Pourquoi Pékin nous enfume ?: La question environnementale en Chine
()
À propos de ce livre électronique
10 % de croissance valent-ils le sacrifice de 1,2 million de personnes chaque année ? Pour Pékin, la réponse est oui. Et il est utile de préciser qu’il ne s’agit ici que des morts liés à la pollution atmosphérique. La perspective est d’autant plus effrayante que l’histoire écologique du XXIe siècle s’écrira principalement à Pékin. Obsédé par son développement économique, le pouvoir chinois a déployé tout son talent pour cacher le problème. À ses propres citoyens, en réprimant sévèrement ceux qui ont voulu lancer l’alerte. Au reste du monde, en devenant une force de blocage dans toutes les instances écologiques internationales.
Pourquoi Pékin nous enfume ? est une exploration des ambiguïtés dangereuses du régime chinois sur la question environnementale. Un exercice de désenfumage qui s’attelle aussi bien à scruter les envers de ce miracle économique qu’à saisir ses transformations potentielles.
Découvrez une enquête sans complaisance sur un désastre écologique.
EXTRAIT
Le drame écologique du XXIe siècle se nouera en Chine… Malheureusement. Que l’on s’en indigne ou non, les choix délicats qui décideront de l’avenir de la planète se feront en grande partie à Pékin, au sein d’un pouvoir dont le seul horizon de réflexion pourrait se résumer à cette capacité à perpétuer son autorité sur 1,367 milliard d’individus. Il y a des perspectives plus réjouissantes. Mais le pessimisme et le déterminisme sont des guides imparfaits, l’avenir des écosystèmes, même accablé du poids des forfaitures passées, reste à écrire… au moins partiellement. Si le tableau est sombre, il n’est pas monochrome. Car aussi peu convaincante fut-elle en matière environnementale par le passé, la gouvernance chinoise se définit d’abord et avant tout par son pragmatisme, et elle pourrait trouver dans les années à venir un intérêt aussi bien pécuniaire que politique à faire évoluer son modèle vers davantage de durabilité. Elle devrait être poussée dans ce sens par une société civile chinoise qui, si elle n’a pas toujours voix au chapitre, n’est pas non plus constituée de dociles spectateurs attendant sans mot dire le point de non-retour.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Matthieu Timmerman est un spécialiste de la politique asiatique, et plus particulièrement chinoise. Docteur en sciences politiques, ancien professeur à l’Institut d’études politiques de Lille et à la Beijing Foreign Studies University (BFSU Pékin), il travaille actuellement pour l’ONG Planète Urgence en Asie du Sud-Est.
Lié à Pourquoi Pékin nous enfume ?
Livres électroniques liés
Pourquoi l'Amérique nous espionne ?: La vérité sur les services de renseignement américains Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationSherif, le grand basculement: Multilatéralisme, intelligence artificielle, Afrique Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationNotre effroyable société de décadence Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationL'écologie et la narration du pire: Récits et avenirs en tension Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationEtat de droit ou état de tous les droits ?: Peut-on encore être raisonnable ? Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLa compétition mondiale, quel esclavage !: Oserons nous l'abolir ? Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationMoi, Citoyen de la République, je... Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationCulture Générale : 35 Thématiques Captivantes à Découvrir Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationClimat, la démission permanente: De « notre maison brûle » à la Convention citoyenne pour le climat, vingt ans de politiques climatiques Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationDes subprimes au populisme: Confessions d'un libéral (presque) repenti Évaluation : 1 sur 5 étoiles1/5Les nouveaux déséquilibres du monde: Multilatéralisme, Etat du monde Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationJésus-Christ et la question sociale Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLa face cachée du monde : entre mythes et réalités Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationL'homme cet inconnu (Traduit) Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationPourquoi Soral séduit - Tome 1: Pour une véritable critique du capitalisme Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLa Restauration du capitalisme en Union soviétique Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationT comme Tchétchénie: Histoire Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLa Corruption dans Les Pays en Développement Défis et Réponses: La corruption, définie simplement comme l'abus de pouvoir à des fins privées, est un problème mo Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationDarwinisme numérique - Réédition "Paradoxale Disruption": De Clausewitz à la digitalisation des entreprises Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLes nouvelles routes de la soie: L'émergence d'un nouveau monde Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationPrêt-à-penser et post-vérité: Le suicide numérique de la démocratie Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLes partis politiques, ateliers de la démocratie: Science politique Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe Créatorat: Un nouveau paradigme pour la vie en société Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationL'avènement du Jihad en RD Congo: Un terrorisme islamiste ADF mal connu Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLes tentatives de banalisation de l'extrême droite en Europe: Sciences politiques Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationPolitique économique de la France (1900-2010) Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationÉtudes européennes Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationDe l'égalité à la pauvreté: Une socio-histoire de l'assistance en Belgique (1895-2015) Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationDynamiques de l ethnicite en Afrique: Elements pour une theorie de l Etat multinational Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLes crimes cachés des présidents: Une autre histoire de l'Amérique Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluation
Relations internationales pour vous
La face cachée du monde : entre mythes et réalités Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationAnalyse metathéorique des relations internationales et de la géopolitique Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe MONDE D'APRES: Les conséquences de la COVID-19 sur les relations internationales Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationIntroduction aux relations internationales: Cinquième édition mise à jour Évaluation : 3 sur 5 étoiles3/5Le procès de Hissein Habré: Comment les Tchadiens ont traduit un tyrant en justice Évaluation : 3 sur 5 étoiles3/5LA GUERRE PAR D'AUTRES MOYENS: Rivalités économiques et négociations commerciales au XXIe siècle Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Théorie des relations internationales : conflits et migrations: Essai de science politique Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLa construction de l'Union européenne: Dépasser les frontières pour instaurer la paix Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationNotre avenir en Danger ? Agenda 2030: La Vérité sur la Grande Réinitialisation, le WEF, l'OMS, Davos, Blackrock et l'Avenir du G20 Mondialiste Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationRelations internationales: Une perspective européenne Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLes nouvelles routes de la soie: Géopolitique d'un grand projet chinois Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe traité de Versailles et la fin de la Première Guerre mondiale: Chronique d’une paix manquée Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationQuelques citations sur les armes nucléaires: À lire pour éviter d'appuyer sur le bouton nucléaire Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationAfrica's Last Colonial Currency: The CFA Franc Story Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLes nouveaux déséquilibres du monde: Multilatéralisme, Etat du monde Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationFaut-il détester la Russie ?: Vers une nouvelle guerre froide Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationChasseurs de matières premières: Préface de Michel Collon Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLa Gauche et la Guerre: Analyse d'une capitulation idéologique Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationPoutine: L'homme que l'Occident aime haïr Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationUne Loi fondamentale pour l'Union européenne Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationUSA-CHINE: Les dessous et les dangers du conflit Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLes crimes cachés des présidents: Une autre histoire de l'Amérique Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLa diplomatie d'hier à demain: Essai politique Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5Les Guerres de Syrie: Essai historique Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLa dette odieuse de l'Afrique: Comment l'endettement et la fuite des capitaux ont saigné un continent Évaluation : 3 sur 5 étoiles3/5La religion du Capital Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluation
Avis sur Pourquoi Pékin nous enfume ?
0 notation0 avis
Aperçu du livre
Pourquoi Pékin nous enfume ? - Matthieu Timmerman
?
PROLOGUE
POINT DE
NON-RETOUR
Point de non -retour. Expression terrible qui pourrait paraître pour le moins exagérée. Mais les faits sont là et le doute n’a plus lieu d’être : la Chine est un enfer écologique. Même le pouvoir chinois a fini par admettre à demi-mot ce qu’il aura pendant longtemps nié ou minimisé. Mais ni l’évidence des faits ni la pression internationale (et encore moins un quelconque souci éthique) n’auront été à l’origine de ce revirement. Le seul intérêt pour Pékin à se saisir de la question environnementale est le risque potentiel de déstabilisation politique qu’elle pourrait provoquer. Le Parti communiste l’a très bien compris, le seuil de tolérance de la population vis -à- vis de la dégradation rapide de son environnement s’amenuise et la confiance à l’égard du gouvernement pour juguler ces problèmes est au plus bas – et devrait certainement le rester. Rien de plus logique pourrait-on dire, les autorités n’ont jamais fait preuve d’une once de responsabilité en la matière, préférant jouer avec un temps qu’elles n’avaient pas et supposer que la sainte croissance viendrait, une fois le problème surgi, encore une fois à sa rescousse.
Le drame écologique du XXIe siècle se nouera en Chine… Malheureusement. Que l’on s’en indigne ou non, les choix délicats qui décideront de l’avenir de la planète se feront en grande partie à Pékin, au sein d’un pouvoir dont le seul horizon de réflexion pourrait se résumer à cette capacité à perpétuer son autorité sur 1,367 milliard d’individus. Il y a des perspectives plus réjouissantes. Mais le pessimisme et le déterminisme sont des guides imparfaits, l’avenir des écosystèmes, même accablé du poids des forfaitures passées, reste à écrire… au moins partiellement. Si le tableau est sombre, il n’est pas monochrome. Car aussi peu convaincante fut-elle en matière environnementale par le passé, la gouvernance chinoise se définit d’abord et avant tout par son pragmatisme, et elle pourrait trouver dans les années à venir un intérêt aussi bien pécuniaire que politique à faire évoluer son modèle vers davantage de durabilité. Elle devrait être poussée dans ce sens par une société civile chinoise qui, si elle n’a pas toujours voix au chapitre, n’est pas non plus constituée de dociles spectateurs attendant sans mot dire le point de non-retour.
L’intérêt de cet opus n’est pas d’élaborer des récits d’anticipation mais plutôt d’explorer les dilemmes et les ambiguïtés de la Chine sur la question écologique. Pour ce faire, rien n’est plus évocateur que d’aborder ces problèmes à travers les smogs qui s’abattent régulièrement sur les villes chinoises. Celui de l’hiver 2013 à Pékin n’aura (à l’échelle de la Chine) pas été le pire mais assurément le plus symbolique. Il constituera notre fil rouge, celui à partir duquel nous tenterons de comprendre pourquoi Pékin nous enfume.
1. PARCE QUE
LA CHINE
SUFFOQUE
Il ne fut guère une surprise, seule sa visibilité fut une nouveauté. Car qui pouvait décemment croire que cette formidable croissance économique chinoise n’entraînait pas une destruction importante, sinon massive, de l’environnement ? Il est une chose de savoir, il en est malheureusement une autre de voir. Et le smog qui s’est abattu sur la ville de Pékin entre décembre 2012 et janvier 2013 avait tout d’une vision cauchemardesque : brouillard si dense que l’on distinguait à peine à dix mètres, passants portants des masques, hôpitaux encombrés et cet AQI (Air Quality Index ²) qui venait chaque heure asséner ces chiffres, 500, 775, 900 – alors qu’audessus de 150, l’air est jugé malsain, au -dessus de 300 dangereux et qu’au-delà de 500, on est hors indice. Vision déroutante, effrayante, anxiogène et pourtant révélatrice… sur laquelle il fallait poser un nom. On peut aisément comprendre que, face à ces images surréalistes, le mot airpocalypse ait rapidement fait l’unanimité. Le smog frappa de nouveau au mois d’octobre 2013, mais cette fois ce fut la ville d’Harbin dans le nord-est du pays qui dut fermer son aéroport et ses écoles et là encore, l’AQI dépassa très largement 500. Puis ce fut Shanghai au mois de décembre 2013 avec un taux qui n’atteignit que 480.
Quiconque a récemment vécu à Pékin n’a pas été étonné outre mesure par cet univers grisâtre, ces masques de protection et l’absence de ciel bleu, ils font désormais partie du quotidien de la capitale chinoise – auxquels il ne faudrait pas manquer d’ajouter ces picotements réguliers à la gorge et l’impression d’être un fumeur invétéré. Pékin ne prit donc pas un nouveau visage, en revanche ce fut la première fois que l’AQI affichait de tels niveaux de concentration de particules depuis son installation en 2008 ³. AQI n’est pas une initiative chinoise, c’est un chiffre fourni par un appareil de contrôle de la qualité de l’air installé sur le toit de l’ambassade américaine à Pékin – destiné, selon le discours officiel, à informer les citoyens américains présents sur place et diffusé via les réseaux sociaux. Sa spécificité est de mesurer les particules PM2,5, c’est-à-dire celles dont le diamètre est inférieur à 2,5 micromètres – celles qui sont les plus dangereuses pour la santé car pénétrant les alvéoles pulmonaires. Inutile de souligner que les autorités pékinoises n’apprécièrent que fort modérément cette publication horaire, qui sous une apparente neutralité chiffrée, appuyait là où ça fait mal. Le ministère chinois de la Protection de l’environnement a certes son propre index, l’API (Air Pollution Index) mais il ne mesure que les PM10 (particules moins dangereuses que les PM2,5) et il a la faiblesse d’être directement lié aux instances gouvernementales, peu reconnues pour être des modèles d’objectivité.
La crise de l’hiver 2012-2013 ne fut pas seulement environnementale, elle fut également révélatrice d’une crise de confiance de la population à l’égard d’un discours qui, s’il n’est plus dans le déni, s’obstine à rassurer plutôt que de jouer la transparence. Et à ce petit jeu, les autorités y ont laissé quelques plumes. Car c’est bien du côté de l’ambassade américaine que les Pékinois guettaient l’information et c’est bien l’AQI qui est devenu la référence en matière de qualité de l’air en Chine (les consulats américains à Chengdu, Guangzhou, Shanghai et Shenyang possèdent désormais leur propre index).
Une autre conséquence de l’airpocalypse, certes moins stratégiquement importante mais loin d’être négligeable, est l’image qui en a été renvoyée. En à peine six mois, le nombre de touristes à Pékin a baissé de 14,3 % par rapport au premier semestre de l’année 2012, et c’était la première fois depuis 2008 que la capitale chinoise enregistrait un tel reflux de touristes. Et que dire de ces expatriés qui hésitent à renouveler leur contrat, ou des futurs candidats à l’expatriation pour qui l’eldorado chinois a désormais un goût plus âcre. Cette image écornée à