L' APRES-PAYS: prix Walt Whitman 2016
Par Mai Der Vang
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À propos de ce livre électronique
Point de vue de l'autrice
Je n’ai trouvé le titre L’après-pays qu’à la toute fin. J’écrivais toutes ces images, toutes ces descriptions de paysages, et tous ces endroits oubliés, ces lieux de désolation, cette terre tombée en ruine. J’explorais l’idée de l’après-pays dans ses multiples visages. L’après-pays du réfugié qui a dû quitter sa terre natale, et ce qui reste de cette terre. Il y a une sorte d’après-pays propre à ces terres qui ont vécu la guerre. Et il y a bien sûr l’après-pays de l’esprit.
Mai Der Vang
Née et élevée à Fresno, en Californie, Mai Der Vang est poète et professeure en création littéraire. Afterland (L’après-pays), son premier livre, lui a valu le prix Walt Whitman en 2016.
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Avis sur L' APRES-PAYS
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Aperçu du livre
L' APRES-PAYS - Mai Der Vang
souffrance.
Cher combattant de la Guerre secrète,
Laos, 1975
Tu as déjà senti la main américaine
exhalant un souffle
qui attisait les flammes.
Maintenant, ils ont mis fin à la guerre.
Les Américains sont rentrés chez eux.
Ton village hmong est un cimetière.
Penses-tu à ta femme, disparue,
comment les Pathet Lao l’ont traînée,
nue, en sang, en cris, par ses cheveux noirs,
au creux des ombres de la forêt.
Ou à la tête de ton fils dans un mortier
à riz, réduite en miettes de coquille.
Et à ton frère, le cadet
qui t’a suivi au combat.
Tout était scalpel le jour où ils vous ont capturés
tous les deux. Ils ont tranché
et fait bouillir sa langue,
et l’ont enfoncée dans ta gorge.
Songes-tu à l’Américain qui retourne
à sa tasse de café,
à des draps neufs
dans un lit chaud,
qui se gare dans son entrée.
Désolé pour tes montagnes,
disent-ils, voici les dernières
munitions,
quelques caisses remplies de grenades.
L’imagines-tu en train de lire
son journal du matin,
de regarder le bulletin de nouvelles de fin de soirée.
Peut-être serres-tu fort ton fusil,
sangles-tu tes élégies
dans ton dos,
comme tu le ferais d’un nouveau-né.
Tu attendras
pendant des heures, treillis en loques
les autres, abandonnés,
envahissant la piste en terre battue,
se bousculant devant la porte verrouillée
de l’avion
parmi les éparses chaussures,
chemises, blouses, valises
jetées dehors.
Quelle complainte de douleur fait éruption
quand tu vois le dernier avion
américain décoller,
loin au-dessus de Long Cheng.
Avec quelle force te prend-elle aux tripes,
cette supplication à un dieu, un ancêtre
ou un dirigeant inventé :
nos morts par milliers de votre côté
pourquoi n’autorisez-vous pas
un autre avion.
Lumière de citadelle en flammes
Jadis cette région montagneuse nous voyait naître.
Jadis
nous étions les enfants de rois.
Aujourd’hui je suis un palissandre siamois
en flammes.
Je suis la peau d’un rideau qui s’affaisse.
Je suis un os de trou de balle.
Je suis enfermée dans le four à cendres d’une forêt.
Peb yog et nous serons.
Le ciel dort, édredonné d’une milice d’étoiles.
Quelqu’un a plié
un millier de billets funéraires
d’or et d’argent en bateaux miniatures.
Peb yog
hmoob et nous serons.
Je suis affamée comme le mendiant qui a ouvert
une noix de coco et y a trouvé le cœur d’un gaur sauvage.
Hmoob et nous
serons.
L’arbre est plus ancien
que sa terre natale,
s’y écoule sa citrine annuelle
comme du miel qui s’égoutte d’un sablier.
Peb yeej ib txwm yog
hmoob.
Je creuse et creuse racines jusqu’à n’en plus trouver.
Soldat je persévère, jambes coupées,
oreille tranchée.
Je suis devenue l’air strident
dans un fût de bambou ; le souffle
d’une armée de cloches.
Nos larmes oscillant comme un pendule de sel
Tu dois emprunter la route occultée
Pour trouver ton chemin
Hors de ces boisés amers.
J’emprunterai une autre route.
Fini le temps où nos doigts berges
Se reposaient dans l’eau laiteuse.
Traçons-nous
Chacun un chemin
Jusqu’à ce que nous trouvions
La galerie empoussiérée de nos