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Volée de gros sel sur Guérande: Enquête en Loire-Atlantique
Volée de gros sel sur Guérande: Enquête en Loire-Atlantique
Volée de gros sel sur Guérande: Enquête en Loire-Atlantique
Livre électronique232 pages3 heures

Volée de gros sel sur Guérande: Enquête en Loire-Atlantique

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À propos de ce livre électronique

Les salines de Guérande sont le lieu de pillages et d'évènements mystérieux.

Après deux périodes de dix ans d’engagement dans les Forces Spéciales, Agathe Le Bégo, dont les parents paludiers sont décédés, revient vivre dans les salines de Guérande pour exploiter ses œillets.
Qui détrousse les gens du sel de leur récolte ? Petits larcins, ou opération de grande envergure ? Pourquoi des vols d’oiseaux invasifs, les Ibis sacrés, sont-ils observés au moment des pillages ?
Un paludier est tué.
Qui est monsieur Chang, énigmatique importateur chinois, responsable d’une association ornithologique opaque, créateur d’une boisson énergisante révolutionnaire qui lui sera fatale ?
Qui est ce supposé yéti noir qui hante les marais de grande Brière ?
La sulfureuse juge Ivanna Petsek devra se débattre au milieu des agents spéciaux manifestant une addiction au Secret défense...

Enfilez vos lunettes d'ornithologue pour cette enquête divertissante, et attachez votre ceinture car la route sera mouvementée !

À PROPOS DE L'AUTEUR

Ecrivain complice de la Loire et de la Bretagne, Jean-Pierre Simon est aussi écrivain documentariste, également connu pour ses nouvelles, ses poèmes et paroles de chansons, ses aquarelles et le tournage du bois.
LangueFrançais
Date de sortie18 mai 2020
ISBN9782374690711
Volée de gros sel sur Guérande: Enquête en Loire-Atlantique

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    Aperçu du livre

    Volée de gros sel sur Guérande - Jean-Pierre Simon

    redéployé.

    PROLOGUE

    La Grande Brière est contrée de mystères ; on ne sait pas toujours où se termine la terre, qui n’est en réalité que de la tourbe, où commence l’eau, patrie des roseaux faucardés ou non. Difficile de savoir si l’on foule le sol du département de Loire-Atlantique ou si déjà on est en plein marais, si l’on doit conserver ses bottes ou prendre la barque. La végétation est incertaine, changeante, confuse. Le brouillard, le givre, les frimas, les bulles de méthane montant du fond de l’eau qu’on touille, tout se ligue pour que le mystère monte en mayonnaise à la moindre pincée de légendaire.

    Ici, l’Ankou des Bretons ne peut normalement avancer sa charrette : n’allez pas croire pour autant que le roulier de la mort soit embourbé. Ici les légendes vont de bon cœur, essentiellement colportées par le folkloriste Claude Guillet. Il y est question d’une forêt primitive qui aurait abrité un château renfermant un trésor convoité. Un sorcier aurait noyé la contrée pour se l’approprier. Une sorcière aurait, pour une raison voisine, retourné toute la contrée, ce qui explique qu’on découvre des arbres fossilisés sous la tourbe. Dans ce monde à bascule vivent des Korrigans, d’obscures reines sans royaume, des mages puissants, des vieillards aux pouvoirs insoupçonnés. Jean Failler situe par deux fois l’intrigue des aventures de Mary Lester dans cette contrée changeante.

    Curieusement, dans les toutes proches salines de Guérande, région tout aussi mystérieuse, insolite et étrangère à nos habituelles notions de paysage, la tradition est nettement moins prolixe ; c’est le sel qui constitue un produit de légende.

    *

    Quoi d’étonnant à ce que se développe encore aujourd’hui un climat de mystère çà ou là dans cette grande zone d’incertitude qui déploie ses fanges entre Herbignac et Saint-André-des-Eaux, entre Saint-Lyphard et Saint-Joachim.

    Dans le sud, entre Bréca et la chaussée neuve, certains Briérons pensent tenir leur Yéti, leur Grand Sasquatch, leur Bigfoot, leur Wendigo. Apparue furtivement entre deux arbustes ou depuis une barque qui s’insinue entre les roseaux, la créature humanoïde est noire, les prétendus témoins en jureraient. Fourrure, peau sombre, vagabond mal lavé ? Toujours est-il que l’ectoplasme est de belle taille. Celle d’un grizzly sur ses pattes arrière. Celle d’un géant. Celle d’un monstre.

    La créature vit seule. Manifestement, elle se cache.

    *

    Lassés du paradis para-soviétique de Budapest, les parents de la juge Ivanna Petsek sont entrés clandestinement en France en 1954, dix ans avant la naissance de cette grande et belle fille à l’intelligence brillante. Travailleurs, ils se sont facilement intégrés. La petite Ivanna, leur fille unique, a réussi son droit, est entrée à l’Ecole de la magistrature. Nommée juge d’instruction en Loire Atlantique, elle a travaillé sans se ménager, plus de vingt ans durant sans recevoir de réelle promotion, sa rigidité professionnelle dressant un obstacle devant les petits arrangements qui ne manquent pas d’accompagner ce qu’on nomme une carrière brillante. Strictement vêtue, mais avec recherche, opulente sans être grassouillette, arborant un visage sans véritables rides malgré la cinquantaine dépassée, la grande Ivanna reste séduisante sans être réellement féminine. Elle serait plutôt… femelle, même si le qualificatif n’a rien de valorisant. En effet, madame Petsek s’adonne aux amours tarifés. Elle estime n’avoir ni le temps ni le goût d’une union, d’une liaison même. Son seul souci est de faire exploser sa zone de récompense lorsque sa semaine de travail harassant est achevée. La sexualité est à son hygiène mentale ce que la soupape est à la cocotte-minute. Chez elle, le sang parle : descendante des Magyars, en bonne héritière des compagnons d’Attila, elle a gardé le goût des chevauchées immodérées.

    Ivanna a francisé en Jeanne son prénom, elle a acheté un appartement sur le front de mer des Sables-d’Olonne, elle qui n’aime ni nager ni bronzer. Ici, c’est hors de sa juridiction. C’est là qu’elle a placé le maigre héritage de ses parents trop vite partis, son salaire de juge ne lui aurait pas permis cette folie : elle perçoit des émoluments comparables à ceux d’un prof. A ce prix pourtant la justice est indépendante.

    Là, elle est une femme d’affaires cossue. En bonne fonctionnaire, c’est le samedi soir qu’elle exulte. Toujours sous le joug contrôlé d’hommes ayant la moitié de son âge. Comme toutes les libertines et libertins, elle a ses déviances. Pour elle, c’est la contemplation active de l’ultime explosion des entreprises de ses partenaires. Cela exclut les stratégies de protection, mais exige de la part de ses chevaliers servants, elle le stipule par contrat, une capacité d’anticipation. On a les vices qu’on peut.

    Tout le monde ignore ce à quoi l’austère et implacable juge Petsek consacre ses loisirs. Tous sauf un homme. C’est normal, il est payé pour ça : il est espion.

    Ainsi, l’Amiral d’Alleband a donné à la magistrate un accès illimité à un site de rencontres top secret qu’elle partage avec les femmes soldats de l’état-major de plusieurs armées. En contrepartie, elle aura soin, à son tour, de se retirer lorsque des barbouzes se déploieront pour couvrir les affaires qui lui sont confiées.

    Ce soir-là, le jeune homme dont elle a loué les services est subjugué par le tempérament sismique de cette belle femme mûre, au point qu’il ne voit pas venir les limites de la clause contractuelle ! Quinze ans de moins, et Ivanna se trouvait fécondée ! Mais il peut survenir plus grave, ablutions rigoureuses ou pas.

    Sa soirée gâchée tout à la fois par la frustration et par la trouille, de façon véhémente, elle congédie par anticipation le soupirant inexpérimenté, amputant au passage ses émoluments d’un billet de cinquante. Un juge, c’est gagne-petit.

    Deux ans plus tard, alors qu’elle est devenue substitut grâce aux relations de son bienfaiteur militaire, Ivanna contracte un rhume qui ne veut pas finir. Jamais de fièvre, mais pas de vraie guérison, une forte sensation d’épuisement. Malgré son rythme professionnel exigeant, elle se résout à consulter.

    Analyses. Le verdict tombe. Elle est très évasive lorsque le spécialiste l’interroge sur les circonstances dans lesquelles elle aurait pu contracter un déficit immunitaire. Pas de chance, il a suffi d’un seul faux pas.

    — Vous savez, madame, les traitements ont beaucoup progressé, je gage que vous bénéficierez d’une rémission. Mais désormais, à la moindre pathologie, même bénigne, il faut revenir vers moi !

    Comme si elle n’avait que ça à faire !

    1. Installation.

    Non, les lapins n’ont pas été étonnés : ils l’ont reconnue. Puis, ils ne sont guère nombreux, confinés aux haies, dans les salines de Guérande. Vingt années pourtant, ont dégringolé le calendrier sans qu’on voie la jolie silhouette d’Agathe, plutôt grande, athlétique et bien proportionnée. Un beau visage, malgré ces cheveux filasse d’un blond vénitien, mous et plats comme la tignasse de celles qui fréquentent assidument l’eau – natation ou sports nautiques. Peut-être aussi l’air salé des paluds…

    A quarante-cinq ans, elle s’en revient habiter la maison basse des parents, mi-penty mi-bourrine, un peu à l’écart dans le village de Saillé. Cette maigre agglomération fait figure d’îlot au péril des marais salants, à trois kilomètres de l’insolente station balnéaire de La Baule-Escoublac dont les estivants ignorent tout des peineux se débattant avec le manche démesuré de la lousse.

    Habiter ? Pour le moment, ce serait plutôt camper. Dans sa vie précédente, elle était accoutumée aux bivouacs : elle était militaire, en opération. Les parents sont morts, ensemble, dans un accident d’auto. La camionnette bouffée par le sel n’a constitué qu’une dérisoire protection. Elle est seule héritière d’une bâtisse dont l’entretien a été sacrifié au travail. Dix années d’abandon : le drame s’est produit alors qu’elle terminait son premier contrat décennal, Tchad, Mali… la présence de la France à assurer contre les brutes sanguinaires que ses collègues baptisaient, par consonance, du surnom incongru de « bocaux à rames », allusion dérisoire à la secte nigériane. Du coup, elle a rempilé pour dix années de plus, ses supérieurs ont accepté, compte tenu de ses compétences, de sa vigueur physique et psychologique intacte. Elle termine lieutenant colon, ils n’ont même pas pu la passer « full colonel », comme disent les Américains qui leur mettent une étoile, comme à des sous-généraux.

    Déçue, elle n’a pas signé de troisième contrat ; cela lui aurait été refusé. L’état-major se voyait mal noyauté de l’intérieur par une vieille générale à chignon tiré. Vingt ans de contrat, certaines années ont compté double pour l’ancienneté : elle peut dès à présent prétendre à la retraite. Cela permettra de restaurer la baraque, d’autant que, forte comme un Trait breton, elle met la truelle à la pâte. Mais, jeune encore et pleine de vigueur, elle n’enfilera pas ses pantoufles du matin au soir ni n’écrira ses mémoires de guerre. Fonder un foyer, avoir des enfants ? Ses ovules sont proches de la DLU, elle ne prendra pas le risque. Il faudrait un père, c’est-à-dire aimer à temps plein ; ça, elle ne connaît pas. L’amour, c’est ce qu’on faisait les pires nuits de stress, dans l’angoisse de la mort qui peut frapper n’importe quand. Deux fois même, avec une autre fille : il n’y a pas que les grades qui sont abolis quand on est nus et qu’on crève de trouille.

    Alors, il lui reste le marais. A la fin de l’adolescence, elle l’a fui. Tout naturellement, elle y revient. Elle avait délégué l’exploitation des parents à un voisin. Il était convenu que tant qu’elle servait sous l’uniforme il n’y aurait pas de loyer à lui verser, qu’on ferait le bilan à l’expiration de son engagement. Sa première visite a été pour le paludier. Elle a manifesté son souhait de reprendre l’affaire, d’abord en sa compagnie jusqu’à ce qu’elle ait retrouvé les réflexes, intégré les évolutions de la profession, s’il y a lieu. Ensuite, si ça lui plait, elle gérera seule. Elle doit d’abord reprendre ses marques, reconquérir le pays de son enfance.

    *

    Agathe a décidé de se réapproprier le marais de Guérande. A cette fin, le VTT est la monture appropriée. Malgré les pneus, bruyants sur le goudron, elle évitera les passages en terre battue qui séparent les groupes d’œillets, afin de ne pas gêner ses futurs collègues au travail. Il y a suffisamment de petites voies bitumées, elle peut même se construire un circuit. Elle sacrifie à la RD 92 sur deux kilomètres, direction La Turballe, puis prend à gauche vers Kervalet. Elle s’arrête un moment sur les ponts du Yoro et du Cardinal, pour s’imprégner du paysage des étiers où circule l’eau saumâtre. Après être passée sous la voie, c’est cinq cents mètres sur la route du Croisic ; au rond-point, elle file vers le gîte d’étape de Kerbouchard, puis vient une autre petite route en plein marais, parallèle à la première. Entre les ponts de Sihascouet et Curusson, c’est le Grand Pont, sur l’étier du Sigo. Deux choix lui sont alors offerts : tout droit, et retour sur la départementale, ou s’enfoncer plus avant dans le marais, à gauche vers les baules de Sissable. Si ces baules – qui donnèrent leur nom à la cité balnéaire – ne sont recouvertes qu’aux grandes marées, en face d’elle c’est un vaste estran, inondé deux fois le jour à chaque marée haute. De cet ancien polder, dont les marais sont protégés par une digue, on a vue par beau temps sur la cité médiévale de Guérande, à cinq kilomètres à vol d’oiseau. Elle n’aurait pu venir en auto, c’est réservé aux professionnels – ce qu’elle n’est pas encore tout à fait -depuis le naufrage de l’Erika en 2001… Trop de touristes.

    Les oiseaux sont là. Les limicoles, inévitablement : avocettes, huitriers-pies, gravelots… Des importuns aussi, notamment les Ibis sacrés qui n’auraient jamais dû quitter l’Egypte dont ils sont emblématiques. Mais voilà, dans le Morbihan, qui n’est pas si loin, au parc zoologique du Guerno, qui a par ailleurs accueilli les oiseaux du Peuple migrateur de Jacques Perrin, une population d’ibis a fini par essaimer depuis le site, se complaisant dans les salines de Guérande. Cet échassier est invasif, il a colonisé toute la région, jusqu’au lac de Grandlieu au sud de Nantes.

    Après avoir couché son vélo sur le bord du chemin, elle s’assied pour emplir ses poumons de fragrances d’iode, de salicorne et d’embruns salés. Une demi-heure de rêverie, ses yeux verts posés sur le chenal de Pen Bron, puis la voici sur le chemin du retour vers Saillé. Elle remonte le trajet du sel : elle le voit d’abord s’égoutter sur les ladures, au centre de l’œillet, où l’on viendra le prendre pour le stocker en mulons. Puis elle suit à rebours le trajet de l’eau saumâtre, des vasières à l’aderme en passant par les fares et les cobiers… comme dans le poème de Jean Richepin, La mer, consacré aux chauffoirs des salines de l’ouest. L’auteur de la Chanson des gueux était pourtant né en Algérie !

    Elle salue les paludiers occupés à fourbir la lousse, cette raclette au manche démesuré conçu pour de drôles de carrés potagers où l’on ne récolte que du chlorure de sodium. Un vol d’Ibis incongrus suit approximativement sa direction, remontant vers l’amont des eaux saumâtres pour y commettre quelque forfait piscicole.

    Curieusement, l’un des gros échassiers se désolidarise du groupe… Un chasseur solitaire ? Agathe ne croit pas si bien dire. L’oiseau calque son vol sur le trajet de la cycliste, remontant la route comme s’il n’était pas affranchi des vicissitudes terrestres. Pour s’amuser, elle accélère à fond. Un sprint en VTT, sa condition physique le permet, elle fut un soldat entraîné. L’ibis donne un coup de collier, il est à sa hauteur. Elle ralentit, l’oiseau fait de même. Elle s’arrête : il tourne en rond non loin d’elle, à distance de sécurité toutefois. Ah, si elle avait pris ses jumelles ! Lassée de cet importun au comportement à faire abjurer un éthologue, la jeune femme poursuit sa route jusqu’à chez elle. Le gros oiseau est toujours là, pas loin, comme l’œil qui était dans la tombe et regardait Caïn, selon le vieil Hugo.

    Agathe pose son vélo, gagne la porte délavée de sa masure au toit de chaume sommé de joubardes. C’est seulement là que l’ibis prend congé. Détail incongru, qu’elle a perçu grâce à son expérience des champs de bataille : elle jurerait que l’oiseau a salué au moyen de ses ailes, comme un avion qui vient d’appuyer les troupes au sol. Elle a sans doute rêvé, comme ce chasseur qui a raconté au bistrot qu’un chat sauvage l’avait poursuivi à travers la forêt, jusqu’à l’acculer dans sa demeure.

    2. La drague et le sel

    Agathe gâche du torchis devant sa maisonnette, afin de réparer quelques trous observés en pignon. Un gars passe dans la ruelle, une lousse sur l’épaule : la trentaine, grand et plutôt bien fait, mais elle ne l’a encore jamais vu. Elle poursuit son travail. Il s’arrête et la hèle :

    — Bonjour, la p’tite dame ! C’est vous qui habitez ici, maintenant ? Pas trop tôt, que ce soit racheté ! Les pauvres vieux, ils sont morts, quand j’étais encore ado. Il paraît que c’était à la fille, après. Comme elle s’était engagée dans les paras, elle n’en avait rien à secouer, elle a confié les marais au Père Le Méguen et on ne l’a plus revue…

    Sa logorrhée commence à insupporter la jeune femme. C’est alors qu’il entre dans l’indiscrétion :

    — Vous comptez tout restaurer toute seule, avec vos petits bras musclés ?

    — Pour le chaume, je me ferai aider par un pro, mais ça peut attendre. Mes petits bras musclés, ils en ont vu d’autres. Il se peut qu’ils vaillent les tiens, mon gars.

    — Dame, ajoute l’autre, ça va être une maison de touriste, même si vous habitez à l’année… On aurait mieux aimé voir quelqu’un du pays reprendre ça. Vous avez bien un mari, ou un petit copain, pour vous aider à aménager ?

    — Ni époux ni compagnon, je suis célibataire et compte le rester. Si c’est pour la drague, en admettant que tu me plaises, c’est moi qui ferai les invitations, et dans ce cas ça t’emmènera au mieux jusqu’au bout de la nuit. Mais ce matin, mes glandes de l’amour me laissent tranquille. Au fait, se ravise Agathe, la fille Le Bégo, tu l’as connue ?

    — Holà ! Je ne voulais pas vous fâcher, ma petite dame !

    — Un mètre soixante-seize.

    — La fille Le Bégo, élude-t-il, j’étais gamin, ça fait bien vingt ans… Elle ne doit plus être toute jeune… m’étonnerait que je la reconnaisse.

    — Quarante-cinq ans, exactement. Tu l’as devant toi, gros malin !

    — Vous n’avez pas… tout ça ?

    — La rigueur militaire, ça conserve ! Et encore, j’ai toujours fait partie des moins disciplinées ! Il est vrai que je n’ai pas bouffé de sel au cours des vingt dernières années, il me manque encore pas mal de cuisson. Tes copines d’école doivent paraître plus âgées que moi, même celles qui travaillent en usine.

    — Au pays, certains racontent que vous êtes morte, là-bas, en Afrique.

    — Je t’autorise à me prendre en photo. Au bistrot, tu leur montreras, et tu leur paieras un coup à ma santé.

    — Donc, vous avez repris la maison des parents. Pour les marais, vous les laissez au

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