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La Bible et le feu: Roman historique
La Bible et le feu: Roman historique
La Bible et le feu: Roman historique
Livre électronique233 pages3 heures

La Bible et le feu: Roman historique

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À propos de ce livre électronique

Un ancien moine dominicain est piégé dans le tumulte des premières révoltes paysannes du XVIe.

Le moment est venu de commencer le jugement par la maison de Dieu. Les mémoires d’un ancien moine dominicain, Jean Wilhem qui se trouve pris dans la tourmente de la révolution paysanne du XVIe siècle dans le Saint Empire romain germanique. Ce livre parcourt les débuts du protestantisme et décrit les premières révoltes du monde paysan face à la noblesse et aux bourgeois des villes.

Ce roman historique vous emmènera au XVIe siècle, dans le Saint Empire romain germanique, en plein coeur de la révolution paysanne !

EXTRAIT

À ce moment-là, l’homme qui avait été agressé par le noble tantôt, se leva pour intervenir : — puis-je prendre la parole ?
— qui es-tu ? rétorqua le bourgmestre
— Je me nomme Peter Schlatter, je suis vigneron et zunftmeister de Guebwiller.
— Soit, tu peux venir t’exprimer mais je te préviens pas de débordements sinon je serais dans l’obligation de te jeter en prison !
— Soit ! l’homme marcha lentement dans l’allée le conduisant à l’autel et jeta un regard ironique à l’intention des nobles de la régence lesquels faisaient mine de dégainer leur épée, Jean-Imier de Gilgenberg les stoppa d’un geste bref.
L’homme se mit à parler à l’assemblée :
— je viens parler au nom de tous mes camarades chrétiens de la vallée de Murbach.
Nous dénonçons les atteintes à la liberté faites à notre encontre et de ceux de tous les bourgeois de la ville de Guebwiller faites depuis plus de quatre-vingts années.
— l’interdiction faite par notre prince abbé de Murbach d’avoir un accès direct de la cité par le château de Neuenbourg.
— la suppression de corvées ainsi que la liberté de pêcher et chasser comme bon nous semble sur le territoire de la vallée.
— la suppression de la main morte
— la récupération de communaux
— l’usage de l’ancien droit
— la suppression également des couvents qui extorquent toutes sortes de dîmes.
— la suppression du monopole du sel
Dehors l’agitation se fit de plus en plus forte, les gens se dressèrent sur les fenêtres pour voir de quoi il s’agissait à l’intérieur.
Lorsque le secrétaire du bourgmestre termina son discours, un paysan présent dans l’assemblée prit la parole, un homme aux traits tirés, burinés par les longues années passées dans les champs et les privations de toutes sortes : — mes frères, je partage les doléances faites ici présent mais je tiens à vous dire que nous avons été pour la plupart d’entre nous obligés d’être avec la bande à Wetzel, nous dûmes céder et prêter serment, ils nous ont dit qu’il fallait prêter serment au nom de Sa Majesté Impériale.
Des ricanements se firent entendre dans la salle dans le rang des nobles, Wetzel fulmina en l’entendant, il se leva furieux et l’interrompit pendant son discours : — tu étais bien empressé de nous ouvrir les portes de la ville tantôt, traître !
— Silence ou je fais évacuer la salle ! répliqua le bourgmestre.
Le paysan baissa les yeux et regagna sa place sous les quolibets de ses compatriotes et des rires hautains des nobles.
Henri Wetzel épuisé par cette journée me fit signe pour sortir de l’église, je le suivis.
Dehors la ville était en émois, l’agitation était permanente sur la barfüsser platz, entre les gens qui s’agglutinaient aux portes et fenêtres du couvent et l’agitation quotidienne de la vie de la cité.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Olivier Horn est né en 1967 à Phalsbourg en Lorraine. Très jeune, il était intéressé par l’histoire et la littérature. Passion transmise par son père. Il est jardinier et ceci est son premier livre.
LangueFrançais
Date de sortie4 sept. 2019
ISBN9782851137296
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    Aperçu du livre

    La Bible et le feu - Olivier Horn

    Olivier Horn

    La bible et le feu

    Roman

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    © Lys Bleu Éditions – Olivier Horn

    ISBN : 978-2-85113-729-6

    Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

    In heremi vasta (dans cette vaste solitude) . Le moment est venu de commencer le jugement par la maison de Dieu.

    Une ombre longea la st Alban reinweg, elle était légèrement voûtée, soudain, elle jeta un coup d’œil vers le Rhin qui déversait son courant tumultueux, des bateaux chargés de cargaisons diverses naviguaient sur le Rhin.

    Des pêcheurs remontaient péniblement leurs filets sur de frêles embarcations, suivies de toute une nuée de mouettes dans leurs sillages.

    Le froid et le vent commençaient à se faire sentir : l’ombre remonta la st Alban Rheinweg puis rejoignit la place de la cathédrale pour entrer par le portail st Gall.

    Au deux de la même rue, l’ombre dégagea de sa pèlerine un imposant trousseau de clefs, la serrure grinça avant de céder subitement.

    En entrant dans la maison, l’homme se saisit d’une lampe à huile qui était posée sur un bibelot à gauche de la porte, il tâtonna et prit le  briquet , il se saisit du silex et frotta la molette, l’étincelle jaillit et brûla la mèche d’étoupe contenue dans la lampe, il ferma délicatement celle-ci.

    L’homme souleva la lampe, le plus haut possible, à la lueur et la flamme, on pouvait distinguer un grand couloir en damier noir et blanc fait de marbre qui conduisit au bout à un grand escalier, imposant, en colimaçon de marbre blanc.

    L’homme promena un moment la lampe, ce qui permit de distinguer, son visage, celui d’un homme d’une soixantaine d’années, un visage osseux, les traits anguleux, une longue barbe blanche mais avec une expression de très grande dignité, un regard droit et fier, la fatigue se lisait néanmoins sur son visage, il gravit lentement les marches de l’escalier.

    Il poussa péniblement la porte située en face de l’escalier, à la lueur de la lampe, on pouvait voir distinctement une magnifique bibliothèque qui faisait le tour de la pièce.

    Une table en vieux bois vernis de chêne était installée en son centre, une fenêtre avec son assemblage de ronds de verre, appelés tilbe de 4 à 5 pouces de diamètre dont les veines circulaires empêchent de discerner les objets.

    D’un geste, il ouvrit une lucarne pour laisser un peu d’air frais, le bruit de la rue remontait vers lui.

    Il se tourna vers une étagère et prit un parchemin vierge ainsi que ses besicles, il posa le parchemin sur sa table et commença à écrire.

    Jamais, je ne pourrais effacer de ma mémoire, ce jour du mois de mai de l’an 1525 ou le cours de l’histoire aurait pu être changé. Après toute ma vie à chercher la vérité et à me consacrer à Dieu, j’ai failli en maintes occasions. J’ai douté dans des moments de faiblesses et de meurtrissures et malgré la vanité de l’homme et sa condition qui en fait un pêcheur, misérable mais sauvé par la grâce de l’Éternel.

    Il me l’a donné et je veux le louer et lui rendre hommage jusqu’à la fin de ma vie.

    Durant ma pauvre vie, Dieu m’a permis de rencontrer des grands de ce monde, des humanistes qui m’ont permis de changer ma vision des choses, j’ai 65 ans, ma vue a considérablement baissé, mes membres sont endoloris, mes articulations sont perclus de rhumatismes et la femme que j’ai toujours aimée, n’est plus de ce monde.

    C’est pour cela que j’ai décidé de laisser à la postérité mon témoignage sur ces événements avant que l’Éternel me rappelle à lui.

    Je voudrais également rendre hommage à la bonne ville de Bâle qui m’a offert son hospitalité alors que je fus persécuté et pourchassé.

    Cette ville qui a dû faire face à bien des tourments lors de son histoire, des deux épidémies de 1348 qui emporta plus de la moitié de la populace ou comme ce jour du 18 octobre 1356 où la terre trembla tellement que plus de 300 personnes y trouvèrent la mort et que plusieurs châteaux aux alentours furent détruits.

    La ville fut complètement détruite.

    Heureusement, Dieu dans sa grande bonté permit qu’elle fût reconstruite dans un délai incroyable de six années.

    Une ère de grande prospérité s’ensuivit concrétisée par le grand concile entre 1431 et 1448.

    Je m’appelle Jean ou Jahnus en germain Wilhem, c’est le nom que ma mère m’a donné que Dieu ait son âme.

    Le pays de Hanau, c’est là que j’ai grandi, à une heure de cheval de Strasbourg, c’est un pays tantôt vallonné alternant bourg plus ou moins important, collines, champs et fermes.

    Lorsque je ferme les yeux, je revois encore ses vergers abondants et l’odeur de la fenaison en été.

    Je naquis un jour pluvieux, le 15 mars 1505 au Lichtenberg, dans une ferme à quelques lieux de Saverne et d’Ingwiller.

    Mon père était prévôt, se nommant Ulrich Wilhem, ayant un poste important, il prélevait les taxes et dîmes sur les paysans.

    C’était un homme dur, il gérait le domaine d’une main de fer, gérant un espace vaste d’une quinzaine d’hectares, c’était un laboureur ayant acquis sa fortune par force traîtrise et d’accaparement de terres par le biais de testaments plus ou moins honnêtes, connaissant tantôt un père croulant sous les dettes soit par les guerres, ne laissant plus d’héritiers ou par des dettes de jeux, petit à petit, il réussit à acquérir une fortune considérable.

    C’était l’intendant de la famille du comte Hanau-Lichtenberg.

    Les comtes Hanau-Lichtenberg étaient une famille noble allemande de haute lignée, Philippe 1er, l’ancien de Hanau fut le premier de la dynastie qui passa sa vie à Ingwiller.

    Le domaine étant situé à deux ou trois lieux du village.

    Quatre bâtiments composaient le domaine, ceux-ci étant disposés autour d’une cour centrale, la première bâtisse avait deux niveaux d’habitation, il y avait une cave à vin voûtée comme il était d’usage, en terre battue, très profonde pour offrir à la cour ainsi qu’au prévôt tout le nécessaire aux banquets et agapes divers puis le grenier aménagé pour stocker les céréales nécessaires servant aussi bien à nourrir le bétail que les hommes.

    La cour était fermée par un vaste bâtiment en pierre dans lequel tenaient bêtes et fourrages.

    La deuxième, plus cossue, était composée d’une grande terrasse, des fenêtres vitrées qui avaient pour fonction de laisser passer la lumière mais surtout de voir ce qui se passait en – dehors, voir même de jeter un œil dans les bâtisses d’en – face.

    C’était la demeure de mon père et maître. Il y avait une deuxième pièce au rez-de-chaussée, un parquet en vieux chêne, une pièce sobre et au milieu une table, une étagère avec des livres contenant les comptes ou étaient inscrits toutes les dépenses et rentrées d’argent concernant les activités de la ferme.

    Malgré le poids des années, je ressens encore aujourd’hui dans mes vieux os, le souvenir lorsque dans cette pièce ou mon père me fouettait jusqu’au sang pour me punir d’un larcin que j’aurais commis ou du commettre lorsqu’au même moment depuis la fenêtre ouverte, j’entendais les quolibets des garçons de ferme se moquant de mes cris et singeant la scène devant leurs camarades.

    Philippe IV de Hanau-Liechtenberg était le seigneur dont mon père dépendait et dont il gérait son domaine.

    Ma mère était une servante faisant partie du personnel domestique, elle était logée au deuxième étage de la ferme.

    Elle était au service de mon père qui lui était déjà marié à une femme, fille d’un riche commerçant de Strasbourg ayant fait fortune dans le négoce du vin entre l’Alsace et divers pays d’Europe comme les Flandres et l’Angleterre. C’est par une de ses multiples ruses que cet homme arriva à ces fins pour épouser ce parti prometteur en écus trébuchants.

    Maître Ulrich comme il aimait être appelé, se rendit à Strasbourg pour vendre les divers produits de la ferme, il se rendît au marché au vin, c’est là qu’il fit connaissance avec cette femme mais également avec son beau-père, il acheta une bonne quantité de vin, demanda à revoir le beau-père pour parler affaire, lui disant qu’il était homme de bien et voulait prendre la main de sa fille.

    Comme, il avait l’art et la manière de bien parler, le mariage se fît au mois de mai de l’an de grâce 1485, le gueux, le rustre quand j’y pense, j’en frémis encore en pensant à toutes les souffrances que cet homme m’a fait endurer mais Dieu a voulu qu’il expire plus tôt que prévu.

    Ma mère s’occupait de filer la laine, le nettoyage des étables, de tisser également, c’était une femme travailleuse et d’une très grande douceur.

    Elle avait de longs cheveux châtains, d’une très grande beauté. Ma mère puisait l’eau au puits à chaîne de la place du domaine.

    Elle logeait au deuxième étage de la maison, les domestiques couchaient dans une pièce exiguë, une dizaine de femmes et d’hommes dormaient dans l’autre bâtiment.

    Il n’y avait pas une femme comme elle pour filer la laine ou le lin.

    Elle allait juste avoir seize printemps quand cela, c’est passé, elle était entrain de nettoyer le parquet quand il abusa d’elle pour la première fois, cela se répéta à plusieurs reprises, il la menaça de la mettre dehors si elle ouvrit la bouche.

    Ce qui devait arriver arriva, elle fut enceinte de moi, sa femme se nommait Hildegarde et avait déjà la quarantaine passée, les traits tirés, d’une extrême laideur, c’était une femme très autoritaire, d’une dureté sans pareille, pour cela, ils se ressemblaient bien, du moins en apparence !

    Ulrich parla un jour à sa femme lorsqu’il n’était plus possible de cacher la grossesse de ma mère : mon père mit la grossesse sur le compte de Gustave le palefrenier, dont mon père projetait de se séparer, son regard insolent l’indisposait.

    Dû au travail fourni par ma mère, on ne la chassa point et mon père se chargea secrètement de faire mon éducation.

    Mon père ne m’épargna rien au contraire, il me battait du matin au soir car chaque fois qu’il me voyait il ne put s’empêcher de penser à la faute qu’il avait commise avec ma mère.

    Je revois encore dans ma mémoire, les troupeaux de moutons dans ses collines verdoyantes du comté de Hanau-Liechtenberg souvent attaqué par les loups.

    Des bergers étaient chargés de les garder jour et nuit, j’ai également en mémoire, ces fermes opulentes, ces vergers abondants, l’odeur des fenaisons en été, les porcs que l’on amenait à la glandée dans ses forêts claires des Vosges du Nord.

    Je me rappelle également, d’années de vaches maigres et de disettes, des catastrophes naturelles imputées aux forces maléfiques, l’anéantissement des récoltes, l’incendie, les jours de sécheresses, les maladies du bétail.

    Les billets de sainte Agathe que l’on collait à l’intérieur des étables, sur les portes des chambres et à l’intérieur des armoires et coffres pour éloigner le mauvais sort.

    Quand je repense à tout cela, je ne peux m’empêcher d’être triste en pensant à toutes ses superstitions que l’on pouvait faire croire au peuple, malheureusement tout cela n’a guère changé !

    Je me souviens également des festivités organisées par les paysans, malgré les rudoiements de la vie, l’on s’amusait bien, on faisait ripaille avec beaucoup d’excès malheureusement !

    Ces collines verdoyantes où se succèdent vergers avec pommiers aux couleurs chatoyantes, tantôt acidulées ou sucrées avec un parfum inimitable que je n’ai pu retrouver depuis, des poiriers, cerisiers, pruniers qui recouvraient cette belle région de couleurs roses ou blancs au printemps.

    Moult serfs taillaient, greffaient, soignaient ces arbres magnifiques pour son maître et père tant haï.

    Le potager produisait des légumes à profusion, des serres étaient bâties pour les semis de poix, de choux, haricots et autres légumes.

    Les pommiers étaient de bonnes qualités ainsi que les fameux quetschiers ou pruniers qui donnaient de merveilleuses eaux de vie qui s’exportaient dans d’autres royaumes.

    Ah ! Que ne donnerais-je pour boire une larmichette de ses alcools divins pour réchauffer les articulations de mon corps endolories.

    Il y avait également des ruches dans la forêt , on  faisait du miel avec lequel on élaborait des desserts succulents . On utilisait la cire pour fabriquer des bougies que l’on préférait vendre au marché de Strasbourg plutôt que de les utiliser à part ; les autres devaient se contenter de chandelles faites avec du suif de cochon ou de bœuf.

    En automne, l’on tuait le cochon, ce qui correspondait à la période du marché de Strasbourg, quinze jours après le Saint-André, le cri du cochon que l’on égorgeait, s’entendait à des lieux à la ronde et résonnait en échos sur toute la place du domaine et me remplissait d’effrois.

    Pourtant, j’étais heureux de goûter au boudin préparé par ma mère ou lorsque le jambon pendait dans les cuisines que l’on chapardait avec les autres garnements au milieu des casseroles fumantes et autres volailles plumées.

    Les premières années de ma jeunesse se déroulèrent dans une certaine quiétude mais je devais travailler dur depuis le matin à la nuit tombée, mon père me frappait de plus en plus fort et souffrait de moins en moins de me voir ; je lui rappelais sans cesse son péché.

    Lors de ma dixième année, j’étais entrain de nettoyer l’étable, lorsque je vis au loin un nuage de fumée puis peu à peu, je distinguais deux groupes dont l’un était composé de trois cavaliers . Ils étaient vêtus d’une cotte de maille et portant une longue épée ouvragée à la ceinture ainsi que le petit bassinet à bec de passereau qui était le digne successeur du heaume médiéval de façon dont je ne pouvais distinguer leur visage, suivi d’un chariot de deux chevaux, les naseaux grands ouverts. Les yeux exorbités par l’effort, un homme encapuchonné assis à l’avant fouettant les deux coursiers, les faisant galoper pour ne pas perdre de vue les deux cavaliers qui leur ouvraient la route.

    La fin du convoi se composait de deux cavaliers en robe de bure blanche et le scapulaire noir de l’ordre des Dominicains qui fermèrent la marche.

    Ils sonnèrent à l’entrée du domaine.

    Mon père regarda par la lucarne, envoya un domestique à leur encontre . Il endossa son costume noir, le barbier lui fit la toilette rapidement.

    Il avait une barbichette comme c’était l’usage, les cheveux courts, l’œil sévère et la fraise comme le voulait l’étiquette du moment.

    Le domestique annonça les visiteurs :

    — maître, ce sont des gens de Guebwiller que vous attendiez.

    — faites-les entrer ! : dit-il d’un air impatient.

    Les soldats restèrent à l’extérieur pour s’occuper des chevaux, des valets accourant pour les faire boire et les ravitailler en foin.

    Le groupe entra, je les vis discuter vivement puis ils sortirent dans la cour et se dirigèrent vers moi.

    — Jean, viens voir, ces messieurs et moi-même, désirons, nous entretenir avec toi.

    Le groupe était composé principalement d’hommes d’Église, ils avaient la tonsure des religieux, entre trente ans pour le plus jeune et pour le plus vieux une soixantaine d’années, ils étaient tous vêtus de la robe blanche des dominicains.

    Je te présente le frère Antoine, c’est lui qui désormais s’occupera de toi pour parfaire ton éducation, tu partiras demain avec ses messieurs, dès qu’ils auront rempli les tonneaux de victuailles en échange de leur bon vin !

    Le lendemain à laudes, on commença à charger les tonneaux remplis de carcasses de viandes salées, d’étoffes, d’œufs et de fruits après les salutations d’usages, le père me donna l’accolade, je regardais mon père me faire signe puis je le vis partir sans une larme vers la maison, c’était la dernière image que j’ai eu de mon père, que Dieu lui vienne en aide !

    La troupe se mit en route, je pensais encore à cette vie que j’avais laissée en voyant les valets de ferme s’agiter encore une dernière fois.

    Mes sentiments étaient partagés entre le soulagement en pensant à tous les mauvais traitements et les mauvais souvenirs que j’ai eu ; l’inquiétude pour ma vie future, la tristesse en pensant à ma mère et de ne plus revoir ces collines verdoyantes, les joies, les jeux entre enfants, les moissons, le goût du miel, les récoltes des fruits ; oui tout cela allait me manquer !

    Nous laissâmes Ingwiller derrière nous ; les routes étant fort mauvaises, cela nous obligea à faire halte souvent.

    Depuis notre départ, j’ai eu la sensation désagréable d’être suivi, nous installâmes notre bivouac au lieu dit Graufthâl, pour y accéder, nous avions grimpé jusqu’à des anfractuosités dans la roche qui nous abritait des vents et de là nous permettait de dominer sur toute la forêt et la vallée.

    C’était un trou très vaste ou l’on aurait pu construire

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