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Micro, macro, Macron: Marginales - 296
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Livre électronique196 pages2 heures

Micro, macro, Macron: Marginales - 296

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À propos de ce livre électronique

Découvrez un nouveau numéro en version numérique de la revue littéraire belge Marginales

Assistons-nous à la projection d’un remake de « La grande Illusion » ? Admettons qu’un tiers d’année depuis son élection, le président français nous en fait voir de toutes les couleurs. Ce n’est sans doute pas étranger à ses intentions, de la part d’un penseur acquis au simultanéisme, dont le syntagme favori est « en même temps », et qui devient du fait de ce brouillage involontaire aussi insaisissable que le furet. La politique, on le sait, ne fait pas dans la dentelle, et les mailles tour à tour à l’endroit et à l’envers du nouveau capitaine de la France ne s’accommodent pas de la dictature du tweet que pratique son confrère yankee qu’il a diverti récemment en l’invitant à un régal à sa mesure : un défilé de soldatesque.

Des poèmes et nouvelles inspirés par la thématique de la politique d'Emmanuel Macron avec des écrivains comme Jean-Louis Lippert, Françoise Pirart ou encore Catherine Deschepper.

À PROPOS DE LA REVUE

Marginales est une revue belge fondée en 1945 par Albert Ayguesparse, un grand de la littérature belge, poète du réalisme social, romancier (citons notamment Simon-la-Bonté paru en 1965 chez Calmann-Lévy), écrivain engagé entre les deux guerres (proche notamment de Charles Plisnier), fondateur du Front de littérature de gauche (1934-1935). Comment douter, avec un tel fondateur, que Marginales se soit dès l’origine affirmé comme la voix de la littérature belge dans le concert social, la parole d’un esprit collectif qui est le fondement de toute revue littéraire, et particulièrement celle-ci, ce qui l’a conduite à s’ouvrir à des courants très divers et à donner aux auteurs belges la tribune qui leur manquait.
Marginales, c’est d’abord 229 numéros jusqu’à son arrêt en 1991. C’est ensuite sept ans d’interruption et puis la renaissance en 1998 avec le n°230, sorti en pleine affaire Dutroux, dont l’évasion manquée avait bouleversé la Belgique et fourni son premier thème à la revue nouvelle formule. Marginales reprit ainsi son chemin par une publication régulière de 4 numéros par an.

LES AUTEURS

Jacques De Decker; Marianne Sluszny; Jean-Louis Lippert; Alain van Crugten; Marc Guiot; Chantal Boedts; Marc Meganck; Alain Dartevelle; Jean-Marc Rigaux; Alain De Kuyssche; Claude Javeau; Françoise Pirart; Hermine Bokhorst; Jean-Baptiste Baronian; Catherine Deschepper; Michel Torrekens; Philippe Remy-Wilkin; Daniel Simon; Christo Datso; Thomas Deprijck; Corinne Hoex et Jean-Pol Baras.
LangueFrançais
ÉditeurKer
Date de sortie2 oct. 2017
ISBN9770025293893
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    Aperçu du livre

    Micro, macro, Macron - Collectif

    Éditorial

    Jacques De Decker

    Assistons-nous à la projection d’un remake de « La grande Illusion » ? Admettons qu’un tiers d’année depuis son élection, le président français nous en fait voir de toutes les couleurs. Ce n’est sans doute pas étranger à ses intentions, de la part d’un penseur acquis au simultanéisme, dont le syntagme favori est « en même temps », et qui devient du fait de ce brouillage involontaire aussi insaisissable que le furet. La politique, on le sait, ne fait pas dans la dentelle, et les mailles tour à tour à l’endroit et à l’envers du nouveau capitaine de la France ne s’accommodent pas de la dictature du tweet que pratique son confrère yankee qu’il a diverti récemment en l’invitant à un régal à sa mesure : un défilé de soldatesque.

    Avec son collègue de l’autre camp de ce qu’on appelait la « guerre froide », il a adopté un style différent. Le hasard a bien fait les choses : une évocation de Pierre le Grand occupant le palais de Versailles, il y a promené Vladimir Poutine. Cette façon finement ourdie de pratiquer une diplomatie à grand spectacle et aux registres contrastés lui a valu, dans un premier temps, un état de grâce qui, pour être plus court que d’ordinaire, transgressa les frontières de l’hexagone. La France n’aime rien tant que voir redoré son blason et elle en avait bien besoin, provoquée par la stupidité du Brexit et les démonstrations discrètes mais fermes d’Angela Merkel.

    De cet épisode qui avait l’ampleur d’une ouverture d’opéra – la déambulation de quatre minutes chrono autour de la pyramide du Louvre en avait été le coup de cymbales inaugural – on pouvait déduire que le sixième successeur du Général savait où il mettait les pieds, du moins dans le registre des fastes et des pompes.

    Il serait facile de s’en tenir là. Et, sous le coup du contraste entre le symbolique et le quotidien, se satisfaire de l’adage paradoxal selon lequel qui peut le plus ne peut pas nécessairement le moins. D’autant qu’en l’occurrence, le moins n’en est pas un : un chef d’État en est d’abord l’organisateur et pas seulement le préposé aux fêtes. Bercés par le spectacle, les Français ont été dégrisés lorsqu’on est passés aux choses concrètes. Or, là aussi, le futur président avait joué franc-jeu. Son livre, d’abord, dont le titre « Révolution » n’avait pas été compris parce qu’il prenait le terme dans son sens initial non encore déformé par ses applications pratiques ; ses déclarations publiques ensuite, avaient été longtemps négligées tant il ne semblait pas, vu son âge et sa dégaine, réellement crédible ; ses références enfin n’avaient pas été vraiment saisies, qu’elles fussent philosophiques – donc réservées aux initiés – ou économiques, donc par définition suspectes à l’opinion, en raison d’une scandaleuse démocratisation insuffisante du savoir prioritaire aujourd’hui, qu’on le veuille ou non.

    Bien avant qu’il ne mette en branle son processus d’accession au pouvoir, qui a frappé par sa vélocité et son efficacité, celui qui ne devait se considérer comme un candidat possible que dans ses rêves avait formulé dans la revue « Esprit », dès 2011, une réflexion que « le Monde » a reproduite moins de trois semaines après son élection. Intitulée « Les Labyrinthes du politique », il y formulait clairement quelques questions portant sur la gestion du temps dans l’action politique. Il y posait que « la réponse à l’urgence implique une forme d’action politico-médiatique dont l’efficacité est réduite », ce qui est « d’autant plus vrai que les urgences relèvent souvent de problèmes structurels complexes à traiter et qui nécessitent des actions de fond ».

    Lucide sur la « schizophrénie » que cela pouvait engendrer, il ne dissimulait pas le risque qu’il y avait à voir et à promettre trop loin quand le temps, lui, n’attend pas, et exprimait cette appréhension dans des termes on ne peut plus clairs : « une fois l’élection passée, la réalité arrive, les changements surviennent et l’application stricte des promesses, si elle a un sens politique (…), peut conduire à l’échec ou à des aberrations ». Quelque temps avant l’élection de François Hollande, qui allait par deux fois faire appel à lui, il précise qu’« on ne peut ni ne doit tout attendre d’un homme », que « l’action politique nécessite ensuite l’animation permanente du débat ».

    Ces débats, dès la rentrée, n’ont pas manqué. Celui qui se voulait, pour des raisons que ses réflexions préalables éclairent, le « maître des horloges » a été tenu de sortir de la réserve qu’il s’était imposée, et a accordé l’entretien gigantesque au « Point » qui restera un modèle du genre (et auquel son meilleur ennemi Jean-Luc Mélenchon ne s’est pas privé de répliquer avec la même ampleur dans « Marianne ») parce qu’il y faisait la brillante démonstration du caractère profondément réfléchi de son action.

    Il en appelait à une nouvelle « héroïsation » de l’Histoire, idée que contenait déjà son article d’« Esprit » lorsqu’il y disait que « contrairement à ce qu’affirme une critique postmoderne facile des « grands récits », nous attendons du politique qu’il énonce de grandes histoires ». Visiblement, Macron est un visionnaire de la politique, un idéologue au sens innocent du terme, ce qui, par nos temps issus de l’effondrement des idéologies a quelque chose d’intempestif, de provocateur même. Dans l’article d’« Esprit » il était des plus explicites d’ailleurs : « Seule l’idéologie permet de remettre en cause l’entêtement technique, la réification d’états de fait ; seul le débat idéologique permet au politique de reposer la question des finalités, c’est-à-dire la question même de sa légitimité, et de penser son action au-delà des contraintes factuelles existantes ».

    Ce texte important, Macron le ponctuait avec une expression révélatrice, celle de « naïveté assumée ». C’est cette naïveté qu’on lui récuse aujourd’hui, préférant voir dans sa démarche le fruit d’une stratégie calculatrice, voire cynique. Or, il ne s’agit probablement pas de cela. Le parcours qui l’a conduit à la position « jupitérienne » qu’il occupe actuellement est plutôt comparable à une quête initiatique. Il s’est retrouvé à divers postes qui, en toute logique, auraient été considérés par d’autres comme de plus qu’enviables aboutissements. Ils apparaissent plutôt comme des épreuves, des étapes d’apprentissage qu’il a jugées nécessaires afin d’acquérir la maîtrise de cet improbable dispositif qu’est la gestion d’un État au XXIe siècle.

    Car quelles sont les pierres d’achoppement auxquelles se heurtent les candidats à cette mission impossible dont la métaphore cinématographique suppose un déploiement d’effets spéciaux qui transcendent les facultés humaines ? La maîtrise d’un appareil politique qui n’a cessé de se complexifier, la connaissance intime d’un mécanisme économique qui est la principale source d’alimentation financière de cet appareil, et la communication avec le collectif humain constituant la société dont on occupe la conduite.

    Rien que l’énumération de ces défis dont la combinaison fait penser à ces visions d’Escher où l’on ne sait jamais quand les oiseaux deviennent poissons ou le contraire, ni si les escaliers mènent vers le haut ou vers le bas, esquisse le casse-tête auquel le pianiste-écrivain-philosophe dont nous parlons est confronté et dont, à la différence de certains de ses prédécesseurs, il a parfaitement mesuré les défis. Qu’il commette des bévues ou que des lapsus lui échappent est presque rassurant : c’est l’effet Tournesol qui n’épargne aucun esprit particulièrement exercé…

    L’ensemble des textes que rassemble ce numéro est un florilège de réflexions poétiques et de récits spéculatifs qui témoignent de la façon dont les conteurs – tous belges – ont perçu, presque à chaud encore, ce personnage dont on sait déjà qu’il est appelé à prendre, par sa jeunesse, sa singularité, son charme, la vitesse de son ascension et son évidente réponse à une vocation indéniable, sa place dans la légende.

    Le caractère improbable de son parcours conduit forcément à se frotter les yeux, à craindre que le carrosse se transforme en citrouille, à appréhender les lendemains qui déchantent. La politique est tombée souvent si bas que l’on ne peut s’empêcher d’estimer que lorsqu’elle se distingue de l’ordinaire, elle ne soit qu’un leurre. En plus, l’heure est au nivellement, au scepticisme, à la démythification, certainement pas à la célébration, la critique ayant plus que jamais la cote, mais sans appoint de raison ni de méthode.

    Une chose au moins est sûre : revoilà de l’esprit soufflant en politique. Le directeur de la revue qui a placé ce beau mot à son fronton, Olivier Mongin, ne s’y est évidemment pas trompé, posant que nous nous trouvons devant « un évènement historique qui trouble et fait rupture, que cela plaise ou non ». Rappelant dans le même article (Le Monde, 27 mai) que celui dont la position non orthodoxe sur la dette grecque avait été saluée par Yanis Varoufakis et dont la candidature avait été soutenue par Jürgen Habermas affrontait « une histoire à réinventer dans un temps de la post-histoire », en tentant de situer la barre là où il estimait qu’elle se trouvait. À une hauteur qui peut passer pour illusoire, c’est vrai. Mais à quoi, au fond, aspirons-nous d’autre ?

    Jacques De Decker

    24 septembre 2017

    Et Meso ?

    Marianne Sluszny

    Ce 17 avril 2017.

    J-6 avant le premier tour de l’élection présidentielle.

    L’aveu de Micro, quidam.

    J’ai tiré une seule fois. La balle a percuté l’homme en plein crâne. Elle a eu raison de sa grande gueule. J’ai remballé mon flingue et dévalé l’escalier de secours de l’immeuble. J’ai sauté dans l’auto planquée dans la cour intérieure et pris le large. J’ai rempli mon contrat. Je suis l’assassin de Nicodème Dubois Gnangnan, un des candidats à l’élection présidentielle. Rien de plus facile après trente ans d’exercices à mon club de tir sportif. D’ici quelques petites minutes, mon commanditaire saura que j’ai réussi. Il n’a rien voulu me dire de ses motivations. Cela m’est complètement égal. L’important c’est le fric qu’il versera sur un compte off-shore aux îles Caméléon. Et la vie que je pourrai y avoir.

    Je ne me fais pourtant pas d’illusions. Ce ne sont pas la plage et les cocotiers qui me rendront aimable et séduisant. Je suis laid, d’une laideur qui n’a même pas un iota d’intérêt. De plus, j’ai l’humeur toujours sombre, le caractère bilieux. Je n’ai jamais attiré une femme. Je mesure un mètre 55 avec des semelles compensées.

    Enfant, j’étais la tête à claque de l’école. Microbe au micro, hurlaient mes condisciples à la récréation… C’était hier.

    Macron président, crient aujourd’hui les ouailles du probable futur patron de l’Élysée. Je hais ce type. Tant qu’à faire, c’est lui que j’aurais aimé exécuter. J’aurais joui de démolir la belle petite figure de ce blanc-bec. Déjà qu’il la ramène avec son prénom : Emmanuel, Dieu avec nous.

    En marche ! Comme Jésus sur les eaux de la mer morte.

    En marche ! Vive le mouvement ! Vivent les golden-boys auxquels tout sourit. Qui peuvent parce qu’ils veulent. Qui obtiennent parce qu’ils décident. Des mois qu’on nous gave avec l’alpiniste Macron et son irrésistible ascension. Avec sa magnanime, jeune et lumineuse réussite ! À bas les vieux cons, les gris souris, les sans-grade ! « Les gens qui ne sont rien ». Comme c’est indécent d’être en bas de l’échelle. Comme c’est laid d’être pauvre.

    Emmanuel, lui, il est riche. C’est un homme d’affaires et un banquier. Il est maître de la macrofinance du pays. Il s’est acoquiné avec Rothschild et les adorateurs du veau d’or. Je n’invente rien. C’est France La Marine, ma préférence pour occuper la fonction de Maréchal, qui l’a expliqué lors du dernier meeting du Franc National.

    Oui, j’aurais bien zigouillé Macron mais ce n’était pas dans le cahier des charges de mon commanditaire. J’ai senti qu’il comptait beaucoup sur le virtuose de la marche pour la suite. Il a juste donné une explication à ma mesure, précisant le manque d’intérêt à faire disparaître un candidat menu fretin et l’impolitique de s’en prendre aux gros poissons du bassin de la démocratie.

    Aux îles Caméléon, je mangerai des produits de la mer. Je les adore car ils n’émettent aucun son. C’est le top pour un homme d’images. Car jusqu’à l’événement du jour, j’ai pratiqué un métier de l’image. J’ai passé ma vie l’œil rivé à un objectif de caméra. Je n’ai été qu’un valet. Un obscur, obéissant aux ordres des autres, ces chefs d’équipe qui hurlent dans l’oreillette du casque… plan rapproché, plan moyen, plan large… avance, recule, zoom, tout de suite, plus vite…

    Ma nouvelle vie, ce sera quand même la récré. Dans un univers insonore ou plutôt dépourvu de sons insanes, humiliants et agressifs. Loin du brouhaha des préaux de mon enfance dont les résonances venimeuses assourdissent encore mon ouïe d’homme cassé. Loin de la médiocrité du quotidien.

    Plus besoin de m’arracher du mauvais sommeil le matin. Fini les klaxons dans les embouteillages. Adieu la boîte de conserve du soir, cette pâtée mal réchauffée, engloutie sans un regard pour les ingrédients, les mirettes aimantées par l’intérieur du cadre télé. Et enfin du fric pour me payer des femmes et du bon temps.

    Je le mérite. Je le répète. Cela me fait du bien de le dire. J’ai rempli mon contrat.

    Ce 18 avril 2017, matin.

    Jour – 5 avant le premier tour de l’élection présidentielle.

    Dans la tête de Méso, journaliste à DiffuseParticipe.

    Dubois Gnangnan est mort. Le politicard qui criait Debout la France est à terre. Le pays est en état d’alerte maximale. Cette formule ne veut plus rien dire. La France est avalée par la pieuvre. La lave incandescente coule à flots du volcan de la peur.

    Il n’y a pas une minute à perdre. J’attends les contributeurs du journal, certain qu’ils seront nombreux à remuer leurs plumes virtuelles dans l’encre rouge de l’esprit contraire. Même s’il y a eu mort d’homme, il va falloir provoquer, choquer, polémiquer… Ce n’est pas pour ronronner que j’ai quitté un haut poste dans un quotidien de la presse alignée du pays.

    Se démarquer, c’est notre fonds de commerce, notre mode de pouvoir, notre cran d’arrêt contre ceux qui s’engraissent de la récupération des crimes.

    La plupart des candidats y ont déjà été de leur couplet. France La Marine a déversé ses ordures sur les immigrés. Fleury Gronchon (mon favori) a chanté son oratorio en (île) de ré majeur :

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