Découvrez des millions d'e-books, de livres audio et bien plus encore avec un essai gratuit

Seulement $11.99/mois après la période d'essai. Annulez à tout moment.

Si les femmes baissaient les bras le ciel s'ecroulerait
Si les femmes baissaient les bras le ciel s'ecroulerait
Si les femmes baissaient les bras le ciel s'ecroulerait
Livre électronique140 pages2 heures

Si les femmes baissaient les bras le ciel s'ecroulerait

Évaluation : 0 sur 5 étoiles

()

Lire l'aperçu

À propos de ce livre électronique

Femmes qui écrivent à propos de femmes pour combler, peu à peu, ce grand vide laissé par une histoire écrite par des hommes. Les femmes avec leur travail, leur voix, leur regard, leurs paroles enrichissent la mémoire, ouvrant ainsi un scénario sur le quotidien dont elles sont protagonistes. N.A. nous fait entrer dans son monde en nous racontant sa famille vécue dans un contexte social représenté par une division de classe très marquée. C’est la vie de femmes et d’hommes stigmatisée par le fascisme, la guerre et la résistance. Le tableau s’élargie peu à peu à travers l’expérience de jeunes femmes, contraintes d’émigrer en ville où elles étaient brutalement exploitées. C’est précisément l’exploitation qui les amènera à se rebeller et à découvrir la lutte de classes.
Dans les revers de la guerre et de la pauvreté on découvre encore une fois comme victimes privilégiées les femmes, surtout si leurs problèmes les excluent de la « normalité » et finissent par être ensevelies vivantes dans les asiles, que seule la force d’un médecin comme Basaglia arrivera à fermer. Bien que ses idées n’aient pas été suivies jusqu’au bout. Bien au contraire.
LangueFrançais
Date de sortie10 mars 2021
ISBN9788832281323
Si les femmes baissaient les bras le ciel s'ecroulerait

Lié à Si les femmes baissaient les bras le ciel s'ecroulerait

Livres électroniques liés

Arts du spectacle pour vous

Voir plus

Articles associés

Catégories liées

Avis sur Si les femmes baissaient les bras le ciel s'ecroulerait

Évaluation : 0 sur 5 étoiles
0 évaluation

0 notation0 avis

Qu'avez-vous pensé ?

Appuyer pour évaluer

L'avis doit comporter au moins 10 mots

    Aperçu du livre

    Si les femmes baissaient les bras le ciel s'ecroulerait - Normanna Albertini

    edizioni

    Copyright

    Traduzione di Grazia Pontecorvi.

    © Tralerighe libri editore

    © Andrea Giannasi editore

    Lucca, Marzo 2021

    ISBN 9788832281323

    Prefage de Giuliana Sgrena

    Femmes qui écrivent à propos de femmes pour combler, peu à peu, ce grand vide laissé par une histoire écrite par des hommes. Les femmes avec leur travail, leur voix, leur regard, leurs paroles enrichissent la mémoire, ouvrant ainsi un scénario sur le quotidien dont elles sont protagonistes. N.A. nous fait entrer dans son monde en nous racontant sa famille vécue dans un contexte social représenté par une division de classe très marquée. C’est la vie de femmes et d’hommes stigmatisée par le fascisme, la guerre et la résistance. Le tableau s’élargie peu à peu à travers l’expérience de jeunes femmes, contraintes d’émigrer en ville où elles étaient brutalement exploitées. C’est précisément l’exploitation qui les amènera à se rebeller et à découvrir la lutte de classes.

    Dans les revers de la guerre et de la pauvreté on découvre encore une fois comme victimes privilégiées les femmes, surtout si leurs problèmes les excluent de la « normalité » et finissent par être ensevelies vivantes dans les asiles, que seule la force d’un médecin comme Basaglia arrivera à fermer. Bien que ses idées n’aient pas été suivies jusqu’au bout. Bien au contraire.

    Mais la cause de tous les maux pour la femme c’est sa sexualité sur laquelle les mâles veulent avoir le plein contrôle. C’était ainsi durant des millénaires et ça l’est encore aujourd’hui, même si « l’hystérie » n’est plus soignée par la « castration féminine » (l’ablation de l’utérus ou di clitoris) du moins en occident. Les mutilations génitales féminines (MGF) sont à nouveau une réalité même en Italie à travers les migrations. Normanna embrasse un territoire qui va du Nord au Sud de notre pays pour arriver dans le Salento où se trouvent les femmes « tarantolate » afin de trouver un remède à leurs propres maux : la dance effrénée de la taranta, qui aujourd’hui est devenue une attraction touristique.

    Notre monde d’hier se retrouve aujourd’hui dans les communautés de migrants. Encore une fois émergent les discriminations de femmes qui valent moins qu’un homme, ou pire, moins que rien, au point d’en arriver même à pratiquer des avortements sélectifs de genre. Alors que nos conquêtes, loin d’avoir rejoint la parité de genre, risquent chaque jour d’être compromises.

    Les femmes dès lors ne baisseront pas les bras, puisqu’elles n’ont rien à perdre.

    GS

    Bruna

    Elle était accueillante, avec un sens presque sacré de l’hospitalité ; la maison toujours ouverte et la cafetière napolitaine d’aluminium ou la théière prêtes à l’instant pour n’importe quel hôte. Avec respect, tutoyant seulement quand elle sentait que cela lui était permis et vouvoyant dans toute autre occasion.

    Elle était ordonnée, mais si ordonnée que le cellier pouvait être confondu avec un salon et le linge, les chemises, les lainages, rangés dans les tiroirs semblaient disposés en fonction d’un plan d’agencement précis.

    Elle était mesurée jusque dans l’habillement, toujours en ordre même avec son tablier et le foulard qui lui couvrait le chef. En cuisine, dans l’étable et dans les champs, elle portait le foulard, mais sinon elle l’ôtait, car il ne devait servir qu’à protéger les aliments des cheveux et les cheveux des odeurs et de la poussière.

    C’était une excellente cuisinière : ses ragoûts, le bœuf braisé, le gibier, les entrées et les sauces touchaient, sous ses doigts, des sommets de perfection par leurs arômes, saveurs, présentation à table ; je la revois faire les tortellini, seule, pétrissant et tirant la pâte avec le rouleau, avec une précision et une rapidité enviable.

    Elle avait travaillé toute sa vie comme domestique et avait appris la déférence, l’étiquette, avait mûri une forte dignité et intégrité morale, chose bien à l’encontre de certaines dynamiques d’un village – celui de son mari- où tous étaient parents entre eux (et pas exactement en bonne entente).

    Lorsque, à presque quarante-trois ans, elle avait démissionné pour rentrer chez elle, puisque ma mère devait se marier, le colonel Belotti, son employeur, la rejoignit a Predolo avec l’intention de la convaincre – en bon militaire- à revenir à Milan, étant donné que de bonnes « servantes » comme Bruna il n’en trouvait plus.

    Elle s’était mariée très jeune. A dix-neuf ans, Bruna, alors que son fiancé, mon grand-père Ambrogio n’en avait que vingt. Un mariage fortement désiré par lui, qui voulait l’emmener dans les villes où il serait transféré pour son service militaire. Et il le fit ; ce fut une folie, mais elle le suivit.

    Elle le suivit tout en cherchant et trouvant du travail dans chaque ville où son mari se déplaçait. « Il voulait faire l’amour même en caserne, une fois que j’étais allée le voir », me raconta-t-elle, authentiquement indignée, « mais moi, je ne le lui ai pas permis : on ne fait pas certaines choses là où on peut nous voir, même si on est marié. »

    Bruna était tombée amoureuse de Ambrogio quand elle l’avait vu défiler à Reggio, à tout juste 18 ans, en uniforme (peut-être comme Balilla canonnier fasciste, vu que la loi de 1926 qui instituait l’OMB fasciste, décrétait l’assistance aux jeunes de huit à dix-huit ans, et probablement la famille de mon grand-père en avait profité) ; ç’avait été un coup de foudre.

    « Il était si beau, mais si beau… », me dit-elle ensuite, tu devais le voir en uniforme ! moi je travaillais à Reggio et je l’ai tout de suite reconnu quand je l’ai vu défiler a Porta Castello. »

    Mon arrière-grand-mère, qui dormait avec elle, disait l’avoir entendue faire le nom de ce jeune homme dans son sommeil ; quant à lui, il me racontait de cette belle brune, à l’épaisse, longue chevelure noire et aux grands yeux sombres, mince juste ce qu’il faut e avec cette belle poitrine- « c’est qu’elle n’avait pas de grosses fesses, va, ta grand-mère ! » - elle était trop belle pour la laisser filer.

    Bruna le connaissait déjà, donc, car ce garçon de Predolo, avec d’autres jeunes, était venu plusieurs fois chez eux a Roncroffio, discuter dans les soirées de veillée.

    Cependant elle n’avait jamais remarqué qu’il fût si beau. Peut-être parce qu’en uniforme, même celui tant haï du régime, c’était une toute autre personne.

    Ils se marièrent, et elle le suivit pendant le service militaire, puis ils rentrèrent à son village à lui et, après quelques années, en 1937, naquit ma mère.

    Cette année-là, dans la famille de mon arrière-grand-père, naquirent deux autres enfants- en dehors de ma mère- fils de deux sœurs de mon grand-père : Zelda et André ; ce dernier, malheureusement, serait devenu aveugle à cause d’une maladie mal soignée.

    Ma grand-mère, comme belle-fille, supportait la cohabitation dans cette maison uniquement par amour du mari et de sa fillette, comme il en était ainsi pour de nombreuses autres belles-filles en ces temps-là, souvent traitées comme des bonnes.

    Elle n’était pas habituée à la grossièreté du beau-père, ex berger de la dorsale, avec des mœurs et des attitudes offensantes et autoritaires envers les femmes ; un homme resté veuf étant jeune, qui n’aimait pas le travail et qui préférait payer des garçons de ferme et des journaliers pour se dédier, plutôt, à la chasse et aux femmes.

    Par surcroît, après avoir allaité ma mère pendant plusieurs mois, comme l’argent ne suffisait pas elle fut contrainte de laisser son bébé pour aller à Milan, allaiter l’enfant d’une « dame ».

    Ce fut un choc terrible pour elle et doublement pour ma mère, car en 39 Ambrogio dû partir à la guerre. Il fallait conquérir l’Albanie (car nous avions tant besoin d’un empire !).

    Bruna revint, après avoir pleuré des mois durant, en cachette, toutes les larmes de son corps (avec l’autre bébé tétant son sein), elle ramassa son mobilier et son trousseau et s’installa à Roncroffio, chez sa mère. Elle décida de renfermer ses affaires dans une pièce, sans doute une grange, parce qu’elles ne tenaient pas dans la maison.

    Et elle trouva du travail come domestique chez l’institutrice Clara Bussi Borghini.

    A partir de ce moment-là, pour elle et Ambrogio s’enchaînèrent toute une série d’épreuves sans fin. Car le second conflit mondial éclata, et il dû retourner en Grèce et en Albanie, puis sur le front français.

    Ma mère grandissait sans lui, comme Bruna avait grandi sans Vito, son père, mort dans la grande guerre. Ma mère ne connaissait pas son père et Bruna travaillait, la laissant à Jusfina, sa vigoureuse maman, dans la pièce du métier à tisser. Jusfina se dévouait pour tous ses petits-enfants, en quelque sorte « orphelins » à cause de la guerre et de la misère, bien que leurs pères fussent vivants. Du moins, c’est ce que l’on espérait.

    Bruna travaillait, à Roncroffio, et la guerre arriva jusque là.

    Une délation, et les nazi-fascistes entrèrent chez les Bussi, capturèrent le maitre de maison et le tuèrent dans le potager, avec d’autres personnes. Bruna était là, et dû aller recouvrir les cadavres d’un drap, puis elle dû s’enfuir avec sa petite fille, sa mère et le fils de sa sœur Nina vers Costa Medolana, parce que les fascistes s’étaient mis à incendier le village. Lorsque tout fut fini – et de Roncroffio il ne resta que les décombres fumantes – Bruna réalisa qu’elle avait tout perdu : meubles et trousseau. Elle n’avait plus rien et ne savait pas si Ambrogio serait revenu.

    Puis l’épisode de la mort du cousin Domenico, jeune partisan de 17 ans, capturé, torturé de façon indicible et tué par les fascistes, « par la faute d’un prêtre qui l’avait dénoncé » disait-on. Depuis cet épisode, ma grand-mère et mon arrière-grand-mère maternelles mûrirent une sincère aversion envers tout ce qui avait un relent clérical et moi-même je respectai toujours ce choix, car je connaissais leur souffrance.

    En attendant, il n’y avait aucune nouvelle de Ambrogio.

    La guerre finit, ma grand-mère Bruna partit de nouveau à Milan, où habitait déjà sa sœur Nina avec sa famille, à la recherche d’un travail. Ambrogio pouvait aussi bien être mort, mais elle ne voulait pas accepter la chose. A vrai dire, elle n’avait même pas le temps de s’arrêter pour penser : elle devait élever sa fille. Seule, comme avait fait sa mère.

    Ambrogio, en fait, était vivant. IL s’était retrouvé dans un camp de prisonniers français.

    C’est seulement dans ses dernières années qu’il me raconta ce qui lui était arrivé. Comme d’autres soldats qui avaient souffert l’insoutenable, mais qui à leur retour n’avaient trouvé ni attention ni écoute, jamais il ne s’était laissé échapper un seul mot sur cet épisode. Il m’avait seulement dit que l’Albanie ne lui avait pas plu, qu’elle était très pauvre et que les femmes étaient mal fagotées, voilées, lourdaudes.

    Mais sur la France…rien.

    Mais c’est en France, justement, qu’il avait été emprisonné dans un camp de détention des Alliés, au milieu des pins dans une forêt, construit sur un terrain sablonneux. Les baraques étaient

    Vous aimez cet aperçu ?
    Page 1 sur 1