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Les vies retrouvées
Les vies retrouvées
Les vies retrouvées
Livre électronique1 239 pages14 heures

Les vies retrouvées

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À propos de ce livre électronique

Au terme d'un parcours intense représenté par sa vie, Olivier redécouvre plusieurs passés dont il n'a gardé aucune trace.
Il sera temps de faire le point et d'évoquer toutes les actions et réflexions possibles pour retrouver ce fil perdu dans d'autres époques.
Un voyageur du temps à la recherche des questions fondamentales de toute existence, transcendant les concepts de frontières spatiales, temporelles et culturelles, dans le but d'arriver progressivement à une conclusion inattendue, constituée par la Vérité et par l'essence même de la vie.

LangueFrançais
Date de sortie12 sept. 2023
ISBN9798223473039
Les vies retrouvées
Auteur

Simone Malacrida

Simone Malacrida (1977) Ha lavorato nel settore della ricerca (ottica e nanotecnologie) e, in seguito, in quello industriale-impiantistico, in particolare nel Power, nell'Oil&Gas e nelle infrastrutture. E' interessato a problematiche finanziarie ed energetiche. Ha pubblicato un primo ciclo di 21 libri principali (10 divulgativi e didattici e 11 romanzi) + 91 manuali didattici derivati. Un secondo ciclo, sempre di 21 libri, è in corso di elaborazione e sviluppo.

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    Aperçu du livre

    Les vies retrouvées - Simone Malacrida

    SIMONE MALACRIDA

    « Les vies retrouvées»

    Simone Malacrida (1977)

    Ingénieur et écrivain, il a travaillé sur la recherche, la finance, la politique énergétique et les installations industrielles.

    INDEX ANALYTIQUE

    PARTIE 1

    I

    II

    III

    IV

    V

    VI

    VII

    ––––––––

    PARTIE 2

    VIII

    IX

    X

    XI

    XII

    XIII

    XIV

    ––––––––

    PARTIE 3

    XV

    XVI

    XVII

    XVIII

    XIXe

    XX

    XXI

    ––––––––

    PARTIE 4

    XXII

    XXIII

    XXIV

    XXV

    XXVI

    XXVII

    XXVIII

    ––––––––

    PARTIE 5

    XXIX

    xxx

    XXXII

    XXXII

    XX X III

    XXXIV

    XXXV

    ––––––––

    PARTIE 6

    XXXVI

    XXXVI

    XXXVII

    XXXIX

    XL

    XLI

    XLII

    ––––––––

    PARTIE 7

    XLIII

    XLIV

    XLV

    XLVI

    XLVII

    XLVIII

    XLIX

    ––––––––

    PARTIE 8

    L

    LI

    LII

    LIII

    LIV

    BT

    LVI

    ––––––––

    PARTIE 9

    LVII

    LVIII

    LIX

    LX

    LXI

    LXII

    LXIII

    ––––––––

    PARTIE 10

    LXIV

    LXV

    LXVI

    LXVII

    LXVIII

    LXIX

    LXX

    ––––––––

    PARTIE 11

    LXXI

    LXXII

    LXXIII

    LXXIV

    LXXV

    LXXVI

    LXXVII

    ––––––––

    ÉPILOGUE

    NOTES DE L'AUTEUR :

    Le livre contient des références historiques précises à des faits, des événements et des personnes. Ces événements et ces personnes se sont réellement produits et ont existé.

    En particulier, les noms de villes et de lieux sont donnés tels qu'ils étaient connus à l'époque où se déroulent les événements, et il est laissé à la curiosité du lecteur de comprendre à quoi ils correspondent aujourd'hui.

    D'autre part, les principaux protagonistes sont de pures inventions de l'auteur et ne correspondent pas à de vrais individus, tout comme leurs actions n'ont pas réellement eu lieu. Il va sans dire que, pour ces personnages, toute référence à des personnes ou à des choses est purement fortuite.

    Au terme d'un parcours intense que représente sa vie, Olivier redécouvre plusieurs passés dont il n'a pas gardé la trace.

    Il sera temps de faire le point et d'évoquer toutes les actions et réflexions possibles pour retrouver ce fil perdu à d'autres époques.

    Un voyageur à travers le temps à la recherche des questions fondamentales de toute existence, transcendant les concepts de frontières spatiales, temporelles et culturelles, dans le but d'arriver, par degrés, à une conclusion inattendue, constituée de la Vérité et de l'essence même de la vie.

    "Cette vie, telle que vous la vivez maintenant et l'avez vécue, vous devrez la vivre encore et encore d'innombrables fois, et il n'y aura jamais rien de nouveau en elle, mais chaque douleur et chaque plaisir et chaque pensée et soupir, et chaque chose indiciblement petite et grande de votre vie devra vous revenir, et toutes dans la même séquence et succession - et donc aussi cette araignée et ce clair de lune parmi les branches et donc aussi ce moment et moi-même.

    L'éternel sablier de l'existence se renverse encore et encore et toi avec lui, grain de poussière !"

    Frédéric Wilhelm Nietzsche

    PARTIE UN

    I

    Avize, 13h00 le 22-02-2022

    ––––––––

    Si vous êtes possédé par une idée, vous la trouvez exprimée partout, vous la sentez même.

    Thomas Mann

    ––––––––

    Allongé sur son lit dans la chambre bleue, en un clin d'œil, Olivier Desmoulins s'est souvenu de son prénom et de toute son existence.

    Ouvre tes yeux.

    Il a bien vu le piano, placé dans l'angle extrême du salon, qui s'était tu trop longtemps, n'ayant trouvé aucun exécuteur testamentaire digne du premier propriétaire.

    Précisément, près de soixante-seize ans s'étaient écoulés depuis cet après-midi de fin mai où les habitants d'Avize, dont Olivier Desmoulins, arrivé en ce lieu trois ans plus tôt, avaient écouté une sublime mélodie, composée de toutes les sensations possibles et chaque émotion éveillable.

    Personne n'avait compris « La complainte de la vie », tant était le nom de la composition sellée par le même interprète, que Julien De Mauriac fils des bâtisseurs de l'immense hôtel particulier.

    Olivier avait gardé en lui le souvenir de chaque note et la relisait mentalement au moins une fois par jour, juste au moment où le soleil allait se coucher à l'horizon.

    C'était l'heure préférée d'Olivier.

    Coucher de soleil.

    Symbole de fugacité et de fin extrême.

    Une fin aussi convoitée que redoutée, inévitable mais pas définitive.

    La certitude qu'il avait dans son cœur était celle de toujours voir le prochain lever de soleil, même si, tôt ou tard, l'événement irréversible se serait produit.

    Il sentait maintenant que le moment était venu.

    L'instant du coucher du soleil d'Olivier Desmoulins.

    Rapidement, il s'intéresse au reste du mobilier, resté inchangé depuis la fin du XIXe siècle.

    Le lustre central, en cristal bleu, diffusait une lumière différente selon les saisons, les jours et les heures.

    Les rayons du soleil, pénétrant sous divers angles et avec des intensités différentes, créaient un jeu infini de reflets qui rebondissaient sur les deux miroirs placés sur les murs latéraux et illuminaient le plâtre, également bleu, du plafond et des murs.

    Des myriades de petites incrustations de lapis-lazuli décoraient les finitions des jambages et du poêle en faïence.

    Le secrétaire, placé à l'écart, était tapissé de velours satiné bleu, le même matériau qui servait au rembourrage des chaises et des fauteuils.

    Olivier Desmoulins avait souhaité que la table circulaire, placée au centre de la pièce juste sous le lustre, soit temporairement déplacée pour y placer son lit.

    Il sentait que l'heure de son départ était venue et il ne voulait être nulle part ailleurs que dans cette pièce sous ce lustre.

    La meilleure vue de toute sa vie.

    Autour de lui se trouvaient, dans un silence religieux, les petits-enfants et arrière-petits-enfants des amis de son mentor, Julien De Mauriac.

    Il ne se souvenait pas de tous leurs noms.

    Au final, peu importait.

    C'était leur présence qui était cruciale.

    Un cycle était sur le point de s'achever, dont cependant les personnes présentes ne connaissaient que la partie visible.

    Ils ne connaissaient pas toutes les facettes possibles de la vie d'Olivier Desmoulins, qui était le seul à posséder une vision claire de son œuvre.

    Avec le recul, on peut dire qu'il est satisfait.

    Ses pensées dérivèrent vers les êtres chers qu'il avait rencontrés et les milliers d'étrangers qu'il avait aidés.

    En y repensant, un sourire apparaissait toujours sur son visage.

    C'était étrange pour les personnes présentes de le voir sourire.

    Le moment de la mort d'une personne est toujours considéré comme douloureux, peut-être parce que l'on essaie de refléter la douleur interne de la perte que ressentent ceux qui restent.

    On ne pense jamais à la personne allongée sur le lit, à ce qu'elle ressent.

    Olivier avait cru que ce jour était le dernier.

    Il se sentait à bout de ses facultés physiques et mentales, de plus c'était une journée palindrome.

    Parfait pour la façon dont il avait conçu sa vie.

    Il pensait tout savoir sur lui-même, mais les plus grands mystères de son existence n'avaient pas encore été révélés.

    Pour un tel voyage, quelqu'un (ou quelque chose ?) avait arrangé un étrange coup du sort et de la nécessité.

    Le dernier tour d'horloge, la dernière heure.

    Encore émerveillé par le rêve qu'il venait d'achever de révéler dans son esprit, construction onirique dérivée de la projection de sa vie dans une autre dimension, il n'avait pu prononcer un mot.

    Vous n'avez pas besoin de trop de discours dans certaines circonstances.

    Les regards et les gestes suffisent.

    Les moments fondamentaux de la vie sont marqués par des regards, pas par des mots.

    Dans chaque regard, il y a un mélange de pensées et d'émotions, de sentiments et d'idées.

    Comment mettre des mots sur ce qu'il avait vécu dans les instants précédents ?

    Et la myriade d'actions accomplies au cours de la vie ?

    Avait-il laissé des histoires, des écrits ou des souvenirs ?

    Pas sous une forme indélébile, mais subtilement.

    Toutes les personnes qui l'ont rencontré ont gardé le souvenir d'Olivier, de ses actes et de ses paroles.

    Beaucoup étaient déjà partis et le souvenir d'Olivier s'était éparpillé au vent, comme une fluctuation d'atomes dans le vide presque cosmique.

    Alors, à quoi servait tout ce dévouement?

    Si alors tout est voué à disparaître chez les personnes que vous connaissez directement, à quoi bon consacrer sa vie aux autres ?

    Ne valait-il pas mieux penser à son propre bien-être ?

    Olivier n'avait jamais été de cet avis.

    Il avait été élevé avec une mission et il l'avait accomplie, du moins se disait-il.

    Pourrait-on faire plus?

    Bien sûr, mais la tâche consistait à distribuer aux autres.

    Semez de petites pousses et voyez ensuite les fruits.

    Qu'y avait-il dans la tête d'Olivier ?

    Remarques et réflexions.

    La musique régnait dans son esprit.

    C'étaient des sons entendus partout et recueillis à cet instant.

    Bruits de vagues contre les rochers, de cris d'enfants, d'animaux se réveillant le matin, de constructions humaines artificielles.

    Le son du silence, avant tout.

    Nous ne le remarquons pas trop souvent, mais le silence a son propre timbre et sa propre tonalité.

    Il y a différents silences.

    Le silence d'une forêt est différent de celui du désert qui est différent de celui d'une maison vide.

    Dans les silences, on perçoit les moindres ondulations de l'âme et du Cosmos.

    Ce n'est pas simplement l'absence de bruit ou de son.

    En plus, il y avait les couleurs.

    Les nuances imperceptibles de bleu et de vert, de rouge et de jaune, d'une palette que même le meilleur des impressionnistes n'est pas capable d'imiter, étaient toutes présentes dans l'âme d'Olivier.

    Les odeurs ont fait le reste.

    Un mélange d'expériences sensorielles qui ont déclenché toutes sortes d'idées.

    Quelle a été la première expérience ?

    Quel est le premier cri ?

    Il devait creuser dans son propre esprit.

    Retour en arrière, retour dans le temps et dans l'espace.

    Supprimer les conséquences de l'évolution, comme une horloge qui tourne à l'envers, ramenant tout à son état initial, ou du moins à celui vécu par Olivier.

    C'était un travail de mémoire ardu, susceptible d'adoucissement et d'idéalisation.

    Aller à l'essentiel, à la substance elle-même sans aucune forme d'interprétation personnelle pourrait sembler un vœu pieux et un exercice inutile.

    Au lieu de cela, il était temps d'explorer cette possibilité.

    Le temps, tyran du Cosmos, ne laissait plus de place aux références possibles.

    Les synapses d'Olivier se sont mises au travail, consommant la dernière énergie disponible.

    Des décharges électriques internes, des réactions chimiques, des interactions physiques et un mélange de mécanismes encore inconnus de la science sont allés pêcher dans la mémoire, dilatant les facultés cérébrales.

    Un certain seuil devait être dépassé pour obtenir le résultat souhaité.

    Olivier frissonna.

    Les personnes présentes dans la salle bleue l'ont interprété comme une manifestation de douleur et en ont été désolées.

    Rien de plus éloigné de la réalité.

    C'était la tentative extrême de la pensée de contraster la fugacité du physique.

    Et peut-être qu'Olivier serait allé au sommet de ses facultés intellectuelles.

    Il y avait encore tellement de choses à explorer dans la partie arrière de son cerveau.

    Le simulacre qu'il avait aperçu quelques instants auparavant lui avait donné la preuve de l'immensité de la construction possible qui s'y cachait.

    Il ne restait plus qu'à faire le dernier pas.

    J'entre résolument par la porte étroite.

    Traverser la dernière frontière et vivre les conséquences possibles de première main.

    D'ailleurs, qu'avait-il à perdre ?

    Il était allongé dans son lit depuis deux jours, incapable de se lever.

    Il ne marcherait plus jamais.

    Il était temps de risquer.

    Poussé par l'immense volonté qui l'avait caractérisé, il ferma les yeux et se dit :

    Oui, nous y allons. Force.

    Le tourbillon cérébral le submergea.

    C'était une poussée d'adrénaline qui aurait ramené un éléphant à la vie.

    Il sentit son cœur bondir et son corps se contorsionner.

    Il n'avait pas peur.

    Il paierait n'importe quel prix pour découvrir tout ce qui avait toujours été caché dans son esprit.

    Quelque chose qui avait été placé là sans possibilité de réalisation, sauf dans la dernière heure de son existence.

    Une recherche qui a duré toute une vie et qui s'est concrétisée à cet instant et à cet endroit.

    Il ne s'était pas attardé sur le pourquoi et sur les raisons.

    Il n'avait plus le temps de ruminer davantage.

    Il est allé droit au but.

    Une lumière blanche l'enveloppa et l'introduisit dans une nouvelle dimension, au-delà de la chambre bleue.

    ––––––––

    C'était la lumière de la Provence, sa patrie.

    Tellement différent du quartier d'Avize, moins dur et plus doux.

    Un tel éclat avait accompagné ses premières années de vie.

    C'était une sensation d'insouciance, car la moindre aspérité était lissée.

    Les couleurs étaient presque blanchies et les odeurs maîtrisées.

    Olivier se souvenait parfaitement du parfum des oliviers et des vignes, du vent et de la forêt, de la terre desséchée en été et de la douceur de l'hiver.

    Là, il avait appris à marcher, s'attardant sur un terrain accidenté au milieu des champs.

    Là, il avait vu la mer pour la première fois.

    Un miroir tranquille qui reflétait le soleil et qui était dominé de l'intérieur, à partir de quelques aperçus privilégiés connus seulement des locaux.

    La Méditerranée était si différente de l'océan.

    Doux et envoûtant, presque à faire oublier la puissance des vagues.

    Les premiers pas avaient été marqués par la présence constante de ses parents, Henri et Julie.

    Son père, un homme d'un autre temps, avait en lui-même une allure aristocratique bien qu'il ait des origines modestes.

    Il faisait partie de ce groupe d'hommes anoblis par le travail acharné et qui portaient les marques d'une maturité précoce.

    Né exactement en 1900, entre deux siècles, à la naissance d'Olivier, il était déjà considéré comme un homme adulte qui travaillait dans les champs depuis dix-huit ans.

    L'épaisse barbe noire était la première image que le petit Olivier avait imprimée sur sa tête pour reconnaître son père, ainsi que le timbre de sa voix.

    Le petit réagissait toujours en agitant les jambes et, plus tard, en essayant de suivre Henri, d'abord à quatre pattes puis d'un pas de plus en plus déterminé.

    Il jouait avec Henri depuis qu'il était bébé, s'amusant et souriant au moindre geste de son père.

    C'est son père qui lui a fait goûter les délices de la terre, reconnaître les animaux et ne pas en avoir peur et courir à une vitesse vertigineuse à travers les champs.

    La silhouette d'Henri était complétée par des bras puissants, un physique majestueux avec des jambes plantées au sol comme des troncs de sapin et un respect général qu'il avait envers les autres, pleinement réciproque de tous.

    Il était considéré comme une bonne personne, quelqu'un de confiance, un travailleur acharné et un homme honnête.

    Il n'avait eu aucun problème à demander à Julie de l'épouser, même s'il était au courant d'une culture moins basique que sa femme.

    À cette époque, il n'était pas facile de trouver des femmes d'origine ouvrière plus scolarisées que les hommes.

    Julie avait fréquenté le primaire et quelques années le secondaire et utilisait des termes et des mots très recherchés par opposition à la langue essentielle de la campagne.

    De cinq ans plus jeune qu'Henri, elle n'avait pas vu la laideur de la Grande Guerre en raison de l'éloignement considérable du front, alors que son mari n'avait été employé que dans les derniers mois du conflit, durant l'été 1918 qui vit l'effondrement de Allemagne.

    Cela suffit à Henri pour rejeter avec force toute idée militariste et contradictoire possible.

    Toute une génération de ses pairs avait été sacrifiée sur la Somme et la Marne et un tel massacre n'aurait plus été concevable.

    L'éloignement et la campagne avaient adouci les coups portés par la guerre, bien qu'il y ait eu des tués et des mutilés parmi la jeunesse provençale.

    De même, les années 1920 ont été vécues comme toujours, sans la fureur et l'ardeur de la capitale parisienne, ni plus tard sans le grand effondrement dû à la crise venue d'Amérique.

    Ainsi Olivier a pu naître dans un milieu protégé, dans lequel sa mère Julie était la principale gardienne de l'armure qui s'est créée autour du petit.

    La femme avait pris en charge l'éducation de l'enfant, depuis les premiers mots jusqu'à tester ses penchants.

    Elle avait entendu parler d'une méthode révolutionnaire de pédagogie et d'apprentissage de l'enfance venue d'Italie, basée sur la libre expression des enfants.

    Elle regardait souvent Olivier pour avoir des idées de son fils à stimuler.

    Depuis sa naissance, il avait toujours été attiré par ce qui était en dehors de lui.

    Les autres, l'environnement, la nature, les animaux.

    C'était comme si l'identité d'Olivier ne se façonnait qu'à travers la confrontation avec l'autre-que-soi.

    De sa mère, il gardait un souvenir impérissable.

    Il portait toujours des couleurs claires, blanc ou gris pâle ou bleu ou rose ou jaune ou vert, mais rien d'audacieux ou de flashy.

    Le teint semi-olivâtre qui sied aux femmes du sud de la France contrastait avec la couleur des cheveux, qui était brun tirant vers le blond.

    Les yeux, cependant, étaient noirs et profonds.

    A ces yeux, Henri s'était égaré dans sa jeunesse quand, de retour de la guerre, il reprit le travail des champs, reprenant l'affaire qui appartenait à son père et, avant cela, à son grand-père.

    Ils s'étaient rencontrés au marché d'Alès, la principale ville voisine, un jour de fin d'hiver 1922.

    Olivier se souvenait de ce que ses parents lui avaient dit.

    C'était exactement le 22 février 1922, il y a cent ans.

    Au même moment où leur fils mourait, il y a cent ans, Henri et Julie s'étaient rencontrés pour la première fois.

    D'autres suivirent cette rencontre, jusqu'aux fiançailles officielles puis au mariage, célébré avec sobriété à l'été 1924.

    De ces événements, il ne reste que quelques photographies anciennes en noir et blanc, prises par Olivier avec lui lors de son transfert à Avize.

    Il était retourné plusieurs fois dans son village natal, mais n'y avait trouvé que des ruines.

    Il n'avait ni oncles ni cousins, car la majorité de ses quelques proches avaient péri pendant la Seconde Guerre mondiale et la maison qui avait accueilli son enfance avait été pillée puis occupée par d'autres.

    Olivier avait seulement érigé un monument funéraire en l'honneur de ses parents, bien qu'il sache que leurs corps ne seraient jamais retrouvés.

    Dans les premières années de la vie, tout cela était encore loin et rien ne présageait de la tournure que prendraient les événements.

    Surtout, personne ne pensait qu'après un massacre comme celui vécu entre 1914 et 1918, il y en aurait un autre vingt ans plus tard.

    Il y aurait peu de générations qui n'auraient pas vu les horreurs de l'époque et la famille d'Olivier n'a certainement pas été épargnée.

    Courant au grand jour, possédant toute la joie typique des enfants, Olivier a grandi sous l'œil attentif de ses parents.

    Julie et Henri alternent dans le temps pour se consacrer au petit, qui n'a jamais eu le sentiment qu'il était un fardeau ou que le monde n'était pas adapté aux enfants.

    Grandissant en toute liberté, l'empreinte qui restera toute son existence a été donnée par le désir d'explorer et de tisser des liens et des connaissances.

    Chacun de nous, à la fin des temps, découvre que, parmi toutes les choses apprises, il reste toujours la trace et l'empreinte de ce que nos parents nous ont légué durant notre enfance.

    Il se souvenait encore de la première fois qu'il avait vu la mer.

    Pas tant pour la mer elle-même, mais pour l'émotion et l'émerveillement.

    Ce n'était plus un endroit confiné, comme la rivière ou le ruisseau derrière la maison.

    C'était le sens de l'infini et l'absence de frontières.

    Son père l'avait porté sur ses épaules pour lui permettre de voir plus loin, tandis que sa mère désignait la plage, les vagues et les animaux avec son doigt, pour que le petit apprenne les noms et leur diction.

    Sans trop d'efforts, il avait appris à lire et à écrire bien avant d'entrer officiellement à l'école.

    En même temps, sa mère a stimulé son imagination et sa mémoire, essayant de comprendre ses talents.

    Olivier, sans jamais quitter le monde féerique des enfants, fait principalement de jeux et de divertissements, a ainsi affiné ses connaissances.

    Néanmoins, il avait l'habitude de fréquenter d'autres enfants de la région, principalement des enfants de paysans ou de mineurs, dont la condition de subordination était marquée dès le plus jeune âge.

    Ils auraient à peine pu s'élever de la condition prolétarienne, commençant immédiatement à travailler dur et à une vie de privation.

    En le voyant en compagnie d'autres, Henri et Julie étaient devenus convaincus que le plus grand don de leur fils était d'avoir des relations avec les autres.

    Il n'y avait aucun enfant ou adulte qui ne s'entendait pas avec Olivier et leur fils était à l'aise avec les gens.

    Ils avaient regretté qu'Olivier n'ait pas pu avoir de frère ou de sœur, mais les médecins avaient tranché dans ce sens, compte tenu également des difficultés de Julie à tomber enceinte.

    C'est peut-être pour cette raison qu'ils s'étaient consacrés aux soins de leur fils et y avaient consacré beaucoup plus de temps que la moyenne.

    Malheureusement, les ressources économiques n'étaient pas telles qu'il était possible d'envisager des voyages ou des conforts que seuls les riches pouvaient s'offrir.

    Malgré cela, Henri et Julie avaient toujours pensé que ce n'était pas un obstacle au bonheur et le petit Olivier a grandi sans comprendre les distinctions de richesse et de classe, traitant chaque être humain comme une continuation de lui-même.

    Éclairé par ces souvenirs, Olivier avait imprimé un sourire sur son visage, comme lorsqu'il jouait dans les champs à chasser les papillons ou à cueillir des fruits directement sur les arbres.

    La petite enfance préscolaire avait été pour lui un formidable terrain d'entraînement pour le monde et pour les autres.

    Guidé par la main habile d'Henri et de Julie, il avait été élevé dans le respect de tous et dans la connaissance de la beauté de la Nature et des hommes, sans comprendre le mal qu'il était possible de faire et dont le monde était plein.

    Précisément dans ces années, pas trop loin de chez lui, d'autres nations viraient vers le mal absolu, le malheur qui allait bientôt frapper le monde et qui allait changer la vie et l'histoire de chacun.

    Ignorant tout cela, la famille Desmoulins vivait isolée dans une modeste propriété de campagne, entourée du petit lopin de terre sur lequel les ancêtres d'Olivier avaient versé la sueur et le labeur.

    Le petit Olivier était enveloppé d'une lumière tout autour, émanant de l'esprit de ses parents.

    La même lumière qu'il voyait maintenant dans son esprit et qui dégageait des sensations apaisées depuis trop longtemps.

    Une lumière qui a ouvert une partie de son esprit.

    La recherche était sur le point de commencer.

    Le voyage de retour se dirigeait incontestablement vers une redécouverte.

    Le contrepoint de la Recherche est une Redécouverte.

    Et il ne s'agit pas de temps perdu, mais de vies retrouvées.

    Les vies que nous avons oublié que nous avons vécues.

    II

    Parme - Italie, 1848

    ––––––––

    Il n'y a pas que la Sicile, Padoue s'est aussi relevée.

    La nouvelle est parvenue aux oreilles d'Otello Fubini par l'intermédiaire de l'un de ses amis les plus fidèles, Luca Carnieri, cordonnier de profession et qui avait une boutique juste en face de la boulangerie où la famille d'Otello travaillait depuis de nombreuses années.

    Tous deux étaient fils de la petite bourgeoisie de Parme, la capitale du duché qui avait vu l'année précédente disparaître la bien-aimée duchesse Maria Luigia d'Autriche, elle qui avait réussi une tâche difficile, celle d'être reconnue et respectée après la Restauration, qui avait tenté de défaire les conquêtes napoléoniennes en matière de libertés et de frontières.

    Tout semblait redevenu comme il y a cinquante ans, mais c'était l'esprit qui était différent.

    Le père d'Otello avait eu une formation dans les insurrections de 1831, bien qu'il soit le père d'un enfant d'un an seulement.

    Ayant grandi dans une telle famille, le jeune homme s'était imprégné d'idéaux libéraux et nationaux et avait hâte de se mettre au travail.

    Le métier de boulanger lui était proche, sachant pertinemment que cela lui garantirait nourriture et subsistance pour le reste de sa vie.

    Son frère Giovanni, de quatre ans son cadet, travaillait également dans la boutique et cela a remonté le moral du jeune homme, convaincu que l'entreprise familiale aurait continué sans sa présence.

    Les années précédentes, Otello avait été occupé et avait fréquenté les cercles clandestins de Mazzini, qui lui avaient d'abord appris à lire et à écrire décemment et à utiliser des termes de la langue italienne et non du dialecte.

    Premièrement, il était nécessaire de former des Italiens avec une certaine culture et un certain raisonnement et ce n'est qu'après que ces personnes seraient acheminées vers les connaissances militaires.

    Le père d'Otello était bien conscient des démarches entreprises par son fils et l'avait prévenu :

    « Ne risquez pas votre vie pour eux... »

    Otello, cependant, ne ressentait pas la même chose.

    À ses yeux, devenir patriote était la meilleure vie possible, même au prix de la mort.

    Il y avait en lui une sorte de mélange entre mythe et littérature, alimenté par la lecture des « Dernières lettres de Jacopo Ortis », un livre que même son père avait possédé dans sa jeunesse.

    Après des années de blocage, quelque chose a semblé se produire.

    Si les révoltes s'étaient répandues dans toute l'Italie, on espérait qu'elles s'enracineraient aussi à Parme, surtout parce que Charles II de Bourbon n'était certes pas apprécié comme Maria Luigia, qui avait bien été autrichienne et fille de l'Empereur, mais en même temps Le temps était elle était l'épouse, contre son gré, de Napoléon et cela a été considéré comme un signe dans l'histoire de la ville.

    Ce soir, nous nous retrouvons à l'endroit habituel.

    C'était la dernière phrase chuchotée par Luca.

    Au cercle mazzinien, surnommé par le même « Jeune Italie », comme dans le testament du fondateur, la nouvelle circulait rapidement et souvent en avant-première.

    Il y avait beaucoup de gens dispersés dans différentes villes qui livraient des lettres par des courriers de confiance.

    L'organisation était généralisée et capillaire, avec un haut niveau de loyauté.

    Le père d'Otello le savait très bien, pour en avoir fait partie et fait semblant de ne pas voir, espérant, au fond de lui, que son fils aurait plus de succès qu'eux-mêmes en 1831.

    De corpulence normale, Otello n'avait pas de traits somatiques caractéristiques et particuliers, allant se conformer à une masse indistincte de personnes, qui, dans la foule, devenaient toutes également semblables.

    Cet anonymat était un avantage important puisque les soldats l'auraient à peine reconnu.

    On parlait d'autres cités prêtes à se soulever et de la manière dont les gouvernants essaieraient d'adoucir les requêtes.

    Ils accorderont des dons de leur plein gré.

    Peu compris, il a donc été dit explicitement :

    Ils accorderont des Constitutions.

    En fait, c'était comme ça en Sicile, à Florence et même la Savoie a cédé.

    Même le Pape...

    L'atmosphère devenait incandescente de jour en jour et les gens parlaient ouvertement de révolte.

    Des barricades ont dû être érigées et des armes cachées.

    Il y avait peu de fusils disponibles, des mousquets anciens et en usage en 1831, mais encore moins de personnes étaient capables de tirer efficacement.

    Luca et Otello ont été sélectionnés pour des essais, à effectuer dans la campagne, où les coups auraient été confondus avec des voyages de chasse.

    Ils attendirent le début du printemps et le premier dimanche de beau temps.

    Venise venait de surgir et la même chose se passait à Milan.

    Sur la vague d'enthousiasme, des lettres sont arrivées qui exaltaient le comportement héroïque des citoyens de Milan en chassant le souverain autrichien.

    C'était facile pour Otello d'apprendre à tirer.

    Chargez et visez.

    Il n'était pas surpris par le recul ou le poids de l'arme.

    Luke, d'autre part, a eu quelques difficultés.

    Vous vous rattraperez avec l'esprit patriotique...

    Un vent de révolte soufflait dans toute l'Europe, pas seulement en Italie.

    Ailleurs, il y eut différentes instances, mais le but était toujours le même : renverser le pouvoir préétabli fils de la Restauration.

    C'était quelque chose qui n'aurait pas été accepté.

    « Tôt ou tard, ils essaieront de réprimer les soulèvements par la force et c'est pourquoi nous devons être prêts au niveau militaire.

    Ce n'est que si nous résistons qu'il sera possible de gagner la liberté.

    Otello rentra chez lui le soir.

    C'est du pain à faire, pas la révolution, alors son père l'accueille, conscient de ce qu'il a fait ce jour-là.

    Il n'avait pas cru le voyage entre amis avec Luca et d'autres.

    Peut-être avait-il aussi été informé par quelqu'un du cercle, puisqu'il en avait été membre et avait contribué des années auparavant.

    Pour cette raison, Otello était tenu en haute estime.

    On pourrait dire qu'il était un patriote de deuxième génération, élevé avec les idéaux de liberté républicaine de Mazzini.

    Il était difficile de mettre en œuvre ce qui était dans les intentions de Mazzini, car tous les puissants étaient des ennemis parce qu'ils étaient des rois.

    Il n'y avait pas d'armée régulière qui se serait jointe à eux et, en nombre, ils pensaient que l'Italie devait d'abord se construire en s'appuyant sur la Savoie.

    Otello n'avait pas sa propre vision.

    Il était trop jeune et avide d'action.

    Il voulait participer à une révolte, en faire partie et installer une république à Parme dans laquelle tous les citoyens pourraient se reconnaître.

    Plus de sujets, plus de nobles, mais juste des gens.

    Le jour arriva et Otello put constater l'extrême efficacité de l'action.

    Soutenue par la population, Parme est libérée en peu de temps, sans presque aucune réaction des soldats.

    Il y avait eu peu de coups de feu et peu de morts, surtout beaucoup de confusion et de cris.

    Au début, ils ont été émis pour exorciser la peur et intimider l'ennemi, plus tard, ils ont explosé dans un éclat de joie.

    Otello et Luca rentrèrent chez eux avec des cocardes tricolores sur la poitrine et un fusil sur l'épaule, honorés et respectés par la population.

    Cependant, le père d'Otello, dès qu'il l'a vu, l'a grondé :

    Arrête de jouer...

    Otello était déçu, il se serait attendu à un accueil différent.

    Il esquissa un sourire.

    Mais je pensais que...

    Son frère Giovanni tournait autour de lui, à la recherche de nouvelles ou d'anecdotes.

    « Est-ce vraiment arrivé ? Étiez-vous là?"

    Ce n'est qu'au dîner que son père se fondit dans une étreinte.

    « Fais attention. Je ne peux pas t'empêcher de faire quelque chose que j'ai fait moi aussi quand j'étais plus jeune que toi. Mais je sais comment ça va finir... »

    Otello ne partageait pas ce pessimisme.

    « Cette fois, c'est différent. Charles II fuira, tu verras, et il nous laissera le champ libre.

    Il est déjà question qu'il remette le pouvoir à un conseil.

    Les mazziniens avaient agi dans l'ombre, s'adressant aux gens respectables de la ville, des bourgeois de haut rang qui ne voulaient pas se salir les mains avec la révolte.

    Ils devaient officiellement rester en dehors de cela et ensuite prendre le pouvoir.

    Alors c'est arrivé.

    Ce furent des jours d'exaltation et de joie, où les nouvelles des autres villes ne firent qu'augmenter l'atmosphère de fête et de jubilation.

    « La situation est la suivante.

    Milan et Venise sont libres, la Sicile a un nouveau royaume avec un Parlement et la Savoie a déclaré la guerre à l'Autriche en annexant Crémone, Lodi et Pavie.

    Que voulons-nous faire ? »

    Dans les semaines suivantes, des discussions animées ont eu lieu au sein du cercle Mazzini.

    Les fidèles les plus intransigeants à la doctrine de la Jeune Italie étaient des républicains de premier ordre et n'auraient jamais accepté aucune ingérence du Royaume de Sardaigne.

    En revanche, Plaisance s'était déjà exprimée par un plébiscite d'annexion et Parme fit de même une semaine plus tard.

    L'intervention de Gioberti a été cruciale.

    Luca et Otello sont allés l'écouter et étaient ravis.

    Tous deux ont mis de côté les intentions républicaines, du moins dans un premier temps.

    Nous devons faire l'Italie !

    se disaient-ils.

    La décision avait été prise non seulement sur des bases logiques et sur des convictions politiques, mais sur la vague d'émotion que tout le monde avait ressentie au cours de ces mois où, après le succès victorieux des émeutes, une chanson récemment composée était chantée qui unissait les peuples du nord au sud et d'est en ouest.

    On l'appelait la chanson des Italiens et tout le monde, même les analphabètes, connaissait ses paroles, même sans les comprendre parfaitement.

    La mère d'Otello, par exemple, ne savait pas qui était Scipion ni ce que signifiait le casque de Scipion.

    Son mari s'est occupé de lui expliquer le secret.

    Après avoir réglé la situation à Parme, officiellement unie au royaume de Sardaigne, toute l'histoire de la révolte est désormais centrée sur la guerre avec l'Autriche.

    Les volontaires devaient être envoyés à la guerre.

    « Comme je vous l'ai dit, ce que je pensais s'est produit. Ne vous ferez-vous pas tuer pour ceux-là ? Ils sont toujours rois et trouveront toujours un accord.

    Le père d'Otello avait été prémonitoire et le garçon devait être d'accord là-dessus.

    Son ami Luca, ne sachant pas bien tirer, avait été dispensé, alors que tout le monde attendait un oui du fond du cœur d'Otello.

    Le garçon devait trop réfléchir.

    C'était sa première vraie décision d'un certain niveau.

    Qu'était-il censé faire ?

    Abandonner sa famille et sa ville pour aller ailleurs mener une guerre entre rois ?

    Ou laisser les choses telles qu'elles étaient et attendre la solution finale ?

    Dans les deux cas, il y avait plus à perdre qu'à gagner.

    Cela ne semblait pas être un choix facile, encore moins sans risque.

    Que dois-je faire?

    Il s'est tourné vers son père en tant que conseiller.

    L'homme regarda le visage de son fils et le serra contre lui.

    Elle ne laisserait pas ses rêves se briser, mais elle ne voulait pas non plus le perdre pour toujours.

    Faites ce que votre cœur vous dit. C'est le cœur qui détermine tout. Nous allons là où il commande.

    Il savait ce que cela signifiait.

    D'une manière ou d'une autre, il avait toujours su qu'Otello était né pour s'en aller, pour se réaliser loin de Parme et qu'il n'attendait que l'étincelle.

    Et maintenant l'étincelle, en effet le feu, était là.

    Et comme son fils, toute une génération a été impliquée.

    Après une nuit de labeur, Otello avait trouvé la solution et voulait la partager avec sa famille.

    "Père, vous avez raison de dire qu'il ne faut pas faire les guerres des Rois et qu'il faut défendre notre cause et non la leur, mais je ne puis permettre à une certaine puissance dominante étrangère de revenir dans notre patrie martyrisée.

    Pour cette raison, j'ai décidé de partir, mais je ne rejoins pas les forces savoyardes.

    J'y vais avec les bénévoles de Garibaldi."

    Le seul nom de Garibaldi illuminait les yeux de tous.

    Il était reconnu comme un homme honnête et intègre, aux côtés des peuples et qui n'envoyait pas ses hommes au massacre, au contraire il considérait toute vie comme fondamentale.

    Le jeune frère a immédiatement couru pour l'embrasser.

    Son exemple revenait toujours avec une chemise rouge, comme on identifiait autrefois les volontaires de Garibaldi.

    Le père hocha la tête.

    Son fils avait compris son cœur et à partir de ce moment, il était devenu une personne adulte, franchissant la ligne en tant que garçon.

    Tu deviens adulte quand tu choisis ta propre voie, sachant qu'elle est semée d'embûches et qu'elle suscitera peut-être des regrets, mais tu le fais quand même parce que tu sens que c'est la bonne chose à faire parce que ton cœur l'a chuchoté à esprit.

    Otello avait fait ce pas.

    Il alla saluer Luca et se présenta au comité annonçant sa décision.

    De Parme, dix d'entre eux partirent pour Milan, où Garibaldi avait installé le bataillon Anzani.

    C'était la première fois qu'Otello quittait la ville de Parme.

    Il a été surpris par la taille du Pô et la majesté de Milan.

    Le Duomo lui apparaissait comme une construction immense et magnifique et il prit soin d'écrire une lettre à sa famille.

    Faute d'entraînement, il fut retenu dans la ville et ne rejoignit que plus tard le bataillon qui avait reçu l'ordre de marcher sur Brescia pour contrer l'avancée autrichienne et rejoindre ce qui restait sous le commandement de Garibaldi de Padoue.

    La guerre tournait mal pour les troupes piémontaises, prises au dépourvu par la contre-offensive impériale.

    De plus, il y a eu un triple affrontement de positions entre Garibaldi, Mazzini et Carlo Alberto.

    Personne ne faisait confiance à l'autre et il y avait trop de points de vue différents.

    Otello a le sentiment que l'issue de la guerre est scellée et que les entrées triomphales de Garibaldi à Bergame et Monza ne valent rien, étant donné que, entre-temps, les Autrichiens ont reconquis Milan.

    Que valaient alors les efforts et les morts ?

    Comment revenir au point de départ ?

    Il faut aller vers le nord...

    Le risque était d'être piégé dans l'emprise autrichienne.

    D'un pas soutenu, et Otello n'avait jamais autant marché, ils arrivèrent à Côme.

    Il y avait une poursuite évidente par les Autrichiens qui avaient probablement extrêmement peur de Garibaldi et de ses exploits.

    Otello avait pu constater de première main les qualités du leader.

    Toujours attentif à chaque détail, il était proche de chacun d'eux dans la conduite des combats et dans toutes les situations, du repos au repas.

    De plus, tant à Côme qu'à Bergame, il avait été accueilli avec enthousiasme, comme cela n'était jamais arrivé à aucun roi.

    Peut-être que ça faisait plus peur qu'autre chose.

    Après Côme, Otello s'est retrouvé à devoir choisir.

    Mazzini est allé en Suisse, laissant Garibaldi avec peu de troupes.

    Sur les dix au départ de Parme, seul Otello a choisi le leader.

    Sans s'en rendre compte encore, une première transformation s'était opérée dans la pensée politique d'Otello qui de libéral et républicain allait devenir de plus en plus un homme d'action.

    Les Autrichiens sont plus nombreux et ils ne nous laisseront pas de répit, nous devons les prendre par surprise.

    Les paroles de Garibaldi étaient péremptoires.

    Oui, mais comment ça s'est fait ?

    Nous allons les attaquer.

    Alors c'est arrivé.

    Otello s'est retrouvé dans une bataille étrange, dans laquelle les principaux objectifs étaient deux barges à vapeur et les ennemis autrichiens étaient en fait des Hongrois.

    La mission d'Otello était simple.

    En tant que carabinier d'élite, il doit défendre la conquête des bateaux nécessaires pour traverser le lac Majeur.

    Ce n'est pas fini, demain il y aura plus de combats.

    Otello commençait à acquérir de l'expérience et à comprendre la dynamique de la bataille. Pas même le lendemain, les Autrichiens ont réussi.

    Cette fois, c'étaient des Croates et c'est allé jusqu'à une attaque à la baïonnette.

    Le nombre de volontaires a diminué et Garibaldi a dû fuir en Suisse pour éviter d'être arrêté, mais sa popularité a augmenté.

    Une fuite à pied de Padoue à Varèse sans qu'une armée de l'Empereur puisse le capturer ou vaincre une bande de volontaires, dont les professions étaient disparates, mais aucun n'était des soldats professionnels.

    Il a été démontré que la confiance, la volonté et la passion l'emportent sur les différences de nombre et d'équipement.

    Mille volontaires faisaient plus de cinq mille soldats.

    Parti à pied vers Parme, accompagné d'un groupe de volontaires toscans qui continuerait ensuite, Otello en a compris toutes les petites facettes.

    Une culture politique se développait sur le terrain, allait également améliorer les connaissances du peuple italien.

    Vivant à côté de gens du monde entier, nous avons échangé des opinions sur les traditions et la nourriture, les dialectes et les croyances, les lectures et les personnages.

    C'est là que réside le charme de la chemise rouge en tant que bénévole, contrairement aux cercles restreints mazziniens plutôt destinés aux intellectuels.

    Peu importait que les Autrichiens aient gagné car, tôt ou tard, ils auraient perdu et l'Italie aurait été construite.

    Et peu importait que tout se résolve alors sous le règne d'un souverain savoyard, tant l'expérience de quelques mois avait appris à Otello que la passion de la liberté pousserait sa génération, et les suivantes, à se battre pour un idéal républicain.

    Lorsqu'il a mis les pieds chez lui, sa famille l'a trouvé changé.

    Pas physiquement, puisque cela faisait peu de temps, même si sa mère le trouvait aminci par la marche qu'il avait subie, mais mentalement.

    Aucun d'entre eux n'avait parcouru autant de kilomètres dans toute sa vie et aucun n'avait autant vu l'Italie.

    Seul Otello était entré dans différentes villes et avait fait l'expérience de ce que signifiait être italien.

    Embrassant son père, juste avant un dîner dont il rêvait depuis des semaines, Otello se laissa aller :

    Tu avais raison. Dans l'ensemble. Maintenant, je comprends.

    L'homme hocha la tête.

    Son fils, en deux mois, avait mûri près d'une décennie.

    Maintenant, personne ne pouvait lui dire quoi faire et où aller, car il l'aurait choisi lui-même.

    Il était libre et il le savait.

    L'automne passa et les foyers de révolte furent tous éteints, revenant presque à la situation initiale.

    Il y avait une exception.

    Le 24 novembre, le pape a fui Rome et un mois plus tard, un décret a été publié pour l'Assemblée nationale constituante de l'État romain.

    Une nouvelle flamme brûlait dans les yeux d'Otello.

    « Rome, capitale de l'Empire et avant la République, future capitale de l'Italie ».

    Il a également convaincu Luca cette fois.

    Son ami a été frappé par les histoires de ces mois et a voulu participer à l'histoire aussi.

    Personne dans la famille n'a été surpris par la décision et personne n'a osé demander pourquoi.

    La seule question qui lui a été posée concernait le timing :

    Quand pars-tu?

    Avec la nouvelle année...

    Une ville resplendissante de monuments et d'histoire l'attendait, mais Otello n'y est pas allé pour son passé glorieux, mais plutôt pour construire un nouvel avenir.

    Il remit la chemise rouge dans le sac.

    Il était sûr que cela lui serait utile.

    III

    Rome – Italie, 1849

    ––––––––

    Enfin à Rome.

    Luca et Otello se sont embrassés quand ils ont vu la ville au loin.

    Le premier, en particulier, n'était pas habitué à marcher aussi longtemps et avait ralenti la marche d'Otello qui, autrement, aurait pris quelques jours de moins.

    Ils n'avaient utilisé l'aide des fermiers que pour vaincre les Apennins qui, pendant la saison hivernale, étaient couverts de neige au moins dans la partie supérieure.

    Pour le reste, ils avaient continué à pied.

    Dès son arrivée en ville, Otello se présenta à l'un des nombreux comités, exhibant ses lettres de noblesse.

    Il n'y avait toujours pas de règles en la matière, car tout le monde attendait les élections à l'Assemblée nationale qui auraient lieu une semaine plus tard, le 21 janvier et, par conséquent, les deux ont été accueillis avec une grande froideur.

    Mais Otello savait comment le faire.

    Des volontaires de toute l'Italie arrivaient dans la ville et les liens qu'il avait eus quelques mois plus tôt étaient profonds.

    Il trouva un petit groupe qui avait combattu à Luino et le rejoignit.

    Luca est allé en remorque, attendant un événement important.

    En moins de trois semaines, il n'a pas été ignoré.

    Garibaldi et Mazzini ont été élus et début février, la République romaine a été proclamée.

    Le matin du 9 février, Luca et Otello, accompagnés d'une foule en liesse, assistent à la lecture du décret fondamental, proclamé au Campidoglio.

    Ni l'un ni l'autre n'avaient jamais vu une ville aussi splendide et Otello dut changer d'avis sur ce qu'il avait jugé de Milan.

    Rome était définitivement la vraie capitale en termes d'histoire et de culture.

    Il y avait des monuments de toutes sortes à chaque coin de rue et seule l'ignorance généralisée de la population ne nous permettait pas de profiter pleinement de ce que nous avions été.

    La papauté a maintenu tout le monde dans l'ignorance pendant des siècles, mais cela va changer.

    Il suffisait à Luc d'écouter les premiers articles du décret pour être convaincu des bonnes raisons :

    « Article 1 : La papauté est tombée en fait et en droit du gouvernement temporel de l'État romain.

    Article 2 : Le Pontife Romain aura toutes les garanties nécessaires à l'indépendance dans l'exercice de son pouvoir spirituel.

    Article 3 : La forme de gouvernement de l'État romain sera la démocratie pure et prendra le nom glorieux de République romaine.

    Article 4 : La République romaine aura avec le reste de l'Italie les relations qu'exige une nationalité commune .

    De plus, il avait remarqué que la population sympathisait avec eux et offrait toujours de la nourriture.

    Il n'avait jamais autant mangé à sa faim qu'à Rome et, au fond de lui, il se disait que si toutes les campagnes militaires en tant que volontaire avaient été ainsi, il n'aurait pas détesté une vie d'aventure au tir au mousquet et à l'épée.

    Il ne manquait plus que quelques compagnes pour compléter le tableau qu'il avait toujours imaginé.

    Il se demanda pourquoi il n'avait pas rejoint Otello plus tôt.

    Son ami a essayé de freiner l'enthousiasme.

    « Ici, pour l'instant, c'est le paradis, mais la bataille ne tardera pas à venir.

    D'abord, nous devons vous procurer un uniforme et une arme.

    Après quelques jours, Luca portait une chemise rouge Garibaldian et avait été équipé d'un mousquet.

    Il ne comprenait pas pourquoi il devrait y avoir des affrontements.

    Si la population avait voté et si l'expression populaire avait été adéquatement représentée, pourquoi le pouvoir s'y opposerait-il ?

    Otello a essayé de lui expliquer la situation, bien qu'il ignorait de nombreuses implications politiques.

    « Tout d'abord, le pape veut reprendre le commandement et a appelé diverses puissances étrangères à son secours. Et puis, ceux-ci sont intéressés à finir le travail. Ils ont réprimé toutes les révoltes. A Milan, Palerme, Toscane et Venise. Et aussi ailleurs en France et à Vienne.

    Pourquoi autoriseraient-ils une République à Rome ?

    Savez-vous ce que cela signifie pour les rois ? »

    Luca réfléchit un moment.

    « Aussi pour le Savoy ?

    Otello n'était pas sûr de la réponse.

    Il doutait de tout roi, mais il savait que le seul espoir d'unifier l'Italie viendrait d'un engagement concret de la Maison de Savoie.

    Il agita la main comme pour dire oublie ça et évita la réponse.

    Il était immédiatement clair que la question militaire était prédominante.

    Vous pouvez organiser des élections et rédiger des lois, mais si des puissances extérieures interviennent pour mettre fin avec force à une telle expérience, tout devient inutile.

    Otello a assisté à quelques réunions de coordination.

    Il a dit à Luca de se taire et d'écouter.

    Lui-même n'aurait pas prononcé un mot.

    A la fin de celles-ci, il resta hésitant et quelques pensées menaçantes commencèrent à tourbillonner dans sa tête.

    Si les provinces avaient été à la merci de l'invasion de l'Autriche et de Naples, de la Toscane et d'autres armées, qu'est-ce qui valait la peine de défendre Rome seule ?

    Ce serait une question de temps, mais ils finiraient par capituler.

    Pourquoi tout ça?

    Pourquoi ne pas se rendre immédiatement sans effusion de sang ?

    Lorsque les Français sont intervenus, il était abasourdi.

    Eux, les défenseurs des droits de la Révolution qui avaient ramené un Bonaparte au pouvoir, avaient-ils ainsi trahi ?

    Ceux qui, quarante ans plus tôt, avaient délogé le Pape, ramèneraient-ils au pouvoir un de ses héritiers contre une République ?

    C'était impossible à croire.

    Le voyant dans cet état, ses compagnons d'armes le réconfortèrent.

    Tu réfléchis trop. Laisse faire les gros bonnets, comme on dit ici. On n'a que ça...

    Et ils montrèrent ses bras.

    S'agissait-il alors d'une simple relation d'équivalence ?

    Les gens ont des armes et les intellectuels ont des cerveaux.

    Et de quel droit les nobles avaient-ils plus que n'importe qui d'autre ?

    Il n'a pas pensé plus loin et a bu du vin.

    L'alcool avait sur lui un effet étrange, engourdissant ses sens et le faisant tomber dans un sommeil profond au cours duquel tous les doutes disparaissaient, se réveillant le lendemain matin rempli uniquement de certitudes.

    Manara arrive avec les Bersaglieri !

    La division lombarde était attendue à Anzio fin avril, mais les Français voulaient faire avancer les temps.

    Ils ont cherché un assaut surprise, mais Manara a anticipé leur arrivée avec une marche forcée.

    Nous serons avec la brigade commandée par Garibaldi et nous devrons défendre le Gianicolo.

    Dans la ville tout était fourmillement de soldats et de préparatifs.

    Luca tremblait pour son baptême du feu, mais Otello tenta d'éteindre son enthousiasme.

    Reste près de moi. L'important est d'arriver vivant à la soirée, souvenez-vous en.

    Le début de la bataille était ennuyeux pour Luke.

    Une action immédiate était attendue, mais les Français avaient décidé d'attaquer une autre zone et tout semblait calme sur le Janicule.

    Oudinot a peur de Garibaldi et essaie de percer là où se trouve la Garde nationale, vers la porte Cavalleggeri.

    Otello avait bien fait le tour de la ville.

    Après seulement trois mois, il connaissait la topographie de Rome dans les moindres détails.

    Il était évident qu'il avait déjà de l'expérience et que, d'une certaine manière, il était fait pour l'aventure et les voyages.

    Luca, quant à lui, ne parvenait pas à s'orienter dans le melting-pot labyrinthique des rues et ruelles de la capitale.

    C'était trop vaste pour lui, car il avait toujours été habitué à Parme où tout le monde se connaissait depuis un certain temps et où aucune mutation urbaine ne passait inaperçue.

    Mais ils ne savent pas ce qui les attend...

    Otello a conclu son discours alors que le soleil se levait haut sur Rome.

    Le printemps s'était abondamment épanoui dans la ville, comme s'il voulait se réjouir avec la population et vouloir donner aux monuments historiques un aspect moins austère et plus moderne.

    Si seulement il avait pleinement profité de ce spectacle sans que les canons ne sonnent !

    Otello l'avait espéré, mais il savait que c'était un vain présage jusqu'à ce que les puissants aient joué à la guerre, réprimant le désir de liberté d'un peuple.

    Les abus et les injustices devaient être combattus précisément pour permettre à chacun de vivre en paix et en liberté.

    Luca le regarda hébété et Otello, alors qu'il terminait le pain, le gronda :

    « La Garde nationale est équipée de canons et de fusils de sniper. Ils les rejetteront."

    Alors c'est arrivé.

    Probablement les Français avaient sous-estimé les forces de la République.

    Maintenant, c'est notre tour.

    Garibaldi a vu l'opportunité militaire et l'a exploitée.

    Envoyant les Français en déroute, les faisant reculer de honte, affectant leur orgueil et leur état d'esprit et, surtout, déclenchant une vague d'indignation envers ceux qui auraient dû défendre leur tentative.

    « A la baïonnette !

    Otello a montré à Luca comment faire.

    Courez et restez près de moi.

    Ils sont sortis de leurs positions en criant.

    Les Français n'ont pas fait les frais et ce fut un triomphe total.

    Ce même soir, il y avait des célébrations dans tout Rome.

    Une atmosphère d'euphorie envahissait chacun, même si tout le monde était conscient du résultat à long terme.

    Oudinot aurait demandé des renforts et, en les attendant, aurait stipulé une trêve, tandis que les Bourbons auraient attaqué par le sud.

    De plus, comme d'habitude, il y avait des points de vue différents entre Garibaldi et Mazzini.

    Le premier habitué à jouer, il avait une notoriété indestructible dans le domaine.

    Le second espérait encore une refonte française.

    Avec l'armée renforcée, Oudinot aurait gagné et la République romaine aurait pris fin.

    Ne vous détendez pas trop, il y aura du travail pour nous en dehors de Rome.

    Otello prévint son ami.

    Il agissait comme un vétéran maintenant et, en fait, il l'était.

    Peu de gens pouvaient se vanter sur le sol italien d'avoir plus d'expérience en tant que bénévole, combinée à une foi inébranlable dans la cause nationale et républicaine.

    Ils ont participé aux sorties de Palestrina et Terracina.

    Pas tous deux décisifs, mais suffisants pour convaincre les Bourbons de renoncer à une grande campagne militaire.

    Tout est entre les mains de Mazzini et le traité avec les Français, telle était la rumeur qui circulait dans les départements, même si peu croyaient à une résolution pacifique.

    Les Français étaient beaucoup plus nombreux qu'auparavant et se considéraient désormais militairement supérieurs et n'auraient pas manqué une telle occasion.

    Le nouveau Bonaparte, qui n'était qu'un simulacre de son oncle, devait acquérir une victoire pour reprendre le rôle de la France.

    Le traité est conclu, mais Bonaparte lui-même n'en tient pas compte.

    Maintenant, il y avait trente mille soldats assiégeant Rome et ce ne serait qu'une question de temps. Tout le monde le savait, mais malgré cela, personne n'était disposé à laisser entrer les Français par la porte principale, leur livrant la ville.

    Il a attaqué un jour plus tôt que prévu, violant la trêve établie.

    Maudit.

    Sur le Gianicolo, cependant, il y avait les volontaires de Garibaldi.

    La bataille a été sanglante et la domination française l'a emporté.

    Nous devons riposter.

    A la Villa Corsini, le corps des volontaires tente un coup de maître, mais cette fois les Français sont de trop.

    Le soir, de tristes nouvelles se répandent parmi les soldats.

    Goffredo Mameli avait été grièvement blessé.

    Juste lui, celui de la chanson que tout le monde connaissait par cœur maintenant.

    Il n'avait que quelques années de plus qu'Otello et Luca, qui l'avaient connu personnellement et l'avaient pris comme référence.

    A partir de ce jour, les Français ont commencé à bombarder la ville.

    Une défiguration pour l'histoire représentée par Rome.

    Il y avait de la colère dans la population et pas tant pour le retour futur du pape, qui serait désormais de retour dans quelques mois.

    Une colère devant l'occasion qui aurait échappé.

    Colère parce que Rome a pu se mettre à la tête d'un État libre et indépendant dirigé par des Italiens, sans avoir besoin d'un roi.

    Colère parce que ce sont les cousins français, ceux qui avaient apporté le vent de la libération quelques générations plus tôt, qui avaient brisé le rêve.

    Mazzini a refusé de se rendre et cela a conduit à une résurgence de l'action d'Oudinot.

    C'était maintenant les dernières heures désespérées de la République, mais les volontaires ne se sont pas retenus.

    Toujours sur le Gianicolo, la dernière bataille a eu lieu.

    Et comme quelques mois auparavant, c'était un assaut à la baïonnette.

    Otello a perdu de vue Luca pendant la course et ne l'a ensuite pas retrouvé dans la mêlée.

    Elle n'aurait servi à rien, si ce n'est à décréter le grand sacrifice d'une génération pour un idéal.

    Luciano Manara est tombé.

    Un coup dur pour tout le monde.

    Il était prêt à mourir, il avait écrit une lettre peu de temps auparavant.

    Ce qu'Otello ne pouvait accepter, c'était de voir son ami blessé, mais avec un sort marqué.

    Il s'était fait tirer dessus et il ne lui restait plus beaucoup de temps.

    Quelques mots maladroits.

    « Allez dire... »

    Otello a pensé à sa famille, mais Luca a conclu.

    ... qu'un patriote de l'Italie et de la République est mort ici.

    Il lui serra la main et la posa sur ses épaules.

    Il aurait reçu un enterrement convenable.

    Otello était incapable de dormir.

    C'était lui qui l'avait convaincu et maintenant il était mort, en partie de sa faute. Pourquoi? Comment allait-il continuer sa vie avec un tel rocher sur la conscience ?

    Le lendemain, c'était la capitulation, mais pas avant la proclamation de la Constitution de la République romaine.

    Otello le lut les larmes aux yeux :

    " PRINCIPES FONDAMENTAUX

    I. - La souveraineté est de droit éternel dans le peuple. Le peuple de l'État romain est constitué en république démocratique.

    II. - Le régime démocratique a pour règle l'égalité, la liberté, la fraternité. Elle ne reconnaît pas les titres de noblesse ni les privilèges de naissance ou de caste.

    III. - La République avec ses lois et ses institutions favorise l'amélioration des conditions morales et matérielles de tous les citoyens.

    IV. - La République considère tous les peuples comme frères : elle respecte chaque nationalité : elle prône la langue italienne.

    V. - Les Communes ont toutes des droits égaux : leur indépendance n'est limitée que par les lois d'utilité générale de l'Etat.

    TOI. - La répartition la plus équitable possible des intérêts locaux, en harmonie avec l'intérêt politique de l'Etat, est la norme du découpage territorial de la République.

    VII. - L'exercice des droits civils et politiques ne dépend pas de la croyance religieuse.

    VIII. - Le Chef de l'Église catholique aura de la République toutes les garanties pour l'exercice indépendant du pouvoir spirituel .

    C'était pour quoi maintenant ? La République serait bientôt annulée.

    « Pour donner un avertissement. Aux Français, d'abord, pour leur dire qu'ils ont trahi leurs principes et que nous en sommes l'incarnation. Et puis pour la postérité. Tôt ou tard, il y aura des Italiens qui adopteront ces lois. Cela pourrait même prendre cent ans.

    Un monsieur jamais vu réconforté Otello.

    Cela ressemblait à un rêve ce qu'il avait subi.

    Otello a erré dans la ville à la recherche de consolation.

    Aucun monument historique et aucun coin de Rome ne le consola, pas même les prairies entièrement vertes, pourtant souillées de sang italien.

    Le lendemain, Garibaldi a harangué les volontaires :

    « Je quitte Rome, quiconque veut continuer la guerre contre les étrangers doit venir avec moi. Je promets pas de salaire, pas de douce oisiveté. De l'eau et du pain, quand vous en aurez."

    Ils étaient quatre mille, dont Otello.

    Il savait ce qui l'attendait.

    Une longue marche vers le nord.

    Ombrie et Arezzo comme premiers arrêts.

    Et comme l'année précédente, il y avait un poursuivant, mais plus les Autrichiens.

    Ils étaient français et la disproportion des forces était également élevée.

    En un mois, ils arrivèrent à Saint-Marin, officiellement une république indépendante, mais pour se rendre à Venise, ils avaient besoin d'un transport maritime.

    Venise avait été considérée comme le dernier avant-poste d'où commencer une autre insurrection armée.

    Comme sur le lac Majeur, Otello et les volontaires capturent une flottille de bateaux, mais sont immédiatement interceptés par les Autrichiens.

    De nombreux volontaires avaient déjà disparu auparavant et certains ne s'étaient pas embarqués et seuls quelques-uns ne sont pas tombés aux mains des Autrichiens.

    Otello était conscient que cela signifiait être abattu sur place.

    Comme à chaque fois, le corps des volontaires a été décimé lors de l'évasion et c'est par hasard qu'ils se sont retrouvés sur le bon bateau qui s'est échoué à Comacchio.

    Mais le pire était encore à venir.

    Ce furent des jours d'angoisse, fuyant de case en case escortés par la population locale.

    Partout les peuples les ont aidés.

    De cela Otello pourrait être témoin.

    Il n'y avait personne qui se soit rangé du côté de la puissance étrangère et qui les ait dénoncés, en effet chacun a fait de son mieux pour prêter main forte, même au péril de sa vie.

    Otello a été témoin de la scène déchirante de la mort d'Anita, la femme de Garibaldi.

    Était-il possible que ce soit la seule issue ?

    La mort?

    Sans espoir?

    Et combien de morts de plus y aurait-il eu ?

    Était-ce vraiment la vie qu'il mènerait ?

    Heureusement qu'il était resté en vie, combien de temps encore aurait-il tenté le destin ?

    Ils sont partis de là, en passant par Ravenne et Forlì.

    Parme n'était pas loin et Otello prit congé du général, qui irait en Toscane en suivant la route des Apennins et de là en exil.

    Désormais habitué à marcher longtemps sans s'arrêter, à se cacher à découvert, grâce au temps chaud, il serait à Parme dans quelques jours.

    Là, il rassemblait ses pensées et méditait.

    Son père et sa mère l'ont accueilli comme s'il était ressuscité d'entre les morts.

    Ils l'ignoraient depuis trois mois et l'avaient cru mort après la nouvelle de l'échec de l'expérience républicaine.

    C'était pour quoi ?

    demanda sa mère.

    Otello ne savait pas.

    Il n'avait pas toutes les réponses.

    Son seul geste fut de remettre la chemise rouge de son fils à la famille de Luca, rapportant ses derniers mots.

    Il resta un mois à Parme, le temps de voir arriver l'automne.

    Les quelques volontaires survivants étaient partis en exil.

    Tôt

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