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Crime de guerre: Roman
Crime de guerre: Roman
Crime de guerre: Roman
Livre électronique200 pages4 heures

Crime de guerre: Roman

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À propos de ce livre électronique

Le 30 janvier 1945, en pleine nuit, un sous-marin soviétique coule le paquebot Wilhelm Gustloff en Mer Baltique, provoquant la mort de plus de 9000 réfugiés allemands qui fuyaient l’avancée de l’Armée Rouge. C’est la catastrophe la plus meurtrière de l’Histoire de la Marine. Pourtant personne, ni du côté soviétique ni du côté allemand, ne semble vouloir en parler. Parmi les quelques rescapés, nous suivons la destinée de Mitzi Vogelsang, dans l’Allemagne de l’Est des années 1950-1960. Belle, brillante étudiante, athlète surdouée, la fille adoptive du capitaine Dietz, à la personnalité trop vite forgée par le malheur, veut à toute force partir à la recherche des traces de sa famille décimée par la guerre, et retrouver le souvenir de la Prusse, sa Prusse, sa patrie anéantie et effacée de la carte du monde par les accords entre Soviétiques et Alliés, au moment de l’Armistice. Son vrai miroir est un fidèle ami d’enfance, avec lequel elle suit, animée par ses passions, la route souvent surprenante de sa jeune vie. Ses objectifs : revoir la maison de ses parents, à Koenigsberg, l’ancienne capitale prussienne disparue, devenue Kaliningrad en 1945, sous la domination soviétique. Elle veut aussi retrouver la trace du commandant du sous-marin qui a coulé le Wilhelm Gustloff. Ce roman fait revivre une époque dont il ne nous reste plus guère que l’épisode de la chute du Mur de Berlin. Mitzi, personnage si attachant au charme déroutant, veut absolument découvrir qui est le responsable des abominables malheurs qu’elle a victorieusement, mais si douloureusement traversés depuis les derniers mois de la guerre. Sa quête de la vérité commence…

À PROPOS DE L'AUTEUR

Professeur de chinois à Montpellier et diplômé de l’Université de Paris VII, Thierry Daullé est un ancien élève de Langues O, passionné de littérature, de beaux-arts et de voyages.
LangueFrançais
Date de sortie8 mai 2020
ISBN9791037707444
Crime de guerre: Roman

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    Aperçu du livre

    Crime de guerre - Thierry Daullé

    Du même auteur

    Le Chameau qui boitait, 2005

    Les trois Sceaux de l’Année du Singe, 2015

    Trois Singes pour un Dragon, 2017

    Le Voyage en Occident d’un Singe d’Orient, 2018

    Jamais tu ne verras Venise !, 2019 (éditions Le Lys Bleu)

    Une bicyclette pour Lhassa, 2019 (éditions Le Lys Bleu)

    À tous ces valeureux « artisans » du monde entier,

    connus ou non, qui œuvrent inlassablement,

    jusqu’au désespoir, pour la Paix entre les Hommes.

    Avant-propos

    C’est peu dire que l’histoire terrible évoquée dans ce roman historique, absolument authentique, peut être la source de polémiques.

    La plus grande catastrophe navale de tous les temps, toujours étrangement dissimulée avec le plus grand soin derrière l’écran prestigieux du naufrage accidentel du Titanic, reste encore aujourd’hui un drame plus ou moins subreptice. Un évènement en tous cas à peu près ignoré du grand public, dans le monde entier.

    La nationalité des victimes, près de dix-mille Allemands, dont plusieurs milliers d’enfants, morts étouffés dans le naufrage ou noyés ensuite dans une mer glacée, et aussi les circonstances de ce naufrage survenu dans les derniers mois de l’existence du Troisième Reich, viennent tout naturellement, en contrepoint, nous placer face à la mémoire du commandant du sous-marin soviétique, auteur du torpillage meurtrier.

    Les quelques centaines de survivants ont témoigné. Nous savons.

    Faut-il pleurer sur le sort des milliers de noyés, surpris en pleine nuit alors qu’ils fuyaient vers l’ouest sur le grand navire, pour échapper à la débâcle de leur pays vaincu et au recul de la Wehrmacht nazie, face à la poussée irrésistible et triomphale de l’Armée Rouge, à l’est de l’Europe ?

    Faut-il, a contrario, glorifier le commandant soviétique, traité en héros de l’URSS après la fin du conflit, sans qu’il n’eût jamais eu, pendant toute la guerre, à engager avec son sous-marin le moindre combat contre un seul navire de guerre ennemi ?

    Que les victimes aient été des ressortissants de l’empire nazi en décomposition, et que leur bourreau fût officier de la Marine Drapeau Rouge de l’URSS, victorieuse en 1945 de son ancien allié du Pacte germano-soviétique, ne va sans doute pas nous intéresser longtemps, lorsque nous aurons mesuré la cruelle dimension humaine de cette indéniable catastrophe, d’une gravité jamais égalée.

    Il s’agissait, pour la quasi-totalité des victimes, de civils, d’hommes, de femmes et surtout d’enfants, des réfugiés en déroute. C’est leur histoire tragique, à l’écart de tout parti pris et bien loin de toute idéologie, que je souhaite conter, à travers celle de Mitzi Vogelsang, la survivante.

    T. D.

    Chapitre 1

    Mitzi Vogelsang

    Un dimanche de juin 1962, à Rostock, Allemagne de l’Est.

    Sur la place du Neuer Markt, baignée par le chaud soleil de ce début d’été, la foule est clairsemée et l’ambiance est presque feutrée. Six garçons d’une vingtaine d’années, désœuvrés, sont assis, ou vautrés sur les bancs de bois. Ils font partie de la joyeuse bande du Jugendclub de la FDJ¹. Ils suivent des yeux, comme fascinés, la démarche de cette jeune femme blonde aux cheveux ondulés qui vient vers eux à longues enjambées, indifférente à tout ce qui l’entoure. Elle porte un léger tricot à manches courtes et une jupe souple qui laisse à peine voir ses genoux. Elle tient dans sa main droite un grand panier d’osier. Elle marche sur le trottoir de gauche, regardant droit devant elle, ni hautaine ni maniérée. Elle est sûre d’elle et rien ne semble pouvoir l’effrayer ni même l’inquiéter.

    Werner, qui peut avoir une vingtaine d’années, fait mine d’être vexé et de se lever d’un bond du banc sur lequel il est vautré. Mais le regard glacial de Mitzi le cloue sur place et il se rassied, penaud. Le jeune homme, pour se donner une contenance, allume nerveusement une nouvelle Karo avec le mégot de celle qu’il finit de fumer. La jeune Allemande, les yeux fixés droit devant elle, poursuit son chemin, indifférente. Elle n’a pas manifesté le moindre intérêt pour ces jeunes désœuvrés du dimanche, et, à chacun de ses pas, elle s’éloigne de ce faisceau de regards masculins qu’elle sent fixés avec insistance sur le bas de son dos. Sa démarche est souple et féline, aérienne, involontairement sensuelle. Elle paraît sincèrement ignorer tout ce qui émane d’elle de féminité et de magnétisme. Bien malgré elle. Les yeux de ces garçons qu’elle sent accrochés à ses fesses, c’est tout ce qui lui fait horreur, c’est tellement contraire à tout ce à quoi elle croit dans l’existence.

    — Arrête, Werner, tu n’es qu’un obsédé ! Et tourne la tête, cesse de regarder ses jambes, sous sa jupe, gronde Markus, le jeune homme si sérieux à la fine moustache noire, jusque-là resté assis, en retrait, silencieux, la tête baissée derrière sa mèche de cheveux bruns. Il semble plus âgé et plus posé que ses cinq compagnons.

    Le grand Werner éclate de rire, il fait un geste évocateur et vulgaire, de ses deux mains ouvertes, devant lui. Sa cigarette pincée au coin de sa lèvre moqueuse, il souffle avec nervosité la fumée bleutée et chuchote :

    Les cinq camarades de Markus, ce jeune homme grave qui semble être l’aîné et le sage du groupe, font aussitôt cercle autour du banc sur lequel il se tient assis, l’air grave, penché en avant, les coudes posés sur ses genoux. Très vite les questions fusent :

    Les cinq compagnons de Markus se sont rapprochés de lui, car il parle d’une voix grave, sur le ton de la confidence très privée. Et l’on sait ce que cela signifie, en République Démocratique Allemande, la confiance, la confidence, les secrets. Markus poursuit de sa voix profonde et métallique :

    Hans, le rouquin à l’accent campagnard, baisse le nez comme s’il était pris en faute, mais il ne peut s’empêcher de demander :

    Marcus joint les mains entre ses genoux. Il relève la tête et dit en détachant bien chaque syllabe :

    Werner et Günter, tout à l’heure si audacieux, paraissent à présent tout penauds, comme douchés par les dernières phrases de Markus. Ils semblent même particulièrement émus.

    Malgré eux, les cinq jeunes hommes, tous à peine âgés d’une vingtaine d’années, trop jeunes pour avoir gardé aucun souvenir marquant de la guerre, sont absolument fascinés par cette évocation à mots couverts d’un passé de souffrances qu’aurait vécues la si belle et si mystérieuse Mitzi. Ils veulent tous en savoir plus et ils se rapprochent encore de Markus, se serrant en demi-cercle autour de lui.

    Mais les populations, le plus souvent totalement innocentes, ont été balayées par cette fin de guerre, triomphante pour les Soviétiques. Les Nazis avaient monté l’opération « Hannibal », destinée à évacuer le maximum des leurs, membres du parti, de l’administration, et aussi le maximum de militaires à réutiliser plus à l’Ouest. À la fin, des civils avaient aussi pu se lancer dans cet exode, mais c’était à leurs risques et périls, pour fuir les combats meurtriers. Les Vogelsang, la famille de Mitzi, sa petite sœur Liselotte, ses parents et son grand-père, qui était pasteur luthérien, ont été obligés de fuir ensemble la ville, tous les cinq, tout d’abord en voiture, avec ce qu’ils avaient pu garder de leurs affaires personnelles. Tout le monde fuyait. C’était la panique, la débâcle, la débandade, l’exode.

    Bien sûr, ces cinq garçons, devenus soudain silencieux, ont été nourris depuis l’enfance des récits de la fin de la guerre, du désastre allemand. Bien entendu, ils sont venus au monde au milieu des destructions, de la ruine des villes de leur enfance, car ils sont tous nés entourés des débris et des gravats d’un pays écrasé et vaincu. Le Parti Allemand de l’Unité socialiste, le SED, qui est le Parti Communiste de cette nouvelle Allemagne de l’Est, et aussi les organisations de jeunesse de la FDJ leur ont redonné le goût de vivre et se tenir debout. Ils se sentent fiers d’être allemands, dans un pays ami des vainqueurs, fiers d’être liés à l’Union Soviétique, le Grand Frère, inspirateur et protecteur de cette vie nouvelle qui devait nécessairement suivre une défaite si humiliante, marquée en outre par ce que tout le monde tente de taire à toute force, la honte et l’ignominie d’avoir survécu à l’abominable et exécré régime nazi du IIIème Reich.

    Markus mesure l’effet de ses paroles sur les remous qui agitent l’âme de ses cinq jeunes camarades. Pourtant, maintenant que la porte de l’Histoire s’est entrouverte, il se sent irrésistiblement poussé vers la suite de son récit. Il tient à ce que chacun sache ce qu’a vécu Mitzi Vogelsang, puisque c’est d’elle qu’ils parlent. Il veut que l’on cesse à jamais de la regarder comme un simple objet de convoitise masculine.

    Markus doit leur parler. Et autour de lui, Werner, Jürgen, Günter, Berthold et Hans, suspendus aux lèvres de leur aîné, veulent tout connaître des tourments de celle qui vient de passer si près d’eux et de les éblouir par sa beauté et l’énergie qui émane d’elle.

    Chapitre 2

    Les révélations de Markus

    Le soleil a déjà baissé sur les façades de la place du Neuer Markt, mais la luminosité est encore intense. Peu importe le temps qui passe et l’heure qui tourne, en cette paisible fin de dimanche. Aucun des cinq camarades rassemblés autour de Markus ne désire rentrer chez lui manger le pain du soir et les charcuteries de sa mère. Ils veulent à tout prix découvrir la suite de son récit. Werner en a même oublié d’allumer une de ses éternelles cigarettes Karo, à l’odeur si particulière.

    Et en janvier 1945, nous allons retrouver le même paquebot « Wilhelm Gustloff », amarré depuis des mois le long d’un quai, à Oxlöft, dans le port de Gdynia. Le gigantesque bateau-hôpital a déjà embarqué des centaines de militaires blessés. Il y a aussi à bord des infirmières, en nombre, avec en outre une petite escouade de très jeunes soldats, réaffectés vers l’ouest, un bon nombre de militaires blessés sur le front de l’est, d’après ce que je me souviens des explications détaillées de Mitzi. Ces passagers un peu spéciaux attendent à bord, dans le port de Gotenhafen – oh, pardon ! – dans le port de Gdynia, que le bateau, prêt à embarquer la grande masse des milliers de réfugiés civils, prussiens et poméraniens fuyant devant l’Armée Rouge – la fameuse opération Hannibal –, puisse enfin quitter son mouillage, l’appareillage était prévu au matin du 30 janvier.

    Groupés autour de Markus, les cinq jeunes garçons, qui viennent tout juste de quitter le lycée, se croyaient endurcis et bien à l’abri de toutes sortes d’émotions. À la Freie Deutsche Jugend, c’est l’école des mouvements de la jeunesse qui les a forgés pour devenir déjà des hommes, au service de la République Démocratique Allemande, avec ses principes d’engagement, de force, de résistance et de fidélité au Parti. Ils étaient persuadés qu’ils étaient forts, tous les cinq, sûrs d’avoir en eux un cœur de bronze. Or le récit de leur aîné, Markus, commence à les prendre à la gorge. Est-ce le simple fait qu’ils viennent de croiser Mitzi, l’héroïne si vivante de ces évènements ? Est-ce le talent de conteur de Markus ? Ou bien n’est-ce que la prise de conscience, soudaine, d’un épisode dramatique de la guerre qui s’est déroulé, pas si loin d’ici, il y a à peine dix-sept ans ? Hans se mouche bruyamment en laissant filer deux mots entre ses dents :

    Un moment de

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