À propos de ce livre électronique
Novembre 1288. Privée de roi et d'héritier direct du trône, l'Angleterre se dirige tout droit vers une deuxième guerre civile en une seule génération. Lorsque David, prince du Pays de Galles, et son épouse Lili se rendent à Londres pour assister au mariage de William de Bohun avec la princesse Joan, ils n'ont aucune intention de se mêler de la situation politique locale.
Mais lorsque les luttes intestines mènent à un premier puis à un second meurtre, David et Lili se retrouvent au coeur d'une vaste conspiration. Piégés entre l'histoire et la légende, ils vont devoir décider ce qu'ils devront sacrifier pour sauver à la fois leur propre pays et le peuple d'Angleterre.
Pendant ce temps, au Pays de Galles, Llywelyn et Meg découvrent que la barrière du temps ne les protège pas des obstacles qui se dressent sur leur chemin...
Dans Les Enfants du Temps, sixième tome de la saga Après Cilmeri, nous continuons à suivre l'histoire de Llywelyn et Meg et de leurs enfants au royaume médiéval du Pays de Galles et en Angleterre.
Sarah Woodbury
With over two million books sold to date, Sarah Woodbury is the author of more than fifty novels, all set in medieval Wales. Although an anthropologist by training, and then a full-time homeschooling mom for twenty years, she began writing fiction when the stories in her head overflowed and demanded that she let them out. While her ancestry is Welsh, she only visited Wales for the first time at university. She has been in love with the country, language, and people ever since. She even convinced her husband to give all four of their children Welsh names. Sarah is a member of the Historical Novelists Fiction Cooperative (HFAC), the Historical Novel Society (HNS), and Novelists, Inc. (NINC). She makes her home in Oregon. Please follow her online at www.sarahwoodbury.com or https://www.facebook.com/sarahwoodburybooks
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Aperçu du livre
Les Enfants du Temps - Sarah Woodbury
Principaux Personnages
––––––––
Les Gallois
David (Dafydd) – Prince de Galles
Lili – Sœur de Ieuan, épouse de David
Llywelyn – Roi du Pays de Galles, père de David
Meg (Marged) – Reine du Pays de Galles, mère d’Anna et de David
Anna – Demi-sœur de David
Math – Epoux d’Anna, neveu de Llywelyn
Cadell – Fils d’Anna et de Math
Gwenllian – Fille de Llywelyn
Ieuan – Chevalier gallois, un des hommes de la garde de David
Bronwen – Américaine, épouse de Ieuan
Bevyn – Chevalier gallois, capitaine de la garde de David
Nicholas de Carew – Baron normand/gallois
––––––––
Les Anglais
Edward I (décédé) – Roi d’Angleterre
Eleanor d’Angleterre – Fille d’Edward
Joan d’Angleterre – Fille d’Edward
Humphrey de Bohun – Régent d’Angleterre
John Peckham – Archevêque de Canterbury
William de Bohun – Fils de Humphrey
Maud de Bohun – Epouse de Humphrey
Edmund Mortimer – Baron des Marches
Gilbert de Clare – Baron des Marches
Premier Chapitre
15 novembre 1288
Meg
––––––––
« Tu sais ce que tu as à faire, n’est-ce pas ? » dit Llywelyn.
Dans l’obscurité grandissante, Llywelyn et David regardaient au loin, debout sur le balcon qui surplombait la rivière Wye. Goronwy et moi faisions de même, quelques pieds derrière eux. Le soleil que nous n’avions guère vu en ce jour maussade de novembre se couchait derrière le château.
Je regardai Goronwy, comme pour lui demander son aide, mais il détourna le regard, peu désireux de s’impliquer dans cette querelle. Depuis que Llywelyn avait consenti au mariage de David avec Lili, le père et le fils avaient bienheureusement cessé de s’opposer. En particulier, maintenant que Lili attendait un enfant, Llywelyn arborait discrètement un petit air satisfait. Mais parfois, leurs échanges me donnaient la sensation d’avoir des papillons dans l’estomac, et ceci n’avait rien à voir avec les coups de pieds ou les mouvements soudains du bébé que je portais moi aussi. Ils me disaient seulement que ni l’un ni l’autre ne se faisaient encore complètement confiance. C’était comme si le souvenir amer de ces mois de conflit planait toujours sur leur relation, alors même que l’objet du conflit avait disparu.
« Je veux que le mariage de William et Joan se passe bien, » dit David. « C’est pour cela que nous allons à Londres. C’est la seule raison. »
« On pourrait en profiter pour faire plus, » dit Llywelyn. « Même s’il n’est plus question de mariage entre toi et une des filles de la famille royale, tout n’est pas perdu. Tu peux viser plus haut, et ainsi protéger le Pays de Galles des velléités d’un futur roi d’Angleterre qui aura retrouvé toute sa puissance. Tu pourrais être ce roi. »
Redoutant la reprise de cette dispute, je regardai les flots qui, sous nos pieds, se dirigeaient en tourbillonnant vers la Severn. Le château de Chepstow avait été bâti sur un éperon rocheux au-dessus de la Wye. Les tempêtes de la semaine passée, couplées au reflux provoqué par la marée montante qui remontait le fleuve depuis une heure, avaient considérablement fait monter le niveau de l’eau.
A ce moment, la surface de la rivière, habituellement à environ soixante-dix pieds de la base des murs du château, se trouvait à moins de quarante pieds. Sur la rive opposée, l’Angleterre nous faisait face. C’était quelque chose que personne n’oubliait au château de Chepstow, même si, pour le moment, la paix régnait entre les deux pays.
Ce qui me faisait le plus mal au cœur, c’est que Llywelyn avait raison. Je savais ce que l’avenir était susceptible de réserver au Pays de Galles lorsque l’Angleterre aurait retrouvé un souverain puissant. Nous avions eu la chance de voir le roi Edward disparaître alors même que nous prenions l’ascendant. Dans mon ancien monde, seule la rare conjonction entre l’avènement d’un leader puissant, tel que Llywelyn, et le soutien des ennemis de l’Angleterre avaient permis au Pays de Galles de vaincre ou de résister aux invasions anglaises. Le dernier prince de Galles, non pas Llywelyn, mais Owain Glyndwr, avait finalement failli parce que lorsque ses alliés l’avaient déserté, le roi d’Angleterre s’était avéré plus fort et plus réactif, capable de rassembler des forces supérieures en nombre et en matériel. Le Pays de Galles n’avait eu aucune chance.
David replia les mains et s’appuya sur le mur devant lui. J’avais envie de tendre le bras vers lui, de le toucher, mais je me retins. C’était un adulte désormais, et la décision lui appartenait.
Pour venir sur ce balcon, nous avions dû passer par la cuisine, descendre une volée de marches puis traverser le cellier. Roger Bigod, le premier propriétaire du château, n’avait pas fait construire ce balcon pour jouir du magnifique panorama, ni pour profiter du calme, mais en vue de permettre l’arrivée de renforts et l’approvisionnement du château par la rivière en temps de guerre.
Ce jour-là, nous l’avions choisi pour pouvoir discuter en toute discrétion, allant jusqu’à demander à nos compagnons et aux gardes de quitter le cellier et l’escalier. David avait même exclu Evan, qui le suivait où qu’il aille depuis que David l’avait promu capitaine de sa garde personnelle, son teulu. Seul Goronwy était resté avec nous, silencieux, dans l’ombre.
« Je sais ce que tu veux, Dad, » dit David.
« Vraiment ? » dit Llywelyn. « Pourquoi ne vois-tu pas que monter sur le trône d’Angleterre pourrait changer pour toujours l’avenir du Pays de Galles ? »
« Je le comprends, » dit David, « mais sur quelle base pourrais-je fonder mes prétentions, et qui devrais-je trahir pour parvenir à mes fins ? Humphrey et William ? Les barons normands qui se sont alliés à nous ? »
« Ça n’a pas à se passer ainsi, » répondit Llywelyn. « Chacun sait que la couronne d’Angleterre n’a pas d’héritier direct et que le royaume est en pleine confusion. Aucun des barons n’a le soutien d’un nombre suffisant de ses pairs pour la revendiquer sans ambiguïté, et même ceux qui ont pris le parti de Valence ne peuvent l’imaginer, lui ou un de ses laquais, sur le trône. »
Valence était le seigneur normand à l’origine de l’invasion que nous avions subie au mois d’août. Le grave camouflet qu’il avait essuyé lors de sa défaite retentissante dans l’estuaire de la Severn ne l’avait pas fait disparaître. David et Llywelyn étaient d’accord sur le fait qu’ils ne pouvaient compter sur la chance une seconde fois si Valence parvenait à ourdir un nouveau complot contre le Pays de Galles. Ce qui expliquait l’insistance de Llywelyn pour que David ajoute son nom à ceux des nombreux candidats à la couronne d’Angleterre. Nul ne pouvait savoir ce qui allait sortir du chapeau.
« Je ne suis pas de sang royal, Dad. Quelle serait ma légitimité ? »
« En qualité de High King... »
Le titre de High King était attribué à un souverain qui avait autorité sur les autres rois, sans avoir le titre d’empereur. C’était selon la légende le titre du Roi Arthur et, avant lui, d’Uther Pendragon
David émit un petit rire railleur, sans laisser Llywelyn finir sa phrase. « Mais je ne serais pas le High King. Nous n’avons pas l’intention d’unir le Pays de Galles et l’Angleterre sous mon autorité. Du moins pas aujourd’hui. Nous parlons de briguer le trône d’Angleterre. »
Llywelyn essaya encore. « J’admets que c’est vrai, pour le moment, mais... »
« Même si le peuple anglais en venait à considérer sérieusement ma candidature, en quoi serait-ce différent pour eux de ce que nous avons souffert depuis des siècles sous la botte normande ? »
« Tu ne peux pas sérieusement comparer ce que serait ton éventuel règne à celui du roi Edward. ».
« Dans l’esprit des Anglais, en quoi serais-je différent ? Les souverains gallois qui sont allés trop loin et ont quitté leurs montagnes pour tenter de mettre la main sur les plaines d’Angleterre sont pour la plupart morts au combat au cours de guerres à l’est pour des territoires dont personne chez nous ne s’est préoccupé depuis le départ des Romains. »
« Ces terres étaient à nous, autrefois, » dit Llywelyn.
« Elles l’étaient, » dit David, « mais nous ne sommes plus à l’Âge des Ténèbres et je ne suis pas Arthur, quoi qu’on en dise. »
« Moi, je dis que si, » dit Llywelyn. « Peu importe le sang qui coule dans tes veines. Le pouvoir suprême sur ce pays te revient de droit... »
« Je t’en prie, ne dis pas ça... » David avança vers son père, la main tendue.
« Et c’est l’esprit d’Arthur qui est en toi, même si la moitié de ton sang vient d’un autre monde. »
Avec un grognement de dégoût, David poursuivit. « Dad, arrête, tu sais à quel point, quand on me compare à Arthur, je me sens comme un imposteur. » David se passa vigoureusement les deux mains dans les cheveux, puis les laissa retomber.
« Je sais, et je suis désolé que ça te mette mal à l’aise. Ça ne devrait pas. » Llywelyn me jeta un coup d’œil.
Interprétant son regard comme un appel à l’aide, je vins les rejoindre. « Cela permet d’expliquer ta différence de manière compréhensible et acceptable pour tout le monde, » dis-je. « C’est pour cette raison que nous n’avons rien fait pour contredire la rumeur. C’est pour te protéger. »
« Ce n’est pas comme ça que je le ressens, » dit David. « Il y a longtemps que je n’essaie plus d’expliquer à mon entourage d’où je viens, mais j’ai fait de mon mieux pour rester moi-même, même si on me trouve bizarre. »
« Ce n’est pas que tu es bizarre, mon fils, » dit Llywelyn. « Tu es différent de tous car c’est précisément de cette différence que le Pays de Galles a besoin. C’est pour cela que tu es venu à moi il y a six ans. C’est pour cela que ta famille est si spéciale. Maintenant, l’Angleterre aussi a besoin de toi, pour éviter une guerre civile qui déchirerait le pays pour la seconde fois en une seule génération. »
Llywelyn faisait allusion au risque d’une répétition de la Guerre des Barons, au cours de laquelle, pendant un court laps de temps, le roi Henry avait été écarté du trône au profit de son beau-frère, Simon de Montfort. Llywelyn avait rallié la cause de Simon et fini par épouser sa fille, qui était morte en mettant Gwenllian au monde.
Au cours des trois dernières années, depuis que l’Angleterre avait cessé de revendiquer sa souveraineté sur le Pays de Galles, il nous était clairement apparu qu’aucun semblant d’unité ne régnait entre les barons normands. Il était possible qu’un baron ou un autre obtienne certains soutiens, mais jamais suffisamment pour l’emporter sur une alliance de ses ennemis. La régence était une mesure temporaire, un compromis, jusqu’à ce que l’un des barons parvienne à rassembler assez de forces autour de lui pour tout simplement s’emparer du trône. La récente alliance conclue entre Bigod, Valence et Vere en était un exemple.
Bien que cette tentative ait échoué, combien de barons avaient-ils contemplé la possibilité de faire une tentative similaire, jusqu’à ce que la défaite de Valence ne les incite à changer d’avis ? Clare avait simplement décidé d’attendre la mort de Llywelyn pour se lancer à l’assaut du Pays de Galles. Il avait cru que David serait plus faible que son père. Une victoire lui aurait donné l’avantage sur les autres barons. Mais à présent, même lui avait rejoint David.
David détourna le regard. Comme je le craignais, cette vieille querelle risquait à nouveau de les consumer. Entre deux personnes égales, il n’y avait pas de vote décisif, pas même le mien. Pour essayer d’atténuer la tension, le posai la main entre les omoplates de David et le massai doucement. Ce n’était que le geste d’une mère qui souhaitait mettre fin à une discorde que je ne pouvais supporter plus longtemps entre lui et son père. Alors que je cherchais désespérément ce que je pourrais dire, n’importe quoi pour effacer les rides d’inquiétude apparues prématurément autour de ses yeux, David pencha la tête vers moi et soupira.
J’ignorais si je m’habituerais un jour à avoir un fils qui me dépassait de dix-huit pouces, mais cela n’empêchait pas mon cœur de fondre lorsque je le regardais, tout comme il fondait lorsqu’il était un petit garçon potelé de trois ans. Il allait avoir vingt ans demain. J’avais du mal à réaliser à quel point il avait grandi et mûri depuis le jour où il était arrivé au Pays de Galles avec Anna. C’était maintenant un homme qui me regardait.
Je pris son visage entre mes mains. « Ce que je souhaite pour toi, avant tout, c’est d’alléger les fardeaux que tu portes, et te voir vivre avec un peu plus de légèreté. Ce n’est pas juste de te demander cela, parce que tu portes tout le poids du Pays de Galles sur tes épaules, mais autrefois nous nous amusions, tu te souviens ? »
« Seigneur... Je sais, Maman. » David appuya son front contre le mien. « Et vraiment, ce n’est pas juste pour Lili. Je me conduis comme un ours plutôt que comme un mari. Et maintenant, avec le bébé...
Par-dessus mon bras, Llywelyn prit David par l’épaule. « Mon fils... » dit-il, mais il ne termina pas sa pensée. Au lieu de cela, il resserra son étreinte et je vis blanchir les jointures de ses doigts.
« Llywelyn ! Que se passe-t-il ? » Je posai la main sur son bras.
Je vis son visage se crisper et les tendons de son cou se contracter. « Cariad... » Llywelyn porta sa main droite à sa poitrine, puis ses genoux faiblirent et David et moi vacillâmes sous son poids en essayant de le soutenir, prenant appui de la hanche contre le mur derrière nous.
« Monseigneur ! » Goronwy, qui avait assisté à la scène sans nous interrompre, se précipita vers nous.
« Aidez-moi... » Llywelyn agrippait ma main, luttant pour respirer.
Je passai le bras de Llywelyn autour de mes épaules tandis que David faisait de même de l’autre côté. Ensemble, nous l’assîmes sur le sol au pied du mur.
« Que se passe-t-il, Maman ? » demanda David.
« Je... Je ne suis pas sûre. »
« Je vais chercher Aaron. » David se dirigea en courant vers la porte qui menait au cellier.
Je me blottis contre Llywelyn, qui n’avait pas lâché ma main.
Goronwy vint s’accroupir devant nous. « Il faut le faire maintenant, Meg. On doit le faire tout de suite. »
« Je sais, Goronwy, je sais. » Les larmes me montèrent aux yeux, mais je refusai de les laisser couler. Ce n’était pas le moment de pleurer. Dans ma tête, une seule phrase tournait en boucle comme un mantra, jusqu’à ce que j’aie envie de la crier au lieu de la retenir au fond de moi et de garder mes forces pour Llywelyn. Mon Dieu, ne le laisse pas mourir. Ne le laisse pas mourir. Je ne peux pas vivre sans lui ! « Aidez-moi à le relever. »
Que... que... que faites-vous ? » Llywelyn haletait. Il ne me voyait pas. Il déglutit péniblement et répéta sa question, avec cette fois de l’indignation dans la voix.
« Il est temps de partir, mon amour. » Je pressai ma joue contre la sienne, appréciant la sensation de sa barbe râpeuse contre ma peau.
« Non ! » Llywelyn tenta de me repousser. « Je ne te laisserai pas ! »
« Nous en avons déjà parlé, » dis-je. « C’est ça ou la mort. »
« Ça ne vaut pas la peine de prendre ce risque, » dit Llywelyn. « Pas pour toi. Pas pour l’enfant. »
« Vraiment ? » Je me tournai vers Goronwy. « Aidez-moi à le mettre debout. Nous avons de la chance que cela soit arrivé ici, près du parapet, et non dans la grande salle ou dans nos appartements, ou bien je n’aurais jamais pu y arriver. »
« Vous n’êtes pas assez forte pour le faire sans aide, vous le savez, » dit Goronwy. « Je ne vais pas vous laisser partir toute seule, pas plus que Llywelyn ne le ferait. »
« Bien-sûr que je ne vais pas partir seule. J’emmène Llywelyn... »
Je m’interrompis. Goronwy souleva Llywelyn dans ses bras comme s’il ne pesait pas plus qu’un enfant. Llywelyn avait été malade, par intermittence, depuis la bataille de l’estuaire au mois d’août. Il avait tenté de le dissimuler, mais j’étais sa femme, et je le savais. Il avait perdu du poids, même s’il tentait de le nier quand David en faisait l’observation. Je n’aurais pas cru, pourtant, qu’il avait suffisamment maigri pour que Goronwy puisse le porter ainsi.
Je serrai les dents. Llywelyn avait tort. Il était grand temps que nous partions, que cela lui plaise ou non.
Avec un grognement, Goronwy se servit d’une pierre tombée là comme d’une marche et grimpa au sommet du muret, à hauteur de taille, qui surplombait la Wye. Il me regarda. « Vous venez ? Ça ne va pas marcher si je le fais tout seul. »
« Oui, oui, bien-sûr, je viens ! » Je relevai mes jupes pour dégager me jambes et grimpai à mon tour pour le rejoindre. Je glissai une main sous le ceinturon dans lequel Goronwy portait son épée et saisis la main de Llywelyn de l’autre main. Llywelyn avait cessé de protester. Je sentis la terreur m’envahir en constatant qu’il avait perdu conscience. Il nous restait si peu de temps.
« Maman ! Qu’est-ce que vous faites ? »
Je jetai un coup d’œil par-dessus mon épaule vers mon fils qui se tenait sur le seuil de la porte. Mon fils bien-aimé. Je lui souris, alors qu’à nouveau mes yeux s’emplissaient de larmes. « Je t’aime. Dis à Anna que je l’aime. »
Et avec Goronwy à mes côtés, et Llywelyn serré dans mes bras, je sautai.
Chapitre Deux
15 novembre 1288
David
––––––––
Je me précipitai en avant, essayant désespérément de stopper Maman et Goronwy. Mais avant même d’esquisser le moindre mouvement, je savais qu’il était trop tard. Avant que je n’arrive au milieu du balcon, ils s’étaient déjà lancés dans le vide. En atteignant le muret du haut duquel ils avaient sauté, je me penchai pour scruter les flots tumultueux de la rivière. Je priai pour voir leur tête flotter dans le courant. En même temps, je priai pour ne pas les voir.
Je n’étais pas idiot. A l’instant même où j’avais posé la question à ma mère, je connaissais la réponse. Mon père avait une crise cardiaque et ma mère avait fait ce qu’elle pensait avoir à faire pour le sauver. J’avais fait la même chose pour Ieuan trois ans auparavant. Comment aurais-je pu lui reprocher de tenter de faire de même ? Je ne pouvais détacher mon regard de la rivière en contrebas. Puis je sentis le bras de Lili se glisser autour de ma taille. « Que se passe-t-il ? Je t’ai entendu appeler Aaron. Est-ce que quelqu’un est tombé ? »
Je la serrai contre moi. Puis Anna et Math apparurent près de moi. A leur tour, ils se penchèrent au-dessus du mur pour regarder.
Aucune tête ne flottait à la surface. Personne ne surgit en toussant pour cracher l’eau avalée. Le courant était si fort qu’ils pouvaient se trouver à un quart de mille en aval à présent, s’ils étaient tombés dans l’eau. En me retournant, je vis Aaron au milieu du balcon. Son visage prit une expression attristée en me regardant. J’y lus de la tristesse, et de la commisération.
« Vous étiez au courant ? » demandai-je.
« Oui, » dit Aaron. « Ou plutôt, votre mère avait mentionné la possibilité de... de... » Il se tut et se contenta d’indiquer le parapet de la main. « ...Si la santé du roi ne s’améliorait pas. »
« Je ne savais même pas qu’il était malade. » Je me tournai vers Anna. « Tu le savais ? »
« Est-ce que tu parles de Papa ? » dit Anna. « Maman et moi le trouvions plus faible, et nous n’aimions pas ça, mais ni Aaron ni moi n’avons pu déterminer ce qui n’allait pas. Pourquoi demandes-tu... » Anna ne termina pas sa phrase. Elle pâlit, et regarda de nouveau par-dessus le mur.
Je regardai, derrière Aaron, l’attroupement d’hommes d’armes et de serviteurs qui s’était rassemblé à l’entrée du balcon. Je fis signe à Evan, qui s’avança vers moi.
« Envoie tes hommes vers le sud le long de la rivière, » dis-je. « Encore mieux, vas-y toi-même. »
« Que dois-je chercher ? » Comme moi, Evan s’exprimait à voix basse.
« Des corps dans l’eau. »
Les mâchoires d’Evan se crispèrent. « Monseigneur... »
Je lui saisis le bras, l’agrippant aussi fort que mon père l’avait fait avant de s’écrouler, puis desserrai ma prise. Malgré les paroles de ma mère me demandant d’aborder la vie avec plus de légèreté, il me fallait me contenir devant ces gens. Le prince de Galles n’avait pas le droit d’éclater en sanglots, quelle que soit son envie de le faire. « Je ne pense pas que tu trouveras qui que ce soit. »
Evan fronça les sourcils mais acquiesça, obéissant parce qu’il ne pouvait en être autrement. « Tout de suite, Monseigneur. » Il se retourna. En arrivant près des autres curieux, il écarta les bras et leur fit signe de reculer, et ils acceptèrent de quitter le cellier puis de remonter l’escalier pour regagner la partie principale du château.
Math s’approcha et m’attrapa par l’avant-bras. « Tu as envoyé Evan rechercher des corps. Qui est tombé ? »
« Il vaut mieux en parler ailleurs, » dis-je.
« Nous savons qui, n’est-ce pas ? » dit Lili.
« Pas ici. » J’entourai les épaules d’Anna d’un bras, et celles de Lili de l’autre. « Venez avec moi. »
Je sentis Anna protester silencieusement devant mon refus de parler, mais comment pouvais-je dire à haute voix que j’avais vu Maman, Dad et Goronwy sauter dans la rivière et disparaître, que ce soit dans l’eau ou dans le temps ? Je revis dans mon esprit le déroulement des minutes qui venaient de s’écouler, et secouai la tête. Ils devaient avoir réussi. Ils le devaient, mais je ne pouvais en être certain.
Deux minutes plus tard, je fis entrer tout le monde dans mon cabinet de travail. Math ferma la porte derrière lui et s’adossa contre elle, les poings sur les hanches. Je n’avais pas lâché Anna, mais elle se dégagea et croisa les bras devant sa poitrine. Elle me défia du regard. « Explique-moi. »
« Dad a eu une crise cardiaque... »
Anna laissa ses bras retomber, sa colère évaporée. Math fit deux pas pour la rejoindre et l’entoura de ses bras. Elle se laissa aller contre lui.
« ... j’ai couru chercher Aaron et lorsque je suis revenu sur le balcon, Maman et Goronwy étaient debout sur le parapet, et Dad était dans les bras de Goronwy. » J’essayai de forcer mes lèvres à former les mots ils ont sauté, sans y parvenir. Je me pinçai la racine du nez et fermai les yeux.
« Est-ce que quelqu’un d’autre les a vus sauter ? » demanda Anna.
« Non, » dis-je, « à moins que l’un des gardes ne les ait vus depuis le haut des remparts. »
Math s’adressa à moi par-dessus l’épaule d’Anna. « Tu supposes qu’ils sont partis vers le futur, et pourtant tu as envoyé Evan à leur recherche le long de la rivière ? »
« Il le fallait. Nous devons en être certains. »
« Ils auraient été emportés rapidement vers l’aval, » dit Math. « S’ils ont échoué quelque part, l’endroit le plus probable est le banc de sable, à un mille au sud. »
« Seulement s’ils sont vraiment tombés dans l’eau. » Anna reprenait lentement ses esprits. Elle me regarda au-dessus de ses mains jointes devant sa bouche. « Tout cela est ma faute. »
Je la regardai à mon tour, bouche bée. « Comment cela pourrait-il être ta faute ? »
« C’est moi qui ai pensé à monter en haut d’une tour et à sauter, » dit Anna. « J’en ai parlé avec Maman. »
J’éclatai d’un rire sans joie. « Mais c’est moi qui l’ai fait pour de vrai. »
Les yeux d’Anna s’étaient emplis de larmes. Elle fit un pas vers moi, Math la laissa aller, et je l’attirai dans mes bras. Elle entoura ma taille de ses bras et se mit à pleurer contre mon épaule. A mon tour, des larmes me brouillèrent la vue. Je clignai des yeux pour ne pas les laisser couler. « Ils sont partis, Anna. Ils ont réussi. »
Aaron s’éclaircit la gorge. « Monseigneur, comme vous l’avez deviné quand nous étions sur le balcon, votre mère et moi avions parlé de cette éventualité. »
« Pourquoi n’en avez-vous parlé à aucun de nous, » demanda Anna; la voix étouffée par ma chemise.
« Parce qu’elle m’a fait jurer de garder le secret. » Aaron leva les mains et les laissa retomber. « Je suis désolé. »
« La dernière chose qu’elle m’a dite est dis à Anna que je l’aime, » dis-je. Anna laissa échapper un nouveau sanglot.
« Donc, ils avaient réellement l’intention de partir, » dit Math. « Ça ne pouvait pas être un accident ? »
« Personne ne monte sur un mur au-dessus de la Wye par accident, » dit Lili.
Anna me lâcha et rejoignit Math. Je me mis à aller et venir entre la fenêtre et le centre de la pièce, les mains dans les cheveux, essayant de réfléchir. « Il nous faut discuter de ce que nous allons faire maintenant, avant que l’un d’entre nous n’ait à faire face aux autres. » Je désignai la porte de la main, mais en fait je pensais à l’ensemble de la population. Le roi du Pays de Galles ne pouvait disparaître sans que personne ne le remarque.
Math hocha la tête. « Tu vas devoir faire une déclaration, mais je ne sais pas ce que tu peux leur dire. »
« Faites savoir à ceux qui se trouvent ici à Chepstow que ta mère a emmené ton père à Avalon pour le guérir, » dit Lili, « comme tu l’as fait pour Ieuan il y a trois ans. »
Je m’immobilisai et résistai à l’envie de cracher par terre. Arthur. Encore. La légende me suivait partout. Comment pouvais-je m’en débarrasser alors que mon propre père en parlait comme si c’était la réalité ? Personne ne voulait comprendre que les bottes d’Arthur étaient bien trop grandes pour moi. « A l’époque, nous avons parlé du Pays de Madoc, et c’était déjà absurde. Personne ne va croire que ma mère a emmené Dad à Avalon... »
« Ils vont le croire parce qu’ils voudront le croire, » dit Lili, « exactement comme ils t’acceptent. Ils veulent croire, donc ils croient. »
Mon père avait dit à peu près la même chose. Je fis la moue et fixai le sol, en proie à un débat intérieur, refusant d’admettre que ce qu’elle avait dit allait marcher, et qu’elle pouvait bien avoir raison.
« En ce qui concerne ceux qui viennent ici et s’enquièrent du roi, » poursuivit Lili, « on leur dira qu’il est parti vers le nord, à Aber. »
Math toussota et se mit à rire en même temps. « Et à ceux qui le demandent à Aber, on dira qu’il se trouve à Caerphilly. »
« Entretemps... » dit Anna.
« Entretemps, nous devons prétendre que tout va bien, » dis-je.
« Nous allons devoir changer nos plans, » dit Anna. « Math et moi ne pouvons aller en Angleterre avec vous. »
Je tournai mon regard vers elle. « Et pourquoi ? »
« Parce que nous avons certes perdu nos deux parents, mais Gwenllian aussi. »
Je me serais donné des coups de pied pour avoir oublié notre demi-sœur. Dieu merci, Anna gardait la tête sur les épaules. Apparemment, ce n’était pas mon cas. Anna et Math avaient prévu de laisser leur fils de trois ans, Cadell, avec Maman, Dad et Gwenllian tandis qu’ils nous accompagnaient à Londres. Jusque-là, je n’avais essentiellement pensé qu’à moi et à ce que je ressentais. Si je réagissais ainsi sous la pression, comment mon père pouvait-il imaginer que j’étais prêt à gouverner l’Angleterre ? Il me fallait déjà parvenir à me gouverner moi-même.
Math hocha la tête à son tour. « Nous ne pouvons les laisser seuls avec leurs nourrices. Imaginez ce qu’ils pourraient inventer en notre absence ! »
Cette pensée nous fit tous rire doucement. Gwenllian était une enfant discrète, mais elle était intelligente. Ces derniers temps, elle s’était mise à répondre à Maman sur un ton que je ne me souvenais pas avoir jamais employé. Selon ma mère, Anna s’était montrée tout aussi rebelle à son âge. Cela ne voulait pas dire qu’on la laissait faire, mais en l’absence de notre mère, avec seulement Bronwen et quelques serviteurs pour s’occuper d’elle et d’un Cadell plutôt turbulent, il était impossible de prédire dans quel état nous risquion de retrouver le château de Chepstow à notre retour.
« Je voudrais te dire que je ne suis pas d’accord, mais c’est impossible. » Je m’adressai ensuite à Lili. « Tu n’es pas obligée de venir non plus, si tu penses que c’est mieux. Tu attends un enfant, après tout. »
« Comme si cela avait déjà empêché l’une de nous de se déplacer à notre guise, » dit Anna en souriant. « Elle en est au premier trimestre et le poney que tu as acheté est aussi placide que
