Rolling Stone France

BOB MARLEY SOUL REVOLUTION

Gamin, dans les rues de Trenchtown, ce quartier ghetto de la capitale, le petit métis qu’est Bob, trop blanc pour être Noir et trop noir pour être accepté par la communauté blanche, va souffrir de nombreux préjugés raciaux.

Kingston, mi-février 1962. Juste après avoir fêté ses 17 ans avec son pote Bunny Wailer en sifflant quelques bières Red Stripe, Robert Nesta Marley réalise son rêve: pouvoir enregistrer ses chansons en studio et les voir ensuite gravées sur un disque vinyle. Il déboule alors chez Beverley’s, un magasin de disques et un label du même nom sur Orange Street, sur la recommandation d’un gamin de tout juste 14 ans que Leslie Kong, le propriétaire de Beverley’s, vient de signer: James Chambers pour la ville, devenu Jimmy Cliff pour la scène. “Judge Not” et Do You Still Love Me?”, les premiers morceaux signés Robert Marley, sont mis en boîte aux Federal studios de Leslie Kong en compagnie des Beverley’s All Stars, le groupe maison. Même si le 45-tours, pour lequel il n’a touché que 20 dollars et où est imprimé “Morley” au lieu de Marley, ne se vend pas vraiment, voire pas du tout, le tout jeune Bob de Nine Miles, fils de Norval Marley et de Cedella Malcolm, rayonne: il a mis un pied dans le monde de la musique.

La sortie, en ce mois de février 2024, de , le biopic consacré à la superstar du reggae et consciencieusement joué par Kingsley Ben-Adir, coïncide – outre avec la date anniversaire de sa naissance, le 6 février 1945 – avec ce tout premier enregistrement de son incroyable carrière. À l’époque, il y a soixante-deux ans, Robert Nesta Marley est en apprentissage dans un atelier de soudure près du stade de cricket de Sabina Park, au sud de Kingston. Faute de lunettes protectrices, il reçoit un copeau” chante-t-il, d’une voix encore adolescente, dans ce morceau directement inspiré d’un passage de la Bible. La pauvreté, la violence, l’injustice, le jeune Marley connaît tout ça par cœur. Depuis qu’il a quitté Nine Miles, le hameau de sa naissance en plein cœur de la paroisse rurale de Saint Ann, pour retrouver sa mère à Kingston, il s’y est retrouvé plongé au quotidien. Après avoir tenté de vivre avec son beau-père, Taddy Livingston, le père de Neville “Bunny Wailer” Livingston – une cohabitation impossible –, Bob se retrouve à la rue dans ce Trenchtown sale, dangereux, peuplé de ceux qu’on appelle “”, “ceux qui souffrent”. Cette année-là, l’île obtient aussi son indépendance, qui se traduit aussitôt par le départ des Anglais et de leur puissance économique. La Jamaïque s’enfonce dans la crise, et les temps vont devenir de plus en plus durs. Cela, Bob Nesta Marley l’a bien compris et toute son œuvre en sera le témoin, distillant cette prise de conscience au travers de très nombreux morceaux accusateurs et militants.

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