Hospitalité et substitution: Derrida, Levinas, Massignon
Par Leroux, Georges
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Hospitalité et substitution - Leroux, Georges
Hospitalité et substitution
Derrida, Levinas, Massignon
Georges Leroux
Les Presses de l’Université de Montréal
Gravures de Rembrandt van Rijn (1606-1669), Abraham accueillant les anges, 1656. Eau-forte et pointe sèche, 15,9 x 13,3 cm, Rijksmuseum, Amsterdam; Abraham renvoyant Agar et Ismaël, 1637. Eau-forte et pointe sèche, 12,6 x 9,7 cm, Bibliothèque nationale de France, Cabinet des Estampes, Paris.
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Titre: Hospitalité et substitution: Derrida, Levinas, Massignon / Georges Leroux.
Noms: Leroux, Georges, 1945- auteur.
Collections: Humanités à venir.
Description: Mention de collection: Humanités à venir | Comprend des références bibliographiques.
Identifiants: Canadiana (livre imprimé) 20200086707 | Canadiana (livre numérique) 20200086715 | ISBN 9782760642836 | ISBN 9782760642843 (PDF) | ISBN 9782760642850 (EPUB)
Vedettes-matière: RVM: Derrida, Jacques. | RVM: Massignon, Louis, 1883-1962. | RVM: Lévinas, Emmanuel. | RVM: Hospitalité.
Classification: LCC B2430.D484 L47 2020 | CDD 194—dc23
Dépôt légal: 3e trimestre 2020
Bibliothèque et Archives nationales du Québec
© Les Presses de l’Université de Montréal, 2020
www.pum.umontreal.ca
Collection «Humanités à venir»
dirigée par Ginette Michaud et Georges Leroux
En accueillant des essais brefs et la publication de grandes conférences, cette collection s’engage sur les chemins qu’ouvre aujourd’hui la pensée de ce qui vient, de ce qui arrive à un monde sans repères. Au confluent de la littérature et de la philosophie,elle inscrit son titre dans la recherche de nouvelles Humanités, libres et plurielles.
Table des matières
LIMINAIRE
REMERCIEMENTS
AVANT-PROPOS
OUVERTURE
Les sites pluriels de l’hospitalité
I
Le site biblique: la scène d’Abraham
II
Le site islamique: l’hospitalité sacrée
Note de l’auteur
Du même auteur
LIMINAIRE
Dix ans après la disparition de Jacques Derrida le 9 octobre 2004, nous avons souhaité inscrire un peu autrement son nom dans l’Université, cette université «sans condition» qu’il appelait de ses vœux, liant étroitement sa vocation non seulement à la littérature et à la philosophie, aux «Humanités de demain1», mais à la démocratie à venir.
Nous avons donc créé, avec le concours précieux de plusieurs instances universitaires, un cycle annuel de grandes conférences sous le signe des «Mémoires de Jacques Derrida» afin d’affirmer, de réaffirmer la portée d’une œuvre philosophique qui a profondément marqué de nombreux domaines de la pensée: philosophie, littérature, politique, droit, théologie, esthétique et architecture. Si le travail de Jacques Derrida s’est résolument engagé dès ses commencements dans une relecture minutieuse de tous les grands textes de la tradition philosophique, il ne s’est pas contenté de cette relecture, aussi radicale fût-elle: il a aussi voulu contresigner de la manière la plus forte et la plus audacieuse, pour l’avenir, chacune des œuvres auxquelles il s’est attaché.
Ces «Mémoires de Jacques Derrida» se veulent ainsi une relance de sa pensée, une réponse à des appels multiples. Comme il l’avait fait pour tant d’auteurs auxquels il était remarquablement fidèle, nous cherchons ici à répondre (à, de, pour), à parler en direction de, vers Derrida. Car comme il l’écrivait dans «Justices
»:
Répondre de la responsabilité, et de ce qui la lie et l’oblige à la justice, c’est penser la responsabilité en en formulant et en en formalisant la possibilité, autant que l’aporie. Responsabilité éthique (c’est-à-dire aussi juridique et politique) qui s’expose non seulement dans ce qu’on appelle la vie ou l’existence, mais dans la tâche de déchiffrement, de lecture et d’écriture2.
Georges Leroux et Ginette Michaud
1. Jacques Derrida, L’Université sans condition, Paris, Galilée, coll. «Incises», 2001, p. 11 sq.
2. J. Derrida, «Justices
», dans Appels de Jacques Derrida, Danielle Cohen-Levinas et Ginette Michaud (dir.), Paris, Hermann, coll. «Rue de la Sorbonne», 2014, p. 60-61.
REMERCIEMENTS
Nous remercions pour leur soutien précieux le doyen de la Faculté des arts et des sciences de l’Université de Montréal, M. Frédéric Bouchard; le directeur du Département des littératures de langue française de l’Université de Montréal, M. Francis Gingras; la directrice du Centre de recherche interuniversitaire sur la littérature et la culture québécoises, Mme Martine-Emmanuelle Lapointe, et Mme Hélène Hotton, coordonnatrice scientifique du CRILCQ; les Départements de philosophie de l’Université de Montréal et de l’Université du Québec à Montréal. Sans l’appui de tous ces partenaires, la tenue de cet événement n’aurait pu être possible. Merci également à Nicholas Cotton pour son aide dans la mise au point du tapuscrit.
Nous remercions aussi vivement M. Patrick Poirier, directeur général des Presses de l’Université de Montréal, qui a poursuivi l’initiative de M. Antoine Del Busso en créant la collection «Humanités à venir», permettant ainsi de garder une trace, une archive vivante de ce cycle de grandes conférences.
AVANT-PROPOS
Au moment d’ouvrir la grande conférence annuelle du cycle «Mémoires de Jacques Derrida», j’ai eu le privilège (qui était aussi un défi assez redoutable) de présenter brièvement la carrière du philosophe et professeur émérite Georges Leroux, qui entretient avec le Département des littératures de langue française de l’Université de Montréal une relation privilégiée. Ce lien est tissé d’affinités intellectuelles anciennes, comme avec Christie McDonald, mais plus encore d’amitiés pérennes, avec les professeurs Jacques Brault et Pierre Nepveu et, tout particulièrement, Ginette Michaud, avec qui il codirige la collection qui accueille le texte de cette grande conférence. Entre Georges Leroux et notre département, il y a le projet jamais démenti de consolider les liens entre littérature et philosophie, l’une et l’autre mettant la langue en question, mais il y a aussi l’amitié, qui donne la pleine mesure de ces liens et pour laquelle s’écrivent bien des livres.
Le médiéviste en moi a aussi eu plaisir à évoquer d’emblée un autre lien de Georges Leroux avec notre université, en rappelant le souvenir de l’Institut d’études médiévales où, après un mémoire de maîtrise en sciences médiévales sur Le mythe du péché originel, qui lui permettait d’aborder le concept de volonté dans la pensée patristique, Georges Leroux a préparé sa thèse de doctorat sur le traité 39 de Plotin (Sur la liberté et la volonté de l’Un, Enn., VI, 8)3, sous la direction du père Mathieu De Durand. À travers l’œuvre de Plotin, cette thèse jetait un pont entre la pensée médiévale et la philosophie de l’Antiquité, celle qui allait par la suite occuper la place d’honneur dans le parcours intellectuel du chercheur et du professeur. Georges Leroux a eu l’occasion de le dire ailleurs: l’Institut d’études médiévales a été pour lui, comme pour plusieurs autres étudiants de sa génération, le lieu d’une ouverture à d’autres perspectives, d’autres temps et d’autres mondes, dont celui de la philosophie arabe. La figure de l’islamologue Louis Massignon s’y profilait peut-être même déjà, sans doute dans les enseignements de Jean Jolivet, médiéviste français spécialiste de l’islam qui figurait parmi les prestigieux invités de l’Institut d’études médiévales de l’Université de Montréal, aux côtés d’Henri-Irénée Marou, Paul Vignaux et, bien sûr, Raymond Klibansky.
Les brillantes études universitaires menées par Georges Leroux passent également par Paris et la Ve section de l’École pratique des hautes études, notamment auprès de Pierre Hadot, helléniste et philologue pour qui la philosophie était une manière de vivre qu’il invitait à pratiquer au moyen de ce qu’il appelait des «exercices spirituels». Dans ce milieu intellectuel d’une grande richesse, Georges Leroux se trouvait au cœur de la recherche la plus innovante sur le néoplatonisme. Le bouillonnement de la pensée universitaire, qui intégrait alors les contrecoups de Mai 68, était également pour lui l’occasion de découvrir les premiers textes de Jacques Derrida. Plusieurs décennies ont passé, mais Georges Leroux est toujours resté fidèle au souvenir de ces années de formation et n’a jamais cessé de fréquenter l’œuvre du philosophe.
Avant même ce séjour parisien, Georges Leroux avait été nommé professeur au Département de philosophie de la jeune Université du Québec à Montréal (UQAM). Il y jouera un rôle de premier plan dans le développement de ce qui est alors une nouvelle université publique, engagée dans une mission particulière de démocratisation de l’enseignement universitaire. Pour prendre la pleine mesure de cette période cruciale de l’histoire du Québec et des enjeux de l’enseignement de la philosophie ou du rôle de l’intellectuel dans ce mouvement de transformation sociale, je renverrai aux entretiens que Georges Leroux a accordés à Christian Nadeau, publiés en 2017 aux éditions du Boréal4. Je me contenterai de mentionner ici les innovations pédagogiques, nombreuses, que l’UQAM a favorisées et auxquelles Georges Leroux a activement participé. J’insisterai surtout sur la dimension sociale, voire politique, de ce projet auquel le philosophe attache une réelle valeur, en acceptant d’assumer de nombreuses responsabilités dans l’administration universitaire, bien au-delà de son université d’attache, en assurant, par exemple, la présidence du Programme d’aide à l’édition savante de 1990 à 1992, ou encore à titre de membre du conseil d’administration du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH) ou du comité scientifique de la Bibliothèque nationale du Québec.
Cet engagement envers la communauté universitaire ne s’est cependant pas fait au détriment de sa production scientifique, comme en témoigne l’œuvre considérable de Georges Leroux, dont l’importance est d’abord qualitative, il va sans dire, mais aussi remarquable en termes quantitatifs. Sans me lancer dans un inventaire bibliographique, je rappellerai au moins que Georges Leroux est, entre autres, le traducteur de Plotin, mais aussi d’œuvres parmi les plus importantes de Platon, Le Banquet5, La République6, traductions capitales encore à ce jour. Il est aussi l’auteur de nombreux ouvrages consacrés aux travaux et à la figure du philosophe Raymond Klibansky, son maître et ami7.
Qui plus est, le lien entre Georges Leroux et le Département des littératures de langue française s’inscrit aussi dans son œuvre. En effet, son essai Partita pour Glenn Gould. Musique et forme de vie8 a reçu le prix de la revue Études françaises, associée à notre Département, avant d’être couronné du Grand Prix du livre de Montréal puis traduit en anglais et en japonais. Le prix de la revue Études françaises est attribué à un auteur dont le jury souhaite souligner la contribution exceptionnelle à la réflexion sur la littérature et l’écriture de langue française en lui proposant de publier un texte inédit. La véritable originalité de ce prix vient de ce qu’il sollicite des textes des auteurs qu’il souhaite honorer; il contribue ainsi à faire advenir des œuvres qui n’auraient peut-être pas connu le chemin de l’édition sans lui. Comme en son temps la revue avait permis à L’homme rapaillé de se constituer, le prix a donné l’occasion à Georges Leroux d’explorer une forme d’écriture sur un autre objet (ici le regard émerveillé que l’artiste peut porter sur la vie à travers l’exemple de Glenn Gould), tout en illustrant, à travers ce texte sur la musique, le lien intime qui peut se tisser, dans l’essai, entre réflexion érudite et création littéraire.
Je ne saurais cacher que cet aspect de l’œuvre de Georges