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Napoléon En 1812. Mémoires Historiques Et Militaires Sur La Campagne De Russie Par Le Comte Roman Sołtyk: Général De Brigade d’Artillerie Polonais, Officier Supérieur A l’État-Major De Napoléon
Napoléon En 1812. Mémoires Historiques Et Militaires Sur La Campagne De Russie Par Le Comte Roman Sołtyk: Général De Brigade d’Artillerie Polonais, Officier Supérieur A l’État-Major De Napoléon
Napoléon En 1812. Mémoires Historiques Et Militaires Sur La Campagne De Russie Par Le Comte Roman Sołtyk: Général De Brigade d’Artillerie Polonais, Officier Supérieur A l’État-Major De Napoléon
Livre électronique372 pages5 heures

Napoléon En 1812. Mémoires Historiques Et Militaires Sur La Campagne De Russie Par Le Comte Roman Sołtyk: Général De Brigade d’Artillerie Polonais, Officier Supérieur A l’État-Major De Napoléon

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« Patriote polonais passé à l’état-major de Napoléon en 1812 et fait prisonnier à la bataille de Leipzig. Ces mémoires n’embrassent que la campagne de Russie. » p 155 - Professeur Jean Tulard, Bibliographie Critique Sur Des Mémoires Sur Le Consulat Et L’Empire, Droz, Genève, 1971
LangueFrançais
ÉditeurWagram Press
Date de sortie6 nov. 2015
ISBN9781786251015
Napoléon En 1812. Mémoires Historiques Et Militaires Sur La Campagne De Russie Par Le Comte Roman Sołtyk: Général De Brigade d’Artillerie Polonais, Officier Supérieur A l’État-Major De Napoléon
Auteur

Général De Brigade Comte Roman Sołtyk

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    Napoléon En 1812. Mémoires Historiques Et Militaires Sur La Campagne De Russie Par Le Comte Roman Sołtyk - Général De Brigade Comte Roman Sołtyk

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    Text originally published in 1836 under the same title.

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    NAPOLEON en 1812

    Mémoires historiques et militaires sur la campagne de Russie

    par

    le comte Roman Soltyk

    TABLE DES MATIÈRES

    Contents

    TABLE DES MATIÈRES 4

    AVANT-PROPOS 5

    EPITRE DEDICATOIRE 6

    CHAPITRE I 7

    Détails préliminaires. — Réunion de l’armée française sur le Niémen. — Sa composition et ses stations préparatoires. — Force de l’armée moscovite et sa position. — Alexandre, à Vilna, médite déjà l’abaissement de la France. — Napoléon, sur les bords du Niémen, élabore son système continental. — Son travestissement au bivouac. — Le major Suchorzewski. — Cultivateurs lithuaniens en présence de Napoléon. — Incident singulier. — Passage du Niémen. 7

    CHAPITRE II 17

    Description de Kovno. — Entretiens de Napoléon avec Poniatowski. — Mémoire de Sokolnicki. — Système militaire de l’Empereur sur la campagne de Moscou. — Position des Moscovites. — Dévastations par les traîneurs. — Arrestation des plus coupables. — Fantassins ennemis faits prisonniers. — Questions qui leur sont faites par Napoléon. — Son entrée à Vilna. — Organisation de sa maison militaire. — Sa manière de vivre. 17

    CHAPITRE III 26

    Mission de Balachov, ses instructions secrètes. — La diète de Pologne se confédère. — M. de Pradt. — Organisation du gouvernement de Lithuanie. — Lenteur des préparatifs. — Présentation à la cour. — Dames lithuaniennes. — Bal du général Pac. — Députation de la confédération. — Czartoryski et Soltyk. — Dévastation de la Lithuanie. — Allocution de la députation à Napoléon. — Sa réponse. — Dîner à l’évêché. — Paroles mémorables de l’Empereur. — Une dame moscovite promet un million à qui le prendra. — Travail de Sokolnicki. 26

    CHAPITRE IV 35

    Mouvements des corps de la Grande Armée. — Macdonald à Jacobstadt. — Murat, Davout, Ney, Oudinot  à Wylkomierz; ils se portent sur la Dvina. — Doktorov est au moment d’être coupé. — Le vice-roi à Iwie. — Commandement du maréchal Davout; il arrive à Minsk. — Le roi à Westphalie. — Bagration; il passe la Bérézina. — Camp de Drissa abandonné par les Moscovites. — Napoléon quitte Vilna. — Batailles de Vitebsk et Moguilev. — Hauts faits de la cavalerie polonaise. — Napoléon devant Vitebsk. — Députation polonaise; mécontentement de Napoléon. — Poniatowski, Radziwill. — Le général Chasseloup. — Séjour de Napoléon à Vitebsk. — Diverses anecdotes. — Système de guerre de Napoléon. — Position de son armée. 35

    CHAPITRE V 50

    Reprise des opérations de l’armée de Barclay. — Elle s’avance sur Vitebsk. — Dispositions de Napoléon. — Passage du Dniéper exécuté par la grande armée. — Réunion de Napoléon avec sa droite. — Fausse manœuvre de Barclay. — Portrait du roi de Naples. — Combat de Krasnoïé. — Anecdote sur Napoléon. — Notre arrivée devant Smolensk. — Bataille du 16 et du 17. — Trait du maréchal Ney. — Témérité de Sokolnicki. — Aspect de Smolensk au moment de l’entrée de nos troupes. — Otages polonais devant Napoléon. — Reconnaissance que fait le général Sokolnicki, dans la matinée du 18. 50

    CHAPITRE VI 66

    Dispositions de l’Empereur. — Ney franchit le Dniéper. — Fausse direction de l’armée moscovite. — Combat de Valoutina. — Mort de Gudin. — Retraite des Moscovites sur Dorogobouge. — Revue impériale; distribution de récompenses. — Opérations des corps de Macdonald, Oudinot, Saint-Cyr. — Bataille de Polotsk. — Opérations de Dombrowski. — Marche de Tormassov; il est repoussé. — Bataille de Borodino. — Retraite des Moscovites sur le Styr. — Séjour de Napoléon à Smolensk. — Divers partis qu’il pouvait adopter. — Force des armées belligérantes. Napoléon est décidé à marcher sur Moscou. — Son imprévoyance, quant à l’organisation des quartiers d’hiver de son armée. 66

    CHAPITRE VII 79

    Marche sur Moscou. — Passage du Dniéper. — Barclay prend position à Dorogobouge. — Il se retire sur Viazma. — Cosaque prisonnier amené à Napoléon. — Koutouzov prend le commandement de l’armée moscovite. — Allocution mémorable de l’Empereur. — Il arrive à Gjatsk. — Les deux partis se préparent à livrer bataille. — Combat de Chevardino, prise de la redoute de ce nom. — Proclamations et apprêts des deux partis. 79

    CHAPITRE VIII 89

    BATAILLE DE LA MOSKOVA 89

    CHAPITRE IX 100

    Bivouac impérial. — Conversation intéressante entre le roi de Naples et le maréchal Ney. — Désorganisation de l’armée moscovite. — L’armée de Napoléon occupe Mojaïsk, et s’y repose. — Aspect des hôpitaux de cette ville. — Napoléon marche sur Moscou. — Le roi de Naples aux avant-postes. — Vue imposante de la capitale de l’empire des czars. — Souvenirs de l’ancienne Pologne. — Parlementaire moscovite. — Armistice. — Retraite de l’armée de Koutouzov. — Otages polonais et prisonniers moscovites. — Napoléon devant Moscou; il est morne et silencieux. — Aspect de l’intérieur de  Moscou. — Position de l’armée française. — Hôtel Moussin-Pouchkin. — Commencement de l’incendie. Danger que je cours dans la nuit suivante. 100

    CHAPITRE X 112

    Description du Kremlin; salle du couronnement; drapeaux turcs et polonais; trône de Catherine. — Incendie de Moscou. — Incendiaires fusillés. — Nuit terrible. — Danger imminent que court l’état-major du général Sokolnicki. 112

    CHAPITRE XI 119

    Napoléon quitte Moscou; son séjour à Pétrovski; il retourne au Kremlin. — Aspect de Moscou après l’incendie; les ressources que nous y trouvons. — Fouille des caves. — Démoralisation d’une partie des soldats. — Efforts de Napoléon pour rétablir l’ordre. — Travaux de Napoléon. — Envoyé de Yakovlev à Pétersbourg. — Sokolnicki. — Emissaires secrets. — Double espion. — Mouvement des armées du roi de Naples et de Koutouzov. — Combat de Czerykow. — Koutouzov à Taroutino. — Lauriston au quartier général ennemi. — Etat de l’armée. — Résolution de Napoléon de rester encore à Moscou. — Surprise de Vinkovo. 119

    CHAPITRE XII 135

    Napoléon quitte Moscou et marche à la rencontre de Koutouzov. — Mouvement de flanc de l’armée française pour tourner le camp de Taroutino. — Mortier fait sauter le Kremlin. — Koutouzov lève son camp et marche contre Napoléon. — Combat de Malo-Yaroslavetz. — Ordre énergique de l’Empereur. — Houra des Cosaques. — Napoléon est en danger d’être pris. — Les deux armées adverses en présence. 135

    CHAPITRE XIII 143

    Mouvement de Koutouzov sur Kalouga. — Napoléon a deux partis à prendre. — Il se décide à marcher sur Mojaïsk. — Retraite de l’armée de Moscou sur Viazma. — Marche de Koutouzov de Gontcharovo sur la même direction. — Bataille de Viazma. — Retraite de l’armée sur Smolensk. — Marche de Koutouzov sur Yelnia. — Héroïsme du maréchal Ney; il commande l’arrière-garde. — Désastre du vice-roi au passage du Vop. — Surprise de Liakhovo. — Napoléon rentre à Smolensk. — Désastres de la retraite. 143

    CHAPITRE XIV 149

    Mes vicissitudes pendant la retraite. — Moscovites fusillés. — M. Kopsz. — Opérations de Macdonald, Saint-Cyr, Victor, Dombrowski, Schwarzenberg. — Tableau de la force des deux armées opposées. — Jugement sur la position de Napoléon à cette époque. 149

    CHAPITRE XV 157

    Napoléon réorganise son armée à Smolensk. — Opérations de Victor. — Koutouzov marche sur Krasnoïé. — Napoléon quitte Smolensk. — Combat de Krasnoïé. — Napoléon se porte sur Orcha. — Retraite du maréchal Ney; son héroïsme. — Ma mission à Moguilev. — Prise de Minsk et de Borissov, par Tchitchagov. 157

    CHAPITRE XVI 168

    Napoléon s’arrête à Orcha; il veut rétablir l’ordre dans son armée, mais ne peut y parvenir; il se dirige sur Borissov. — Oudinot bat Pahlen, et prend Borissov. — Tchitchagov se retire derrière la Bérézina. — Mouvements des différents corps. — État déplorable de la grande armée. — Napoléon arrive sur la Bérézina. — Forces et positions respectives. — Passage et bataille de la Bérézina. — L’armée française se retire sur Vilna. — Prédiction singulière. — Napoléon part pour Paris. — Froid extraordinaire; ses effets. — Dissolution complète de l’armée. 168

    REQUEST FROM THE PUBLISHER 179

    AVANT-PROPOS

    Pendant que le grand-duc Constantin gouvernait à Varsovie, les Polonais ne pouvaient émettre leurs pensées. Le despotisme, habile dans ses calculs, comprend toute la puissance morale de la publicité, et en redoute les conséquences inévitables; aussi met-il au premier ordre de ses moyens d’oppression l’esclavage de la presse. La Pologne en a fait la douloureuse épreuve sous le gouvernement du grand-duc, dont tout le talent se bornait aux mesures coercitives, et qui, fidèle aux traditions de son origine, usa, comme tous les tyrans, de la force brutale pour anéantir la dignité de l’homme.

    Depuis ce temps, de funeste mémoire, les hommes et les souvenirs ont vieilli: les uns ont rongé, avec une douloureuse impatience, le frein imposé à leur constant patriotisme; les autres se sont effacés successivement à mesure que les hommes disparaissaient de la scène.

    Les nobles débris de nos armées, épars et contristés, pourront difficilement fournir des mémoires assez complets, assez exacts pour que l’historien à venir y puisse trouver des matériaux suffisants.

    Toutefois le désespérant exil et la trop longue inaction de l’émigration polonaise permettent à ceux d’entre les réfugiés qui ont fait partie de la grande armée de se livrer à des travaux littéraires en rapport à leur position politique et militaire, et quelques-uns d’entre eux pourront, du moins en partie, réparer la perte de temps occasionnée par les circonstances en rassemblant des détails qui tiendront lieu de renseignements plus complets. C’est pour eux tous un devoir imposé à leur civisme; ils sont décidés à remplir cette tâche avec une loyauté garantie par d’honorables antécédents; heureux si les sentiments qui les guident sont appréciés à leur juste valeur !

    Déjà plusieurs journaux ou écrits périodiques, organisés à Paris, réunissent sur ce sujet des documents précieux; entraîné par l’exemple, j’ai cru devoir payer mon tribut à l’histoire, en consignant dans une relation fidèle les faits que ma position personnelle m’a permis d’observer. Je commence par publier ceux relatifs à la campagne de 1812, que j’ai faite tout entière dans l’état-major de Napoléon, ce qui m’a procuré l’occasion de voir de près le grand homme, de scruter sa manière d’être, son infatigable activité, sa détermination et son génie.

    Que si, en présentant un récit succinct des évènements de la guerre, l’on me voit donner quelque extension aux détails relatifs à la Pologne, et surtout à son armée, c’est bien moins par une prédilection nationale que par un sentiment de sévère impartialité, parce que dans plus d’un pays, et dans des circonstances remarquables, plusieurs écrits ont été, à leur égard, sobres d’équité, et que chacun doit être traité selon ses œuvres.

    Je n’ai pas eu en vue d’élever de contestation avec personne, ou de donner des démentis à ceux qui m’ont précédé: je viens combler des lacunes qui ont pu échapper aux recherches de mes devanciers, ajouter ce que j’ai vu à ce qu’ils ont vu eux-mêmes; j’écris en présence de mes contemporains, de mes compagnons d’armes, des guerriers français, de mes compatriotes vivants, qui pourront me juger.

    EPITRE DEDICATOIRE

    SOLDATS DE LA GRANDE ARMÉE !

    Vous qui, en 1812, avez su braver les périls des combats, la faim et le froid, et qui, au milieu de tant de dangers et de désastres, avez conservé intact l’honneur de vos drapeaux :

    Recevez ce faible tribut d’un frère d’armes qui a partagé vos travaux et vos vicissitudes; puisse un jour votre grand exemple trouver des imitateurs, et vos successeurs, aussi vaillants et plus heureux que vous, accomplir la grande œuvre que vous aviez entreprise, abaisser l’insolent orgueil des Czars et régénérer ma Patrie !

    Roman Soltyk, Général polonais.

    Paris, 5 mai 1836.

    CHAPITRE I

    Détails préliminaires. — Réunion de l’armée française sur le Niémen. — Sa composition et ses stations préparatoires. — Force de l’armée moscovite et sa position. — Alexandre, à Vilna, médite déjà l’abaissement de la France. — Napoléon, sur les bords du Niémen, élabore son système continental. — Son travestissement au bivouac. — Le major Suchorzewski. — Cultivateurs lithuaniens en présence de Napoléon. — Incident singulier. — Passage du Niémen.

    A l’ouverture de la campagne de 1812, je me trouvais à la tête d’un escadron du fameux 6e régiment de lanciers polonais, qui a laissé tant de glorieux souvenirs.

    Ce régiment, formé, dans l’origine, par le général Dombrowski, s’était distingué, pendant la campagne de 1809, entre toutes les troupes du duché de Varsovie, par l’excellent esprit qui l’animait. Il avait à citer plus d’un trait brillant de courage, et il avait eu des succès si extraordinaires, qu’il avait fait quatre fois autant de prisonniers à l’ennemi, que l’effectif de sa propre force numérique.

    Quoique je ne fusse entré au service que depuis trois ans, j’étais parvenu, en 1811, à l’âge de vingt ans, au grade de chef d’escadron dans ce régiment. Cet avancement rapide était dû, je le confesse, moins à mon mérite personnel qu’à des circonstances favorables, et à la bienveillante amitié du prince Joseph Poniatowski, qui commandait en chef nos armées. Il est vrai, toutefois, que, comme élève de l’École Polytechnique de France, j’avais droit, d’après ses constitutions, au grade d’officier d’artillerie; nommé capitaine, je fis la campagne de 1809, à la tête d’une compagnie d’artillerie légère, que j’avais formée à mes frais; enfin, après la guerre, on m’honora d’un grade supérieur.

    Chef d’escadron du 6e de lanciers, qui alors tenait la chaîne d’avant-postes de la grande armée, et bordait le Niémen, déjà je me berçais de projets ambitieux pour l’avenir: dans cette illusion, si ordinaire à l’inexpérience de la jeunesse, je me flattais d’acquérir quelque gloire dans les rangs de mon brave régiment, lorsque la destinée m’en éloigna tout à coup pour me placer dans une position, sinon plus avantageuse, du moins plus intéressante.

    Napoléon m’avait nommé, sans que je le susse, aide-de-camp du général de division Sokolnicki, qu’il venait d’attacher tout récemment à son état-major. Ce général avait suivi l’empereur, de Paris à Königsberg, et, à la demande de mon père, il m’avait choisi pour son aide-de-camp.

    Pour ne pas anticiper sur les faits, et ne pas intervertir la marche de mon récit, j’exposerai ces faits, autant que possible, dans l’ordre et l’enchaînement sous lesquels ils se sont présentés à mon observation, pendant la journée du 23 juin alors que j’eus, pour la première fois, le bonheur d’approcher du grand homme, de lui parler et de l’entendre: cette journée devait être féconde pour moi en événements. J’y reviendrai en temps opportun.

    Vers la fin de juin, Napoléon avait réuni son armée sur les frontières de l’empire moscovite. Les auteurs qui m’ont précédé ne s’accordent pas parfaitement sur la force numérique de cette armée; mais, si l’on compare l’état de situation émané du ministère de la guerre avec l’effectif arrivé sur les frontières, il en résulte que cet effectif s’élevait au moins à 400,000 hommes{1} , répartis sur les points ci-après désignés, savoir :

    1° Vis-à-vis de Kovno, sur le Niémen, se trouvaient réunis trois corps commandés, le premier, par le maréchal Davout; le deuxième, par le maréchal Oudinot; le troisième, par le maréchal Ney; plus, deux corps de cavalerie de réserve, commandés, l’un par le général Nansouty, et l’autre par le général Montbrun; la vieille garde à pied, commandée par le maréchal Lefebvre; la jeune garde aux ordres du maréchal Mortier, et la garde à cheval sous ceux du maréchal Bessières. Tous ces corps étaient sous la direction immédiate de Napoléon.

    2° A Pilony, à environ cinq lieues au sud de Kovno, il y avait le quatrième corps (armée d’Italie), sous les ordres du prince Eugène; le sixième corps (Bavarois), sous ceux du général Gouvion-Saint-Cyr; le troisième corps de cavalerie de réserve, dirigé par le général Grouchy (ce corps se réunit ensuite à la colonne impériale); tous ces corps étaient commandés par le vice-roi d’Italie.

    3° Vis-à-vis de Grodno étaient le cinquième corps (Polonais), aux ordres de Poniatowski; le huitième (Westphaliens), dirigé par le général Vandamme; le quatrième corps de cavalerie de réserve, aux ordres du général Latour-Maubourg; à Tykoczin, vis-à-vis de Bialystok, le septième corps (Saxons), qui obéissait au général Reynier. Ces quatre derniers corps étaient sous le commandement supérieur du roi de Westphalie.

    4° A notre extrême gauche, à Tilsit, était le deuxième corps, commandé par le maréchal Macdonald; et, à notre extrême droite, le corps auxiliaire autrichien, aux ordres du prince de Schwarzenberg, vis-à-vis de Drochiczyn.

    Indépendamment de ces forces, l’empereur avait deux réserves: la première, aux ordres du maréchal Victor (neuvième corps), sur l’Oder, en première ligne; et la deuxième, aux ordres du maréchal Augereau, qui était établie sur la ligne de l’Elbe.{2}

    L’armée moscovite s’élevait à environ 255,000 hommes, sans faire entrer en compte les garnisons des différentes places situées sur la ligne de la Dvina et de la Bérézina: elles étaient distribuées de la manière suivante :

    La première armée, aux ordres de Barclay de Tolly, qui occupait l’étendue de pays situé entre la mer Baltique et Lida, était forte de 130,000 hommes, et composée des corps de Wittgenstein, Baggovout, Toutchkov, Chouvalov, Doktorov, des gardes commandées par le grand duc Constantin et des corps de cavalerie aux ordres d’Ouvarov, Korf et Pahlen, enfin des cosaques de Platov.

    La deuxième, commandée par Bagration, comptait 65,000 hommes à l’effectif, et s’étendait depuis Lida jusqu’à Grodno. Elle était formée des corps de Ráievski, Barazdyn, Gortchakov, du corps de cavalerie de Vassiltchikov et Sivers, d’une division des cuirassiers Knoryng, et de différents corps de troupes irrégulières.

    La troisième armée, sous le commandement de Tormassov, présentait un total de 45,000; elle était cantonnée en Volhynie, et composée des corps de Markov, Kamenski et Saken, de la cavalerie de Lambert et quelques cosaques.

    Enfin un corps de réserve de 15,000 hommes, confié au général Ertel, était cantonné près de Mozyr; il ne comptait presque que des recrues.

    D’après ces dispositions, on voit que Napoléon avait réuni, devant le centre de l’armée moscovite, la plupart de ses forces, puisque les deux corps de Macdonald et de Schwarzenberg étaient seuls détachés, et que l’ennemi ne pouvait lui opposer, sur ce point, que 195,000 hommes.

    Du 24 juin au 2 juillet, l’empereur fit franchir la frontière à ces différents corps d’armée, et poussa son centre en pointe sur Vilna.

    Les Moscovites avaient néanmoins rassemblé une masse considérable de troupes sur les bords de la Vilia et du Niémen. Kovno se trouve au confluent de ces deux rivières, et il était très important pour Napoléon de s’en emparer.

    Alexandre était pendant ce temps à Vilna, où il se préparait sérieusement à la guerre; il s’efforçait, par tous les moyens, de se concilier l’affection des Lithuaniens, usant envers eux de sa duplicité ordinaire, et de ces formes insinuantes qui lui valurent plus d’un admirateur. Mais, dans cette circonstance, ces moyens furent sans succès.

    Les deux partis, pour mieux cacher leurs desseins, parlaient de paix, tandis qu’ils se préparaient sérieusement à la guerre; elle devenait en effet inévitable. Sans doute, dans le fond de sa pensée, Napoléon désirait arracher la Pologne au czar; mais il voulait surtout forcer celui-ci à adopter le système continental, qu’il considérait comme le levier au moyen duquel il devait abattre la puissance de l’Angleterre, tandis que l’une ou l’autre de ces mesures aurait été en même temps le signal de la mort pour l’empire moscovite.

    Alexandre, de son côté, demandait, comme condition principale, que l’armée française évacuât la Prusse et la Poméranie suédoise, et repassât le Rhin. Poussé par l’Angleterre, il voulait abaisser la France; il devenait donc nécessaire de recourir aux armes, et de commencer une lutte qui pût décider entre des prétentions si opposées.

    Le 6e régiment de lanciers, dont je faisais partie, venait d’être mis sous les ordres du général Bruyères, qui commandait une division de cavalerie française destinée à marcher à l’avant-garde.

    Depuis le 20 juin, cette division était arrivée; mais sa présence était cachée à l’ennemi par les forêts immenses qui couvrent les bords du Niémen. Les seuls avant-postes polonais pouvaient être aperçus de la rive opposée.

    Le 23 juin, nos cavaliers reposaient encore dans leurs bivouacs, lorsqu’une voiture de voyage, attelée de six rapides coursiers et arrivant au grand trot par la route de Königsberg, s’arrêta tout à coup au milieu de notre camp; elle n’était escortée que de quelques chasseurs de la garde, dont les chevaux étaient haletants et harassés de fatigue.

    La portière s’ouvrit, et l’on vit Napoléon sortir avec vivacité de la voiture, accompagné du prince de Neuchâtel; aucun des aides-de-camp, aucun officier d’ordonnance ne se montraient. Peu après, le général Bruyères arriva seul, au galop. Napoléon était vêtu de son uniforme de chasseur de la garde; il paraissait très fatigué du voyage, et ses traits offraient l’empreinte de la préoccupation. Quelques officiers, parmi lesquels je me trouvais, ainsi que le major du régiment (Suchorzewski), accoururent. Napoléon fit rapidement quelques pas vers le major, et lui demanda où était le commandant du régiment; Suchorzewski, sans se déconcerter de l’absence du colonel qui reposait encore, répondit qu’il le remplaçait, et qu’il était prêt à recevoir ses ordres. Alors l’Empereur lui demanda la route du Niémen, et s’informa où étaient les avant-postes. Il fit diverses autres questions sur la position des Moscovites. Tout en continuant ses interrogations, il demanda à changer d’habit, voulant prendre l’uniforme polonais; car il avait été convenu, ou plutôt ordonné, qu’aucun militaire français ne serait montré aux Moscovites. Il mit donc has son habit, le prince de Neuchâtel fit de même, Suchorzewski, moi et le colonel Pagowski, qui venait d’accourir, suivîmes son exemple, ainsi que le général Bruyères; de sorte que nous nous trouvâmes cinq ou six personnes en chemise au milieu du bivouac, entourant l’empereur, et chacun de nous tenant son uniforme à la main. Les Polonais offraient les leurs aux Français, ce qui présentait un tableau singulièrement original. De tous nos uniformes, la redingote du colonel Pagowski et son bonnet de police convinrent le mieux à l’empereur. On lui avait d’abord présenté un bonnet d’officier de lanciers; mais il avait refusé, disant qu’il était trop lourd. Tout cela fut l’affaire de quelques minutes. Berthier se revêtit aussi d’un uniforme polonais. On amena promptement les chevaux du colonel. Napoléon monta sur l’un d’eux et Berthier sur l’autre; le lieutenant Zrelski, dont la compagnie tenait ce jour-là les avant-postes, fut désigné pour accompagner l’empereur et lui servir de guide. Ils se rendirent à Alexota, village distant d’une lieue du point de départ, situé vis-à-vis de Kovno, et qui n’en est éloigné que d’une portée de canon. L’empereur mit pied à terre dans la cour d’une maison, appartenant à un médecin, dont les fenêtres avaient vue sur le Niémen, et d’où l’on apercevait facilement les environs (j’avais moi-même, trois jours auparavant, levé le plan de Kovno de ce même point); de là Napoléon reconnut parfaitement le pays, sans pouvoir être lui-même aperçu: ses chevaux furent soigneusement cachés dans la cour. Après avoir terminé cette reconnaissance, Napoléon revint à notre bivouac. Il voulut avoir des détails sur la position des ennemis. Le colonel lui ayant dit que je connaissais parfaitement les environs, en ayant fait récemment la reconnaissance, il m’adressa plusieurs questions sur les divers gués praticables qui pouvaient s’y trouver; sur la conformation et les accidents du terrain; sur la position des ennemis. L’empereur me demandait surtout où se trouvaient les masses moscovites, si c’était sur la rive gauche ou sur la rive droite de la Vilia. Il désirait sans doute savoir si la route de Vilna était ouverte, voulant marcher dans cette direction, avec les masses principales, afin de s’emparer du centre des opérations, et couper les corps ennemis qui se trouvaient disséminés le long du Niémen.

    Au retour de Napoléon, nous remarquâmes un changement visible dans sa figure; il avait l’air gai, et même d’une humeur enjouée, étant sans doute satisfait de l’idée de la surprise qu’il préparait aux Moscovites pour le lendemain, dont il avait calculé d’avance les résultats. On lui apporta quelques rafraîchissements, qu’il mangea au milieu de nous, sur la grande route; il semblait prendre plaisir à son travestissement, et nous demanda, à deux reprises, si l’uniforme polonais lui allait bien. Après avoir déjeuné, il nous dit, en riant: « A présent il faut rendre ce qui n’est pas à nous. » Puis il ôta les vêtements qu’il avait empruntés, reprit son uniforme de chasseur de la garde, remonta en voiture, accompagné de Berthier, et partit brusquement. Le même jour, il visita d’autres points du Niémen, et choisit celui de Poniémon pour franchir le fleuve. Le général Haxo l’accompagnait dans cette course.

    Cette apparition soudaine de Napoléon nous parut à tous un songe; car nous ne savions même pas que la grande armée fût si rapprochée, et nous nous doutions moins encore de la présence de l’Empereur. Il est vrai qu’il avait apprécié de bonne heure toute l’importance du secret et de la célérité dans les mouvements militaires, et, à en juger par les miraculeux succès de ses entreprises, il faut convenir que ce fut là une des plus précieuses ressources de son génie.

    Deux heures après, nous vîmes arriver le général Sokolnicki à notre bivouac. Il venait expressément m’y chercher, pour me remettre la lettre de service, signée Berthier, qui me nommait son aide-de-camp. Je m’empressai d’obéir, et me préparai à rejoindre, le plus promptement possible, le général, qui m’avait devancé au quartier impérial.

    Il faut qu’ici je confesse que, quel que soit l’empire de l’amour-propre et de ces sentiments personnels qui nous font secrètement applaudir à un choix qui nous distingue, je cédai quelque temps à l’idée pénible de m’éloigner de mes bons camarades du 6e de lanciers et de ces intrépides soldats à la tête desquels je m’étais flatté de pouvoir m’attirer une distinction particulière, dans le cours de la campagne qui allait s’ouvrir, et qui semblait devoir être féconde en mémorables évènements. La peine sincère que j’en ressentis ne pouvait être affaiblie que par l’honorable compensation que le sort m’avait préparée, en me plaçant auprès du héros du siècle.

    Cependant j’éprouvais quelques inquiétudes pour mon service ultérieur; elles prenaient leur source dans les récits qu’on faisait fréquemment du caractère original et presque bizarre que l’on supposait au général Sokolnicki, quoique pourtant il fût le plus sensible, le meilleur et le plus brave des hommes, ainsi que j’ai pu m’en convaincre en une foule d’occasions.

    De tous les officiers du 6e de lanciers, celui qui me montra la plus franche et la plus constante amitié, ce fut, sans contredit, le major Suchorzewski, homme plein de loyauté, et du commerce le plus sûr comme le plus agréable; je vivais avec lui dans la plus grande intimité, et nous occupions assez habituellement la même chambre; son caractère tenait à la fois de l’antique et du moderne, du romain et du polonais; il possédait la force d’âme et la pureté de principes des anciens maîtres du monde, et y joignait la bravoure impétueuse et l’aimable abandon d’un habitant des bords de la Vistule. Fallait-il charger l’ennemi, on le voyait toujours au premier rang, portant le premier coup de sabre; et, après le combat, il se montrait si modeste, que lui seul semblait ignorer son mérite. Simple dans ses manières, il était d’une véritable insouciance pour tout ce qui tenait à la mise; et, quelques jours avant le commencement des hostilités, lui ayant fait observer que son uniforme était râpé et même percé en plusieurs endroits, il me répondit froidement :

    « Il est assez bon pour se faire tuer dedans. »

    Après avoir embrassé mes bons camarades, je me rendis au quartier impérial. Chemin faisant, je me présentai au général Bruyères, commandant de la division, pour lui donner communication de l’ordre qui m’appelait à faire partie de l’état-major impérial. Le général me félicita avec bienveillance d’une telle faveur, et me dit: « Puisque vous allez rejoindre l’Empereur, emmenez avec vous les paysans lithuaniens qui viennent d’arriver à nos avant-postes: peut-être voudra-t-il les interroger personnellement. »

    Afin de remplir les intentions du général, j’emmenai en effet dix ou douze cultivateurs du pays, qui avaient traversé le fleuve, la nuit précédente, et qui, pour se soustraire aux mauvais traitements des Moscovites, étaient venus se réfugier dans notre camp.

    Le bivouac de l’Empereur se trouvait à une lieue et demie de Kovno; et, à droite de la grande route, les tentes impériales étaient dressées sur

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