La révolte d’un orphelin: Roman
Par Leonel Abada
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À propos de ce livre électronique
La révolte d’un orphelin conte le récit d’un jeune homme issu d’une famille misérable, qui, dès sa naissance, perd tragiquement sa mère à la suite d' un accouchement difficile ; après le décès de sa mère, son quotidien au fil des temps sera un cocktail de misères, de frustrations, de persécutions et de traumatisme. Révolté par ces conditions dégradables qui gâchent sa vie, il prend une décision très forte malgré des remparts : sortir sa famille de la précarité et, surtout, honorer ce qu’il avait appelé le sacrifice ultime qu’avait fait sa mère pour qu’il puisse naitre.
Plongez-vous dans ce roman qui retrace le parcours d'un jeune homme orphelin qui se bat pour aider sa famille et honorer le sacrifice de sa mère.
EXTRAIT
Quinze mois s’étaient écoulés jour pour jour après le décès de madame Bekolo. Monsieur Bekolo avec l’aide de la femme de son grand frère avait pu surmonter cette épreuve jusque-là. Bien évidemment, c’était très pénible pour un homme de s’occuper d’un nouveau-né. Le laver, le nourrir au biberon, ce n’était pas du tout facile. En plus, il devait chaque jour, aller au champ. Tous les travaux de la maison lui étaient destinés : la lessive, la vaisselle la cuisson sans oublier les travaux champêtres qui l’occupaient tellement. Financièrement, il ne s’était jamais heurté à un degré de difficultés aussi élevé. Pour acheter du lait au nourrisson, il était obligé de s’endetter après épuisement de ses petites économies. Les aides reçues de sa famille, de celle de sa défunte épouse et des amis et connaissances, s’étaient avérées elles aussi insuffisantes après quinze mois.
Au bout de quinze mois après la naissance de son fils, monsieur Bekolo était vraiment à bout de souffle, il n’en pouvait plus, toutes les voies s’étaient épuisées. Il ne pouvait plus acheter du lait à son fils. Il avait épuisé ses ressources financières, il s’était fortement endetté. Il voulut même contracter d’autres emprunts mais il n’avait pas trouvé de créanciers ; il était à bout ; il était au bord du précipice. Il décida donc malgré lui de soumettre l’enfant au rythme normal de la maison. L’enfant mangeait ce que lui-même il mangeait. Lorsqu’il cuisinait les tubercules, pour qu’Evina puisse les avaler aisément, il les pilait. L’alimentation vraisemblablement était pauvre, et Evina était particulièrement fragile.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Julius Leonel Abada Belinga est né en 1995 dans le centre du Cameroun. Il est titulaire d’un master en science politique obtenu à l’université de Yaoundé II Soa.
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Aperçu du livre
La révolte d’un orphelin - Leonel Abada
Chapitre I
Elle s’était réveillée de bonne heure ce jour comme d’habitude ; elle avait pris environ trente minutes pour se préparer afin de rallier son champ comme chaque jour. Madame Bekolo quitta enfin le domicile familial et se rendit au champ, accompagnée de sa fillette Nga. Elle devait y passer toute la journée, et rentrer en soirée juste à l’heure de préparer le repas vespéral. Généralement, elle rentrait à la maison entre seize heures et dix-sept heures.
Mais ce jour, elle rentra plus tôt que prévu ; vers quatorze heures, le visage tout terne, on sentait que quelque chose n’allait pas très bien en elle. L’on dirait qu’elle avait accouché au champ, que non ! Puisque sa grossesse était toujours visible ; mais son atmosphère et son comportement étaient des plus étranges qui soient. Elle avait l’habitude de ramener du champ : vivre, bois, légumes, mais ce jour, son panier était tout vide elle n’avait rien ramené du champ. On dirait qu’elle y avait été chassée. C’était une ambiance très inhabituelle. La joie qu’elle dégageait habituellement, avait disparu durant les quelques moments passés au champ ce jour.
Quelques minutes précédant son retour du champ, je vis Agnès une fillette d’environ dix ans sortir pieds nus en courant du domicile des Bekolo, dix minutes après, lorsque je la revis accompagnée de Mâ Rita pénétrer le domicile des Bekolo, mes soupçons se confirmèrent. Madame Bekolo, plus aucun doute, était victime des signes précurseurs de l’enfantement ; je sus illico que cette dernière subissait indubitablement les foudres des contractions. Mâ Rita en effet était réputée comme l’une des accoucheuses de la bourgade. La voir chez les Bekolo à cette heure du soir, ajouter au comportement plus qu’étrange de madame Bekolo dont la grossesse était visiblement à terme, il était évident que le bébé voulait déjà voir le jour.
Lorsque la sexagénaire Mâ Rita arriva au domicile en terre battue au toit de nattes de raphia des Bekolo, il fallait être un tantet subtil pour constater que les allées et venues traduisaient indéniablement l’ambiance qui règne très souvent dans les hôpitaux lorsqu’une femme est en voie d’accoucher. Sauf que là, on était à Eyangap, au village, dans un taudis et non dans un hôpital ; on voyait la vielle Mâ Rita monter et descendre, sortant et entrant au pas de course à la recherche des herbes certainement pour fabriquer toute sorte de potions coutumièrement usitées à Eyangap pour permettre aux femmes de cette bourgade et de ses environs d’accoucher. Un périmètre de sécurité fut installé peu après l’arrivée de Mâ Rita ; certaines personnes du taudis furent soudainement et très subtilement mises dehors ainsi que tous les jeunes garçons. Seules les femmes, et les fillettes étaient autorisées à y entrer ou à y rester ; aucun homme, aucun garçon ne pouvait y accéder ce qui me conforta dans ma position : Madame Bekolo était sur le point d’accoucher.
Les femmes à Eyangap accouchaient généralement sur des petits lits en bambous, sans confort sans soins médicaux pire encore, elles ne connaissaient pas de visites prénatales, juste des potions que les anciennes du village leur donnaient. Le processus était très archaïque et sans sécurité. Elles accouchaient grâce à l’aide des grand-mères du village qui, grâce à leurs expériences de mère, étaient devenues au fil des années des accoucheuses. Néanmoins, l’accouchement pouvait se transformer en tragédie. Le risque était énorme et permanent car ces grand-mères n’avaient aucune connaissance véritable en médecine toutes leurs pratiques étaient indigènes et sans aucune garantie de sécurité. On risquait donc de perdre soit la mère du bébé, soit le bébé lui-même, ou alors les deux. Plusieurs familles avaient d’ailleurs été endeuillées suite à des accouchements tournés au vinaigre.
Pendant que certaines femmes mettent au monde leurs enfants dans les grands hôpitaux et centres de santés, et ce, aux petits soins des infirmières, madame Bekolo par contre, se battait dans son taudis contre moustiques et inconfort dans le seul but de mettre au monde son fils.
Au bout de deux heures d’intenses efforts, Mâ Rita n’avait pas pu faire accoucher madame Bekolo. La situation devenait de plus en plus critique et inquiétante on dirait que le bébé ne voulait plus connaître ce monde. Essoufflée, et à bout de forces, Mâ Rita envoya monsieur Bekolo appeler Mâ Dina sexagénaire également qui habitait à environ deux kilomètres des Bekolo. Mâ Dina était réputée en effet comme la plus expérimentée de toutes les accoucheuses de la contrée. On l’appelait affectueusement : « la grand-mère des situations difficiles ». On la voyait généralement sur scène quand la situation se complexifiait. Quelque temps plus tard, elle arriva pieds nus, avec un foulard ridiculement noué qui exprimait clairement que la nouvelle l’avait surprise ; elle entra en trombe dans le taudis transformé en salle de maternité.
Sans attendre, Mâ Dina se mit au travail pour essayer de faire accoucher madame Bekolo. Dehors, tout le monde craignait le pire ; les cœurs battaient la chamade car la situation se dégradait davantage madame Bekolo manquait de plus en plus de forces ce qui était très inquiétant. En effet, la probabilité de perdre non seulement le bébé mais aussi sa maman augmentait à grande vitesse. Il fallait faire vite mais alors très vite. Mâ Dina mit en œuvre son savoir-faire et son expérience. Son palmarès parlait d’elle car, elle avait mené à elle seule jusque-là pas moins de cinquante accouchements dans la contrée elle savait donc s’y prendre. Elle utilisait ses techniques ; ses touches personnelles dont elle seule avait le secret ; elle tournait des potions qu’elle faisait boire à madame Bekolo. Chacune des accoucheuses avait ses méthodes propres à elle. Environ trente minutes plus tard, on entendit des petits youyous qui sortirent du taudis des Bekolo ; contre vents et marées, le bébé Evina venait de voir le jour. Il poussa un cri comme pour dire non aux souffrances qui l’attendaient. Aux youyous des femmes qui sortaient de l’intérieur, je sus directement que tout n’allait pas très bien ; qu’il y avait un bémol car, les cris n’étaient pas à la hauteur de l’événement. D’habitude, lorsqu’une femme venait d’accoucher à Eyangap, les cris des femmes pouvaient aller jusqu’à un kilomètre. Mais ceux de ce jour, c’est à peine qu’on pouvait les entendre à plus de cinq cent mètres.
L’accès au taudis fut élargi à certaines personnes de dehors ; les grandes personnes surtout. Je profitai également pour y entrer. Dedans, je vis, madame Bekolo, toute triste et très affaiblie, avec des larmes dégoulinant sur ses joues dodues serrant son fils nu contre elle. Cela m’intrigua vraiment, au lieu d’être satisfaite de voir son fils nouveau né, madame Bekolo manifestait de la pitié. Cette scène présageait quelque chose de mauvais. Tout le monde savait que c’était un mauvais signe car sa tristesse laissait clairement paraître quelque chose de pire. Son rythme cardiaque était anormal ; elle avait perdu beaucoup de forces et surtout beaucoup de sang ; directement, Mâ Dina récupéra le bébé de ses mains et habilla ce dernier. Madame Bekolo visiblement n’allait pas du tout bien ; le comportement des grandes mères laissait percevoir également une très grande inquiétude. Elles étaient agitées. Elles qui étaient anciennes dans le domaine, elles savaient très pertinemment quand la situation n’allait pas en s’améliorant. Elles faisaient tout ce qu’elles pouvaient pour essayer de stabiliser la situation. Elles efforçaient de verser de l’eau froide sur elle prétextant que cela lui donnerait des forces, essayaient de lui faire boire de l’eau sucrée, mais rien de tout cela n’avait ni stabilisé ni amélioré la situation.
Quinze minutes plus tard, les grand-mères étaient à fond de cale, l’état de santé ne s’améliora point. Il allait plus tôt de mal en pis. Les débats furent lancés pour passer à l’étape supérieure. Il fallait trouver un moyen de transport pour l’amener à hôpital. À dix-neuf heures à Eyangap, il était extrêmement difficile de trouver un moyen de transport. Le centre de santé le plus proche était l’hôpital de district d’Akonolinga situé à vingt-quatre kilomètres d’Eyangap. Il fallait pour trouver un moyen de transport, aller à quatre kilomètres du taudis des Bekolo ; où l’une des rares personnes possédant un moyen de transport dans les environs vivait. Dans les environs, monsieur Okala était parmi les rares individus possédant un moyen de transport permanent : une moto. Monsieur Bekolo avait très rapidement pris la route pour le domicile de monsieur Okala. Arrivé chez ce dernier, il trouva bel et bien la moto garée à l’angle de son séjour. Malheureusement, le propriétaire des lieux était absent. Il avait d’après sa femme, voyagé la veille sans sa moto, parce que celle-ci était en panne. Monsieur Bekolo perdit l’usage de la parole lorsqu’il apprit cette nouvelle décourageante, il paniquait, il était très inquiet pour sa femme. Sans plus dire quoi que ce soit, il retourna chez lui.
La situation de sa femme allait en s’empirant. Monsieur Bekolo n’avait pas d’autres options ; il devait attendre un éventuel mototaxi qui pouvait passer par là. À Eyangap et ses environs, les motos étaient utilisées comme le moyen de transport en commun le plus en