PETITES ET GRANDES HISTOIRES LITTÉRAIRES
Le 14 juillet 1789, Mme de Sade a rendez-vous avec l’administration de la prison de la Bastille. Elle souhaite récupérer les affaires de son époux, le célèbre marquis (1740-1814), qui croupissait depuis cinq ans dans cette forteresse de l’Est parisien. Mais, au début du mois, sentant la fièvre révolutionnaire monter, le gouverneur de Launay l’a exfiltré vers l’asile de Charenton. Il faut dire que cet infernal prisonnier, furieux qu’on l’ait privé de promenade en haut des toursbeuglait-il à travers les barreaux de sa cellule, avant de devoir la quitter précipitamment. Lorsque les assaillants de la Bastille y pénètrent, s’y trouvent donc encore ses vêtements, ses meubles et ses livres – six cents, dont quelques raretés –, sans compter ses manuscrits. L’un d’eux, intitulé est tellement transgressif que le sulfureux libertin l’a planqué avant de prendre la poudre d’escampette. En quelques jours, la forteresse – symbole honni et désuet de l’arbitraire royal – va être mise à sac. Les pillards s’en donnent à cœur joie. Parmi eux, un dénommé Arnoux de Saint-Maximin débusque le précieux manuscrit. Lequel va entamer un périple abracadabrant jusqu’à se retrouver en cette rentrée 2023 dans une vitrine de la Bibliothèque nationale. Mais ça, l’infortuné marquis – libéré en 1790 – ne peut l’imaginer. Inconsolable, il pense son brûlot perdu à jamais et (). Effectivement, il ne le reverra jamais.