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Toute ma musique de « Yesterday and Today »
Toute ma musique de « Yesterday and Today »
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Livre électronique418 pages4 heures

Toute ma musique de « Yesterday and Today »

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À propos de ce livre électronique

Détrompez-vous, ceci n'est pas une encyclopédie sur la musique, loin de là. C'est, tout simplement une compilation commentée de la musique, tous formats confondus, que j'ai aimée et que j'aime encore. Si vous êtes comme moi un baby-boomer, vous vous retrouverez en terrain connu, sinon, peut-être y ferez-vous des découvertes intéressantes. J'espère que votre exploration sera aussi plaisante que le fut ma replongée dans tout mon passé musical. C'est du moins le souhait que je formule. Bonne lecture !
LangueFrançais
Date de sortie13 juil. 2023
ISBN9782322563548
Toute ma musique de « Yesterday and Today »
Auteur

Luc A. Granger

Luc A. Granger est né le 18 septembre 1952 à Drummondville, Québec, Canada. Entré dans la fonction publique fédérale en 1980, il a pris sa retraite en 2010. Depuis, il consacre beaucoup de ses temps libres à l'écriture et à la musique. Il a déjà publié, aux éditions BoD, trois recueils de chants et de poésie qui ont été regroupé dans un seul livre, bonifié: Toutes mes fleurs et mes épines; un livre corporatif: Tous mes bien-cuits et autres fioritures de bureau; un livre autobiographique: Palace Hemming plus treize autres nouvelles de ma vie; un essai sans prétention aucune: Le livre de mes livres; un recueil de poésie dont les enfants sont les héros: Tous les enfants jouent dans la même cour; et un livre-survol de la musique qu'il a aimée : Toute ma musique de Yesterday and Today.

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    Aperçu du livre

    Toute ma musique de « Yesterday and Today » - Luc A. Granger

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    Juste avant que je naisse…

    Dès le départ, j’aimerais préciser que ce livre que vous tenez n’est pas une encyclopédie sur la musique ni sur le monde du disque. Il n’est qu’un autre livre que j’écris pour, tout d’abord, me faire plaisir. Sur le modèle de mon opus précédent Le livre de mes livres (publié chez BoD) qui se voulait une compilation de livres marquants de ma vie, celui-ci se veut une compilation de la musique qui a jalonné agréablement ma vie.

    Le musicien amateur que je suis, et que je suis toujours resté, n’a jamais cessé d’admirer les musiciens professionnels, les chanteurs et les chanteuses aux belles voix, et les auteurs-compositeurs, quelquefois aussi interprètes de leur musique. Je n’ai jamais cessé d’être impressionné par la variété des sonorités, des styles, des arrangements, des interprétations que l’on retrouve dans ce vaste monde de la musique, classique, ancienne comme moderne. Sur ce plan-là de la musique, je trouve que l’humain a toujours fait et fait encore preuve d’une originalité et d’une ingéniosité qui semblent vraiment sans limites.

    Bien entendu, au fil des ans, j’ai développé des goûts et des appétits personnels pour certains genres de musique mais cela, sans exclure l’expérimentation dans d’autres genres. Je vois ces genres musicaux comme des cercles : la plupart des cercles musicaux sont ou se veulent distincts les uns des autres, mais ils ne s’excluent pas totalement : aussi éloignés semblent-ils être des miens, mes cercles, ils se chevauchent quelque part. Par exemple, les groupes qui font de la musique « hard rock » sont souvent ceux qui composent les plus belles ballades : Scorpions, Uriah Heep, Led Zeppelin, Nazareth, Black Sabbath, Metallica, pour ne nommer que ceux-là ; ce faisant, ils viennent superposer une partie de leurs cercles au-dessus des miens avec des pièces magnifiques comme Wind of Change, Come Away Melinda, Stairway to Heaven, Love Hurts, Solitude, Nothing Else Matters, etc...

    Car je le dis d’emblée, j’aime essentiellement la pop et le rock doux, lyriques, orchestrés, inventifs, progressifs, même si, moi aussi, je me permets de temps en temps de superposer mes cercles sur ceux des autres… Je suis né en 1952, je ne surprendrai donc personne en affirmant que j’ai aimé et que j’aime encore les Beatles. Que j’ai aimé et que j’aime encore les Rolling Stones, des débuts du moins (jusqu’à Honky Tonk Woman). Que j’ai aimé et que j’aime encore Creedence Clearwater Revival (CCR pour les intimes). Que j’ai aimé et que j’aime encore les Moody Blues (d’avant leur séparation surtout). Que j’ai aimé et que j’aime encore Barclay James Harvest (BJH pour les intimes). Que j’ai aimé, et que j’aime encore Jim et Bertrand, Beau Dommage et Harmonium. Que j’ai aimé, quoique sur le tard, et que j’aime encore Offenbach. Que j’ai aimé et que j’aime encore Claude Dubois et Robert Charlebois. Que j’ai aimé et que j’aime encore Georges Moustaki, Adamo, Jean Ferrat, …et tant d’autres qu’il serait superflu de mentionner ici, puisque je vous les présenterai plus loin dans ce livre.

    Je vois bien que dans mes déclarations d’amour musicales, il se trouve peu de femmes… Pourtant elles ne sont pas inexistantes dans mes goûts musicaux : entre autres chanteuses, j’ai aimé et j’aime encore beaucoup de chansons de Withney Houston, de Barbra Streisand, de Véronique Sanson, de Renée Martel, de Ginette Reno, de Diane Dufresne, etc.

    Et si vous me posez la question : « Eille Granger ! Elvis Presley, dans tout ça, il est où ? » Je répondrai que dans ma jeunesse, dans mon enthousiasme aveuglé de Beatlemania, j’ai boudé et méprisé le King ; je le disais démodé, dépassé, déclassé par les Beatles… (De plus, il n’a composé aucune de ses chansons !) Comme si les artistes devraient sortir de scène lorsqu’un autre qui nous plaît plus survient. J’ai compris, un peu plus tard, qu’il n’y avait pas qu’une seule scène musicale, mais autant de scènes qu’il y a d’artistes qui en revendiquent une… Et c’est très bien ainsi… Eh oui ! J’admets volontiers et de bonne grâce, qu’Elvis Presley est plus qu’un excellent interprète du rock’n roll des années 1950-1960, que c’est lui, ─ mais bien sûr, il n’est pas le seul, ─ qui a contribué de façon importante à casser la baraque vermoulue de l’étouffant et écrasant puritanisme américain ─ et le nôtre par ricochet. Avec lui, les USA, et le monde aussi bien, furent « all shook up ». Ce n’est pas rien… Aujourd’hui, oui, j’aime bien le rock’n roll et les ballades d’Elvis… Yeah !

    Cette formalité réglée, n’hésitons plus : « …En avant la musique ! »

    Luc A. Granger

    1

    La musique de mon enfance -; Les décennies « yesterday »

    Les émissions-télé pour enfants avaient chacune leur thème musical qu’on avait voulu simple mais accrocheur : on cherchait des vers d’oreille, dit-on aujourd’hui. Quel Québécois, Québécoise de 70 ans et plus ne se rappellent pas des thèmes d’ouverture et de fermeture de la Souris verte, de Bobino (et l’espiègle Bobinette), de la Boîte à surprise, de Sol et Gobelet (…sont de drôles de pistolets), de Fanfreluche (…va raconter une belle histoire à sa manière), du (C’est le…) Pirate Maboule (…qui a perdu la boule), de (Je suis…) Popeye (…le vrai marin, pouh pouh !), des Satellipopettes et de Passe-Partout de leurs enfants, etc… Qu’on entendît, de près ou de loin, un de ces airs intimement liés à l’une de nos émissions favorites, on lâchait tout à vitesse grand « V » et l’on se ruait vers l’un des derniers sièges encore disponibles disposés devant le poste de télévision. Il s’agissait là chez nous d’une version adaptée à notre réalité familiale de la chaise dite musicale où tout le monde – nous étions 6, 7, puis 8 enfants – ne pouvait pas gagner. Les perdants s’assoyaient par terre, sur le prélart du salon, tout simplement.

    Ces jingles, ces vers d’oreilles nous accrochaient et nous tiraient vers la télévision comme les vers de terre attirent les poissons vers la ligne à pêche.

    Comme c’était les premières incursions d’images électroniques dans les maisons ─ en noir et blanc ─, il fallait, nous disait-on, se méfier des conséquences d’une exposition trop fréquente ou trop prolongée aux ondes hertziennes. Donc, déjà à cette époque, maman Lorraine nous suppliait de ne pas trop nous approcher de l’écran afin de ménager nos yeux et, aussi, nous intimait l’ordre de baisser le son du téléviseur un, pour ménager nos oreilles et ne pas devenir sourd, et deux, pour ne pas réveiller papa Joseph qui, parce qu’il travaillait de nuit une semaine sur trois, dormait l’après-midi dans la chambre située tout à côté du salon.

    En voici quelques-uns de ces « grands » dessins animés musicaux.

    The Wonderful World of Disney (Le Monde merveilleux de Disney)

    Nous reconnaissions aussi très facilement le thème d’ouverture de l’émission The Wonderful World of Disney présentée par Walt Disney lui-même. Au Canada, elle fut tout d’abord diffusée par la CBC, le canal 6 le samedi soir, à 18h00 si je me souviens bien. À chaque fois, nous espérions, que dis-je, nous priions très fort le Seigneur pour qu’il fît en sorte que ce soit le quadrant « dessins animés » qui soit en vedette ce soir-là… On aimait particulièrement les dessins animés de Goofy (Dingo), de Donald Duck, et même de Mickey Mouse. La musique, toujours présente dans ces sketches animés, accompagnait, renforçait et amplifiait même le caractère drôle ou dramatique de l’histoire contée de ses sonorités classiques ou jazzées. C’était particulièrement vrai dans les saynètes animées sous la bannière Silly Symphony dans lesquelles, la plupart du temps, la musique classique était omniprésente. De grands films d’animation issus des Studios Disney suivront, depuis ce temps jusqu’à aujourd’hui, incorporant des musiques et des chansons déjà existantes ou de toutes nouvelles :

    Fantasia (musiques de Bach, Tchaïkovski, Stravinski, etc, -1940) ;

    La Belle et la Bête (The Beauty and the Beast, Céline Dion - 1991) ;

    Aladdin (A Whole New World, Peabo Bryson/Regina Belle - 1992) ;

    The Lion King (Can You Feel the Love Tonight, Elton John-1994) ;

    Frozen - La Reine des Neiges (Let it Go, Idina Menzel - 2013).

    (Pour ne nommer que ceux-là parmi la plus que centaine de films d’animation produits par les studios de Disney)

    Plus tard, et en parallèle des Silly Symphonies, ce sera le thème d’entrée de la parade des personnages des Merrie Melodies et des Loonie Tunes qui nous feront nous agglutiner dans le salon. À l’instar de ce que fit Disney, la musique agrémentait les saynètes du lapin Bugs Bunny, du canard Daffy Duck, du putois Pepe le Pew, du chasseur de lapins Elmer Fudd, du cochonnet Porky Pig, du pirate Yosemite Sam, du chat Sylvester (Grosminet), de Tweety Bird (Titi) le canari, de la souris Speedy Gonzales, du coq Foghorn Leghorn, de Wile E. Coyote pourchassant sans cesse mais inutilement le Road Runner, …et de bon nombre d'autres personnages aussi farfelus les uns que les autres.

    Bref, la musique devint rapidement indissociable du 9e art : on ne pourrait jamais plus imaginer un dessin animé sans musique.

    La musique classique au service des « comics »

    Autant les studios de Disney que ceux de la Warner Bros s’inspirèrent, pour l’histoire racontée dans leur œuvre, des grands maîtres de la musique classique pour créer le script d’un dessin animé, mais adapté à l’un des personnages de la maison.

    Du Frédéric Chopin, du Johann Strauss II, Le Barbier de Séville de Jeoachino Rossini, du Robert Schumann, du Johannes Brahms, du Richard Wagner, etc. Dans un de ces dessins animés qui m’a le plus amusé, on voit Bugs Bunny, transformé en Maestro Leopold (Stokovski, le vrai !), arriver sur scène pour diriger un orchestre symphonique accompagnant un ténor ; les deux, autant les musiciens de l’orchestre que le chanteur, se verront pousser par lui au-delà de leur capacité de jeu et de chant… Hi-la-rant !

    Tout jeunes, on pouvait ne pas savoir que cette musique s’appelait « classique » ; comme papa avait quelques connaissances dans ce domaine, on n’avait pas besoin de le prier pour qu’il nous renseigne sur ce vaste monde musical encore inconnu de nous.

    Cette musique-là, le classique, on l’écoutait peu à la maison ; peut-être est-ce pour cette raison que je n’ai vraiment pas été tenté d’en consommer beaucoup… Plus tard cependant, je me convertirai quand même à un « certain » classique.

    Pas à toute, non, car pour avoir été obligé, au cégep, d’en écouter pour en analyser le style et la forme, je me suis rebiffé un tantinet. Surtout sur les concertos brandebourgeois d’un certain auteur classique de renommée mondiale, concertos qui me semblaient copiés-collés les uns sur les autres. À l’école de musique du collège de Drummondville, dans mon cours « d’écoute des œuvres de Bach », il fallait noter le contrepoint joué par tels et tels instruments, et vérifier si la forme ternaire à l’italienne « vite-lent-vite » du concerto était respectée… Immanquablement, tristement même, toute notre attention focalisée sur la forme, nous faisait oublier de juste écouter, de savourer l’œuvre. J’aime bien J. S. Bach, mais pas tellement ses concertos brandebourgeois…

    Au Séminaire de Trois-Rivières, en attendant que le film annoncé ne commence, on nous proposait une musique classique sans air, un peu terne, toujours le même air, me semblait-il même… C’était peut-être encore Bach et l’un de ses concertos de Brandeburg ?…

    Le classique que j’aime bien fait partie, du moins pour la plupart des œuvres, de la période de l’histoire musicale dite « baroque ».

    Voici des œuvres classiques qui me plaisent particulièrement : l’Adagio d’Albinoni, le Canon de Pachelbel, La Fugue en Sol majeur de Jean-Sébastien Bach, Le Boléro de Ravel, Les Valses pour piano de Frédéric Chopin, Le Concerto d’Aranjuez de J. Rodrigo, Clair de lune de Ludwig von Beethoven, les Grandes valses viennoises de Johan Strauss, et quelques autres encore… Los Indios Tabajaras sont 2 guitaristes d’Amérique du Sud qui se sont amusés à jouer des grands airs classiques sur leurs seuls deux instruments ; sur certaines pièces, ils font preuve d’une grande virtuosité, je ne vous dis que ça...

    La musique de papa et maman

    Avant l’apparition de la télévision canadienne, la musique était l’affaire de la radio et du disque 78 tours. Le Québec pudibond des années 1950 chantait et dansait bien sûr mais c’était très souvent des et sur des chansons tirées des albums de La bonne Chanson* – oui, toute autre chanson pouvait se voir qualifiée de « mauvaise » ! de l’abbé Charles-Émile Gadbois, c’est-à-dire des chants traditionnels, patriotiques et, qui en sera surpris, religieux. Les danses, c’était des danses folkloriques et des gigues. Tout ça excluait par avance et d’emblée toutes formes d’allusions au sexe, à la sensualité, et toutes formes de rapprochements lascifs ou quelque peu intimes. On ne badinait pas alors avec ces choses-là, dans la très catholique et très prude province de Québec !

    *Voir le texte des pages 234-236

    Le violon de papa Joseph

    Pendant près de 20 ans, mon papa Joseph et son groupe Les JRG (pour Joseph-Raymond Granger) ─ dont son grand frère Gérard faisait partie ─ ont, semaine après semaine, animé des après-midis et des soirées de danse dans les salles de Drummondville. Un peu de sa musique se retrouve sur un CD, immortalisant ainsi une de ses grandes passions : jouer du violon.

    Chez nous, le violon de notre papa Joseph – oui, le violon était l’un de ses nombreux... violons d’Ingres –, n’était jamais bien loin. Quand il en avait le temps et l’envie, Joseph sortait son précieux instrument de sa cachette, un étui en bois de sa fabrication dont l’intérieur était capitonné de manière à le protéger des chocs et des « graffignes ».

    Après avoir bien enserré son violon sous le menton, il enduisait les crins de son archet d’une substance résineuse jaunâtre qui s’appelle de l’arcanson, et s’assurait avant de jouer que ses quatre cordes, dans l’ordre de la plus grave à la plus fine appelée chanterelle, rendaient justement et précisément les sons attendus de sol-ré-la-mi. Sinon, il les ajustait en tournant de sa main gauche, par petits à-coups, l’une après l’autre, les quatre chevilles auxquelles elles étaient rattachées au bout du manche et, si nécessaire, en tournant précautionneusement de minuscules vis idoines pour obtenir un maximum de précision ; le son produit par la corde ainsi ajustée et réajusté était vérifié par un pizzicato lent et continu effectué par l’index de la main droite et il devait obtenir l’approbation de l’oreille exercée de l’instrumentiste.

    Une fois ce cérémonial incontournable et solennel complété, plus ou moins long, cacophonique et fastidieux car il se faisait à l’oreille, Joseph interprétait, les uns après les autres, des « reels », des sets carrés, des valses, des polkas, bref, des airs et des mélodies de son époque. Je rappelle que Joseph était un violoneux, c’est-à-dire qu’il jouait du violon selon une méthode d’apprentissage à la mode dans son jeune âge qui s’appelle « l’apprentissage sur le tas », les jeunes imitant les plus vieux. C’est ainsi que fut transmise d’une génération à l’autre une multitude de chansons et de mélodies faisant partie du terroir folklorique qui, autrement, auraient pu se perdre à jamais.

    Joseph n’était pas le seul violoneux du Québec ; d’autres, comme lui, qui avaient enregistré leurs « tounes » sur disques-vinyle 78 tours ou 33 tours, Ti-Blanc Richard, Ti-Noir Joyal, Monsieur Pointu (Paul Cormier), Lévis Bouliane, Isidore Soucy, pour ne nommer que ceuxlà, étaient beaucoup plus connus que mon papa. Oui, il suffisait d’une caractéristique physique particulière, la forme du nez, la couleur des cheveux, pour attribuer au violoneux un sobriquet qui devenait bien souvent son nom d’artiste ; à l’instar des Monsieur Pointu, Ti-Blanc Richard et Ti-Noir Joyal, Joseph le violoneux arborant une tignasse rousse, devint, logiquement, pour son public, Ti-Rouge Granger.

    Adolescent, je l’ai déjà confessé en d’autres lieux et en d’autres circonstances, j’avais toujours la fierté un peu gênée d’accompagner mon père dans ses interminables séances musicales. Il connaissait un assez grand nombre de pièces qu’il jouait par cœur dans un ordre qui ne variait pas beaucoup d’une fois à l’autre ; de plus, le guitariste s’apercevait très tôt que l’accompagnement à la guitare devenait un tantinet répétitif et fastidieux : quatre valses en sol majeur, deux en ré majeur, trois « reels » en sol majeur... trois autres en la majeur, et presque toujours un patron de base inchangé de trois accords majeurs. Bref, assez rapidement, un gars ou une fille se tannait... Mes frères, mes sœurs sachant gratter la guitare, et moi, nous lassâmes un peu : mais je n’ai jamais vu Joseph, l’orgueilleux, Ti-Rouge Granger, quémander un accompagnateur lorsqu’il s’installait au salon pour jouer du violon. Jamais ! Il partait ses premières pièces seul, puis le temps passait... Moi, quand j’étais là, à la maison, je voyais ses yeux à mon papa qui, un tantinet moins fiers et orgueilleux que sa tête, imploraient une compagnie, silencieusement. Et, presque toujours, j’avais pitié : j’allais quérir l’instrument complémentaire au violon, la guitare, et j’allais m’installer sur une chaise, pas loin de lui.

    Ce fut comme ça jusqu’au crépuscule de sa vie, même après que Joseph se fut relevé d’un infarctus l’ayant invalidé pour une bonne période de temps : plus de danses, plus de chants, plus de guitare, plus de violon. Il savait devoir faire un deuil complet de la danse, du chant et de la guitare, mais sa tête de cochon lui susurrait qu’il serait capable un jour de rejouer du violon. Sachez que, dès que son état lui permit de tenir un violon et de coordonner l’archet tenu d’une main et un pianotage de doigts sur le manche de l’autre, je me fis un devoir filial d’aller le rejoindre le plus souvent possible à son domicile et de l’accompagner, dans les deux sens de ce dernier mot, dans sa convalescence et sa réhabilitation difficile mais progressive de violoniste. Et, à force d’essayer, Joseph, l’orgueilleux, le persévérant, l’entêté, l’obstiné Ti-Rouge Granger, parvint à en rejouer plus que convenablement de son violon.

    Plusieurs des pièces que papa jouait se retrouvaient dans la pile de disques 78 tours que nous avions à la maison : plusieurs valses et reels dont celui du pendu et celui de l’oiseau moqueur. S’y trouvaient aussi : le Minuit Chrétiens (1948) interprété par le ténor Raoul Jobin et les Disciples de Massenet et un disque de Clémence Desrochers : Les enfants d’ma sœur / L’enfant de Marie (1958). Tous ces disques-là se sont envolés vers le fond de la cour sous forme de frisbies. Un vrai « autodafé » volant de petits trésors.

    Honte à nous, jeunes écervelés irespectueux et inconscients que nous étions alors de la valeur des choses !

    Les « Soirées canadiennes »

    Près de 300 villes, villages du Québec et d’ailleurs, (plus d’une vingtaine, 2 fois) ont participé à cette populaire émission. Le 17 septembre 1960, Louis Bilodeau recevait les gens de St-Félix-de Kingsey ; incidemment, la compagne des 20 dernières années de vie de mon papa Joseph, Aline Francœur, y a participé.

    Soirée canadienne était l’émission-phare de ce courant de musique : elle fut d’abord diffusée localement sur les ondes de CHLT-Sherbrooke puis sur le réseau Télé-Métropole pour le bénéfice de l’ensemble du Québec. Louis Bilodeau a animé cette émission hebdomadaire du samedi soir pendant 23 saisons, soit de 1960 à 1983. Le concept général est celui-ci : recréer chaque semaine une veillée canadienne d’antan en mettant en valeur non seulement chacune des villes et chacun des villages « visités » – un petit film documentaire diffusé en début d’émission en faisait le panégyrique –, il mettait aussi en vedette les artistes de cette ville ou de ce village. On avait donc droit à des violoneux, à des « gigueux », à des chanteurs et chanteuses de chants traditionnels et folkloriques, à des chanteurs et chanteuses de chansons à répondre, et à des danseurs et danseuses de danses traditionnelles et folkloriques. Et il se trouvait, systématiquement, parmi les invités d’honneur de chaque émission, monsieur le maire de la municipalité visitée et son épouse, monsieur le doyen de la place et son épouse, et monsieur le curé (non, là, pas d’épouse… non mentionnée en tout cas !).

    Le 20 juin 1977, Louis Bilodeau a animé la Soirée canadienne du Québec à l’Olympia de Paris, une émission bien spéciale bien accueillie par nos « cousins français » et produite par la société d’état, Radio-Canada. Ce spectacle mettait en vedette les artistes, chanteurs et danseurs, du Festival des Cantons de la région de l’Estrie ainsi que le violoniste Ti-Blanc Richard, aussi originaire de cette région. Ce dernier y fera une démonstration de ses talents de « violoneux » en jouant un « reel » tout en transformant en archet toutes sortes de choses hétéroclites : un mini-archet, une verge de 3 pieds – oui, ça se pouvait, et ça se peut encore, dans le système de mesures impériales –, une pipe au long tuyau, une hache, un bâton de hockey… Puis il demanda à un spectateur hésitant du nom de Jœ Dassin – oui, le chanteur – de venir bouger l’archet pendant que lui, Ti-Blanc, tournerait son violon de manière à lui faire jouer la mélodie. L’hilarité de Jœ Dassin tenant le susdit archet : un vrai beau moment de télé…

    Soirée canadienne ? Une sympathique et joviale émission bon chic, bon genre, qui tentait de maintenir vivant tout un pan du patrimoine culturel traditionnel propre aux Canadiens-français que nous étions. Il faut reconnaître que ce patrimoine, bien qu’il existe toujours dans les mémoires archivistiques, ne prend désormais que bien peu d’espace dans la vie culturelle quotidienne des Québécois et des Québécoises des années 2000. Sauf aux Fêtes…

    Le jazz des années 1930, toutes les formes de rock-blues des années 1940 et suivantes, la soul des années 1950, la pop, la pop-rock des années 1960, le disco des années 1970, le rap, le hip-hop, le punk, le slam, la house, le trash et le techno, plus récents, ont remplacé tout ça et ont relégué la musique traditionnnelle et les chansons à répondre aux oubliettes. Alors oui, on est rendu loin des rythmes traditionnels et des steppettes folkloriques hérités de nos ancêtres canadiens-français…

    Ce répertoire « désuet » de chansons et ce folklore poussiéreux, on ne les ressort désormais qu’une fois par année, au Jour de l’An… pour se donner bonne conscience beaucoup plus que par goût, je crois bien.

    Pourtant, dans les années 1970, l’émission Soirée canadienne fut parfois plus populaire, dans les Cantons de l’Est en tout cas, que la Soirée du Hockey qui la suivait dans l’horaire !

    Le country-western

    Dans les années 1950-1960 (et +), le country-western avait aussi ses adeptes et ses chantres. Les États-Unis nous envoyaient :

    Chet Atkins (guitariste) : Galopping on the Guitar, Stardust, Yankie Doodle Dixie, et beaucoup d’interprétations à la guitare de chansons populaires, celles des Beatles, notamment ;

    Gene Autry : Back in the Saddle Again, Be Honest With Me, Tears on my Pillow ;

    Glen Campbell : By the Time I Get to Phœnix, Galveston, Rhinestone Cowboy, Whichita Lineman ;

    Johnny Cash : Ring of Fire, Man in Black , I Walk the Line ;

    Patsy Cline : Crazy (1961-Il faut voir C.R.A.Z.Y. le film québécois de

    Jean-Marc Vallée (2005), pour entendre Crazy… et bien plus !) ;

    John Denver : Take Me Home Country Roads, Sunshine on My Shoulder, Rocky Mountain High ;

    Bobby Gentry : Ode to Billy Jœ, Mississipi Delta ;

    The Jordanaires : In Them Old Cottonfields Back Home, Unloved, Unwanted ; ce groupe, qui chantait « mal aimé » et « non désiré », a fait les « back up vocals » d’Elvis Presley – et de beaucoup d’autres artistes connus, en passant – dans plus d’une centaine de ses chansons et ce, sur une période de 15 ans ;

    Willie Nelson : Always on My Mind, Georgia on My Mind, To all the Girls I’ve Loved Before ;

    Roy Orbison : Only the Lonely, Pretty Woman, California Blue, Blue Angel, Blue Bayou, Crying (seul en 1961 ; en 1987, en duo avec KD Lang), All I have to do is dream ; You got It, Handle With Care (Lui avec les Travelling Wilburys : George Harrison, Bob Dylan, Jeff Lynne et Tom Petty ;

    Buck Owens : Act Naturally, I’ve Got the Tiger by the Tail ;

    Patti Page : How Much Is That Doggie in the Window, Tennessee Waltz, Fly Me to the Moon ;

    Dolly Parton : Jolene, I Will Always Love You (eh oui, c’est sa chanson à elle !), Islands In the Stream ;

    Kenny Rogers : Lady, Lucille, The Gambler ;

    Hank Snow : The Golden Rocket, I’m Moving On ;

    Lucille Starr : Crazy Arms, Colinda, Send Me No Roses, French Song;

    Hank Williams : Lovesick Blues, Jambalaya ;

    Tammy Wynette : Stand by Your Man, D.I.V.O.R.C.E. ;

    Et beaucoup d’autres artistes encore…

    Au Québec, on pouvait entendre les artistes country-western suivants :

    Le Soldat Lebrun : L’adieu du soldat, (voir l’info de la page 115) ;

    Oscar Thiffault : Le rapide blanc (vendu à plus de 500 000 exemplaires !), La cabane à sucre ;

    Marcel Martel : Un coin de ciel, J’entends le train, Cœur de maman, À qui l’p’tit cœur après neuf heures ;

    Sa fille Renée Martel : Un amour qui ne veut pas mourir, Cowgirl dorée, Nous on aime la musique country ;

    Lévis Bouliane : Quand le soleil dit bonjour aux montagnes ;

    Paul

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