6/ LESBOS LA HONTE DE L’EUROPE
APRÈS LE NIGERIA, LE KURDISTAN, LE DONBASS, LA SOMALIE ET LE BANGLADESH, BERNARD-HENRI LÉVY S’EST RENDU EN GRÈCE, DEUX FOIS, AU CAMP DE MORIA, OÙ ILS SONT PRÈS DE 20 000 RÉFUGIÉS À CROUPIR ET À SE DÉSESPÉRER
« Lorsque se déclara l’épidémie, j’étais en mission sur l’île de Lesbos, en Grèce », écrit BHL dans « Ce virus qui rend fou » (éd. Grasset). Le contraste sera brutal : le mot d’ordre planétaire « Restez chez vous » va faire de ces hommes, de ces femmes et de ces enfants, installés sous des bâches, des pestiférés. Depuis 2015, après avoir franchi les 9 kilomètres qui séparent la Turquie de l’Europe, ils s’entassent dans ce qui devait être un camp de transit pour 2 840 personnes… Et se retrouvent prisonniers d’un cul-de-sac. Au camp de Moria, on ne vit pas, on attend.
L’ENFER, C’EST ÇA
« Ils ne m’ont pas donné de drap… J’ai accouché comme ça, sans rien, dans ma tente, sur le plastique, j’ai saigné… » Qui est «ils»? L’administration grecque barricadée dans son périmètre grillagé et barbelé ? Les ONG qui, dans la zone sauvage du camp, celle qui déborde et monte sur les collines d’oliviers, se coltinent toute la misère du monde, affrontent les néofascistes qui rêvent de les bouter hors de l’île et ne savent où donner de la tête ? Les voisins de tente afghans qui, parce qu’elle est soudanaise, n’ont pas répondu à ses appels à l’aide? Le fait est que Fatimah est seule, aujourd’hui, dans son abri de bâches plastiques blanches. Son bébé de 6 mois, accroché dans son dos, est enveloppé dans un pauvre tee-shirt, marqué «Welcome in Lesbos», qu’elle a retaillé en Babygros. Ses aînés, 8 et 2 ans, blottis contre elle, semblent encore plus terrorisés qu’elle par la présence d’un photographe et d’un interprète. Et c’est dans un mauvais arabe, entrecoupé de longs silences, qu’elle livre, par bribes, le détail de son
Vous lisez un aperçu, inscrivez-vous pour lire la suite.
Démarrez vos 30 jours gratuits