante. Être sommelier et voir comment tous ces excentriques du show-biz se comporteraient, ne manquait pas d’intérêt.

    L’inspecteur gastronomique cravacha sa vieille Volvo jusqu’à Saint-Nazaire. Une fois au centre-ville, il appela Judith. Il lui raconta la situation. L’imaginer en sommelier amusa beaucoup celle-ci. Elle lui donna quelques conseils pour ses emplettes que, de toute manière, Barbaluc ne suivrait pas. Dans une boutique du centre-ville, il trouva son bonheur. Expliquant sa situation, il réussit le tour de force de se faire livrer ses deux costumes retouchés pour le lendemain soir.

    Il était encore tôt. Arsène Barbaluc décida de faire un détour par Le Croisic. La bruine avait cessé. Un peu de ciel bleu déchirait le gris du ciel. Il passa par La Baule et longea sa plage de sable fin. Annonçant l’été, les appartements du front de mer commençaient à ouvrir leurs volets. Dans quelques semaines, les parasols et les serviettes de plage envahiraient le sable. L’air sentirait bon la crème solaire, les beignets et autres chouros.

    Il traversa Batz-sur-Mer, puis prit la route côtière. Il lui sembla que de nouvelles constructions avaient encore vu le jour, grignotant un peu plus une Côte Sauvage qui n’avait plus de sauvage que le nom. Sur le sentier des douaniers, quelques retraités entretenaient leur forme en joggant tranquillement. L’océan était gris, une houle d’ouest battait tranquillement le granit. Le rocher de l’Ours surveillait le large. Rien n’avait changé depuis sa dernière visite.

    Arsène Barbaluc s’arrêta devant La Rose des vents. Il frissonna en regardant l’hôtel-restaurant aujourd’hui à l’abandon. Avec son ami, l’officier de police Michèle Archambaud, ils y avaient mené une enquête criminelle délicate et dangereuse. Cela faisait longtemps. Même le bistrot qui leur avait servi de quartier général avait disparu. Rasés, les bâtiments avaient été remplacés par une superbe villa fermée onze mois de l’année. Barbaluc fit quelque pas autour de la propriété et laissa vagabonder ses pensées. Il aurait bien dîné avec le lieutenant de police. Malheureusement, elle était en vacances quelque part dans les Cyclades.

    L’inspecteur gastronomique abandonna ses souvenirs et entra dans Le Croisic par l’avenue Saint-Goustan. Une petite barque tanguait et luttait contre la marée montante qui s’engouffrait dans le chenal de Pen Bron. Il s’installa à la terrasse d’un café du quai de la petite chambre. Un petit vent de nord-ouest le poussa à relever le col de son manteau. C’est la Mercedes Pagode qu’il remarqua en premier. Un peu plus loin sur le quai, Arsène Barbaluc repéra le propriétaire de la voiture de sport, avec le musicien chauve. Comment Magali avait dit qu’il s’appelait ? Il ne retrouva pas le nom. Les deux hommes étaient avec un troisième dont Arsène Barbaluc ne pouvait voir le visage. Les cheveux châtains et longs, portant santiags vertes et blouson américain à l’effigie de l’université de Stanford. La discussion semblait animée.

    L’arrivée d’un bateau dans le port détourna l’attention d’Arsène Barbaluc. Quand il tourna la tête vers les trois hommes, ils avaient disparu. Il jeta sur la table quelques pièces de monnaie.

    V

    SOUPE D’ORTIES

    Le soleil couchant enflammait les quelques nuages qui s’attardaient dans le ciel de Guérande. La salle à manger du Sainte-Hélène affichait complet. À la porte du petit salon, Geoffrey Trubert accueillait par leur nom les héritiers de Ian Lister-Jones. Tamara Sandaire assurait le service du petit salon et Arsène Barbaluc se tenait légèrement en retrait. Avec attention, ils enregistraient les patronymes des clients. Geoffrey Trubert leur avait demandé de personnaliser au plus leurs rapports avec ces clients qui avaient réservé le petit salon pour toute une semaine.

    Le premier à se présenter fut l’excité à la Mercedes Pagode, répondant au nom de Samuel Isotta. Sa voix haut perchée, sa manière d’essayer de capter l’attention, sa façon de donner sa pochette qu’il portait en bandoulière à Tamara sans un mot, irrita immédiatement Arsène Barbaluc.

    Monsieur et madame Bacconière le suivirent de peu. Monsieur et madame Beauge-Bellorge se présentèrent quelques minutes après le guitariste des Myst of Dreams. Puis ce fut le tour de madame Bacconière. Arsène Barbaluc s’étonna de réentendre ce nom de famille. La dame, très élégante dans un tailleur chocolat, s’installa à côté du guitariste.

    — Alors mon frère, es-tu bien installé ?

    — Parfaitement. Même Clara trouve la chambre parfaite.

    — C’est une chance, commenta Danièle Bacconière en dévisageant sa belle-sœur qui baissa la tête.

    Le dandy et Françoise Mauzier qui voyageait avec lui, firent attendre les autres quelques minutes. L’inspecteur gastronomique sourit en examinant Peter Buckland, le batteur du groupe. Toujours impeccablement habillé dans un costume gris trois-pièces, chemise blanche et cravate aux couleurs d’un probable club londonien. Ses chaussures de luxe étaient parfaitement cirées. Il portait une barbe de trois jours, soigneusement entretenue et de longs cheveux blancs, négligemment lâchés sur les épaules. Ses mains manucurées portaient des bagues à chaque doigt, excepté au pouce. « Un vrai personnage », s’amusa l’inspecteur gastronomique.

    — Toujours en retard, mon cher Linus, lança Samuel Isotta.

    — Comme je te l’ai toujours expliqué, mon cher Sam, le talent doit toujours se faire attendre. C’est pour cela que tu es toujours le premier.

    Samuel Isotta rougit et Martine Beauge-Bellorge toussota.

    — Allons, les enfants, lança Pascal Bacconière. Nous sommes ici pour rendre hommage à Ian et solder son héritage suivant ses dernières volontés. Nous allons avoir pas mal de moments à passer ensemble, poursuivit le musicien. Essayons de faire que cela soit un bon moment.

    Geoffrey Trubert éclaircit sa voix, leur souhaita la bienvenue, leur annonça que Tamara et Arsène seraient à leur service et quitta le petit salon. Tamara distribua les cartes pendant que Barbaluc proposait un apéritif. Il y eut des jus d’ananas, de tomate, un Daïquiri, un Martini.

    — Qu’avez-vous comme whisky ? demanda

    Vous aimez cet aperçu ?
    Page 1 sur 1