Contes sur l'Amour
Par H.C. Andersen
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Aperçu du livre
Contes sur l'Amour - H.C. Andersen
Contes sur l’Amour
Translated by
P. G. la Chasnais
Copyright © 2019, 2019 Hans Christian Andersen and SAGA Egmont
All rights reserved
ISBN : 9788726353730
1. e-book edition, 2019
Format : EPUB 2.0
All rights reserved. No part of this publication may be reproduced, stored in a retrievial system, or transmitted, in any form or by any means without the prior written permission of the publisher, nor, be otherwise circulated in any form of binding or cover other than in which it is published and without a similar condition being imposed on the subsequent purchaser.
SAGA Egmont www.saga-books.com – a part of Egmont, www.egmont.com
La bergère et le ramoneur
Avez-vous jamais vu une armoire de bois vraiment vieille, toute noircie par l’âge, où sont sculptés des fioritures et des feuillages ? Un tel bahut se trouvait dans un salon, il provenait de l’arrière-grand’mère. Des roses et des tulipes y étaient sculptées du haut en bas ; et parmi les spirales les plus singulières des petits cerfs montraient leur tête aux nombreuses branches, et au milieu du bahut était découpé un homme entier, plutôt cocasse à voir, et qui grimaçait, on ne pouvait pas appeler ça un rire, il avait des pattes de bouc, de petites cornes au front, et une longue barbe. Les enfants de la maison l’appelaient toujours le major-général-commandant-en-chef-aux-pieds-de-bouc, ce qui est un nom assez long à énoncer, et il n’y a pas beaucoup de gens qui portent ce titre-là ; et ç’avait été un travail de le faire sculpter. Enfin, il était là ! et toujours il regardait la table placée sous le miroir, car une charmante petite bergère en porcelaine s’y tenait ; ses souliers étaient dorés, sa robe gentiment troussée avec une rose rouge, et elle avait un chapeau d’or et une houlette de bergère ; elle était exquise ! Tout près d’elle se tenait un petit ramoneur, noir comme du charbon, mais aussi en porcelaine ; il était aussi propre et beau que n’importe qui ; il était ramoneur, c’était seulement ce qu’il représentait ; le fabricant de porcelaine aurait pu aussi bien faire de lui un prince, car cela revenait au même !
Il se tenait là gentiment avec son échelle, et son visage était blanc et rose comme celui d’une fille, et c’était là, en somme, un défaut, car il aurait bien pu y avoir un peu de noir. Il était tout à côté de la bergère ; on les avait placés là, tous les deux, et, puisqu’ils y étaient, ils s’étaient fiancés ; ils se convenaient, en effet, ils étaient jeunes, de la même porcelaine, et tous deux également fragiles.
Près d’eux se trouvait encore une poupée, trois fois plus grande, c’était un vieux Chinois qui pouvait hocher la tête ; lui aussi était en porcelaine, et il se prétendait le grandpère de la bergère, mais il ne pouvait pas le prouver ; il affirmait qu’il avait autorité sur elle, aussi avait-il fait signe de la tête au major-général-commandant-en-chef-aux-pieds-de-bouc, qui avait demandé la main de la bergère.
— Tu auras là un mari, disait le vieux Chinois, un mari qui, je crois bien, est en acajou, il fera de toi une major-général-commandant-en-chef-aux-pieds-de-bouc, il a tout le bahut plein d’argenterie, sans compter ce qu’il a dans des cachettes mystérieuses.
— Je ne veux pas aller dans la sombre armoire, disait la petite bergère, j’ai entendu dire qu’il a onze femmes en porcelaine là-dedans !
— Eh bien, tu seras la douzième, dit le Chinois ; cette nuit, aussitôt que ça craquera dans la vieille armoire, vous célébrerez la noce, aussi vrai que je suis Chinois !
Et il hocha la tête et s’endormit.
Mais la petite bergère pleura et regarda le chéri de son cœur, le ramoneur en porcelaine.
— Je crois, dit-elle, que je vais te prier de venir avec moi dans le vaste monde, car nous ne pouvons pas rester ici !
— Je veux tout ce que tu veux, dit le petit ramoneur ; partons tout de suite, je pense que j’aurai de quoi t’entretenir avec mon métier.
— Si seulement nous étions en bas de la table, dit-elle ; je ne serai pas heureuse tant que nous ne serons pas dans le vaste monde !
Et il la consola et lui montra où elle devait poser son petit pied sur les ornements sculptés et les feuillages au long du pied de la table, il s’aida aussi de son échelle, et ils furent en bas sur le parquet, mais lorsqu’ils regardèrent la vieille armoire, il y virent une grande agitation ; tous les cerfs sculptés allongeaient leurs têtes davantage, dressaient leurs branches et tournaient le cou ; le major-général-commandant-en-chef-aux-pieds-de-bouc sauta en l’air, et cria au vieux Chinois :
— Voilà qu’ils se sauvent ! Ils se sauvent !
Ils furent un peu effrayés, et, vite, sautèrent dans le tiroir de la table à ouvrage.
Il y avait là deux ou trois jeux de cartes qui n’étaient pas complets, et un petit théâtre de poupées, qui était dressé, autant que cela pouvait se faire ; on y jouait la comédie, et toutes les dames, de carreau et de cœur, de trèfle et de pique, étaient assises au premier rang et s’éventaient avec leurs tulipes, et derrière elles se tenaient tous les valets, montrant qu’ils avaient de la tête, à la fois en haut et en bas, comme l’ont les cartes à jouer. La comédie montrait deux êtres qui ne devaient pas être l’un à l’autre, et la bergère pleura sur leur sort, car c’était comme sa propre histoire.
Je ne peux pas supporter ça ! dit-elle ; il faut que je sorte du tiroir !
Mais lorsqu’ils arrivèrent sur le parquet, et regardèrent en haut vers la table, le vieux Chinois était réveillé, tout son corps chancela, il tomba comme un paquet.
— Voilà le vieux Chinois qui vient ! cria la petite bergère, et elle tomba sur ses genoux de porcelaine, tant elle était désolée.
— J’ai une idée, dit le ramoneur. Si on grimpait dans la grande potiche fourre-tout qui est dans le coin ; nous y