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Vols de vies
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Livre électronique467 pages6 heures

Vols de vies

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À propos de ce livre électronique

Nos choix, sans l’ombre d’un doute, influencent le parcours de notre vie de façon positive ou, dans certains cas, viennent nous hanter. Au-delà des conséquences de nos décisions, d’autres personnages ont des desseins différents pour nous et par leurs actions inqualifiables viennent perturber notre existence. Parfois, les effets sont exponentiels dans le devenir d’une famille.
Billy Side, le maire de Rivière-Santé, son épouse Omalie Sung et leurs enfants Alice et Loïc forment une famille enviée. Ils sont beaux, intelligents et en santé. Demeurant dans la ville festive par excellence au Manitoba où la criminalité est inexistante sauf, curieusement, pour le maire et sa famille, ceux-ci vivront des moments traumatisants. Qui se cache derrière tous les ennuis et les incidents graves qui leur tombent dessus sans que la police ne puisse mettre le grappin sur les malfrats ? Ce roman à suspense vous emmènera aux quatre coins du Canada et même au Tibet ! Vols de vies est au pluriel et vous comprendrez pourquoi lorsque vous aurez lu le livre !
LangueFrançais
Date de sortie29 sept. 2021
ISBN9782897553050
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    Aperçu du livre

    Vols de vies - Réjean Côté

    Chapitre 1

    Le cellulaire de Billy Side, le maire de Rivière-Santé, était posé sur la table de cuisine. Autour de la table, Omalie son épouse, le sergent Bourque ainsi que Billy attendaient l’appel. Ils étaient assis là depuis maintenant deux heures, alors qu’une équipe de la GRC s’affairait dans le voisinage à la recherche d’une piste quelconque, du moindre indice, s’il se pouvait. Incapables de manger, ils ne comptaient plus le nombre de cafés ingurgités. Soudainement, un air de jazz fit chanter le téléphone. Billy regarda l’appareil en craignant de répondre et d’entendre la suite. La tension était à son comble. Il activa le haut-parleur afin que tous puissent écouter.

    La voix hésitante et empreinte de terreur, Billy se racla la gorge et répondit :

    — Oui !

    — Bonjour cher Billy et chère Omalie, je ne vous demanderai pas si vous allez bien en ce moment, car je n’ai pas de temps à perdre et que je connais la réponse, ah, ah, ah ! Nous avons vos charmants enfants avec nous et ils s’ennuient beaucoup de vous. D’ailleurs, ce sont eux que vous entendez chialer en ce moment. Comme nous sommes les maîtres du jeu, nous allons jouer à « Qui préfères-tu » ? Dans une heure précisément, nous allons rappeler et vous devrez nous indiquer lequel des deux vous voulez récupérer, car c’est ce qui est amusant dans ce jeu : vous n’allez récupérer qu’un seul des deux. Ah j’allais oublier… si vous n’êtes pas capables d’en nommer un, nous garderons les deux ! Il vous reste 59 minutes, beau petit jeu, ah, ah, ah, ah, ah, a… Et la ligne coupa.

    Omalie en état de choc et ne se contenant plus s’adressa au sergent Bourque :

    SERGENT BOURQUE, TOI ET TA GANG D’ENQUÊTEURS FAITES VOTRE TRAVAIL ET TROUVEZ NOS ENFANTS !

    Le sergent Bourque, malgré son expérience de gendarme, était très affecté par ce double enlèvement ; il était un ami de la famille et même plus, il était le parrain du cadet, Loïc. Il ne pouvait rien répliquer, il ne trouvait rien à dire pour apaiser la colère et la détresse d’Omalie. Billy, tout aussi dévasté, s’adressa à Omalie :

    — Chérie, le sergent ne peut rien pour l’instant. Nous n’avons pas de détails sur les kidnappeurs. Il nous reste moins d’une heure pour décider qui nous allons...

    Billy fut incapable de terminer sa phrase, tellement attristé, découragé et impuissant face à cette situation dévastatrice.

    Chapitre 2

    Le 15 juillet 2024 soit quatorze mois avant l’enlèvement des enfants Side, avait lieu une journée plutôt spéciale à Rivière-Santé. Cette petite municipalité située au sud du Manitoba et connue jadis sous le nom de Gretna, accueillait tel que promis par son maire lors de son élection, le chanteur Raphaël Roberge pour un spectacle. Sous un soleil de plomb, une foule importante était rassemblée devant la scène extérieure du Centre de villégiature. Résidents, touristes, tout confondus, tout près de 3 000 personnes étaient là à patienter, attendant que le nouveau maire s’adresse à eux.

    Fébrile, au centre de la scène, le maire Billy Side introduisit son demi-frère.

    — Aujourd’hui, c’est un grand jour pour la communauté de Rivière-Santé. Non seulement nous avons l’immense honneur de recevoir une vedette internationale, mais c’est également un nouveau départ pour la municipalité. En effet, depuis peu, nous avons repris possession à 100% du Centre de villégiature !

    La foule applaudit avec vigueur cette nouvelle et le maire poursuivit.

    — Nous lançons à cet instant précis un concours auprès de tous les résidents de Rivière-Santé afin de donner un nom à ce merveilleux site enchanteur.

    — Pour célébrer ce nouveau départ, laissez-moi vous présenter mon demi-frère Raphaël. J’ai manqué notre premier rendez-vous lors de sa venue ici même à Rivière-Santé il y a un peu plus de deux ans alors que je créchais dans un bois pas très loin d’ici. Je suis extrêmement heureux d’avoir renoué avec lui et c’est un grand plaisir de le recevoir à nouveau. Sans plus tarder, voici le grand Raphaël Roberge !

    Raphaël s’amena au centre de la scène en saluant la foule et entama le spectacle avec sa chanson Crawling.  La représentation prit une tournure magique au moment où il entreprit de chanter son plus grand succès Wish I ! En entamant cette chanson, tous les jeunes qui avaient fait le spectacle avec lui deux ans plus tôt s’amenèrent sur scène afin de la chanter avec lui et ce, à sa grande surprise. Il fut touché sincèrement et dut s’essuyer les yeux afin de poursuivre.

    Après l’évènement, Raphaël laissa son band festoyer au El Salvador et il se dirigea à la demeure de Camilla Fuentes présentement incarcérée. Pendant qu’elle purgeait sa peine de cinq ans, Billy et sa famille logeaient et prenaient bien soin des enfants de Camilla, Luis et Ramon. Raphaël était le parrain d’Alice et inutile de dire qu’elle était sa plus grande admiratrice. Raphaël avait apporté une tonne de cadeaux pour les enfants de la maison et un pyjama couleur neutre pour le bébé d’Omalie et Billy que la cigogne larguerait dans les prochains mois. Quoique très heureux de se retrouver en famille, il existait un vide entre les deux demi-frères. Raphaël ne savait toujours pas pourquoi son frère avait quitté le Québec sans donner les raisons de son départ il y a plusieurs années déjà. Non seulement il avait quitté son patelin mais il avait aussi changé nom et prénom afin que personne ne puisse le retracer. Le vide existerait toujours tant et aussi longtemps qu’aucune explication ne serait divulguée. Comme les deux frères n’étaient jamais seul à seul pour en discuter, le mystère demeurait tout entier. Le lendemain du spectacle, Raphaël quitta Rivière-Santé heureux d’avoir renoué avec sa famille manitobaine, mais quelque peu déçu de repartir sans savoir les raisons de la « désertion familiale » de son demi-frère Billy.

    Au lendemain de la fête, la vie reprit son cours habituel à Rivière-Santé, sauf que la soirée organisée la veille avait laissé un doux parfum communautaire de bien-être. L’air est meilleur ici que partout ailleurs se disait Billy en reconduisant son demi-frère pour rejoindre ses musiciens.

    Quelque peu attristé, le band quittait le Centre de villégiature en distribuant mains et câlins aux employés.

    — Il faudra rester plus longtemps la prochaine fois, dit le batteur à Raphaël.

    Après avoir regardé le groupe quitter, Billy se dirigea vers l’hôtel de ville. Ce soir, aurait lieu la toute première assemblée générale tenue dans l’école secondaire de Rivière-Santé où étaient attendues quelques centaines de résidents. Le maire attendait ses conseillers afin de refaire le tour des différents points de la réunion. Cette assemblée ne serait pas une vulgaire promenade dans le parc et les membres du conseil en étaient conscients. Ce serait la première assemblée générale depuis les deux ans de tutelle et de la première année d’administration de ce nouveau conseil.

    La réunion allait débuter dans quelques minutes et Billy, malgré un air serein, était extrêmement nerveux. Comment réagiraient les citoyens aux nouvelles plus qu’ordinaires ? Omalie, qui gérait la logistique, irait chercher et escorter les membres du conseil pour se rendre dans le gymnase. À l’heure prévue, elle entra dans la salle à diner des professeurs de l’école. Elle pressentait son Billy très nerveux et s’avança vers lui, fit semblant de replacer correctement son nœud de cravate et termina le tout en s’approchant et lui chuchotant à l’oreille qu’il était le meilleur et le plus beau. Ce petit geste émut Billy et il se dit que ceci deviendrait désormais un rituel avant chaque assemblée générale.   

    Le maire constata que la salle était à pleine capacité et plusieurs personnes se tenaient debout à l’arrière. Son stress augmentait : comment devait-il interpréter ce constat ? Besoin d’information, curiosité ou insatisfaction ? Peu importe, il se devait d’être à la hauteur. Il se racla la gorge, prit une gorgée d’eau d’une main tremblante, telle une feuille de papier devant un ventilateur qui roule à fond de train, et prit la parole :

    — Bonjour chers concitoyens de Rivière-Santé. Nous sommes heureux de vous rencontrer pour la première fois en assemblée générale afin de vous transmettre des informations et de faire avec vous les mises au point qui s’imposent. Où en est votre municipalité après un an de gouvernance de vos élus, précédé de deux années de tutelle sous la gouvernance de la province du Manitoba ?

    — Comme vous le savez pour la plupart, la mise en tutelle fut le résultat de la gigantesque enquête menée par le sergent Bourque de la GRC et de son équipe. Cette enquête a dévoilé au monde entier les scandaleuses opérations illégales et meurtrières du maire précédent et de son conseil. Vous avez vécu tout au long de ces deux années gérées par l’État sans oreilles attentives à vos besoins. Au tout début de la tutelle, le gouvernement provincial a pris possession du Centre de villégiature qui appartenait alors à la ChiliNewLife Corporation. En raison des opérations illégales opérées par ce groupe : prostitution, ventes de boissons hallucinogènes et homicides, le gouvernement a pris possession du site lorsque les actionnaires ont été incarcérés. Le gouvernement avait alors voté une motion d’urgence afin de maintenir en opération les centres de santé qui s’y logent et d’en tirer des revenus appréciables. Comme vous le savez, de très nombreux touristes à travers le monde viennent ici chercher les meilleurs soins de santé : massages, méditation, exercices, danses, etc. Les retombées indirectes pour la province ne sont pas négligeables, loin de là. Rivière-Santé est la principale source touristique du Manitoba depuis plusieurs années et sa popularité ne cesse de croître. Cette prise en charge par le gouvernement provincial a fait fondre les recettes de la municipalité considérablement. Comme si ce n’était pas assez, d’autres frais se sont ajoutés depuis que la municipalité est desservie par la Gendarmerie Royale du Canada (GRC) et non plus par la force locale instaurée par l’ancien maire Simpson. Depuis ce temps, tous les policiers locaux ont été démis de leur fonction tout simplement parce qu’ils n’avaient aucune certification légale de l’État pour agir à titre de gendarmes. Ces deux premiers facteurs susmentionnés ont fait des dommages considérables sur les finances de la municipalité.

    — Un autre facteur, socio-économique celui-ci, les nombreux résidents expatriés au Chili. Vous avez perdu des amis, des voisins qui, en raison de papiers non conformes aux yeux du gouvernement canadien, ont dû quitter notre pays. Après enquête, la GRC s’est rendu compte que tous les travailleurs qui œuvraient à l’usine de traitement de l’eau étaient recherchés par les autorités chiliennes. Alors, ces gens ont dû être redirigés vers les autorités policières du Chili.  En raison de ce que je viens de vous dire, le ministère de l’Immigration a ouvert un bureau sur la rue Principale et vérifie, depuis, le droit de résidence au Canada des citoyens de notre municipalité. Sur ce point, je vous avoue que le nombre de maisons maintenant vacantes me fait craindre le pire pour notre municipalité et avant de se faire citer en tant que ville fantôme, votre conseil va travailler d’arrache-pied à regarnir ces maisons vides et le plus tôt sera le mieux. 

    Cette première assemblée était d’une très grande importance. Billy devait rassurer les citoyens et le début de son allocution n’avait rien fait pour réjouir et sécuriser les gens. Il sentait la tension et devait y remédier.

    — Les nouvelles ne sont pas toutes mauvaises pour autant. Ma première promesse lors de notre élection a été tenue : la présentation d’un spectacle du chanteur Raphael Roberge et son band. Promesse tenue et sachez qu’en plus, ils nous ont fait cadeau de leur spectacle d’hier; aucun frais pour la municipalité.

    Des applaudissements se firent entendre, appuyés de cris de joie. Billy se sentit soulagé de cette démonstration sympathique des citoyens. 

    — Cette soirée mémorable que nous avons vécue hier, représente le point de départ d’une nouvelle ère. C’est dans cet état festif que nous voulons vivre le plus souvent possible à Rivière-Santé. Comme je vous l’ai dit hier, la municipalité a repris possession de son Centre de villégiature. D’ailleurs, on veut lui trouver un nom et les détails du concours apparaitront sur notre page Web et notre page Facebook sous peu. Ce ne fut pas facile de reprendre possession du Centre. Il a fallu jouer du coude avec le premier ministre Pruneau. Il ne voulait pas vraiment nous remettre ce joyau, cette vache à lait. Je lui ai dit qu’il nous devait des taxes et que si la province ne voulait pas nous remettre le Centre, il devrait payer pour les infrastructures érigées et payées par Rivière-Santé. Jusque-là, il ne bronchait pas. Après lui avoir montré les factures d’infrastructures et des taxes municipales à payer, futures et rétroactives, il a commencé à se gratter le menton. Et comme il hésitait encore, je lui ai rappelé son discours inaugural en Chambre à l’effet que les municipalités devaient se prendre en main et ne pas s’attendre à ce que l’État soit toujours derrière elles pour financer leurs projets, des sommes dont la province ne disposait pas de toute façon. Il m’a regardé avec son sourire légendaire en me disant « c’est exactement cela, vous avez tout compris ». Dès lors, il s’est engagé à faire voter une motion pour nous remettre ce que l’État avait pris de force. Bref, voilà pour les bonnes nouvelles. Hormis la gestion efficace et judicieuse de la municipalité, quels sont nos prochains combats ? 

    — La légalisation de la vente de la Coucouna et l’offre des services sexuels dans nos centres de santé. Monsieur Spooner va dans quelques minutes vous parler de nos finances et vous comprendrez alors la nécessité de reprendre ces activités.

    Billy remarqua l’outrance de ses propos dans la salle : boisson hallucinogène et services sexuels. Il aurait pu éviter d’en parler à ses concitoyens, mais il avait promis d’être transparent et c’est ce qu’il faisait lors de cette assemblée. Est-ce que trop de transparence pouvait nuire et rendre les résidents encore plus méfiants envers ses politiciens ? Il se posait la question en cette soirée qui n’était pas terminée, ne sachant pas comment elle finirait : dans la paix ou dans la cohue ? Il céda la parole au trésorier Gerald Spooner, le grand manitou des finances. Celui-ci, début soixantaine, chevelure inexistante, grand et maigre, était un homme de peu de mots ce que Billy appréciait grandement.  Il dressa donc un bilan qui fit état de la précarité des finances de la municipalité pour la principale raison que pour opérer les centres de santé selon les normes gouvernementales, les dépenses de fonctionnement avaient doublé. Les revenus nets avaient donc chuté de 60% lors des deux dernières années opérées par le provincial. La bonne nouvelle qu’il fallait garder en tête, c’est que le nombre de visiteurs augmentait chaque année. Le manque à gagner pouvait aussi s’expliquer du fait qu’ils ne pouvaient plus vendre de Coucouna et que le réseau de services spéciaux, Spooner n’étant pas à l’aise de les nommer « services sexuels », avait été interrompu par la GRC lorsque la municipalité avait été mise en tutelle. La municipalité avait encore des réserves mais plus pour longtemps et aucun projet d’envergure ne pouvait être envisagé dans les conditions actuelles.

    Avant de conclure l’assemblée, Billy affirma aux résidents présents qu’il devait rencontrer sous peu le ministre responsable du ministère de la Santé du Canada afin de faire approuver la boisson Coucouna. Le cannabis étant légal depuis octobre 2018 au Canada, pourquoi ne pas légaliser la Coucouna ? Si cela devait se produire, la vente libre de cette boisson pourrait rapporter énormément à la municipalité qui possédait  déjà une bonne recette toute prête à être consommée ! Après avoir répondu à quelques questions, l’assemblée prit fin sur une bonne note.

    Chapitre 3

    Georgie, la cousine et amie de cœur de Harry Simpson, ancien maire de Rivière-Santé et résident permanent d’un centre correctionnel, s’était montrée volontaire afin de suivre les activités du sud du Manitoba dont Rivière-Santé fait partie, pour le compte de la Gazette de Teouville. Paul Arseno, directeur de la Gazette de Teouville, était ravi de son volontariat. Depuis qu’elle y avait été affectée, elle se faisait un plaisir de fournir les dernières nouvelles sur toutes les activités de Rivière-Santé à Harry Simpson et, parfois même, avant les lecteurs du journal. C’est ainsi qu’elle annonça au maire déchu que les centres de santé étaient maintenant opérés par la municipalité et de ce fait, par Billy Side.

    Barry Trump, ancien président et patron de Billy Side lorsqu’il était vice-président à Flylonger, étaient assis face à Harry Simpson, dans la cafétéria du Centre correctionnel de Milner Ridge, à 90 km au nord-est de Winnipeg. L’information de Georgie fut plutôt difficile à avaler pour les deux détenus. Après avoir perdu leur liberté, ils ont vu l’État leur retirer la garde de leur bébé (Centre de villégiature) et, comble de malchance, c’était Billy Side leur ennemi juré qui pouvait désormais jouir de ce site magnifique.

    Malgré le fait que Simpson y était pour le reste de ses jours et Trump pour encore 22 ans, ces deux crapules avaient encore des amis fidèles à l’extérieur des murs pouvant leur rendre des services. Les deux détenus filaient un mauvais coton depuis cette nouvelle et se promirent mutuellement de faire tout en leur pouvoir pour anéantir Billy Side. Ils lui devaient bien cela : après tout, c’est lui qui avait mis fin à leur vie de pacha. Avoir un compte de banque bien garni quand tu te trouves en dedans ne servait plus à rien… sauf à rendre des comptes !

    Trump et Simpson élaborèrent quelques plans, mais la question était comment les réaliser sans que personne ne puisse leur attribuer la faute ? Avec toute la ruse qu’on lui connaissait, Simpson arriverait à ses fins, 100% garanti ! D’une part, créer un réseau extérieur fiable pour recevoir des informations et d’autre part, trouver une personne de confiance à l’intérieur pour faire passer les commandes. Idéalement, il s’agirait d’une personne qui puisse circuler librement à l’interne comme à l’externe. Trump discutait souvent avec l’un des gardiens et, lors d’une discussion avec celui-ci, apprit que sa fille s’était vu refuser une bourse pour un projet ambitieux qu’elle caressait. Ingénieure en forage en quête d’une maîtrise, elle voulait élaborer des stratégies de détection d’effondrement précoce avec des correspondants chiliens. L’endroit ciblé était nul autre que la mine de Copiapo au Chili, cette même mine qui en 2010 fit 33 mineurs prisonniers durant 69 jours à plus de 700 mètres de profondeur. Ce projet qu’elle caressait devait faire partie de sa thèse et nécessitait un appui financier important.

    — Le voilà notre homme, se dit Simpson !

    Chapitre 4

    Billy Side attendait patiemment que la secrétaire du ministre de la Santé à Ottawa lui fasse signe afin de le rencontrer dans son bureau. Billy crut avec justesse que le cannabis étant légal depuis 2018, une porte s’ouvrirait facilement pour légaliser une boisson hallucinogène comme la Coucouna. Il fallait seulement convaincre le ministre que la consommation de la Coucouna n’était pas dommageable pour la santé.  Finalement, la secrétaire lui fit signe de le suivre et ouvrit la porte. Billy entra et serra la main du ministre Anthony. La poigne fut ferme de part et d’autre, laissant aucun doute sur l’intention de ne pas s’en laisser imposer d’un côté comme de l’autre. Pendant que Billy remerciait le ministre de lui accorder cette entrevue, celui-ci l’interrompit. D’un air solennel et qui présageait un sentiment de négation :

    — J’ai regardé votre dossier, monsieur le maire, et bien qu’il soit bien monté, je dois avouer que de prime abord nous ne sommes pas très chauds à l’idée d’ouvrir ce robinet, dit-il sourire en coin, se croyant possiblement très drôle !

    Billy, fort insulté de se faire dire « non » dans les 30 premières secondes de leur rencontre alors qu’il n’avait même pas commencé son exposé, rétorqua au ministre :

    — Je comprends que vous ayez plusieurs chats à fouetter, Monsieur le ministre, mais peut-être n’avez-vous pas consulté le chapitre consacré au traitement de l’eau avant d’y insérer les épices liquéfiées ! Le ministre vint pour parler et Billy continua :

    — L’eau utilisée pour produire la Coucouna est de bien meilleure qualité que celle que vous avez sur votre bureau. Cette boisson a été testée pendant dix ans et personne n’a subi de malaise en la consommant et ce que vous ne savez probablement pas, elle contient beaucoup moins de coliformes que celle d’Ottawa. Et preuve à l’appui dans le rapport fourni par une firme externe, cette eau est moins dommageable pour la santé que n’importe laquelle des boissons gazeuses ou encore des boissons énergétiques sur le marché. Au contraire, elle soulage les souffrances autant psychologiques que physiques ! Alors, je ne vois pas où est le problème de votre robinet !

    Le ministre Anthony, n’appréciant pas l’affront et le ton un peu agressif de Billy, le remercia et lui dit qu’il aurait sous peu une réponse à sa demande. Le ministre interpella sa secrétaire afin de reconduire Billy hors de son bureau. Fin de la rencontre et sans poignée de main cette fois !

    Arrivé tard à la maison le lendemain, Billy discutait avec Omalie :

    — Je crois que notre projet de Coucouna est à l’eau, ceci dit sans jeu de mots !

    — Pourquoi dis-tu cela, Billy ?

    — Disons que le ministre était contre l’idée dès le départ et que j’ai dû faire un très bref exposé malgré moi et qu’il m’a éconduit de son bureau très rapidement.

    — Va-t-il au moins te donner une réponse sous peu ?

    — C’est ce qu’il a dit, mais comme ce ne fut pas très chaleureux, je crois que nous devrons trouver un autre plan.

    — Devrait-on l’inviter dans nos centres de santé et lui faire goûter à la Coucouna, dit-elle, sourire en coin ? Et Billy de rétorquer dans le même style de blague :

    — Et lui offrir le service à la carte en usage jadis, faisant allusion aux services sexuels offerts dans les centres avant que le gouvernement manitobain n’intervienne.

    — Pauvre Billy, lui dit Omalie, en l’entourant de ses bras et le serrant fort contre elle. Tout en maintenant sa position, elle lui dit :

    — On ne s’arrêtera pas là, tu le sais. Je pense qu’en plus nous devrons exercer des pressions pour faire légaliser la prostitution tout comme à Amsterdam et probablement d’autres villes à travers le monde. Ce sont de bons revenus pour nous ainsi que pour le gouvernement. Je m’y mets dès demain, Billy.

    Celui-ci se recula légèrement tout en maintenant Omalie tout contre lui, la regarda avec admiration et désespoir en même temps, mais au fond de lui, il savait que cette battante ne reculerait devant aucun défi !

    Pendant ce temps, à la prison de Milner Ridge, Barry Trump et Harry Simpson s’entretenaient avec le gardien Trevor Bing.

    — Trevor, nous avons quelque chose à vous proposer. Nous avons de l’argent dans une fondation qui pourrait servir à votre fille. De plus, nous avons beaucoup de contacts au Chili. L’argent n’est même pas un problème, croyez-nous.

    — Que dois-je faire pour que ma fille reçoive cette bourse ?

    — Pas grand-chose, vous n’aurez qu’à nous rendre de petits services, vous et votre fille. Si vous êtes d’accord, je n’ai qu’un appel à faire et un chèque sera fait au nom de votre fille. Par contre, pour des raisons stratégiques et organisationnelles, les chèques ne peuvent jamais dépasser 5000 $ à la fois. Quel est le nom de votre fille pour son premier versement ? Après une légère hésitation, Trevor Bing accepta et divulgua :

    — Elle s’appelle Lisa Bing.

    — J’appelle dès maintenant mon comptable. Elle pourra aller chercher son premier chèque dans 48 heures à cette adresse inscrite sur ce bout de papier.

    Trois jours plus tard, l’agent correctionnel remercia discrètement Simpson. Sa fille était très heureuse, mais elle prévoyait avoir besoin d’au moins 20 000 $ pour effectuer ses recherches au Chili.

    — Pas de problème, elle pourra en recevoir le double si elle et vous acceptez de rendre quelques services.

    Ne voulant pas déplaire à sa fille avec qui il venait récemment de renouer, il sentit sa pression monter. Dans quoi s’était-il mis les pieds ? Et trop tard pour reculer ! Simpson, jouissif, lui remit un bout de papier qu’il devrait lire à l’extérieur du centre carcéral et exécuter la consigne à la perfection dans les délais prescrits.

    Chapitre 5

    Dans leur cour arrière, Omalie, enceinte de plusieurs mois, regardait Alice s’amuser et à l’occasion tenter de faire rire le petit Loïc couché dans sa poussette. Avec ce beau temps doux et une brise légère, rien de plus agréable que de passer du bon temps à l’extérieur ! La voisine et gardienne occasionnelle, madame Hernandez, la même qui gardait les enfants de Camilla jadis, sortit à l’extérieur avec un homme. Omalie fut surprise, car madame Hernandez ne recevait jamais d’invité. Tout comme elle, le prétendant devait être dans la jeune soixantaine. Omalie, quoique très curieuse de nature, fit des efforts pour ne pas regarder dans leur direction, ni écouter leur conversation. Après tout, elle était bien heureuse pour madame Hernandez si elle avait maintenant un petit copain.

    Omalie débuta son travail sur le dossier « Coucouna ». Il y avait bien des boissons hallucinogènes connues dans le monde dont l’ayahuasca, une boisson hallucinogène originaire d’Amazonie. Omalie en avait pris connaissance il y a quelques années lorsqu’elle était journaliste pour un journal de Mexico. Ce breuvage psychédélique comptait des milliers d’adeptes aux États-Unis depuis 2010 environ. Toutefois, il s’agissait d’une drogue dure qui pouvait s’avérer dangereuse si prise en trop grande quantité. Elle découvrit avec grand étonnement que cette boisson était maintenant permise par Santé Canada depuis 2017 à la condition qu’elle soit consommée dans un cadre religieux reconnu par l’État.

    Au souper, Omalie fit part de ses découvertes à Billy. Cette nouvelle raviva l’espoir qu’il semblait avoir perdu. Il allait donc mandater un spécialiste pour faire un parallèle entre cette boisson et la Coucouna. Il sortit l’album des finissants de son université afin de prendre contact avec une personne des cohortes de biologie et de chimie. Tiens donc, une connaissance, la docteure Hill !

    Le soleil laissait ses rayons réchauffer et illuminer la ville. Un camion s’arrêta devant la résidence de madame Hernandez. Deux hommes en sortirent un réfrigérateur, quelques minutes plus tard, une cuisinière et une méga télévision. Cette livraison étonnait Omalie, pas qu’elle fut jalouse mais parce que madame Hernandez vivait très modestement, sans jamais faire d’excès.

    Elle sortit dehors et aperçut sa voisine sur son balcon avant. Au premier abord, elle semblait mal à l’aise. Omalie lui dit tout bonnement :

    — Mon dieu, Madame Hernandez, avez-vous gagné à la loterie ?

    Madame Hernandez avoua qu’elle en avait assez de vivre avec de vieux appareils et qu’elle devait bien se gâter de temps à autre ! Voulant éviter de prolonger la discussion sur ses achats, elle dit :

    — Et vous Omalie, une femme d’action comme vous, que faites-vous de vos journées ? Omalie, trop contente de travailler sur des dossiers importants, se laissa emporter :

    — Billy est revenu d’Ottawa avec le sentiment d’avoir échoué dans sa tentative de convaincre le ministre de la Santé de faire légaliser la Coucouna. Son dossier risque donc d’être tassé et relégué aux oubliettes par Santé Canada. Alors, je m’y mets activement et éventuellement sur un autre... ce qui intrigua madame Hernandez :

    — Vous êtes tellement douée, Omalie, que vous y arriverez je n’en doute pas le moins du monde. Mais de quel autre dossier parlez-vous si je ne suis pas trop indiscrète ? Omalie trouva bien surprenant que sa voisine soit aussi loquace aujourd’hui, elle qui d’ordinaire était si effacée.

    — Je me laisse emporter si facilement quand je parle de recherches, excusez-moi, je dois retourner à l’intérieur, Alice et Loïc vont bientôt se réveiller. Bonne journée et félicitations pour vos appareils neufs, laissant en plan madame Hernandez sur ces gentils propos !

    Une fois à l’intérieur de la maison, elle s’en voulait d’avoir parlé d’un dossier confidentiel. Même si madame Hernandez ne semblait pas avoir trop d’amis et qu’elle était d’une nature plutôt discrète, Omalie conclut qu’elle devait faire attention à ce qu’elle disait surtout sur les affaires de la municipalité.

    Le lendemain, un samedi, donc jour de congé pour Billy et les enfants de Camilla, tout le monde attendait que madame Hernandez arrive afin de veiller sur Alice et Loïc. Dès son arrivée, Billy, Omalie, Ramon et Luis quittèrent pour se rendre au centre carcéral afin de voir leur amie Camilla Fuentes, la maman de Ramon et de Luis. 

    Camilla savait qu’elle aurait de la visite aujourd’hui et tentait de camoufler les ecchymoses du côté droit de sa figure. C’est ce qui arrivait lorsqu’une personne des forces de l’ordre se retrouvait en dedans, crut-elle. Il y avait des petits règlements de compte. Camilla ne savait toutefois pas pourquoi trois femmes s’en étaient prises à elle lorsqu’elle était sortie dans la cour de l’établissement. Elle ne les connaissait pas et ne les avait jamais vues auparavant. Pourquoi aujourd’hui, alors qu’elle recevait des visiteurs ? Décidément, il y avait du drôle de monde en prison.

    C’était l’heure des rencontres et tout le monde fut attristé en voyant le visage enflé et meurtri de Camilla. Les enfants s’essuyèrent les yeux et Omalie s’adressa à Camilla :

    — Pour l’amour Camilla, qui t’a agressée ?

    — Ah ! ce n’est rien, de petits incidents et tu devrais voir la figure de l’autre, dit-elle en souriant !

    — Je sais que tu sais te battre, ma belle, en se référant aux deux bagarres qu’elles ont eues il y a quelques années, mais je n’en resterai pas là et vais ordonner à notre avocat de faire un suivi afin que tu puisses avoir une meilleure protection.

    — S’il te plaît, Omalie, n’en fais rien, car ça pourrait être bien pire. Ce qui se passe en dedans de ces murs doit y rester, sinon je risque d’y laisser ma peau. Il ne me reste plus grand temps et j’espère seulement que cet incident ne sera pas retenu contre moi. Alors, « silencio por favor » !

    Sur le chemin du retour, de son rétroviseur, Billy vit la tristesse émanant du visage des fils de Camilla. Malgré l’annonce qu’ils se régaleront d’une bonne pizza pour souper, leur mets favori, il ne put que leur arracher un petit sourire, très bref. Un autre moment pénible pour les garçons.

    Quelques visites plus tard où à chaque fois Camilla arborait des marques subies lors d’échauffourées, Omalie et Billy se demandèrent bien s’il s’agissait de coïncidence ou encore de message s’adressant à eux. Camilla jurait qu’elle n’avisait personne, mais à chaque fois elle subissait de mauvais traitements, soit la veille ou la journée même des visites.  Billy et Omalie, fort inquiets, se posaient la question : mais qui est derrière tout cela et pourquoi ?

    De retour à la maison, Billy et Omalie discutèrent des dossiers chauds. Le ministre Anthony n’avait pas encore donné de réponse à la demande de la municipalité afin de donner son aval pour que Santé Canada puisse statuer sur le dossier de la Coucouna. Omalie avait étoffé un dossier très révélateur avec l’aide d’une biochimiste renommée, en l’occurrence la docteure Hill. Louise Hill fut, entre autres, l’une des nombreuses conquêtes de Billy à l’université.  Billy lui avait demandé son aide, en souvenir de leur amitié et du bon vieux temps. La municipalité n’étant pas très en moyens, il lui avait offert en échange de ses services, un séjour à l’un des centres de santé. Connaissant la renommée du Centre de villégiature de Rivière-Santé, elle accepta avec joie, mais à la condition que Billy passe une soirée avec elle. Quoiqu’Omalie ne sauta pas de joie lorsque Billy partit retrouver la belle blonde pour souper au Centre de villégiature, elle comprenait bien que le maire devait parfois avoir des rencontres de ce genre pour le bien de la municipalité. Mais allaient-ils recevoir un massage tous les deux dans la même pièce, allaient-ils prendre un bain tourbillon ensuite, allaient-ils… ? Omalie se souvenait trop bien que Billy avait eu des rapports intimes avec Camilla le soir où ils s’étaient retrouvés tous les trois dans la cabane dans les bois.  Elle en garde encore des traces et craint que Billy ne succombe aux charmes de la Dre Hill.

    Dès le lendemain du départ de la Dre Hill vers Winnipeg, des photos sur Facebook apparurent montrant Billy et la belle blonde en train de porter un toast, marchant côte à côte en robe de chambre et finalement en train de se la couler douce dans le spa !

    Fâché, Billy croyait qu’Omalie l’avait fait surveiller, mais Omalie lui dit de ne pas détourner la conversation, en l’accusant de l’avoir trompé. Bref, une vive discussion s’ensuivit qui ne fit pas de gagnant. Après quelques jours de « guerre froide » de part et d’autre, la hache de guerre fut enterrée laissant d’autres cicatrices sur le cœur d’Omalie.

    Quelques semaines plus tard, Billy était en route pour rejoindre la Dre Hill à Ottawa

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