Le souffle des patènes: Roman
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À propos de ce livre électronique
Trois ignobles personnages, animés de tendances suicidaires ont réussi à faire partir vers Wxckqz, un pays imaginaire, les populations de Gardeleau, qu’ils accusent à tort d’être de trop dans le pays.
Depuis les temps immémoriaux, l’homme a toujours été amené, de son propre gré ou par la force des choses à partir vers des lieux inconnus, à la recherche d’endroits moins hostiles ou plus accueillants.
Norbert Luc Nobime nous présente un tableau à la fois réaliste et poétique d'une nature originelle et proche de la fin... Laissez-vous embarquer dans ce roman !
EXTRAIT
Des hommes et des fils d’hommes sont au festin, sur l’autel des sacrifices. La prostration s’installe en tout lieu et les yeux contemplent le panorama d’une éternité qui sort de terre maintenant ; tout tend à s’effondre autour des fervents et les vitraux proclament les frasques d’une aventure qui n’a commencé nulle part. Les pleurs emplissent le vide et les larmes débordent des visages émaciés qui ne savent ni quoi dire ni quoi faire. Les lucioles ne voient plus du bout de leur nez ; il ne fait plus bon vivre à Gardeleau. La terre a vomi sa colère sur les nations ; les mers ne se calment plus ; elles ont tellement ingurgité et l’encre et la gadouille. Les vents ne soufflent plus du bon côté et le soleil a brûlé ses propres entrailles ; ses rayons acérés planent sur la tête des impies et les fanatiques filent comme l’éclair se terrer dans les catacombes. Les ronces et le jonc ont pris la place de la pervenche ; ils ne sortent plus de terre comme au bon vieux temps, lorsque les écluses du ciel laissaient sortir les flots qui enivrent les mers et les océans. Les roussettes tombent d’en haut ; ivres, elles se dessèchent sur la cime des grands arbres. Les météorites ont pris la route ; la lueur de la lune a dérouté leur descente sur la terre des vivants ; déjà, elles fusent sur les têtes et dans leur course elles traînent le ciel qui a défait ses amarres. Les flamboyants et les frangipaniers baissent la garde ; ils laissent tomber la bataille. Les centurions eux, sont tous tombés et l’armada a disparu de la vue des cerbères qui tombent si bas ; là, l’amblyope ne pourra plus mener la barque sur les ailes de l’abîme. La nuit tombe et le jour s’est perdu entre les vêpres et la vigie.
Tout a commencé quelque part, loin d’ici.
C’est comme une petite histoire qui se répète et se répète tous les dimanches et les jours de repos.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Norbert Luc Nobime est né en 1965 à Fort Lamy au Tchad. Béninois, Il est architecte et développeur de bases de données relationnelles et exerce ses activités en freelance. Il nourrit sa passion en écriture depuis son enfance et dispose plus de 70 manuscrits inédits. Le Souffle des patènes est son premier roman à être édité.
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Aperçu du livre
Le souffle des patènes - Norbert Luc Nobime
Avant-propos
Mèrdde et ses frères ne décolèrent plus. Les besogneux s’invitent à leur table ; ils boivent du vin et mangent du pain. À l’approche de la dernière catastrophe, les gentilshommes décident de mettre sur pied un subterfuge : celui d’envoyer à Wxckqz les nombreuses gens qui peuplent le vieux pays où poussent le pin et l’arolle et qui se plaisent aux côtés des princes et des rois à savourer les délices du buffet. Ils ont ainsi décidé de perdre les pauvres et les faibles qui se donnent le privilège, à l’instar des prédestinés de mener une belle vie. De plus, il n’y a plus assez de place pour tout le monde, pour tous ces hommes et toutes ces femmes qui traînent sous la peine et la souffrance. La débine et la faim s’installent et les bouches à nourrir sont incalculables.Dans peu de temps, il n’y aura plus d’eau pour que le monde puisse humecter le gosier ; l’on étouffe ; l’air à respirer est rare et la chaleur a percé les outres qui servent à garder l’eau bouillante des ablutions et l’aigre vin des oblations.
Gardeleau regorge de toute la misère du monde ; elle est corrompue, pervertie et se remplit de violence. La fin de toute chair est arrivée et les choses vont disparaître. Bientôt, il ne restera plus qu’un seul arbre dans le pays. Le grain se fait rare et les fleuves ont tari. Les eaux stagnantes donnent du menu flétan et les arbres se sont desséchés. On ne trouve plus que du bois sec dans les environs ; le mistral ne vient plus du bon côté et le monde suffoque sous la chaleur accablante des jours qui ne sont plus les mêmes.
Mèrdde et les siens ont imaginé Wxckqz, le pays dont l’oreille n’a jamais entendu parler et que la langue ne peut prononcer ; le pays qui n’existe pas. Ils ont parlé des abords où les fleurs sortent de terre et parfument le blizzard ; des doums qui tombent sur le sol puis s’élèvent vers le ciel ; des abricots qui sortent des coins ; de la chair jaune et grasse de l’olive qui pend au bout des branches ; des alouates qui se collent sur le raidillon des pinacles, à l’affût des goélands qui nichent dans les monts et plantent leurs serres dans la chair des brebis égarées.
Là-bas, Mèrdde, Palle et Quokin dépêchent le monde qui les entoure ; toute la pauvreté s’en ira donc vers le lieu que les ingénus passeront une éternité à chercher jusqu’à ce que la mort vienne guérir leurs souffrances.
Sur les dunes qui s’élèvent au loin, au sommet des regs qui blessent la plante des pieds, leurs os desséchés vont blanchir comme la porcelaine qui sert au breuvage des mages. Au fond des eaux et des océans, les chairs pourries s’en iront nourrir le maigre plancton qui surnage mers salées et noires marées.
Ils leur ont parlé de la contrée qui les attend à l’horizon, à l’endroit où l’écho des montagnes se confond au refrain des cigales chantant à plein temps ; là-bas, ils vont se gaver des figues que personne n’a encore mangées. Wxckqz est cachée loin d’ici ; au croisement des routes parallèles. Les promeneurs n’osent s’y aventurer et les bateaux se perdent au milieu des vagues en divagation.Le chemin qui y mène se cache dans le cauchemar des bonimenteurs qui règnent sur la ville et se réjouissent le dimanche entre l’aube et l’après-midi.
Les corneilles sont aussi de la partie ; elles montent sur les tapirs et les campagnols puis se gavent du matin au soir de jujubes et de pastèques. Les hypocrites ont tout simplement dit une parole pour perdre le grand nombre des gens qui se dispute le pain de leurs banquets. Mèrdde, Palle et Quokin n’auront plus que trois outres posées sur la méridienne ; trois corps encore sains à vêtir et à soigner et une seule prière à dire au milieu de la nuit.
Le moment venu, les gens sont partis dans toutes les directions, à la merci de la bourrasque qui souffle. Sur le chemin de leurs pérégrinations, quatre longues années ont passé ; quatre cents ans durant l’odyssée belle et tragique des anachorètes qui ne savaient pas où aller ; quatre mille longues années sont encore passées ; quarante mille ans faits de longues années aux jours qui n’en finissent jamais de paraître jusqu’aux lendemains tranquilles. Sur la route, ils ont magnifié la bonté des sols remplis de bon grain et les outres de bon vin doux qui égaie le cœur des baptisés ; l’ivraie n’a pas sa place en ces lieux. Durant tout le temps, ils ont crapahuté sur les routes assassines où sont tombées, hordes et cohortes.
Puis à l’aube des peines et des labeurs, elle a surgi des rêves et des oraisons. Les pierres vivantes jonchent le pré et disent de temps en temps une petite prière aux dolmens et aux menhirs du désert.
Elle s’est dressée avec ses tours et ses contours qui touchent le ciel, ses dômes et son panthéon, l’asile et l’arène.
Àla fin des soixante-dix-septièmes jours, après que six siècles aient passé, voilà Wxckqz !
Les pèlerins ont bâti au fil des ans, dans la prière, la louange, l’adoration, la foi et la dévotion, chaque mur, chaque pan, chaque talus, chaque lagon du vaste monde où il fait si bon vivre. Ils ont bercé vers la cité ceinte d’or et d’émeraude leur procession de songes au cours desquels les murailles de la ville et les cloisons des maisons sont devenues un vrai ouvrage d’art, comme fait par la patte des guêpes maçonnes.
Il est apparu de nulle part ; de l’abîme, la motte s’est manifestée comme une parure que dessine les fleurs au firmament et réveille les printemps ensommeillés ; son air odoriférant émane des jardinets qui offrent du plaisir aux naseaux des bêtes. Il a surgi devant les pauvres gens qui marchaient depuis des lustres à la recherche d’un petit coin pour poser la tête et reposer le corps ; la terre a fait irruption au-devant de la foule, à la face du peuple qui marche et marche depuis des âges.
Mèrdde, Palle et Quokin sont restés cloîtrés à Gardeleau, la ville étroite. Il ne reste plus que peu d’air et les eaux tumultueuses procurent la mort. Les grains ne se posent plus sur les épis. La mer a vomi ses entrailles et la colère qui monte de la plage s’est abattue sur les océans.Chaque jour, les feuilles tombent ; l’automne ne sait plus où se donner de la tête ; sur les voies du printemps, l’hiver a posé ses haillons pour ne plus jamais se départir du temps qui se meurt.
Au milieu de la prairie, seul le pinastre demeure encore jusqu’au jour de l’an. Les lascars se morfondent, isolés, seuls dans le vaste pays, vaste comme plusieurs mondes ; ils vont et viennent entre la mer et les collines ; le soir, plein de désespoir, ils n’en peuvent plus de marcher.
Alors, il se raconte ici et ailleurs ; partout, on narre l’histoire de Wxckqz la belle cité.Là-bas, les maux ont disparu ; les souffrances n’existent plus et les maladies sont guéries. Le grain tombe du ciel et l’épeautre déborde des gamelles remplies de civet et de biscotin. ÀWxckqz, il fait vraiment bon vivre ; le soleil a pris compassion des gens qui ont tant souffert ; il s’est revêtu d’un lourd manteau fait de soie et de laine ; quand il sort de la pénombre sa grosse tête échevelée, c’est d’une capuche en peau d’hippopotame qu’il se voile.
Une petite couche de chaleur caresse désormais les rivages. Il pleut à verse. Chaque matin, la brise fraîche et légère berce les matins et les molosses qui ont passé la nuit sous les étoiles ou tapis à la devanture des cases imprenables. Au commencement de la journée, tout le monde sort de sa case pour chanter l’hymne aux trois majestueux qui ont eu la belle idée de chasser leurs semblables vers les terres et les mondes qui se terrent dans les abysses.
Mèrdde dit alors à ses semblables :
Puis ils sont sortis du palais pour suivre les propos qui viennent de loin. Ils sont partis avec leurs compagnons : les fortunés, les rupins et les nababs, les mollahs et les pachas. Ils sont allés à la suite des bienheureux.
Le Souffle des patènes, plus qu’un ouvrage de la foi est le livre de la création des choses.
Ce sont les propos de l’émanation des mondes que l’on engendre à partir de rien, à partir d’un rêve ou d’une folie, d’une simple parole, d’un souffle, d’un soupir ou même d’une méchanceté.
C’est aussi le livre de la confiance aux ambitions ; de la certitude en la présence d’une évidente providence ; le livre de la croyance aux forces de l’esprit et aux paroles qui donnent la vie.
C’est le livre de l’amour qui vit dans le silence et de la haine que portent les mots.
Lorsque les paroles se lèvent sur les promontoires et que la loi et les édits s’imposent aux âmes sensées, lorsque la peur et la rancœur font frémir les coupables et les innocents, l’abîme laisse éclore à la fois le remords et l’espérance et fait ressurgir entre les mots durs que l’on prononce à l’emporte-pièce, sur la place ou dans le prétoire, l’amour de ne pas rester seul au monde ; l’amour tout court.
Le souffle des patènes est enfin, le livre des voyageurs, des migrants et de ceux qui marchent sous le soleil.
C’est le livre de la vie.
Les citrouilles pourrissent sur le sol et les semences s’enfouissent dans la bonne terre. Les tiges séchées se détachent des arbrisseaux comme les loqueteux qui prennent un linceul pour se protéger du froid. Bientôt, il en sera fait des contes et des légendes qui égaient les enfants de chœur. Les valétudinaires ont encore un petit kilo de chair pourrie sur la charpente.
Ainsi, les mondes apparaissent au goût des lèvres, au gré des désirs et des caprices. Les villes et des châteaux se dressent au fond de la bouche et du cœur. Lorsque l’encens brûle dans la navette, les foucades ne s’éteignent plus au petit matin ; elles prennent corps à l’offertoire. Les eaux qui coulent sous les ponts durcissent et laissent passer les carrosses, les charrettes et les traîneaux que tirent gaillardement les frelons aux dents longues et les félins qui n’ont plus de griffes pour gratter la terre. Les cendres s’amassent au carême-prenant et les langues de feu ne sortent plus de l’âtre ; elles surgissent de la gueule du chat qui s’amourache aux minettes pendant les jours de fête. Quand vient l’été, le printemps se réchauffe jusqu’à la Toussaint et laisse aller au vent les ailes des escarbots qui brûlent au séchoir.
Voici que s’achève le voyage.
Les jours de jeûne se terminent à la fricassée de veau. Les dévots se noient dans un bouillon de vin doux puis enivrent la coterie qui s’est assoupie entre le narthex et le chancel ; là, ce sont des anges qui se lamentent ; ils ont besoin de chair fraîche ; de la chair fraîche des adolescentes qui déambulent dans les pacages.
Enfin, Mèrdde et les siens sont euxaussi sur le chemin qui mène à Wxckqz, la conurbation qui n’a jamais existé, le pays qu’ils ont monté de toutes pièces. Et pourtant, depuis quelques instants, elle existe.
Wxckqz a fini par exister. C’est l’ultime aubaine à la survie des méchants, la dernière atellane pour rester en vie.
Les vagues montent, montent et montent encore. Elles font chavirer les cuirassiers aux robes d’aciers.
À la margelle d’un puits, le damoiseau est venu à la rencontre d’une vestale.
Sur la plage, sur le sable fin, quelque part loin