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Les damnés de l’île de Sein: Le cimetière des naufragés d'Ar-Men
Les damnés de l’île de Sein: Le cimetière des naufragés d'Ar-Men
Les damnés de l’île de Sein: Le cimetière des naufragés d'Ar-Men
Livre électronique184 pages2 heures

Les damnés de l’île de Sein: Le cimetière des naufragés d'Ar-Men

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À propos de ce livre électronique

Des homicides vont tourner l'enquêteur vers les légendes locales.

Qui a poignardé cette fille venue d’Audierne, retrouvée saucissonnée sur un menhir de l’île de Sein, et ce chercheur que l’administration a peut-être trop vite déclaré suicidé ? Pour le savoir, il faut retourner dans le passé de l’île et exhumer des légendes et des vieilles peurs qui remontent à la nuit des temps. Victor Tarin, démêle l’écheveau de cette enquête qui suinte la vengeance et la folie…

Retrouvez les aventures de Victor Tarin en version numérique !

À PROPOS DE L'AUTEUR

Né en 1961 à Languédias, fils et petit-fils de boulanger, Eric Rondel est l'auteur de nombreux ouvrages historiques sur la Seconde Guerre Mondiale. Amoureux de sa région et de son histoire, il a créé le personnage décapant de Victor Tarin pour pouvoir en parler différemment à travers des romans policiers qui la mettent en valeur. Dès la sortie de la première aventure de Victor Tarin en 1998, le personnage a trouvé son public.
LangueFrançais
Date de sortie3 juin 2020
ISBN9782374690544
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    Aperçu du livre

    Les damnés de l’île de Sein - Eric Rondel

    Locronan.

    Quelques remerciements

    Au docteur Ambroise Menou pour tous les livres historiques qu’il m’a prêtés.

    A l’hôtel-restaurant Ar-Men et à sa bibliothèque, où, ma femme et moi, nous avons passé un si agréable séjour pour préparer ce roman.

    De peur d’en avoir oublié, je tiens à remercier ici tous les habitants de l’île de Sein qui, dans leur gentillesse et leur envie de partager les beautés et l’histoire de leur caillou, ont accepté de me donner du temps et de répondre à mes questions parfois indiscrètes, et de me donner des informations précises, jusqu’à me faire tomber amoureux de leur île.

    J’invite tous mes lecteurs à se rendre sur cette île extraordinaire et d’y passer quelques jours. Voici quelques adresses de passionnés qui nous ont conquis par leur accueil et leur gentillesse : l’Abri du Marin et la Station de Sauvetage, les incontournables musées de l’île ; l’atelier du peintre Didier-Marie Le Bihan ; les épiceries Chez Marie Annick et la Cambuse de l’Île ; la librairie Tom Pouce ; les bars ou restos Chez Christine, Chez Bruno ; le Cormoran Borgne ; Chez Brigitte ; Chez Nadine ; la Case de Tom ; Les Trois dauphins ; la crêperie du Crabe qui Rit ; le Men-Brial… plus ceux que j’ai peut-être oublié, qu’ils me pardonnent.

    Bien sûr, l’histoire que je raconte ici et qui se déroule sur l’île de Sein dans un futur proche, est totalement inventée et les personnages impliqués sont totalement fictifs. Le seul rôle calqué sur la réalité, c’est celui de l’île de Sein.

    Eric Rondel

    Il n’est pas nécessaire

    d’aller au bout du monde

    pour voir la beauté,

    L’île de Sein suffit…

    Une fois que tout fut terminé

    Défiant avec bravoure et ténacité les flots de l’océan Atlantique prêts à la dévorer corps et biens à l’extrême ouest de la Bretagne, tout au bout du Raz de Sein hanté par la Bag-Noz, l’île de Sein, l’île légendaire entre toutes entourée par la Mor Diou – Mer de Droite – et la Mor Kleï – Mer de Gauche – sans cesse rongée par la mer tempétueuse, souligne l’horizon à environ trois milles nautiques de la pointe du Raz comme un trait de vie et d’espoir. Longue d’à peine deux kilomètres sur huit cents mètres de large, elle est dominée par les cinquante mètres du grand phare noir et blanc de Goulenez qui, tout en rassurant le navigateur, abreuve et éclaire le Sénan par les installations modernes qu’il renferme.

    Avant de mériter son séjour sur l’île de Sein, le téméraire passager de l’Enez Sun ou du Biniou doit affronter les périls du Raz de Sein, où les légendes hantent ses parages sans cesse tourmentés.

    Rien d’effrayant comme le passage entre le Raz et l’île de Sein, écrivait jadis Cambry, la moindre erreur, une fausse manœuvre vous précipitent à jamais dans des gouffres, sur des rochers, sans aucun espoir de salut…

    Nul n’a passé le Raz, dit un proverbe, sans mal ou sans frayeur… et c’est vraiment ce qui arriva à d’innocentes victimes, lors ce terrible mois de juin… Mais j’anticipe trop la catastrophe qui frappa l’île, au point d’y créer une nouvelle légende, celle des Démons de Sein… une légende qui sera bientôt aussi populaire que celles du Bateau des Sorcières et du Bateau de Nuit.

    Comment ! Vous ne connaissez pas ces terribles récits populaires qui se racontaient jadis dans les longues veillées d’hiver quand hurlaient les ouragans. Alors, avant de vous conter le pourquoi et le comment du crime horrible qui déclencha une catastrophe sur l’île de Sein il y a peu, écoutez ces récits qui nous viennent de la nuit des temps :

    Les sorcières de l’île de Sein étaient des veuves qui avaient le mauvais œil, mais le problème, pour le commun des mortels comme vous et moi, était de distinguer celles qui portaient ce fâcheux présage des autres. On ne le reconnaissait qu’à l’épreuve… une épreuve parfois cruelle. La veuve ensorcelée, par une nuit de tempête, était jetée hors de son lit. À ses pieds, elle trouvait son panier à provisions, son bidon à varech et son tablier. Par une incantation magique, le panier se transformait en coque de barque, le bidon s’amplifiait en mât et le tablier se gonflait comme une voile. Sur cette barque de fortune, le Bateau des Sorcières, la veuve s’élançait à la conquête de la mer. Gare aux pêcheurs qui la rencontraient ! Aux patrons seuls elle révélait sa présence en leur murmurant à l’oreille un secret terrible, un secret à faire dresser les cheveux sous le bonnet de laine. Dans les conversations avec les camarades, les autres ne devaient jamais faire la moindre allusion à cette confidence. Sinon, à la première sortie, c’était le naufrage.

    Le Bateau de Nuit – le Bag Noz – quant à lui, il est encore de plus mauvaise rencontre. Habituellement, il marche à contre-bord de celui des pêcheurs. Son influence magnétique est telle que la barque de ces malheureux vire immédiatement pour suivre le sillage de l’autre. Ils ont la conviction que cette force mystérieuse les entraîne vers le port. Hélas ! ce n’est qu’une illusion. Le bateau fantôme s’enfonce dans les brumes de la nuit, abandonnant au milieu des récifs la barque des pauvres pêcheurs¹.

    Le Caillou, comme l’appellent affectueusement les Sénans, cette terre de légendes et de mystères où se heurtent les Korrigs et les Teuz, rase les éléments chaotiques de l’Iroise comme une frêle barrière de granit qui s’effrite avec le temps ou bien diminue dangereusement à cause des touristes inconscients qui lui volent ses galets pour décorer des jardins, ou remplir de trophées des vitrines du continent.

    Pour éviter de continuer à voir ces fétichistes inconscients lui dérober ses défenses naturelles, il faudra peut-être un jour faire transiter les touristes sur une balance avant leur embarquement à Audierne, et les repeser à leur retour pour les empêcher de ramener leur butin de forban.

    Une autre idée serait peut-être de demander à chaque visiteur d’apporter un galet du continent, mais ce serait déshabiller Paul pour habiller Jacques…

    L’île des Sept Sommeils druidiques, où auraient régné en maîtresses absolues neuf vierges druidesses, dont la célèbre Velléda, est parfois présentée comme le dernier vestige émergé de la cité engloutie d’Is. Certains avancent même que le roi Arthur et Merlin l’enchanteur vécurent sur ce rocher où pas un arbre sauvage ne pousse.

    Secrète et jalouse, l’île domptée oppose fièrement ses façades de granit et de béton aux vents hurlants et destructeurs venus de l’océan, qui s’engouffrent sans état d’âme dans ses rues étroites du Lenn au Nifran, qu’aucun cadastre officiel ne répertorie.

    Mystérieuse et magique, l’île sauvage de Plas Ar Skoul et son amer en forme d’obélisque à l’îlot de Kilaourou et ses mégalithes silencieux, ne dévoile ses beautés et sa magie qu’à ceux qui les méritent. Attristée par l’indifférence des incultes, Sein crie haro sur le touriste qui débarque au pied du phare miniature à tête verte du Men Brial à 10h30 du matin caméra en bandoulière, arborant sac à dos et bâton pour faire pèlerin, chemine en parlant fort sans vraiment prendre le temps de regarder, et repart à 16h00 du quai des Français Libres en déclarant crânement avoir tout vu. Quand ils ne passent pas leur temps à traquer des Sénanes qui, pour le continental de base, portent encore toutes la coiffe !

    N’opposant aux fureurs de l’océan qu’une altitude moyenne d’à peine un mètre cinquante, l’île de Sein, frêle épine dorsale de cinquante-six hectares entourée des grandes profondeurs de l’Atlantique, menace à tout moment l’engloutissement. Mais ce terrible piège, que les Sénans ont déjà eu à redouter des dizaines de fois au cours des siècles, les obligeant parfois à se réfugier sur les toits des maisons du Nifran pour ne pas être emportés par les raz de marée, ils le connaissent et vivent avec. Ces intrépides sauveteurs de marins en périls, qui doivent avoir plus d’eau salée que de sang à couler dans leurs veines, ont refusé plusieurs fois d’abandonner leurs maisons inondées ou leur île balayée par les vagues, sur les conseils pourtant avisés des autorités ducales, royales ou républicaines, qui leur proposaient d’autres maisons plus sûres, mais… sur le continent.

    S’il est un seul village peuplé d’irréductibles et de gens solidaires en Bretagne, c’est bien Sein, car, cher lecteur, si vous me permettez cette image forte qui n’a ici rien de péjoratif, le Sénan est accroché à son île comme une bernique à son rocher, rien ne pourra jamais le faire partir ou renoncer, ni les tempêtes naturelles du sud-ouest, ni les incidents extérieurs provoqués par les hommes.

    Et pourtant…

    Un événement plus terrible qu’un raz de marée faillit faire fuir les derniers habitants de l’île de Sein il y a quelques années… mais cette fois, c’étaient l’homme et sa folie qui en étaient les causes… la nature n’avait rien à voir dans de drame.

    Cette histoire incroyable, qui puise sa source dans la nuit des temps et dans ce que l’on croyait n’être que des légendes ou des contes de la veillée, sans la persévérance de courageux Sénans, prêts à risquer leur vie pour sauver leurs semblables, aurait transformé en désert cette magnifique île du Ponant, sûrement une des plus magiques du Parc Naturel Régional d’Armorique.

    * * *

    Témoin et acteur involontaire des faits criminels qui se déroulèrent sur Sein au cours de cette terrible journée de juin, quand le Diable chemina sur l’île, et malgré tous les conseils avisés des nombreux médecins de renom qui me suivent régulièrement depuis, je n’arrive pas à évacuer toutes les scènes d’horreur qui défilent encore devant mes yeux à chaque fois que je vois une étendue d’eau… Je n’ai jamais pu remettre les pieds sur un bateau ou sur une île depuis ces difficiles journées où tout suintait la mort.

    Maintenant, la seule pensée de me retrouver prisonnier au milieu de l’océan avec des inconnus me donne des sueurs froides, me rend mal à l’aise, me fait délirer et inventer des choses terribles. Je ne peux pas m’empêcher d’imaginer qu’il y a peut-être un assassin potentiel qui cherche une innocente victime parmi les passagers bavards du bateau ou parmi les piétons qui arpentent innocemment les chemins de l’île… Le seul fait de ne pas avoir de possibilités de fuir hors des limites de cet espace clos me rend fou et pire, pourrait me transformer en tueur… pour ma survie, bien sûr.

    Ne voyant pas de solution miracle pour effacer ma mémoire, j’ai décidé, au contraire, de fixer les évènements à jamais, tant qu’ils sont aussi clairs dans ma pauvre tête, et de les écrire dans ce carnet. J’espère trouver dans cet exercice difficile un semblant de bien-être et une thérapie dans la recherche de la chronologie et de la genèse de ces crimes odieux. Bien sûr, tout ceci doit rester entre moi et moi… je refuse totalement toute publication de ces écrits qui sont strictement personnels et demande à ma famille de détruire ce manuscrit s’il tombait par hasard entre leurs mains.


    Autour des Îles Bretonnes par Théophile Caradec.

    Sud du Cap Sizun

    Matinée du dimanche de la Trinité

    Ce matin brumeux de juin qui promettait une belle journée, sur la départementale D784 du canton de Pont-Croix, une Citroën verte immatriculée dans le Var roulait tranquillement en direction d’Audierne, un joli petit port breton du sud Finistère, jadis réputé pour ses goémoniers et ses langoustiers, qui partage aujourd’hui avec Plouhinec son activité économique entre la pêche côtière sélective de qualité et le tourisme.

    Cette voiture était celle de l’abbé Jean-François d’Esterel, un jeune prêtre élégant à la tignasse rouge feu, tout juste sorti du séminaire. Il n’était arrivé en Cornouaille que depuis quelques semaines, et, la première grande responsabilité que lui avait confiée l’évêque du diocèse de Quimper et du Léon avait été le remplacement du curé solidaire à l’ensemble paroissial du Cap-Sud, décédé depuis peu après une mauvaise chute d’un arbre. Fier et conscient du poids de cette lourde tâche, l’abbé d’Esterel avait immédiatement emménagé au presbytère de Plouhinec. Et, ce matin-là – deux jours seulement après son arrivée au Cap Sizun, le pays des clochers de dentelles – tout vêtu de noir, avec le traditionnel petit col blanc qui lui rehaussait le cou, rasé de frais et imbibé d’eau de Cologne bon marché, après une petite prière dans l’église Saint-Vinoc, il partait célébrer sa première messe sur l’île de Sein, une des communes qui composent l’ensemble paroissial Cap-Sud placé sous le patronage de sainte Klervi, en compagnie de sa mère.

    La mère de l’abbé d’Esterel était une femme autoritaire, native de Fréjus, s’exprimant avec un fort accent méridional, au verbe haut et à la verve fielleuse trempée dans l’acide de commère. Jalouse du bien être de son fils ou plutôt qui aimait s’impliquer dans toutes les phases de sa vie, voire même la diriger, avait exigé de l’accompagner pour ses premiers pas dans ce pays de brumes, de tempêtes et de mécréants comme elle se plaisait à lui rappeler quotidiennement.

    Ce n’est qu’au début du XVIIe siècle que l’île de Sein eut un homme chargé de veiller sur la pratique religieuse de ses habitants, après la mission que Dom Michel Le Noblez y entreprit. Ce saint homme s’était rendu sur cette île perdue, car il avait appris qu’il y avait une ville, au-delà de la terre ferme en Cornouaille, où les habitants vivaient comme des barbares.

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