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Les Oreilles de la Villa Marlier
Les Oreilles de la Villa Marlier
Les Oreilles de la Villa Marlier
Livre électronique140 pages2 heures

Les Oreilles de la Villa Marlier

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À propos de ce livre électronique

En janvier 1942, un jeune officier de la Wehrmacht, assiste malgré lui, à la conférence de Wannsee, à Berlin, dans la villa Marlier où les hauts dignitaires nazis se réunissent pour parachever leur macabre projet de « solution finale ». Devenu témoin gênant, il tombe dans un piège machiavélique tendu par Adolf Eichmann, en personne.
LangueFrançais
Date de sortie1 mars 2013
ISBN9782312008653
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    Les Oreilles de la Villa Marlier - Stéphane Delahaye

    cover.jpg

    Les Oreilles

    de la Villa Marlier

    Stéphane Delahaye

    Les Oreilles

    de la Villa Marlier

    LES ÉDITIONS DU NET

    22 rue Édouard Nieuport 92150 Suresnes

    © Les Éditions du Net, 2013

    ISBN : 978-2-312-00865-3

    Tel Aviv, septembre 1982, une chaleur sèche et étouffante envahissait les rues et les faubourgs de la ville qui ne dort jamais. La vague caniculaire qui sévissait sur cette bulle paisible et tolérante, avait provoqué l’afflux massif de la population sur les plages Metsitsim, Gordon, Frishman ou encore Bograshov.

    Simon Horowitz, 69 ans, était allongé sur son lit, les yeux clos. La climatisation de la villa du quartier chic de Ramat Hasharon, permettait de maintenir une température supportable dans la chambre, mais de grosses gouttes de sueur perlaient régulièrement sur son front. La fièvre envahissait progressivement son corps. Simon Horowitz savait qu’il était en train de perdre le combat qu’il menait depuis de nombreux mois contre une maladie que les médecins désignent toujours comme incurable. Une légère toux ferrine faisait tressaillir régulièrement le vieil homme et venait perturber la quiétude qui régnait dans la pièce.

    Sarah Horowitz, son épouse, était assise sur une chaise à ses côtés. Elle sursauta lorsque Simon dit d’une voix tremblante : « J’ai soif, Sarah ! »

    Elle se leva rapidement, se rendit dans la cuisine et versa un verre d’eau fraîche. Elle revint et aida Simon à se relever pour boire. Il avala à s’en étrangler, le contenu du verre, puis s’allongea de nouveau dans un long soupir.

    – Tu sais, tu es ce que la vie m’a apporté de mieux, Sarah.

    – Oh Simon, mais toi aussi tu es ce que j’ai de plus précieux.

    Elle lui prit la main droite et lui baisa tendrement. Simon la regarda, l’air grave et lui dit sur un ton sévère.

    – Je ne suis pas celui que tu crois Sarah !

    Sarah saisit alors un mouchoir sur la table de nuit et épongea le front ruisselant de Simon.

    – Repose-toi mon amour.

    Simon attrapa l’avant-bras de Sarah et le serra fortement.

    – Écoute-moi ! Je ne suis pas celui que tu crois ! Je suis un imposteur !

    Sarah restait calme et impassible. Elle posa sa main sur le front de son mari.

    – La fièvre monte de plus bel. Je vais te préparer un…

    – Non, ce n’est pas la peine ! Écoute-moi, vraiment, c’est important !

    Sarah obéit et resta assise sur sa chaise.

    – Je suis un lâche ! De belles larmes cristallines se mirent alors à jaillir et à dégouliner sur le visage de Simon. Elles étaient limpides et claires comme de l’eau de roche, mais elles auraient dû avoir une couleur sombre, grise, terne, car ces larmes étaient anciennes, enfouies au plus profond de son être, depuis tant d’années où Simon aurait voulu soulager sa conscience.

    Sarah Horowitz n’avait jamais vu Simon pleurer. Le mal qui rongeait cet homme courageux était sans nul doute à l’origine de cette fuite lacrymale. Bien des fois elle avait senti chez son mari des moments de profond désarroi et de morosité, mais elle n’avait jamais cherché à connaître l’origine de ces instants de blues. Sarah avait toujours pensé que cette noirceur était le fruit des drames qu’ils avaient enduré ensemble, mais elle ne voulait pas se retourner sur ce passé si douloureux. Elle voulait toujours aller de l’avant, toujours se projeter vers l’avenir, pour oublier ces heures troubles. Mais aujourd’hui, Sarah Horowitz prenait une claque, ce passé qu’elle occultait depuis toujours se présentait à elle.

    Berlin, lundi 19 janvier 1942. Klaus Heidsieck, 29 ans, officier de la Wehrmacht sortait du centre de commandement des états-majors du Reich. Ce bâtiment de six étages, basé dans le quartier Biesdorf de Berlin, abritait à la fois une entité des services de renseignements de la Wehrmacht et une entité du RSHA, l’office central de la sécurité du Reich. Au quatrième étage se trouvait la IVème division, la police secrète d’état (Gestapo) avec notamment la section IV B-4, dirigée par le lieutenant-colonel (l’Obersturmbanfürher) Adolf Eichmann, qui s’occupait des « affaires juives ».

    Klaus Heidsieck habitait assez loin de ce lieu, mais sa marche rapide lui permettait de parcourir la distance matin et soir, en une grosse demi-heure. Ce soir, les pas du jeune officier étaient encore plus rapides qu’à l’habitude, car la température était glaciale, il y avait du vent, le temps avait été gris toute la journée, il était même tombé quelques flocons de neige. Il arriva au 13 de la Gelsenkirchenstrasse, là où il résidait avec sa mère, Hilda Heidsieck. Il monta les trois étages quatre à quatre et entra dans le petit trois pièces.

    – Ah Klaus, mon poussin ! Hilda Heidsieck était à la cuisine où elle épluchait des pommes de terre.

    – Bonsoir maman. Klaus embrassa sa mère sur une tempe.

    – Tu n’as pas trop froid ? Il fait un froid sibérien. Ah tiens, Madame Dienstag a la grippe. C’est la troisième personne de l’immeuble ! Il faut bien te couvrir le matin.

    – Ne t’inquiète pas, je ne suis pas frileux. Aux jeunesses, on nous faisait sortir par -10°C en maillot de corps et en short et puis je marche tellement vite que je me réchauffe.

    – Oui, mais c’est comme cela que l’on attrape du mal, tu te mets en nage et après tu prends un refroidissement. Tu ne peux pas marcher normalement, enfin ?

    – Non ! Et puis tu sais bien que je ne suis jamais malade.

    – Tu vas manger une bonne soupe, cela va te faire du bien. Va dans le salon te reposer avant de dîner. Tu as passé une bonne journée ?

    – Tu sais, la routine. Des documents à traduire, des procédures à écrire, des messages à déchiffrer.

    Klaus laissa sa mère à ses tâches culinaires et se rendit dans le salon. Il s’assit dans un fauteuil, celui placé à côté du guéridon où trônaient fièrement deux photos : celle d’un soldat sur un cheval et celle d’un jeune homme souriant avec une médaille autour du cou serrant la main d’Adolf Hitler.

    Il ferma les yeux et s’assoupit. Il sursauta quand Hilda l’appela pour venir souper.

    Il prit place à la table de la cuisine face à sa mère.

    Klaus était fils unique, il n’avait quasiment pas connu son père, Horst, mort à Verdun durant la première guerre mondiale. Klaus était né en 1913, il n’avait que sa mère comme unique famille, car Horst Heidsieck était orphelin, il avait connu Hilda à l’orphelinat. Ils avaient dix ans et avaient juré de ne plus se quitter et de fonder une grande famille. Mais la guerre en avait décidé autrement.

    Klaus brisa le silence du repas :

    – Cela ne va pas fort sur le front Russe.

    – Ah bon ?

    – Je ne comprends pas pourquoi Hitler s’est mis en tête de s’attaquer à l’union soviétique ?

    – Ce sont des communistes, Klaus !

    – Il veut créer « un espace vital » à l’Allemagne mais on ne peut pas être au four et au moulin. On se disperse trop !

    – Laisse le Fürher diriger notre pays. Contente-toi de bien faire ton travail. Je veux que tu restes dans les bureaux des états major. La première guerre mondiale m’a pris mon mari, je ne veux pas que la seconde me prenne ce que j’ai de plus précieux !

    – Tu as sans doute raison, laissons faire le Fürher.

    – Oui Klaus, j’ai raison. Comme le Fürher a raison de vouloir redonner à l’Allemagne sa dignité et d’effacer la défaite de 1918. Ton père serait fier de toi Klaus ! Lorsque la guerre sera finie, le Fürher te recevra à nouveau, et je serai encore plus fière que la première fois.

    – Quand donc cette maudite guerre finira-t-elle ?

    – Aie confiance, Klaus.

    Klaus se leva, il embrassa sa mère sur le front.

    – Je vais me coucher maman. Bonne nuit.

    – Bonne nuit mon poussin.

    Hilda Heidsieck le surnommait comme cela depuis toujours, car Klaus avait de magnifiques cheveux blonds, comme son père. Il avait également ses grands yeux bleus et sa stature, un véritable aryen, si cher à Adolf Hitler.

    Klaus entra dans sa chambre, se dévêtit et enfila son pyjama.

    Il prit son livre de chevet caché sous son matelas. Comme chaque soir, il lisait quelques lignes avant d’éteindre la lumière. Son marque-page était particulier, c’était une photo de l’actrice Marie Magdalène Dietrich dans l’ange bleu. Il avait découvert ce film en 1930, il avait 17 ans et il était tombé amoureux de Lola-Lola. Marlène Dietrich en chapeau haut de forme, assise sur un tabouret en se prenant le genou et armée de ses bas noirs et de son porte-jarretelles ravageur, lui avait procuré ses premiers émois. Il lui arrivait de temps en temps de faire des rêves très érotiques dans lesquels Lola-Lola lui rendait visite. Il était fasciné par la beauté de ses jambes, magnifiées par la présence des bas de soie. Il prenait bien soin de cacher cette photo, car il savait qu’elle pourrait l’envoyer tout droit en prison. Chaque soir, il regardait ce cliché avant de s’endormir, c’était un rituel immuable depuis bien des années et rien n’y personne ne pourrait le lui enlever.

    Mardi 20 janvier 1942, 6 h 30, le réveil mécanique retentit dans la chambre de Klaus Heidsieck. Il se leva avec un épouvantable mal de crâne. Il fit sa toilette en essayant de faire le moins de bruit possible pour ne pas perturber le sommeil d’Hilda, enfila son uniforme, avala son bol de café noir sans rien manger, prit le temps de chercher un cachet d’aspirine, revêtit son manteau, ferma la porte avec délicatesse, descendit rapidement l’escalier et s’enfonça d’un pas décidé dans la pénombre de l’aube berlinoise. Un léger crachin glacial lui fouettait le visage. Encore une journée morne, grise, froide qu’il détestait, mais de toute façon il allait passer sa journée assis à son bureau, alors peu importe qu’il fasse beau ou pas.

    7 h 30, Klaus arriva au centre de commandement des états-majors du Reich. Il entra dans le grand hall et emprunta le grand escalier de marbre gris qui permettait d’accéder en haut à gauche aux étages réservés à la Wehrmacht, et en haut à droite aux étages regroupant diverses unités de la SS. Klaus travaillait au cinquième étage, aile gauche, il y avait un petit bureau presque borgne, tout juste éclairé par la lumière du jour qui filtrait par un petit was-ist-das. Il lui fallait allumer continuellement la lampe de son bureau. Klaus aurait pu être dans un bureau plus

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