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Daisy
Daisy
Daisy
Livre électronique361 pages5 heures

Daisy

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À propos de ce livre électronique

Daisy, fille d'un ancien gangster londonien fortuné, John, et de son épouse espagnole, Teresa, a grandi à Marbella, sur la Costa del Sol, alias la Costa del Crime. Elle idolâtre ses parents et cherche à impressionner son père vieillissant en l'aidant à gérer les affaires familiales après ses études universitaires.

Cependant, une erreur de jugement désastreuse aboutit à une tragédie familiale, et sa mère met Daisy sur une voie plus sûre, celle d'aider la communauté locale en guise de pénitence.

LangueFrançais
Date de sortie21 avr. 2023
ISBN9781667455594
Daisy

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    Aperçu du livre

    Daisy - Owen Jones

    Daisy

    Owen Jones

    ––––––––

    Traduit par Florian PLATEL 

    Daisy

    Écrit Par Owen Jones

    Copyright © 2023 Owen Jones

    Tous droits réservés

    Distribué par Babelcube, Inc.

    www.babelcube.com

    Traduit par Florian PLATEL

    Dessin de couverture © 2023 Owen Jones

    Babelcube Books et Babelcube sont des marques déposées de Babelcube Inc.

    DAISY

    Une histoire entre vengeance et rédemption

    ––––––––

    par

    Owen Jones

    Traduit par

    Florian Platel

    Copyright © Avril 2023 Owen Jones

    Bangkok, et Fuengirola, Espagne

    Le droit d'Owen Jones d'être identifié comme l'auteur de cette œuvre a été revendiqué conformément aux sections 77 et 78 du Copyright Designs and Patents Act 1988. Le droit moral de l'auteur a été revendiqué.

    Dans cette œuvre de fiction, les personnages et les événements sont soit le fruit de l'imagination de l'auteur, soit utilisés de manière entièrement fictive. Certains lieux peuvent exister, mais les événements sont totalement fictifs.

    Daisy

    Une histoire entre vengeance et rédemption

    Par Owen Jones

    Publié par

    Megan Publishing Services

    https://meganthemisconception.com

    DÉDICACE

    Cette édition est dédiée à ma femme, Pranom Jones, qui me rend la vie aussi facile que possible – elle fait un excellent travail à cet égard.

    Merci également à Wes Waring pour ses conseils sur les fusils de précision.

    Le karma vous rendra tous la pareille.

    CITATIONS INSPIRANTES

    Ne croyez pas en quelque chose simplement parce que vous l’avez entendu,

    Ne croyez pas en quelque chose tout simplement parce des gens le disent et que c’est répété par de nombreuses personnes,

    Ne croyez pas en quelque chose simplement parce c’est écrit dans vos livres religieux,

    Ne croyez pas en quelque chose sur la seule autorité de vos professeurs et des anciens,

    Ne croyez pas aux traditions parce qu’elles ont été prononcées pour de nombreuses générations,

    Mais après observation et analyse, lorsque vous trouverez que tout est en accord avec la raison et est propice au bien et au profit de tout un chacun, alors acceptez-le et vivez pour cela.

    Gautama Buddha

    ———

    Grand Esprit, dont la voix est dans le vent, écoute-moi. Fais-moi grandir en force et en connaissance.

    Fais-moi contempler le coucher de soleil rouge et pourpre. Que mes mains respectent les choses que tu m'as données.

    Enseigne-moi les secrets cachés sous chaque feuille et chaque pierre, comme tu l'as enseigné aux gens depuis des siècles.

    Laisse-moi utiliser ma force, non pas pour être plus fort que mon frère, mais pour combattre mon plus grand ennemi : moi-même.

    Permets-moi de me présenter devant toi les mains pures et le cœur ouvert, afin qu'au fur et à mesure que ma vie terrestre s'estompe comme le coucher du soleil, mon esprit te revienne sans honte.

    (Basé sur une prière traditionnelle sioux)

    SOMMAIRE

    1 La Villa Blanca, Marbella, 1995

    2 La première vie de Daisy

    3 L’apprentissage

    4 Quand Daisy en apprend davantage

    5 Le côté obscur des affaires

    6 Mémoires d'une mère

    7 Une soirée agitée

    8 En quête d’identité

    9 Un plan qui se met en place

    10 La punition

    11 L’erreur de Daisy

    12 Répercussions

    13 Un prix trop cher

    14 Guérison

    15 La croisière

    16 L’enquête

    17 Une expérience incendiaire

    18 L’étau se resserre

    19 Révélations

    20 Le grand nettoyage

    21 Reconversion

    22 Les Refuges de Daisy

    23 Epilogue

    Les goules de Calle Goya

    À propos de l’auteur

    1 LA VILLA BLANCA, MARBELLA, 1995

    Teresa était allongée sur le lit, respirant profondément, un large sourire illuminant son visage, à côté de son patron, John, qui, à soixante-cinq ans, avait subi beaucoup trop d’outrages dans la vie pour être capable de jouer un rôle actif dans un amour passionnel. Il aimait qu'elle jure pendant leurs ébats, mais cela ne lui venait pas naturellement, et elle oubliait généralement de le faire dans le feu de l'action. Teresa avait quarante-deux ans et était fière que John soit son amant. En fait, elle l'aimait depuis des années, malgré la grande différence d'âge. Elle avait été attirée pour la première fois par cet Anglais distingué lorsqu'il venait lui acheter des produits sur le marché de Fuengirola, et elle était tombée amoureuse de lui presque dès le premier jour où il l'avait engagée comme cuisinière et gouvernante. Elle était loin de se douter à l'époque que ses fréquentes visites au marché étaient des prétextes pour la voir.

    — C'était génial, Teri, ma chérie... Oh, oui... Tu sais très bien t’occuper de moi.

    Teresa roula vers lui pour se pelotonner contre son corps. Elle mit son bras droit sur la poitrine de son amant et ils s’embrassèrent.

    — Tu es la meilleure, lui dit-il.

    — C'est facile pour moi de te rendre heureux, Johnny, parce que je t'aime. Tu es mon héros et mon sauveur, répondit-elle, comme elle le faisait souvent.

    Un bruit sourd, comme une explosion, retentit depuis l'extérieur. Le téléphone sonna alors que John tendait le bras pour l'attraper. C'était la personne qu'il était sur le point d'appeler, il le savait.

    — Qu'est-ce que c'était, Tony ? demanda-t-il sans la moindre trace d'anxiété dans sa voix.

    — Je ne suis pas sûr, patron, mais on n'a pas été touchés... Il fut interrompu par une deuxième explosion similaire à la première, puis une troisième d’un autre genre. Ça vient d'un peu plus loin sur la route. J'ai l'impression que ça se passe vers chez O’Leary d'après la fumée. Je sors pour essayer d’en savoir plus.

    Tony était costaud, une armoire à glace, mais chauve. C'était le chef de la sécurité de John et cela faisait dix ans qu’il travaillait pour lui.

    John l’entendait courir via le téléphone, il ne respirait même pas fort, puis il s'arrêta.

    — Je suis à environ deux cents mètres de leur portail d’entrée là. On dirait que la maison a été touchée, et leur portail... et il y a des morceaux de motos partout... Il y a deux hommes à terre... en feu... Oh ! Je crois qu'on les a achevés à coups de batte de base-ball, sur la nuque. Pour moi, ça ressemble à une attaque de lance-roquette. Je reviens. Je ne veux pas me faire choper comme témoin.

    — Non, bien sûr que non. Reviens, mais essaye de voir si tu peux trouver quelque chose en toute discrétion.

    Il raccrocha.

    Cinq minutes plus tard, John s’était rendormi, comme il le faisait souvent. Teresa se leva silencieusement, s’habilla et se remit au travail. Il était temps de s'occuper du dîner de son employeur.

    Pendant le repas, Tony briefa John sur ce qu'il s’était passé.

    — Ce n’est pas officiel, patron, mais ça vient d'un des gars d’O’Leary, donc j’avoue que c’est tout ce qu’on aura qui se rapprochera le plus de la vérité. C'était une attaque éclair où un lance-roquette a été utilisé. Apparemment, ils ont tiré sur leur premier passage. C’est passé à travers les grilles du portail et ça a atteint la maison. Le gardien, qui a dû remercier sa bonne étoile de ne pas s’être fait exploser, a répliqué avec quelques tirs.

    Les motards sont revenus par le portail et ont tiré une nouvelle fois, mais la traînée de flamme du lance-roquette a dû enflammer le carburant qui s'échappait d'un impact de balle dans le réservoir d'essence et celui-ci a explosé. La deuxième roquette a frappé le portail, ce qui devait être le but de la première, et l'a complètement déglingué. Quand la bécane a explosé et que les types se sont retrouvés dans les feux de l’Enfer, les gars d’O’Leary leur ont pété la nuque avec une batte pour être sûrs qu'ils ne reviendraient pas.

    — Qui est à l’origine de ça, Tony ?

    — Il a dit qu’il ne savait pas, mais quand j'ai suggéré que ça pouvait être un gang irlandais rival opérant depuis là-bas, il n'a pas nié.

    — À part les motards, personne d’autre n'a été blessé, n’est-ce pas ?

    — Le gardien a pris cher. Il a été blessé par des éclats d'obus, et les morceaux de fer forgé du portail explosé qu'il s’est pris dans la tronche n'ont rien arrangé, mais il va sûrement s’en tirer. Une femme de ménage s’est pris des éclats de verre, mais ça va. Les O’Leary se trouvaient à proximité de la piscine donc ils ont été blessés aussi.

    — La police est venue ? J'ai cru entendre des sirènes, mais je dormais à ce moment-là et j’ai pu rêver.

    — Oui... les pompiers et l’ambulance aussi, mais bien après que tout soit fini. Les O’Leary avaient déjà ramassé le gardien et la femme de ménage pour les emmener à l’hosto avec le Range Rover. L’ambulance s’est occupée des corps des motards ; les pompiers ont éteint la carcasse fumante de la moto puis ont vérifié la maison pour voir s'il n'y avait pas de dégâts structurels, quant à la police, elle a bouclé la zone. Il reste encore pas mal de monde là-bas qui vaquent à leurs occupations respectives. Ils m'ont demandé si j'avais vu quelque chose, mais je leur ai répondu que j’avais vu que de la fumée. Ils en ont pas grand-chose à foutre à partir du moment où il n’y a pas d’Espagnols impliqués.

    — Non, tu as raison. Super, merci Tony. Bien joué, comme d'habitude. Tu penses qu'il y a des risques pour nous ?

    — Non, patron, c’est juste ces enfoirés d’Irlandais... euh, pardon patron, ces Irlandais, qui se disputent un territoire. Rien à voir avec nous. Mais j'ai fait appel à quelques bras supplémentaires, juste au cas où.

    — Bien. Tu as déjà mangé ? demanda-t-il en se dirigeant vers la chaise.

    — Non, mais il y aura sûrement quelque chose qui m’attend au bureau à mon retour. Merci.

    — Comme tu veux, Tony. Tu es toujours le bienvenu, tu sais. Allez, va manger. Je te verrai plus tard lors de mes tournées.

    John appréciait de faire deux fois le tour du jardin près de la maison avant d'aller se coucher, une sorte de marche digestive.

    John Baltimore est venu pour la première fois à Marbella il y a vingt ans, quand il avait quarante-cinq ans. Mais à l’époque, il venait de manière sporadique, bien que ses séjours se rallongèrent au fur et à mesure. Il n’a pas fui comme beaucoup avant lui. Il s’est juste fait assez d'argent, et en a hérité aussi, lui permettant de réfléchir et de se dire que quitter le Royaume-Uni serait une bonne idée avant que certaines personnes, à savoir la police, le fisc et la presse, commencent à fouiner d'un peu trop près. Si on commençait à ouvrir certains dossiers, on parviendrait sûrement à remonter jusqu'à lui, alors il a préféré émigrer, sachant qu'il possédait, et son père avant lui, une propriété en Andalousie depuis des décennies.

    La presse avait surnommé la côte de la province de Malaga, la Costa del Crime, mais c’était plus proche de la vérité que ce que l’on croyait, surtout par rapport à la population britannique, qui, pour une minorité d’entre eux, représentait assez bien cette description. Une minorité tout de même assez importante dans la région, car une grosse partie de la mafia britannique s’était installée sur la Costa del Sol avec l'intention de mettre un terme à leurs anciennes activités criminelles, mais, l’oisiveté faisant, ils y retournèrent. Certains se contentèrent de mener leurs anciennes opérations à distance, et d'autres tentèrent de s'imposer auprès de la faune locale, espagnole ou autre, qui leur opposa une certaine résistance. Cela apportait souvent de la violence ; parfois les Britanniques gagnaient, parfois non.

    John avait tout abandonné en quittant l’Angleterre, mais avait tout de même quelques affaires juteuses sous la main ici, en Espagne, pour lesquelles pourtant il perdait petit à petit de l'intérêt. Même si, à cause de son acharnement au travail et n’ayant ni héritier ni épouse, il devait continuer. Il avait été marié trois fois, sans compter ses nombreuses conquêtes extraconjugales. Beaucoup de ses maîtresses ont prétendu porter son enfant, mais il n’en a jamais accepté la responsabilité, pour aucune, parce qu'il avait toujours l’espoir d'avoir un jour un héritier légitime. Mais ce jour n’arriva jamais et, à son âge, cela faisait longtemps qu’il avait perdu l’espoir d’en avoir jamais un.

    Il avait des projets pour que Teresa ne manque jamais de rien, comme il l'avait fait pour ses « vraies » épouses, et il caressait l’idée de donner le reste à une association caritative s’occupant de femmes ayant connu des moments difficiles. Son père et lui avaient souvent été responsables d'avoir mis des femmes dans ce genre de situations, ce n’était donc qu'un juste retour des choses.

    Le père de John, dont il porte le prénom, bien que son père se soit initialement appelé Sean, avait été envoyé par sa mère de Londres à Dublin pour l’empêcher de s'impliquer dans un soulèvement revendiqué par l’Irish Republican Brotherhood, dont des rumeurs avaient commencé à se répandre au sein des cercles concernés dès la fin 1914. Ils avaient prévu d’utiliser l'avantage que représentait la participation active des Britanniques dans la Première Guerre mondiale ; de plus, l’Allemagne leur avait offert des armes afin qu'ils puissent organiser une sorte de révolte. Elle avait eu peur pour sa sécurité après qu’un ami lui avait dit que John pensait de plus en plus sérieusement à rejoindre « la Cause » – réunir l’Irlande et se débarrasser de l'influence de Westminster.

    Il était devenu un délinquant dans le quartier de l’East End à Londres la première année de la Première Guerre mondiale, mais vivait dans la chambre d'une maison où des réfugiées belges étaient logées. Il y avait des centaines de milliers de réfugiés belges au Royaume-Uni, dont la plupart étaient des femmes et des enfants. Il avait remarqué que beaucoup d’entre elles devaient faire le trottoir pour s’en sortir, alors il eut la judicieuse idée d’emprunter de l'argent à un usurier pour louer une maison, qu'il transforma en bordel. Il avait engagé dix femmes belges plus ou moins jeunes qu'il faisait travailler nuit et jour toute la semaine, et, à la fin de l'année, il possédait une dizaine « d'affaires » de ce genre. En cinq ans, il parvint à devenir propriétaire de tout un tas de maisons.

    La première chose qu’il fit après avoir commencé à gagner de l'argent fut d'appeler ses jeunes frères pour venir l'aider dans ses affaires, nouvelles, mais incroyablement compliquées.

    Il devint millionnaire avant ses trente ans, ce qui le rendait particulièrement fier, lui qui était arrivé à Londres en 1914 avec moins d'une livre en poche.

    John junior était le fruit d’une des nombreuses liaisons entretenues avec les travailleuses, mais pas une liaison avec l’homme qu'il avait appelé père, son père adoptif, parce que ses propres parents avaient été tués par sa propre famille dans deux fusillades distinctes. John senior avait adopté John junior parce qu'il avait honte de ce que son frère avait fait, et de la manière dont sa progéniture s'était vengée. Le bruit courait également du manque de vigueur des spermatozoïdes présent dans la famille et John junior avait toujours pensé qu'il suivait ainsi la tradition de ses antécédents masculins.

    Deux mois plus tard, à la suite d’une nouvelle session de câlins endiablés, et avant que John ne tombe dans les bras de Morphée, Teresa lui murmura à l'oreille :

    — Johnny, mon héros, mon chéri, tu vas devenir papa...

    — Hein ? Mais de quoi tu parles, Teri ? Je ne peux pas avoir d’enfants... Je n’en ai jamais eu et je suis bien trop vieux maintenant ! En plus, tu m'as dit que tu étais ménopausée, donc tu ne peux pas en avoir non plus.

    — C’est ce que je pensais, ce bébé est un don du ciel, Johnny...

    — Si c’est vrai, c’est un putain de miracle. Tu as été voir un médecin ?

    — Non, pas encore, mais une femme sait ce genre de choses ; elle n’a pas besoin de la confirmation d'un médecin.

    — Une femme peut-être, mais un homme si, alors tu iras consulter demain, ma chérie.

    — Mais si je suis enceinte, Johnny, qu’est-ce que tu vas dire ?

    — C’est tout simplement impossible. Ni toi ni moi ne pouvons avoir d’enfant !

    — Mais si c’était le cas ?

    — Impossible je te dis. Tu délires... ou tu as pris du poids. Oui, c’est ça, tu as pris du poids.

    — Non, Johnny, notre bébé fait la taille d’une cacahuète. Je n'ai pas grossi à cause de ça. En fait, je fais le même poids depuis longtemps : cinquante-deux kilos, mais je porte la vie en moi. Aussi impossible que ça puisse paraître, je suis enceinte. J'ai déjà ressenti ça avant, mais oui, j’irai voir un médecin demain.

    — À la bonne heure ! Tu verras que j’ai raison.

    Quelques secondes plus tard, il s’était endormi et Teresa s'occupa de veiller au sommeil de son bien-aimé.

    Lorsque John apprit qu'il serait père avant la fin de l'année, il ne savait pas trop comment réagir. Tout semblait s’être passé très vite, mais, secrètement, il était empli de joie. Toutefois, sa partie cartésienne insista pour réclamer un test ADN. Après que l'amniocentèse lui prouva, dix semaines plus tard, qu'il allait réellement être père, il demanda à Teresa de l’épouser, mais il se heurta avec déception à une apparente réticence de sa promise.

    — Teri, je croyais que ça t’aurait fait plaisir de m'épouser, dit-il.

    — C’est le cas, avoua-t-elle tristement, mais je ne veux pas que le bébé que je porte en soit la raison. J'aurais préféré que tu me le demandes parce que tu m'aimes.

    — Mais je t’aime, Teri, tu le sais ça. Je ne suis juste pas très fortiche à parler de ce genre de choses, mais je pensais que tu le savais.

    — Une femme aime se l’entendre dire quand même, Johnny...

    — Je suppose que c’est le cas aussi pour un homme, ma chère, en tout cas ça l’est pour moi, je l’avoue, mais si tu le répètes autour de toi, je le nierais.

    — Sale macho, se moqua-t-elle gentiment en s'abandonnant dans le creux de ses bras. Tu veux l’entendre, mais tu ne veux pas donner le même plaisir aux gens que tu aimes. C’est un peu égoïste, tu ne trouves pas ?

    Il ne répondit pas tout de suite, mais Teresa voulait justement attendre.

    — Oui, je suppose que tu as raison, finit-il par admettre. Je suis vraiment désolé de ne pas t’avoir dit plus tôt que je t’aimais. De toute ma vie, je ne l’ai jamais dit à qui que ce soit, sauf peut-être à ma mère. Je ne m’en souviens pas. Je t’ai déjà parlé d’elle ? Elle s'appelait Fleur et venait de Belgique, mais là n’est pas le sujet de toute façon. Teri, est-ce que tu veux bien m’épouser ? Je serais l’homme le plus heureux du monde et, bien que ça fasse un peu ringard, je suis un homme d'action, pas de paroles... Mais ça je pense que tu le sais déjà.

    — Ce n’est pas du tout ringard, Johnny, c’est magnifique... Ses yeux s'embuèrent. Je veux t’épouser, Johnny. Je t'ai toujours aimé, mais je veux que tu me promettes que tu t’occuperas de notre enfant. Mon sort n’a pas d'importance, mais je veux que notre bébé ait toutes les attentions, sinon ça ne sert à rien que je reste ici.

    — Ma très chère Teresa, si tu m’épouses, notre bébé, garçon ou fille, héritera de tout ce que je possède.

    — Dans ce cas, Johnny, j'accepte. J'accepte de t’épouser.

    John voulait que la cérémonie de mariage ait lieu d’ici une semaine, mais Teresa avait insisté pour s'occuper de tout, correctement. Elle ne lui avait juste pas demandé de se convertir au catholicisme et n’avait pas demandé non plus à ce que le bébé soit élevé comme un catholique.

    À quatorze semaines, après un mariage fastueux, Teresa annonça à John qu'ils attendaient une petite fille. Elle avait eu peur que cela lui déplaise, mais elle ne détecta aucun signe en ce sens.

    Pour sa part, John pensa effectivement qu'il aurait pu être déçu, mais fut surpris de voir que cela n’était pas le cas.

    — Comment pourrait-on l'appeler ? demanda Teresa un jour au réveil.

    — Et si on l'appelait Daisy ? proposa-t-il.

    — Bien sûr, réfléchit-elle. Daisy... Marguerite en français... une perle... un joyau caché. Ce serait parfait pour notre fille, notre cadeau du ciel, qui aurait dû ne jamais voir le jour.

    2 LA PREMIÈRE VIE DE DAISY

    La grossesse de Teresa, sa troisième, bien que les autres se soient terminées prématurément, s'est déroulée sans problème, même si elle était naturellement anxieuse à cause de ce passif. John en était conscient et lui avait fourni une infirmière privée ainsi qu'une deuxième voiture, pour que le jardinier puisse l’emmener à l’hôpital, au cas où ni lui ni Tony n'aurait été disponible. Cependant, tout se passa bien, Daisy naquit à la maison le 14 décembre pendant un après-midi ensoleillé, avec l'assistance d'une sage-femme envoyée par la compagnie d'assurance de la famille. L'accouchement se déroula sans aucun problème et John explosa de joie à la vue de sa magnifique femme tenant dans ses bras leur beau bébé.

    John n’avait jamais été très fan de photos, et pourtant, en une semaine, il en avait des centaines. Il les montra à ses amis et connaissances, et lorsqu’ils disaient qu’elle avait son nez ou ses yeux, il était fier comme un coq, même s'il ne s’en rendait pas bien compte. Pour lui, elle était le portrait caché de sa chère Teresa, et il n’aurait pas voulu qu'il en fût autrement. Il ne l’emmenait jamais à l’extérieur de la propriété, mais il aimait la promener avec son landau dans le jardin, en lui décrivant les fleurs et les oiseaux, tout en s’assurant que personne ne l’écoutait. Il fit même fondre le cœur de Teresa un matin, car, en voulant entrer dans la chambre de Daisy, elle le vit lui chanter « Ah ! Vous dirai-je maman ».

    Lorsqu'il vit qu’elle l’écoutait, son visage devint rouge pivoine, et elle ne le revit plus jamais chanter de la sorte.

    Peu de temps après, les petites balades dans le jardin cessèrent, ce qui eut également des conséquences pour Teresa, parce que John n’avait pas l’habitude de sortir seul, il avait besoin de la compagnie de sa femme. Ce qui signifiait qu’ils allaient devoir trouver une nounou, et même si ce n’est pas vraiment ce que souhaitait Teresa, elle sentait qu’elle allait devoir céder, elle n’avait jamais rien pu refuser à John.

    Les périodes où Daisy restait avec sa nounou, Lisa, commencèrent à s'allonger et à devenir plus fréquentes, au point que le bébé montrait plus d'affection envers Lisa qu’envers sa propre mère. Cela lui brisa le cœur, sans qu’elle ne puisse rien y faire. À peu près à cette période, Tony remarquait que la petite Daisy était souvent seule dans son parc au milieu du jardin, alors il décida de passer un peu de temps avec elle pour jouer. Que quelqu'un le voit jouer avec un enfant comme un idiot ne lui posait pas de problèmes particuliers, lui qui avait toujours regretté de ne pas en avoir. Daisy avait l’air d’apprécier et ils devinrent bons amis.

    John s'absentait de la maison de plus en plus souvent, bien que son bureau se trouva là, mais ne sachant pas ce qu’il en était, cela ne le dérangeait pas. C’est comme cela qu'il avait été élevé.

    Même très jeune, Daisy semblait avoir l’esprit vif, apprenant l’espagnol et l'anglais à peu près à la même vitesse. Teresa en profita pour améliorer sa maîtrise de la langue de Shakespeare, qui était plutôt honorable compte tenu de la région et de son vécu. Cela pouvait s'avérer utile plus tard pour améliorer sa relation avec sa fille.

    Pourtant, malgré cela, Daisy grandissait plus ou moins seule, ou, plus précisément, avec des domestiques. Elle vivait dans la même villa que ses parents, mais John avait l’habitude d’être seul et ce n’est pas à son âge qu’il allait changer. Il aimait aller au restaurant le soir, et il demandait à sa femme de l’accompagner, à l'instar des femmes de ses amis, bien que cela se terminait souvent de la même façon après le repas : les femmes assises ensemble en bout de table et les hommes à l’opposé.

    À l’heure où ils rentraient à la maison, la nurse avait déjà couché la petite Daisy après lui avoir lu une histoire avant de dormir. Pour être honnête, la nurse de Daisy n’aurait pas pu l'aimer plus que si cela avait été sa propre fille, et la mère de Daisy faisait de son mieux pour compenser ses absences régulières, car elle ne parvenait pas à se libérer de ce sentiment de culpabilité qui en découlait ; cependant, elle était rassurée, car elle savait dorénavant que Daisy serait à l’abri, et c'était finalement tout ce qui comptait.

    Daisy n'aura jamais à avoir à faire un jour ce qu’elle avait fait, elle, pour assurer un avenir sûr pour elle-même et ses enfants.

    Daisy suivait le chemin de beaucoup d’enfants issus de familles aisées. Dans ses tendres années, cela évoluait entre se faire gâter par des parents se sentant coupables et se faire délaisser par ces mêmes parents, le tout dans la même journée ; puis, à l’âge de cinq ans, elle entra en maternelle, où là les enseignants se mirent à remplacer à la fois les parents et les nurses. Tout le monde était aux petits soins, mais cela ne faisait qu'accroître la confusion, l'isolement et la solitude des enfants concernés, y compris Daisy...

    En grandissant, elle manifesta une certaine insensibilité ; une solitaire ne recherchant pas nécessairement d'amis ou de compagnie. Cela n’empêcha pas cependant d'autres enfants de se lier d'amitié avec elle, mais aucun ne devint très proche à proprement parler. Elle n’avait aucune notion de ce que pouvait être une meilleure amie.

    L'école ne s'avéra pas tellement différente, si ce n’est que Daisy y excellait. La vérité étant qu’elle cherchait désespérément à attirer l’attention de son père. Elle était quasiment sûre d'avoir celle de sa mère, qui passait un peu plus de temps avec elle lorsqu’elle n’était pas retenue par ses « devoirs » liés  la vie sociale de son époux.

    C’est à cette étape de sa vie, au collège, qu’elle entendit parler pour la première fois des exploits et de la réputation de son père, celle d'un « dur à cuire ». Certains allèrent même jusqu'à le qualifier d'homme « sans pitié » ou de « tueur de sang-froid ». Cependant, malgré ces descriptions peu honorables, rien ne la fit davantage s'interroger sur son père, au contraire, elles ne firent que renforcer le statut de héros qu’elle se forgeait de lui dans son jeune esprit. Après tout, sa mère ne le considérait-elle pas elle aussi comme « son héros » ? Un qualificatif qu’elle utilisait volontiers assez fréquemment.

    Elle n’avait jamais parlé de ses sentiments vis-à-vis des fréquentes occasions où les gens parlaient mal de leur père, mais elle ne répondait pas non plus à ceux qui en parlaient avec admiration, bien que, en son for intérieur, elle bouillonnait de fierté pour cette personne dont elle commençait à en découvrir plus par les autres.

    Son école prodiguait un enseignement à la fois en anglais et en espagnol, elle possédait donc la maîtrise totale des deux langues. Elle se mélangeait aussi facilement avec les petits Espagnols de toutes origines sociales qu’avec les riches petits Britanniques. En fait, elle n’avait jamais rencontré de Britanniques pauvres, donc, jusqu’à ce qu’elle aille en pensionnat en Grande-Bretagne à seize ans pour

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