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La médiation au Grand-Duché de Luxembourg: Droit, Technique, Processus, Posture & Paysage institutionnel
La médiation au Grand-Duché de Luxembourg: Droit, Technique, Processus, Posture & Paysage institutionnel
La médiation au Grand-Duché de Luxembourg: Droit, Technique, Processus, Posture & Paysage institutionnel
Livre électronique636 pages3 heures

La médiation au Grand-Duché de Luxembourg: Droit, Technique, Processus, Posture & Paysage institutionnel

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À propos de ce livre électronique

Ces dernières années, un outil est venu compléter l’offre de résolution des conflits : la médiation. Il a été rangé parmi des modes familiers comme la justice étatique, l’arbitrage, la conciliation et la négociation.

La compréhension de ce que représente la médiation au Luxembourg a fortement évolué grâce à une activité législative accrue depuis les années 90 jusqu’à aujourd’hui avec un accord de coalition qui encourage l’utilisation de ce mode de résolution des conflits dans toutes les matières, en ce compris dans les instances étatiques, ce qui accentue bien plus encore l’intérêt porté à la médiation.

Le présent ouvrage réunit tous les textes législatifs et règlementaires relatifs à la médiation, dresse un tableau précis des acteurs de la médiation et propose une approche sur l’utilisation du terme « médiation » avec l’objectif de contribuer au développement cohérent de la matière et à son accessibilité.

Le livre s’adresse principalement aux avocats, médiateurs, magistrats, praticiens du droit, juristes d’entreprise, compliance officers, responsables d’institutions publiques, dirigeants d’entreprises privées et représentants des ressources humaines.
LangueFrançais
Date de sortie5 sept. 2019
ISBN9782879984360
La médiation au Grand-Duché de Luxembourg: Droit, Technique, Processus, Posture & Paysage institutionnel

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    Aperçu du livre

    La médiation au Grand-Duché de Luxembourg - Jan Kayser

    couverturepagetitre

    La collection Vademecum accueille des manuels de haute qualité scientifique qui orientent utilement les praticiens du droit luxembourgeois dans le cadrede leurs activités.

    Rédigés dans un langage clair et munis de différents niveaux de lecture, les ouvrages répondent aussi bien aux attentes précises des professionnels qu’aux particuliers demandeurs d’une information de première ligne.

    Parus dans la même collection :

    G. Vogel, Le droit de la presse, 2012

    Y. Zeippen-J. Verchaffel, VAT Package 2010-2015, 2012

    J.-L. Putz, Das luxemburgische arbeitsrecht, 2013

    N. Schaeffer, Le droit de la grappe au Luxembourg, 2013

    Lëtzebuerger Juristendag, Quo Vadis droit luxembourgeois, 2013

    F. Hubé, Comprendre le livre foncier d’Alsace-Moselle et le pratiquer, 2014

    T. Pouliquen, La lutte contre le blanchiment d’argent, 2014

    M. Feyereisen, Guide pratique du droit du travail, 2016

    R. Bisenius, L’assurance du particulier, Tome 1 : Assurances et dommages, 2017

    R. Bisenius, L’assurance du particulier, Tome 2 : Assurances de personnes, 2017

    K. Vilret, Droit de l’assurance-vie luxembourgeoise, 2017

    O. Buscheman, M. Bologne et G. Marchal, La déclaration fiscale des sociétés commerciales au Luxembourg, 2018

    J.-L. Putz, Comprendre et appliquer le droit du travail, 2018

    J. Verschaffel-Y. Zeippen, Pratique de la TVA au Luxembourg, 2018

    M. Besch, Normes et légistiques en droit public luxembourgeois, 2019

    O. Laidebeur, P. Kihn, B. David et Th, Bovier, La propriété intellectuelle au Luxembourg, 2019

    A. Cuny de la Verryère-V. De Meester, Sûretés et garanties au Grand-Duché de Luxembourg, 2019

    O. Laidebeur, Intellectual Property in Luxembourg, 2019

    Des reproductions peuvent être autorisées par luxorr (Luxembourg Organisation for Reproduction Rights) – www.luxorr.lu

    Pour toute information sur notre fonds et les nouveautés dans votre domaine de spécialisation, consultez notre site web : www.larcier.com

    © Lefebvre Sarrut Belgium s.a., 2019

    Larcier Luxembourg. Une marque éditée par Lefebvre Sarrut Belgium s.a.

    c/o DBIT s.a.

    7, rue des Trois Cantons - L-8399 Windhof

    EAN 978-2-87998-436-0

    Cette version numérique de l’ouvrage a été réalisée par Nord Compo pour ELS Belgium. Nous vous remercions de respecter la propriété littéraire et artistique. Le « photoco-pillage » menace l’avenir du livre.

    Mes remerciements vont à

    Lydie Err et Alice Risch,

    Jacques Wolter, Anne-Sophie Theissen, Pit Buchler et Max Urbany,

    Pierre Thielen,

    René Diederich, Rosario Grasso, Guy Harles, François Kremer et François Prum,

    Pierre Gramegna, Carlo Thelen, Paul Ensch et Tom Wirion,

    Stefan Kessen et Beate Voskamp,

    Dorothea Assmann et Lis Ripke,

    Michelle Göbel et Anthony Boulanger.

    Préface

    La médiation, outil de prévention et de règlement pacifique des différends, est devenue au fil de son histoire une pratique largement intégrée dans les systèmes juridiques modernes à travers le monde. Au Luxembourg, le phénomène de la médiation a connu une forte évolution ces vingt dernières années et s’est forgé une solide réputation.

    Les médiateurs, comme la désignation l’indique, ont pour mission de régler un conflit entre parties, sans devoir passer par les tribunaux. Toute une panoplie de situations conflictuelles tombe sous la compétence du médiateur, qu’il s’agisse de difficultés familiales, de contentieux de voisinage, d’équivoques sur le lieu de travail ou de litiges commerciaux.

    La volonté politique de renforcer davantage encore le rôle de la médiation se traduit par l’intégration de cet outil flexible dans un nombre croissant de textes légaux et réglementaires, par exemple dans la loi, récemment adoptée, réformant le divorce. Cette loi donne la possibilité au juge aux affaires familiales d’ordonner aux parties la participation à une réunion préalable auprès d’un médiateur. Une fois informées, les parties pourront décider en connaissance de cause d’entamer une procédure judiciaire ou de régler leur différend à l’amiable avec l’aide du médiateur.

    Dans l’objectif de continuer à développer et à consolider la pratique de médiation, les parties de coalition s’efforcent à promouvoir la médiation au niveau national. Ainsi, à côté d’une promotion générale des modes alternatifs de résolution des conflits et d’une extension de leur cadre d’intervention, une professionnalisation progressive du métier de médiateur figure parmi les objectifs fixés. Dans cet ordre d’idée, un projet pilote sera lancé en collaboration avec les acteurs intervenant dans le monde de la médiation en vue d’identifier une série de matières pour lesquelles, à l’instar de ce qui est mis en œuvre pour les affaires de divorce, une réunion d’information préalable sera obligatoire avant qu’une affaire puisse être suivie au niveau judiciaire.

    De plus, dans une volonté de faciliter l’accès des citoyens aux services de médiation, le gouvernement prévoit la création d’un service virtuel de « guichet unique ». Cette plateforme informera les citoyens sur les services de médiation et les aidera à s’orienter.

    Au Luxembourg, la médiation doit beaucoup à l’un de ses plus fervents défenseurs. Un grand mérite revient à l’auteur Dr. Jan KAYSER, spécialiste de la médiation qui, dans son nouvel ouvrage, nous présente de manière claire et précise le chemin à la fois parcouru par la pratique de la médiation ces vingt dernières années au Grand-Duché de Luxembourg, tout en offrant une vue d’ensemble sur le système institutionnel et légal en place.

    Cet ouvrage est dédié aux praticiens de la médiation, aux chercheurs, aux étudiants et de manière générale à toute personne s’intéressant de près ou de loin à ce mode alternatif de règlement des conflits qui contribue au développement et à la restauration de la paix sociale.

    Félix Braz,

    Vice-Premier ministre, ministre de la Justice

    Avant-propos

    « L’apparition de la médiation dans le monde judiciaire à la fin du XXe siècle n’est pas un hasard. Elle marque le point de départ d’une mentalité nouvelle, d’une justice nouvelle. » ¹

    La médiation, pratique prétorienne qui se développe au Grand-Duché de Luxembourg dès 1803, vise à définir l’intervention d’un tiers pour faciliter la circulation d’information, éclaircir voire rétablir le dialogue entre les parties. En effet la médiation, du latin mediare, signifie partager par le milieu, servir d’intermédiaire. C’est donc celui qui est au milieu des parties. ² Ce tiers intermédiaire neutre, indépendant et impartial est celui qu’on dénomme le médiateur.

    Désormais il existe tout un corps de différents médiateurs et de règles en matière de médiation. La définition de cette activité varie selon les contextes d’application (administratif, santé, consommation, voisinage, famille, milieu scolaire…). Néanmoins des constantes existent à chaque fois qu’un tiers intervient pour faciliter une relation ou la compréhension d’une situation et des éléments de pédagogie et de qualité relationnelle se retrouvent dans toutes ces pratiques de médiation.

    La médiation traduit le besoin de recourir à une méthode moins autoritaire de règlement de conflit et permet aux personnes de se réapproprier en quelque sorte le litige, « leur » litige, et de se responsabiliser en devenant un acteur dans le règlement du conflit. Les intéressés ont recours justement à ce tiers neutre, impartial et indépendant pour aider à communiquer et à trouver pour une grande partie en eux-mêmes la solution au différend qui les oppose, respectivement à comprendre en connaissance de cause une situation donnée.

    Soit la médiation permet d’obtenir une résolution rapide et plus douce du litige qu’une procédure judiciaire. Plus encore face à une décision de justice qui attise plus volontiers les rancœurs et les animosités la médiation conduit généralement à apaiser les traumatismes et à pacifier les insatisfactions.

    Plus particulièrement la médiation administrative, champ d’activité du soussigné Ombudsman, permet notamment de prendre en considération non seulement les conclusions des parties mais aussi les raisons profondes du différend. Il est constant de constater que les causes de conflits entre administrés et administrations sont à rechercher souvent dans des dysfonctionnements dus à des difficultés de communication ou à des incompréhensions. Le litige peut parfois se régler très simplement par l’entremise du médiateur ce qui permet d’éviter le cas échéant un recours aux tribunaux. La médiation administrative est susceptible de renforcer la confiance des particuliers à l’égard des autorités et d’améliorer notablement la communication.

    D’une manière générale la médiation s’adapte aux différents contextes, et n’exclut nullement l’intervention parallèle et concertée de différents médiateurs.

    La médiation est un processus dynamique, qui s’inscrit dans la réalité relationnelle et s’adapte constamment aux évolutions de la société et des relations humaines, contribuant à préserver sinon rétablir un lien de confiance mutuelle, permettant à chaque partie de sortir gagnante d’une situation de conflit.

    Claudia Monti,

    Médiateur du Grand-Duché de Luxembourg

    1. B. BLOHORN-BRENNEUR, « La médiation judiciaire en France : Bilan de 10 ans de pratique (1995-2005) », Gaz. Pal., 12 mai 2005, doctr., p. 1560.

    2. Littré en ligne.

    Introduction

    Ces dernières années, nos sociétés ont développé un outil qui est venu compléter l’offre de résolution des conflits : la médiation. Elle se range parmi les modes pour l’instant plus familiers comme la justice étatique, l’arbitrage, mais aussi la conciliation et la négociation.

    En 1803 déjà, la médiation apparaît pour la première fois dans une loi luxembourgeoise toujours applicable – en matière de droit d’environnement d’ailleurs : Napoléon promulgue cette loi en tant que « médiateur » de la confédération suisse. ³

    Depuis, la compréhension de ce que représente la médiation a fortement évolué et s’est précisée au fur et à mesure avec une activité législative accrue dès la fin des années quatre-vingt-dix jusqu’à aujourd’hui. Un comble représente sûrement la loi du 24 février 2012 sur la médiation en matière civile et commerciale qui introduit en droit luxembourgeois une définition centrale de la médiation et du médiateur sur la base de textes européens. D’autres textes importants suivent, le dernier datant de 2018.

    À ce jour, le Grand-Duché compte 51 textes en la matière. Ce chiffre va probablement augmenter la médiation restant en plein développement : l’accord de coalition du gouvernement actuel prévoit son utilisation dans toute une série de nouveaux domaines et contextes différents :

    En matière d’accès à la justice, il est prévu d’étendre l’assistance judiciaire à la médiation conventionnelle.

    Dans une rubrique « modes alternatifs de résolution des conflits », la coalition a l’intention de promouvoir l’outil comme mode de résolution des conflits judiciaires et extrajudiciaires en toute matière, même pour les instances étatiques. Il est prévu de créer un service de « guichet unique » afin de faciliter la mise en contact des citoyens avec les opérateurs en matière de médiation. Un projet pilote aura pour objectif de définir certains domaines juridiques dans lesquels une réunion d’information sur la médiation devra être réalisée préalablement à l’introduction d’une action en justice. L’accord de coalition focalise son attention sur la qualité en matière de médiation afin de s’adapter à la professionnalisation du domaine au niveau international.

    La médiation entre victime et auteur est mentionnée en matière de justice restaurative qui sera approfondie comme élément d’une justice moderne.

    Dans le domaine de l’intégration, des formations à la médiation interculturelle seront introduites pour faciliter le travail des acteurs.

    En matière de culture, la médiation servira à soutenir le travail et la coopération des différentes associations et organisations culturelles et leurs réseaux.

    En matière de protection des consommateurs, il est prévu de vérifier si, dans le cadre de la procédure de recours collectif qui sera instituée, un processus de médiation devrait être introduit.

    Collectionner et présenter l’éventail législatif d’une matière qui a déjà revêtu et surtout revêt et revêtira beaucoup d’activité législative, offrir une vue d’ensemble des textes existants en la matière au Grand-Duché, contribuer à leur cohérence et consolidation, présenter les institutions qui mettent en œuvre la médiation et proposer une approche sur l’utilisation du terme « médiation », ceci est l’objectif de ce livre.

    Il s’agira ainsi premièrement de donner un bref aperçu sur les domaines d’application pratique au Grand-Duché de Luxembourg de la « médiation » sans thématiser en détail ses fondements théoriques en général qui ont déjà très bien été traités dans une grande variété de publications. ¹⁰

    La deuxième partie est consacrée à la présentation d’un « paysage de médiation » qui s’est effectivement créé ces dix dernières années avec un ensemble d’institutions, acteurs et opérateurs.

    La troisième partie contient la collection des sources législatives et règlementaires en médiation au Luxembourg en citant le texte de loi ou de règlement grand-ducal soit dans son intégralité soit en partie pour les passages qui traitent de la médiation tout en préservant la compréhension du contexte dans lequel il est renvoyé à la médiation. Cette collection des textes suit l’ordre alphabétique de la matière de médiation respective. Le texte même est précédé par un résumé afin de permettre au lecteur de se faire un aperçu du contenu. Suit après chaque texte un commentaire de celui-ci pour des fins d’explication, suggestion ou illustration.

    Ce faisant, ce livre restera une œuvre ouverte qui devra être adaptée à l’évolution rapide et réjouissante de la matière.

    Luxembourg en juillet 2019

    Dr. iur. Jan Kayser

    3. Voir 3.12. ; voir sur la longue histoire en matière de recherche de solutions à l’amiable E. VIVET, Négociations d’hier, leçons pour aujourd’hui, Larcier, Bruxelles, 2017.

    4. Accord de coalition 2018-2023, p. 19.

    5. Accord de coalition 2018-2023, p. 20.

    6. Accord de coalition 2018-2023, p. 25.

    7. Accord de coalition 2018-2023, p. 53.

    8. Accord de coalition 2018-2023, p. 85.

    9. Accord de coalition 2018-2023, p. 85.

    10. Voir parmi d’autres G. FRIEDMAN et J. HIMMELSTEIN, Défier le conflit, La médiation par la compréhension, Larcier, Bruxelles, 2016 ; J. MIRIMANOFF, Dictionnaire de la résolution amiable des différends, (RAD/ADR) en matières civile, commerciale, familiale et sociale, Larcier, Bruxelles, 2015 ; J. KAYSER, Alternative Formen gerichtlicher und außergerichtlicher Streitbeilegung im deutschen und französischen Zivilprozess – Les modes alternatifs judiciaires et extrajudiciaires de résolution des conflits en procédure civile allemande et française, Peter Lang, Frankfurt am Main, 2006, Zugl. : Potsdam, Paris, Univ., Diss., 2005.

    CHAPITRE 1

    La médiation au Luxembourg – une posture, une technique et un processus

    Nous rencontrons la notion de médiation dans différents contextes. Elle a également sa place en dehors du monde juridique : le médiateur sur nos chantiers qui donne des informations aux riverains et passants inquiets sur des solutions provisoires pour atténuer les gênes occasionnées pendant les travaux, le médiateur dans nos musées qui nous aide à interpréter une œuvre d’art ou nous guide à travers l’exposition, l’ami qui « joue le médiateur » quand ses deux autres amis se disputent en proposant une façon de faire qui pourra sûrement arranger les deux parce qu’il les connaît bien.

    À chaque fois, « médiation » décrit une façon de se comporter qui est marquée par l’intérêt ouvert et sincère d’une personne pour la situation dans laquelle se trouve une autre. Cet intérêt se manifeste par un comportement respectueux envers cette autre personne et une écoute concentrée et focalisée sur celle-ci.

    C’est ce qui caractérise pour l’essentiel ce qui est entendu en matière de médiation par « posture médiative » (1.1).

    La technique de médiation, quant à elle, intègre la posture, la matérialise, la met en œuvre de façon consciencieuse, contrôlée et professionnelle en utilisant des outils (1.2).

    Le comble au niveau de la formalisation de la médiation, c’est le processus de médiation qui est clairement encadré par la loi et qui implique l’intervention d’un médiateur dont la fonction est de même légalement définie de façon précise et qui maîtrise de façon professionnelle tant la posture, que la technique, que le processus (1.3).

    À chaque fois – posture, technique et processus – il s’agit de médiation, juste respectivement à des degrés d’intensité différents. Pour marier et mettre en valeur une grande motivation d’utiliser une notion heureusement positivement connotée ¹¹ d’un côté et l’existence d’une définition juridique précise ¹² de l’autre, il conviendrait de préciser, en utilisant le terme « médiation », s’il est justement question de la posture, de la technique ou du processus.

    1.1.

    LA POSTURE MÉDIATIVE

    La posture médiative se base essentiellement sur le « Harvard Concept » qui a été développé par les deux professeurs de droit Roger Fisher et William L. Ury à la Harvard Law School et publié en 1981 dans le livre « Getting to Yes » dans le cadre d’un programme de recherche sur la négociation.

    Selon ce concept, il importe notamment dans le relationnel de traiter séparément les questions de personne et le problème. ¹³ S’il est nécessaire de rester ferme et décidé au niveau du fond, il est d’autant plus important de garder son estime envers son ou ses partenaires et rester respectueux au niveau de la forme.

    Tous les contextes communicatifs se prêtent pour l’application de cette posture médiative pour rendre plus efficaces les relations professionnelles, les contacts privés, les liens contractuels, le fonctionnement économique et social – la vie sociétale en général. Chacun peut s’en servir sans forcément y avoir été formé en y veillant dans sa communication journalière.

    1.2.

    LA TECHNIQUE MÉDIATIVE

    La médiation peut être utilisée à bon escient comme technique communicative. Il s’agit alors de s’en servir à des fins précises, notamment dans les différents contextes professionnels, pour poursuivre un objectif ou une stratégie communicative dans un contexte spécifique, notamment aussi pour prévenir un conflit.

    Il peut s’agir, au niveau du cadre, d’une négociation, d’un entretien, d’une présentation, d’un discours, d’une modération, d’un coup de téléphone, voire d’une plaidoirie d’un avocat devant un tribunal.

    C’est à ce moment-là que montent au créneau d’autres éléments essentiels importants du Harvard Concept : aux côtés du "Separate the people from the problem" se joignent en premier lieu l’objectif d’aller chercher les intérêts souvent cachés derrière les positions ¹⁴ d’autant plus nettement exprimées par le ou les partenaires communicatifs et le concept de développer une série d’options de décision ou de solution avant de les évaluer. L’évaluation se fait seulement par la suite et ceci sur la base de critères objectifs. ¹⁵

    La médiation en tant que technique comporte également deux outils communicatifs spécifiques importants qui servent à réaliser lesdits éléments du Harvard Concept : la reformulation ¹⁶ et la communication non-violente. ¹⁷

    Le savoir-faire et les compétences pour appliquer ces concepts et outils évoqués sont souvent acquis dans le cadre de formations pour répondre aux différents contextes d’utilisation professionnels et à la technicité de la matière. Non seulement le secteur privé ¹⁸ mais également la fonction publique s’engagent pour mettre à disposition des programmes pour offrir des possibilités de se familiariser avec la matière. L’Institut National d’Administration Publique vient de concevoir le nouveau programme de formation générale initiale pour l’accès à toutes les carrières dans la fonction publique qui prévoit un volet « Compétences Communicatives et Comportementales » intégrant les techniques médiatives. Les formations de médiation en matière interculturelle prévues dans l’accord de coalition, mentionnées dans l’introduction, se rajoutent à cette tendance même pour un domaine très spécial. ¹⁹

    L’utilité et le rôle pratique de la technique médiative se manifestent curieusement par le fait que certaines entreprises notamment dans le secteur de la construction commencent à modifier leur business model et centrent leur portefeuille de prestations de services autour d’une prestation centrale d’ordre communicatif qui devient le cœur de leur activité économique.

    Transférées ainsi, beaucoup de compétences qu’utilise le médiateur professionnel dans le processus de médiation profitent ainsi à toute sorte d’autres contextes.

    1.3.

    LE PROCESSUS MÉDIATIF

    Quand la médiation revêt la forme d’un processus dans le sens où le contexte est celui d’un conflit existant entre parties, il est important de bien considérer son encadrement juridique précis qui a été mis en place au Luxembourg par la loi du 24 février 2012 ²⁰ prévoyant l’intervention d’un médiateur compétent. ²¹

    Le médiateur acquiert sa compétence dans le cadre de formations spécifiques qui ont pour objet de traiter de façon intensive, détaillée et structurée les façons d’assumer en pratique une posture médiative et de mettre en œuvre en présence des parties à un conflit les techniques.

    Au-delà de bien connaître sa posture et sa technique, le médiateur sait guider les parties à travers la médiation que la loi désigne comme « processus » pour bien marquer la différence par rapport à la procédure civile classique. Si le processus de médiation est loin d’être réglé de façon détaillée comme ceci est le cas pour la procédure civile qui compte 1268 articles de loi au Luxembourg, il revêt une structure précise. Celle-ci est marquée par des phases, selon le modèle, quatre à six, ²² qui d’ailleurs, dans le fond, sont les mêmes partout dans le monde et rendent ainsi la médiation universelle en tant qu’instrument de résolution des conflits et donc indépendante de règles procédurales nationales très variées.

    La qualification et la professionnalité du médiateur sont caractérisées surtout par ses compétences communicatives et linguistiques. L’éloquence et une utilisation précise de la langue sont cruciales dans le cadre de son activité. Ce qui constitue sûrement le moteur de sa qualification et sa professionnalité médiative, c’est son intérêt bien développé et sa curiosité pour l’être humain dont il cherche à retracer son comportement et ses motivations, sans en même temps le juger, afin de préserver l’impartialité. La sauvegarde de cette impartialité est d’ailleurs l’expression la plus marquante des compétences communicatives du médiateur dans le cadre d’un processus médiatif.

    Ce faisant, sa qualification d’origine – qui peut être très diverse d’ailleurs – peut le cas échéant lui être utile dans le sens où il sait comprendre la technicité du dialogue des parties sans que cette qualification technique correspondant à la matière du dossier soit par contre forcément nécessaire. L’essentiel c’est d’écouter et faire ressortir les besoins des parties et de ne pas se servir de sa qualification d’origine pour donner du conseil matériel ou une solution toute prête aux parties : c’est ce qui le distingue d’ailleurs d’un conseil et d’un conciliateur et ce qui lui permet de se concentrer entièrement sur sa responsabilité processuelle.

    Le niveau de la qualification médiative du médiateur au Luxembourg a d’un côté suivi le rôle et l’importance croissants du processus de médiation en tant que mode alternatif de résolution des conflits, de l’autre côté les attentes des utilisateurs et du marché qui s’inspire du niveau international.

    Le standard de base de formation spécifique en médiation s’est stabilisé au niveau de 150 heures. Ceci pour toutes les trois possibilités existantes au Luxembourg pour formaliser la « compétence » du médiateur exigée par la loi du 24 février 2012 :

    l’agrément de l’Association luxembourgeoise de la Médiation et des Médiateurs agréés (ALMA) ²³,

    l’agrément du ministère de la Justice en tant que Médiateur agréé par le ministre de la Justice ²⁴ et

    l’agrément du Centre de Médiation Civile et Commerciale (CMCC) ²⁵.

    Les médiateurs pratiquants témoignent souvent d’une nécessité d’un nombre d’heures de formation spécifique nettement plus important avant de se sentir sûrs pour mener à bien le processus de médiation. La pratique montre également à quel point la formation continue en la matière joue un rôle important. C’est dans ce sens que devrait être mis en œuvre l’accord de coalition qui « focalise son attention sur la qualité en matière de médiation afin de s’adapter à la professionnalisation du domaine au niveau international » : prévoir une obligation de formation continue pour rester agréé en tant que Médiateur agréé par le ministre de la Justice comme ceci est également nécessaire au niveau du système d’autocertification des agréments de l’ALMA et du CMCC. En ce sens, il serait également souhaitable de prévoir une vérification des compétences de fait d’un médiateur avant son agrément. ²⁶

    11. À titre d’exemple significatif voir rapport de la commission de l’économie du 14 janvier 2016, page 7 suivant l’avis de l’ALMA dans le cadre du projet de loi N° 6769 : « La notion de « Médiateur de la consommation » a fait l’objet d’une discussion en commission. Cette abréviation a finalement été retenue comme étant la plus « catchy » ou accrocheuse. ».

    12. Article 1251-2. (1) Nouveau Code de procédure civile ; voir 3.3.

    13. R. FISHER, W. URY and B. PATTON, Getting to Yes, Penguin Books, London, 2011, p. 19 et s. : Separate the people from the problem.

    14. Sur l’importance centrale en matière de médiation du savoir-faire de faire ressortir les intérêts des parties dans le sens de leurs vrais besoins voir S. KESSEN und B. VOSKAMP, Präzise Interessenklärung, perspektive mediation 2010/2, p. 66 et s.

    15. R. FISHER, W. URY and B. PATTON, Getting to Yes, Penguin Books, London, 2011, p. 3 et s., 19 et s.

    16. Sur cet outil important voir par exemple H. DIEZ, H. KRABBE und DR K. ENGLER, Werkstattbuch Mediation, Verlag Dr Otto Schmidt, 2. Auflage, Köln, 2019, p. 119, 121, 122, 176, 191 et s. ; CH. DUVE, H. EIDENMÜLLER, A. HACKE und M. FRIES, Mediation in der Wirtschaft – Wege zum professionellen Konfliktmanagement, Verlag Dr Otto Schmidt, 3. Auflage, Köln, 2019, p. 270 et s.

    17. Sur cette technique fondamentale voir la littérature abondante et notamment M.-B. ROSENBERG, Gewaltfreie Kommunikation – Eine Sprache des Lebens, Junfermann Verlag, Paderborn, 2016.

    18. Voir programme en matière de compétences médiatives et communicatives de la House of Training en coopération avec le Centre de Médiation Civile et Commerciale, l’Association des Banques et Banquiers, Luxembourg et l’Institut National pour le Développement durable et la Responsabilité sociale des entreprises, houseoftraining.lu.

    19. Accord de coalition 2018-2023, p. 53.

    20. Voir 3.3 ; codifiée dans les Articles 1251-1 à 1251-24 du Nouveau Code de procédure civile.

    21. Article 1251-2 (1) phrase 1 et Article 1251-2 (2) phrase 1 du Nouveau Code de procédure civile

    22. Voir par exemple le modèle de CH. DUVE, H. EIDENMÜLLER, A. HACKE und M. FRIES, Mediation in der Wirtschaft – Wege zum professionellen Konfliktmanagement, Verlag Dr Otto Schmidt, 3. Auflage, Köln, 2019, p. 79 et s. ; pour des illustrations sur le déroulement pratique du processus de médiation voir par exemple G.- G. HÖSL, Mediation – die erfolgreiche Konfliktlösung, Grundlagen und praktische Anwendung, Kösel-Verlag, München, 2017 ou G. FRIEDMAN et J. HIMMELSTEIN, Défier le conflit, La médiation par la compréhension, Larcier, Bruxelles, 2016.

    23. Voir 2.1.1. ; alma-mediation.lu.

    24. Selon le règlement grand-ducal du 25 juin 2012 fixant la procédure d’agrément aux fonctions de médiateur judiciaire et familial ; voir 3.3.2.2.

    25. Voir 2.2.2.

    26. Pour un agrément, le CMCC prévoit depuis 2018 un examen théorique et pratique devant une commission par exemple.

    CHAPITRE 2

    Le paysage institutionnel de médiation au Luxembourg

    Entre-temps, il existe effectivement un vrai paysage d’acteurs en matière de médiation au Grand-Duché avec une grande variété d’associations et surtout d’opérateurs différents qui forment une véritable famille médiative dans le pays.

    Les associations regroupent des personnes qui s’intéressent à, travaillent dans la médiation ou souhaitent la soutenir en tant qu’instrument sociétal utile et s’engagent pour la mettre en avant. Il s’agit de coordonner des activités, de réunir et échanger des informations et de représenter la matière envers la société.

    Les opérateurs, souvent membres des associations, mettent en place et réalisent en pratique posture, technique et processus médiatifs dans le cadre des compétences et missions qui leur sont attribuées.

    La famille médiative s’est réunie autour du slogan « Smart & Fair – Mediation in Luxembourg » : associations et opérateurs utilisent ce slogan dans leurs différentes communications écrites ou digitales en différentes couleurs qui symbolisent les différents secteurs ou domaines spécifiques pour lesquels ils sont responsables. ²⁷

    Outre sa fonction de faciliter aux citoyens, entreprises et institutions de se faire une idée d’ensemble du paysage institutionnel, cette cartographie colorée s’entend aussi comme contribution au Nation Branding dans le sens où elle visualise la présence d’un secteur de prestations de service organisé de façon très spécifique dans un pays prédestiné comme site pour la matière : le Luxembourg – au centre de l’Europe avec son caractère international et multilingue – se prête pour l’approche consensuelle.

    2.1.

    LES ASSOCIATIONS

    2.1.1. L’A

    SSOCIATION

    L

    UXEMBOURGEOISE

    DE

     

    LA

     M

    ÉDIATION

    ET

     

    DES

     M

    ÉDIATEURS

    A

    GRÉÉS

     (ALMA),

    A

    .

    S

    .

    B

    .

    L

    .

    L’ALMA a pour objectif de promouvoir une médiation de qualité. Fondée en 2005, elle figure comme précurseur dans ce domaine.

    Un des outils dans ce sens représente la délivrance d’un agrément ²⁸ pour permettre à des médiateurs de formaliser leur compétence. Le « Groupe de Travail Agrément » de l’ALMA est en charge de vérifier si toutes les conditions ²⁹ sont remplies.

    À travers des avis que l’ALMA émet sur des projets ou propositions de loi, l’association dispose d’un autre moyen pour s’engager auprès du législateur en faveur de la médiation. ³⁰

    L’ALMA propose également des formations spéciales à ses membres pour soutenir leur travail sur leur qualification et pour accompagner et transmettre les développements récents en la matière. Dans cette optique aussi, l’association organise tous les ans, en coopération avec les différents opérateurs de la médiation, la Semaine Mondiale de la Médiation pendant laquelle toute une variété de manifestations et conférences est au programme.

    Le « Smart & Fair – Mediation in Luxembourg » en sa version bleu clair est réservé pour l’ALMA.

    2.1.2. L

    E

    G

    ROUPEMENT

    E

    UROPÉEN

    DES

     M

    AGISTRATS

    POUR

    LA

     M

    ÉDIATION

    (GEMME)

    ³¹

    ,

    S

    ECTION

    L

    UXEMBOURG

    GEMME est un regroupement des magistrats des États membres de l’Union Européenne et des États membres de l’Association Européenne de Libre-Échange (avec la Suisse, le Liechtenstein, la Norvège, l’Islande) fondé en 2003, qui, pratiquant ou souhaitant pratiquer le recours aux modes alternatifs de règlement des conflits, estiment qu’une justice effective et pacificatrice implique, entre autres exigences, une promotion et un développement de ces modes alternatifs et plus particulièrement de la médiation judiciaire. ³²

    L’association se veut être un pôle d’échange européen sur les pratiques et expériences en matière de médiation entre magistrats, avocats et institutions européennes pour contribuer au développement de la médiation et des modes alternatifs de règlement des conflits.

    Avec le soutien du European Union Civil Justice Programme et Eurochambres ³³, GEMME organise des colloques et assises internationaux dans tous les domaines de la médiation et propose des formations pour les magistrats.

    La section nationale Luxembourg a été fondée le 16 octobre 2017 en présence du ministre de la Justice.

    2.2.

    LES OPÉRATEURS

    Les opérateurs seront présentés dans l’ordre chronologique de leur création à l’exception de la médiation de voisinage dans les communes et des médiateurs individuels dont le moment de leur mise en place ne peut être fixé de façon commune pour chaque opérateur individuel de ces deux catégories.

    Dans toute leur diversité, les opérateurs ont au moins un dénominateur commun : ils se servent tous de la posture et de la technique médiatives et jouissent d’une grande indépendance institutionnelle.

    2.2.1. L

    E

    C

    ENTRE

    DE

     M

    ÉDIATION

    ,

    A

    .

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    .

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    AMILLJEN

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    ET

     

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     F

    ONDATION

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     F

    AMILIA

    Le développement de la médiation au Luxembourg a ses racines dans le secteur socio-éducatif. Vers la fin des années 90, le Service National de la Jeunesse, inspiré par les revendications de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant faisant ressortir le rôle fondamental de l’écoute de l’enfant, a pris l’initiative de mettre en place une formation en médiation pour un groupe de professionnels, notamment du droit, de la psychologie et de l’éducation. Cette formation répondait auxdites revendications avec les approches techniques appliquées en matière de médiation.

    Pour aussi donner un cadre institutionnel et réaliser une pratique médiative, le Centre de Médiation ³⁴ a par conséquent été fondé en 1998, d’abord à titre expérimental, sous forme d’association sans but lucratif afin de garantir une indépendance institutionnelle et une autonomie règlementaire pour son fonctionnement interne, notamment au niveau de la déontologie. Il est conventionné par le ministère de l’Éducation nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse.

    Le Centre de Médiation est spécialisé en matière de médiation familiale, mais aussi pénale ³⁵ et de voisinage et travaille surtout, au-delà de son personnel de base, avec des médiateurs vacataires.

    Il y a deux autres opérateurs dans ce domaine même si la médiation familiale ne représente qu’une activité parmi d’autres encore plus importantes en matière d’accompagnement de la famille : l’a.s.b.l. Consultation et Préparation Familiale, dénommé « Familljen-Center »

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