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Manettes & pixels: Histoire du jeu vidéo et Retrogaming
Manettes & pixels: Histoire du jeu vidéo et Retrogaming
Manettes & pixels: Histoire du jeu vidéo et Retrogaming
Livre électronique650 pages5 heures

Manettes & pixels: Histoire du jeu vidéo et Retrogaming

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À propos de ce livre électronique

Nostalgiques des années Tetris et Pacman, ce livre est fait pour vous !

Qui n'a jamais joué à un jeu vidéo ?

Nombreux sont ceux qui se sont essayés à Pong, Space Invaders, Pac-Man, Super Mario Bros., Tetris, The Legend of Zelda, Les Sims, Minecraft, Call of Duty, et bien d'autres.
Véritable composante culturelle, le jeu vidéo attire 75% des Français, d'une moyenne d'âge de 35 ans, et 1 femme sur 2. Des fameuses bornes d'arcade dans les années 1970 aux consoles modernes ultra-sophistiquées, l'histoire du jeu vidéo débute en 1947, aux États-Unis, avec Cathode Ray Tube Amusement Device. Puis Spacewar débarque en 1963 : la jeuvidéomania est née.
Dans le jeu vidéo, tout est affaire de vitesse, et les technologies progressent au rythme effréné des exigences des video games. Du PDP-1 à la Xbox, de l'Atari 2600 à Nintendo DS, ce sont sept décennies d'avancées technologiques, qui ont permis l'émergence de la console de jeux dans les salons puis dans la poche du jean.

Ce livre présente les machines et les jeux que la France a connus. Il donne également des clefs au passionné pour comprendre l'évolution rapide du jeu vidéo au gré de la technologie et de l’imagination.

Un panorama de tous les jeux vidéos depuis leur invention, où chacun retrouvera ses consoles et ses jeux favoris !

EXTRAIT

Dans le jeu vidéo, tout est affaire de vitesse. Le joueur ne doit généralement pas traîner. Et il y a aussi la technologie qui évolue en permanence. Les jeux paraissent et puis s’effacent. Oubliés, ils ressortent quelques années plus tard, libérés du poids de l’évolution technologique et des contraintes économiques. Ainsi est né le retrogaming. Certains anciens jeux sont adaptés aux nouvelles technologies, souvent émulés sur les matériels du moment. Ils perpétuent leur jouabilité et leur charme. Les joueurs exigeants argueront que rien ne vaut la véritable machine et son support. C’est peut-être vrai. Dans tous les cas, l’immersion dans un retour vers le passé apporte bien du plaisir.

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

Enfin une véritable histoire du jeu vidéo ! Manettes & Pixels est une chronologie qui prend bien en compte le jeu vidéo français, des machines et des jeux depuis les débuts dans les années 70. L’ouvrage apporte un éclairage qui touchera le lecteur, à la différence des nombreux ouvrages traduits, qu’ils soient américains ou japonais. - Silicium

De cet ouvrage, une idée transpire, tout au long des pages : nous avons tous eu, à un moment ou à un autre de notre vie, une console de jeux vidéo, et c’est toujours avec émotion et nostalgie que nous nous souvenons de nos premiers pas dans le 10e art. [...] Manettes & Pixels est tout simplement un incontournable, une nouvelle bible à posséder absolument ! - Level 1

À PROPOS DE L'AUTEUR

Avril 1976, la chaleur du bitume se fait pesante à Los Angeles en sortant du taxi jaune.
Il faut franchir quelques marches pour pénétrer dans l’immense hall de l’hôtel. La lumière cède le pas aux ombres des moquettes pourpres et moelleuses. Tout devient frais et silencieux. En attendant la clé de la chambre, le salon près du bar offre un ilot de gros fauteuils Chesterfield. La petite table cocktail de verre et de faux bois est très originale. Elle diffuse une lumière blafarde.
René Speranza y découvre son premier jeu vidéo. Une balle rebondit seule, comme le battement d’un cœur artificiel qui attend un prétendant. « Insert a quarter to play ». L’invitation est tentante.
Quelques pièces sont vite perdues pour tenter de maitriser le geste. Comment imaginer dès lors qu’ils ont immortalisé un instant qui aurait dû rester anodin puis oublié. De quelle force le jeu vidéo imprègne-t-il la mémoire des joueurs ?
LangueFrançais
Date de sortie9 mars 2018
ISBN9782366960778
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    Aperçu du livre

    Manettes & pixels - René Speranza

    vidéo.

    Préface

    Ma pomme, c’est moâââ…

    Il a de l’humour, de la classe et un prénom qui n’est pas sans évoquer les années folles de Maurice Chevalier. Mais René Speranza ne cherche pas à se mettre sous les feux de la rampe. C’est un acharné discret. Acharné parce que, depuis des années, avec une bande de passionnés qu’il a su motiver, il empile, compile, amasse, accumule, amoncelle, moissonne, collectionne, emmagasine, recueille, entasse, thésaurise tout ce qui – de près ou de loin – ressemble à un micro-ordinateur de l’époque des pionniers : ces années quatre-vingt, qui sont à l’informatique ce que la conquête de l’Ouest a été pour l’histoire de l’Amérique. Une période prolifique, riche en initiatives de toutes sortes. Du très british Lord Sinclair au très baba cool Steve Wozniak, de multiples personnalités ont jalonné la route de l’histoire des micro-ordinateurs. J’ai coutume de dire que la micro-informatique est une discipline qui génère sa préhistoire plus rapidement que toute autre activité. Elle respecte toujours la loi de Gordon Earle Moore, l’un des trois fondateurs d’Intel, qui postulait en 1969 que la complexité des semi-conducteurs doublait tous les ans à coût constant. En termes clairs, cela signifie que les premières machines des années 1980 sont d’épouvantables nanars au regard du moindre PC d’aujourd’hui. Oui, mais… beaucoup d’entre nous les ont eues dans les mains et ont vécu avec elles d’indicibles émotions. Et plus particulièrement en jouant avec elles. Elles étaient autant de portes ouvertes sur le Nouveau Monde. Des promesses d’avenir meilleur et de lendemains qui chantent. Si certaines de ces promesses ont été tenues, les lendemains ne chantent pas pour autant. Apple, Microsoft, Google, Facebook, Amazon sont de-venus des géants aux stratégies opaques dont nous sommes tous dépendants. Ce n’est pas l’avenir dont nous avions rêvé. Raison de plus pour faire un petit retour en arrière : époque rayonnante où tout était à construire et à inventer. Fort heureusement, certains travaillent dans l’ombre pour maintenir vivant le souvenir de ces temps bénis où le champ des possibles était une vaste plaine à explorer. Discret, donc, le travail de René Speranza et ses amis, mais indispensable. Car il maintient allumée la bougie du passé qui éclaire l’avenir. Et que nous montre-t-elle ? Qu’il est toujours possible d’innover, d’inventer sans pour autant disposer de la fortune de Gatsby le Magnifique. Ce livre nous explique qui furent les pionniers et ce qu’ils ont inventé. Mais l’aventure ne s’est pas arrêtée pour autant. Tout reste à faire et tout dépend de l’inventivité, de la créativité, de l’enthousiasme des générations au pouvoir et à venir.

    Il faut lire l’histoire de l’informatique, des pixels et du jeu vidéo comme on lit l’Histoire de France : on sait qu’elle ne se répétera pas, mais elle nous a légué des valeurs importantes. « Partager la connaissance, lutter contre l’obscurantisme, améliorer notre quotidien, respecter l’individu » en sont le substrat universel. Demain, avec l’explosion de la robotique, des nanotechnologies et la suprématie des réseaux, il faudra se souvenir de tout ça. Ce livre nous aide à ne pas perdre de vue ces valeurs. Une nouvelle partie reste à jouer…

    Jean-Louis Le Breton

    Jean-Louis Le Breton a créé et édité les premiers jeux d’aventure en français sur Apple II dans les années 1980 via son entreprise Froggy Software. Journaliste informatique pendant de nombreuses années (L’Ordinateur Individuel, Mac Informatique, Univers Mac, Micro à Micro, Le Rayon High Tech, etc.), il dirige aujourd’hui, depuis plus de dix ans, un magazine d’information régional dans le Gers : Le Canard Gascon*. Il est aussi l’auteur de nombreux polars et de pièces de théâtre humoristiques.

    * www.le-canard-gascon.com

    Spacewar fonctionnant sur le PDP-1 du Musée de l'histoire de l'ordinateur.

    © Joi Ito, Japon, pour Flickr, CC.

    En cette nuit du 4 avril 1963, il ne fait que 7 °C. La pluie ne cesse de tomber depuis plus de dix jours sur Quincy, dans le Massachusetts. Dans cette banlieue calme de Boston, aucune lumière ne vient signaler de présence humaine. Une Mercury Eight modèle 1949 tourne lentement à l’angle de Greenleaf Street et s’engage dans Woodward Avenue. Il est 3 h 30 et le jeune Jarvis Melsome, qui est à son volant, s’est levé il y a moins d’une demi-heure. Il stoppe sa vieille ‘49 au numéro 25. Aussitôt, Lester « Lex » Grandthorpe sort de la grande maison blanche et vient à sa rencontre. Ce jeune adolescent n’a quasiment pas fermé l’œil de sa courte nuit. À 14 ans, il est pourtant un gros dormeur. Mais cette nuit, il va enfin pouvoir découvrir le jeu sur ordinateur dont tout le monde parle. Son cousin Jarvis et une poignée d’autres étudiants l’améliorent sans cesse depuis plus d’un an. Il fait fureur au Massachusetts Institute of Technology où Jarvis étudie les mathématiques appliquées en informatique.

    Tout le campus en parle, et les étudiants font la queue pour faire une partie. Le temps machine est précieux et l’utilisation est strictement réglementée. Les joueurs doivent patienter la nuit et réserver un créneau pour découvrir ce nouveau jeu tellement avant-gardiste. Lex ne l’a jamais vu, mais il a déjà bien appris les leçons que Jarvis lui a données, lors des repas familiaux. Il est vrai que tous les hommes de la famille suivent avec intérêt les avancées du formidable programme Mercury que le Président Kennedy a lancé en 1959.

    Lors de la vingtaine de kilomètres qui longe l’Atlantique et les sépare du labo, les deux jeunes Américains révisent le jeu, tels des astronautes qui vont monter dans la petite capsule Mercury, qui n’est d’ailleurs prévue que pour une seule personne.

    Le jeu est entièrement contrôlé par un ordinateur. Lex est fasciné par ces immenses cerveaux de métal remplis d’électronique qui semblent offrir un nouvel horizon plein de promesses aux étudiants. Le jeu est baptisé « Spacewar ». Il est exécuté par le PDP-1, premier ordinateur de la jeune société Digital Equipment Corporation, DEC pour les initiés. Ce puissant ordinateur orienté temps réel a été installé à la fin de l’été 1961. Dès cette époque, un groupe d’étudiants a commencé à créer un jeu qui utilise un affichage vectoriel sur un oscilloscope. Dès le printemps 1962, le jeu est codé par Steve Russell en deux cents heures. Steve est un fan de science-fiction et il aime particulièrement la lecture des romans de Doc Savage. Cela lui a inspiré le thème de la bataille spatiale : deux fusées, une façon Tintin et une façon roquette, s’affrontent sur le grand écran rond qui simule la Voie lactée illuminée de nombreuses étoiles. En son centre, une croix grossière symbolise une étoile à l’attraction progressive et destructrice pour les deux vaisseaux s’ils venaient à s’approcher de trop près. Le vainqueur du jeu est le survivant. Certains y voient le symbole de la lutte spatiale avec le grand ennemi soviétique.

    Doc Savage Magazine, mars 1934.

    Lors de cette grande épopée Spacewar, de nombreux étudiants travaillent à améliorer l’environnement. Pete Sampson écrit un sous-programme qui ajoute le décor en planétarium. Dan Edward peaufine la gravité. Alan Kotok et Bob Saunders créent les manettes préfigurant les gamepads d’aujourd’hui. Le PDP-1 n’était pas assez puissant pour fournir un adversaire, Spacewar est donc un jeu pour deux joueurs. La première version ne proposait que quatre interrupteurs de commande par joueur directement sur le pupitre du PDP-1 : rotation à droite ou à gauche, gaz et feu. Un bouton de warp est arrivé plus tard.

    Lorsque Lex pénètre dans la salle informatique, il est étonné de la pénombre. « Elle accentue l’immersion ludique », lui assure son cousin. Seul le bruit important des machines se fait entendre. Un groupe d’étudiants est silencieusement assemblé autour de deux joueurs. Il est pourtant 4 h du matin, mais il y a tellement de fans de ce jeu qu’il faut venir la nuit pour pouvoir y jouer. Face à eux, un tube cathodique laisse apparaître une voie lactée comme celle que l’on voit dans le générique de The Twillight Zone qui passe sur CBS et que tous les jeunes Américains apprécient.

    En cette époque de conquête spatiale, Lex se dit que Spacewar offre un nouvel espace à conquérir. Les ordinateurs sont pleins de promesses. Si les jeux vidéo n’ont été jusqu’à présent que des expériences éphémères, celui-ci est différent. Il sera diffusé sur tous les ordinateurs de Digital, et chaque université américaine qui adoptera le PDP-1 fera aussi tourner sa propre version.

    À la fin de la décennie 1960, le milieu étudiant dessine la contre-culture et l’agrémente de science et de fiction. Ce premier jeu vidéo marquera les esprits de nombreux étudiants, mais restera très élitiste, sa diffusion se limite à de puissants ordinateurs de plus de 120 000 $.

    Les premiers jeux vidéo furent éphémères et sporadiques

    On ne parlait pas encore de jeu vidéo. Parmi les nombreux projets de « TV games » ou de « computer games » qui virent plus ou moins le jour durant les décennies 1950 et 1960, on peut en retenir les principaux.

    Cathode Ray Tube Amusement Device (1947)

    Découvert depuis quelques années seulement, CRTAD est le plus ancien jeu connu et date de 1947.

    Les créateurs sont Thomas T. Goldsmith Jr. et Estle Ray Mann. Ils utilisent un tube cathodique pour l’affichage. Il s’agit d’un jeu de simulation de lancer de missile. Le joueur utilise son écran comme un radar et y appose des films colorés pour agrémenter le jeu. L’inspiration est claire, la Deuxième Guerre mondiale, la science et le futur. Le brevet « Cathode Ray Tube Amusement Device » est déposé en janvier 1947 et enregistré en décembre 1948. Le jeu ne semble pas avoir connu beaucoup de succès.

    Cathode Ray Tube Amusement Device, schéma, 1948, domaine public.

    Chess (1947–1958)

    Alan Turing (1912-1954) est un mathématicien et cryptologue qui va poser les bases théoriques de l’informatique dès 1936. Ce sujet britannique va améliorer les fameuses « bombes cryptologiques » polonaises à même de faciliter le décodage des machines de communication chiffrée Enigma de l’armée allemande. Il a ensuite théorisé sur le jeu d’échecs afin d’étudier les concepts d’intelligence artificielle. En 1947, Turing conçoit un programme de jeu d’échecs, mais il n’existe alors aucun ordinateur capable d’exécuter son programme. Ce n’est que dix ans plus tard que Dietrich Prinz, qui était un de ses collègues à l’université de Manchester, programme une ébauche limitée sur l’ordinateur Ferranti Mark I. Elle ne résout que le problème du mat en deux coups et sans sortie vidéo, en utilisant le télétype. Ce n’est donc pas encore un jeu vidéo, mais le concept d’intelligence de la machine est désormais posé et démontré. L’ordinateur sera un adversaire au joueur.

    Alan Turing statue à Bletchley Park, © Ian Petticrew, CC.

    Bertie the Brain (1950)

    Face à l’informatique naissante et son immense potentiel ludique, la technologie analogique a encore matière pour simuler une intelligence à même de servir d’opposant. « Bertie The Brain » est une machine conçue par Rogers Majestic pour l’Exposition nationale canadienne de 1950. Le docteur Josef Kates y crée un jeu de morpion à plusieurs niveaux de difficulté. Les visiteurs de l’exposition peuvent l’affronter grâce au clavier numérique de saisie et un affichage sur oscilloscope, le tout inclus dans un immense boîtier façon parc d’attractions.

    Nim (1951)

    Dans le même esprit de démonstration populaire, le constructeur anglais Ferranti expose l’ordinateur NIMROD lors du Festival of Britain, le 5 mai 1951. Ce véritable ordinateur de plus d’une tonne est plus gros qu’un camion. Des panneaux d’ampoules et d’inter-rupteurs assurent la communication avec le joueur. La machine est exclusivement dédiée au jeu de Nim. Très ancien, ce jeu à deux joueurs est très simple. On place un paquet d’allumettes sur une table. Chaque joueur prend à tour de rôle de une à trois allumettes. Le gagnant est celui qui prend la dernière.

    NIMROD est le premier ordinateur dédié à un jeu et s’appuie sur une adaptation d’un ancien calculateur de 1941. Un second exemplaire est construit pour le New York World’s Fair.

    OXO (1952)

    C’est en 1952 qu’Alexander S. Douglas, étudiant de l’université de Cambridge, écrit un programme de morpion baptisé « OXO ». C’est une démonstration appliquée à sa thèse sur l’interaction homme-machine. Il tourne sur l’EDSAC et, pour la première fois, le jeu se charge en mémoire avant d’être lancé. Le joueur dispose d’un oscilloscope qui affiche une matrice de 35 x 16 points. C’est suffisant pour le damier du morpion et les X et les O. Pour saisir la position de son pion, le joueur utilise un cadran téléphonique qui lui permet la saisie des chiffres de 0 à 9.

    OXO, le premier jeu vidéo de l’histoire, domaine public.

    Tennis for Two (1958)

    Chaque année, le centre de recherche nucléaire Brookhaven National Laboratory organise une journée porte ouverte. En 1958, William Higinbotham imagine une attraction qui ravit le public. Un jeu de tennis pour deux joueurs se joue sur un ordinateur analogique avec un oscilloscope et deux manettes spécialement créées pour l’occasion. Le jeu est vu de côté et le filet vertical sépare les deux adversaires. C’est le Department of Energy qui finance cette installation afin de promouvoir l’atome qui est alors paré de nombreuses vertus.

    Reconstitution de Tennis for Two sur CAX 2010. © Marlith, CC.

    Mouse in the Maze (1959)

    Avant l’émergence de Spacewar sur PDP-1, le Massachusetts Institute of Technology (MIT) dispose d’un ordinateur expérimental, le TX-0. De 1957 à 1961, les étudiants conçoivent de nombreux programmes, dont certains ont d’indéniables qualités ludiques. Le plus célèbre est Mouse in the Maze. Le joueur trace au crayon optique un labyrinthe, place un morceau de fromage et une souris sur l’écran. La souris va alors parcourir l’écran pour atteindre le fromage. Ce n’est pas très ludique, mais replacé dans le contexte, ce jeu fait fureur auprès des étudiants.

    Bornes d’arcade, © goodrob13, Flickr, CC.

    Playing in the seventies

    L’expérience de Spacewar va marquer la génération d’étudiants américains qui l’a pratiqué. Certains imaginent créer une adaptation commerciale, de nombreux autres vont jouer aux jeux d’arcade.

    L’été semble interminable le 29 août 1972. À 19 h, il fait encore une chaleur écrasante sur Mountain View quand Wayne tourne sur El Camino Real en direction de Sunnyvale. Son immense Pontiac Bonneville’66 dispose heureusement de la climatisation. Il semble vouloir profiter de sa fraîcheur tout en allant boire une bière bien fraîche avec sa nouvelle copine Sheena, une grande blonde qu’il a rencontrée lors d’une fête chez un ami commun, il y a moins d’un mois. Elle s’est installée près de lui sur la banquette aussi grande qu’un sofa et a déployé ses longues jambes bronzées de Californienne en pleine santé sur l’accoudoir de la portière. Il conduit lentement d’une main, la boîte automatique de l’imposant paquebot se charge de masquer l’existence du glouton moteur. Les informations à la radio ne parlent que du Watergate qui commence à faire du bruit et du Vietnam qui n’en finit pas. « Je vais mettre une cassette », fait Wayne en attrapant deux cartouches 8 pistes au hasard, Led Zeppelin IV et Back In The USA de MC5. « Houla ! », lui répond Shenna en choisissant une autre. « Je préfère Joni Mitchell Blue, c’est plus cool ». Elle enclenche la 8 track directement dans le poste et les premières notes de All I Want s’égrènent.

    « Allons boire une bière chez Andy Capp, c’est à côté. » La circulation est calme, ils se garent juste en face. Il y a toujours de la musique chez Andy Capp, mais Wayne a une autre idée en tête. Un pilier de comptoir de ses amis lui a dit qu’il y a un nouveau jeu particulièrement sympa. Il ne l’a pas dit à Sheena, mais il brûle de l’essayer. Le choix d’Andy Capp n’était pas innocent…

    Traversée la route brûlante en quelques enjambées rapides, le bar climatisé leur fait l’accueil d’une oasis. Çà et là, quelques personnes sont dispersées et le couple s’installe facilement à une table. Wayne jette un oeil dans le fond de la salle, en direction des machines de jeu. Il devine quelques personnes en train de jouer. Il sourit. Une plantureuse serveuse s’avance vers leur table et lance un jovial « Hi Guys ! ». Surpris, Wayne s’aimante machinalement le regard dans son décolleté outrageusement calculé. Sheena grogne et Wayne commande simplement deux bières. « Je vais aller voir la salle d’arcade, on dirait qu’il y a des nouveautés. »

    « Voilà », lui rétorque Sheena. Wayne passe les billards, les flippers et le Computer Space éteint. Il découvre deux gars en train de jouer à une borne rouge, ornée d’un petit nom : Pong. Un bip est émis régulièrement. Il s’approche en saluant deux autres quidams qui observent la partie, un verre de Bud à la main. En regardant par-dessus l’épaule, il découvre un jeu très stylisé dont il comprend instantanément le fonctionnement. C’est un jeu de tennis sommaire. Wayne retourne chercher Sheena pour s’essayer à une petite partie…

    Arcade

    Les jeux d’arcade sont généralement des jeux où, pour jouer, il faut mettre des pièces dans un monnayeur. Les premiers apparaissent au début du XXe siècle. Ce sont des jeux de lancer, des jeux de tirs, que l’on trouve dans les fêtes foraines. Le premier flipper est créé par Gottlieb à Chicago en 1931. Il est très rustique, fait de bois et entièrement mécanique, mais suit déjà la logique de la descente d’une boule à travers obstacles et puits. L’arcade tire son nom des lieux où les exploitants placent les machines. C’est souvent dans un centre commercial américain, dans une allée latérale pas trop exposée pour un jeu à l’abri des regards et hors de la vue du flot des visiteurs. Mais les bornes de jeu vidéo peuvent trouver leur place partout où le public peut jouer. En France, par exemple, c’est au bistrot.

    Galaxy Game

    Spacewar a marqué une génération d’étudiants scientifiques américains. En cette fin des années 1960, le prix de l’informatique baisse régulièrement, et certains imaginent pouvoir ainsi créer des bornes d’arcade payantes. C’est le cas de Bill Pitts, étudiant à Stanford, qui construit une adaptation baptisée « Galaxy Game ». Elle utilise le nouveau DEC PDP-11, qui ne coûte plus que 20 000 $ en 1969. La borne de jeu qu’il imagine intègre un ordinateur. En août 1971, tout est prêt pour le lancement commercial. Pitts est alors visité par un certain Nolan Bushnell qui travaille pour Nutting Associates. Il lui annonce qu’il a la même idée que lui, mais que son approche est infiniment plus rentable… Galaxy Game est malgré tout installé dans un bar près de la fac et connaît un réel succès. Il reste à l’état de prototype, car Bill Pits comprend que son jeu ne sera jamais rentable.

    Galaxy Game, 1971, Tom Purves, Flickr, CC.

    Nolan Bushnell

    Nolan est comme les autres étudiants scientifiques de sa génération. Né en 1943 à Clearfield, Utah, il assure avoir côtoyé Spacewar lors de son passage à l’université de l’Utah au milieu des années 1960. Mais il a plutôt dû le découvrir au SAIL, le laboratoire d’intelligence artificielle de Stanford où il pensait prolonger ses études en 1969. L’Utah ne dispose d’ailleurs pas de DEC PDP. Incontestablement, il adore le jeu. Plus jeune, il travaillait l’été dans un parc d’attractions, ce qui lui donne une bonne vision du monde de l’arcade. Comme Bill, il a compris le potentiel commercial de Spacewar, mais il a aussi compris que l’utilisation d’un ordinateur ne peut être rentable. Après avoir obtenu son diplôme en génie électrique en 1968, il continue de croire au potentiel de ce jeu.

    Nolan Bushnell en 2013, © Tech Cocktail, Flickr, CC.

    Il se fait embaucher par Ampex, célèbre fabricant de matériel audio et vidéo. En feuilletant les magazines informatiques spécialisés, il découvre un nouvel ordinateur, le Data General Nova, qui passe sous la barre des 4 000 $. La puissance de la machine est suffisante pour y connecter facilement quatre écrans et proposer simultanément quatre jeux. Son projet d’adaptation de Spacewar était en sommeil dans son esprit. Il refait surface. Nolan commence sérieusement à réfléchir et en débat avec Samuel Frederick Dabney, surnommé Ted, un collègue et néanmoins ami. Les deux forment un véritable tandem. Nolan est versé dans l’électronique numérique, et donc l’informatique, alors que Ted maîtrise l’analogique. À la fin 1970, ils se rendent à l’évidence. Le Nova n’est pas assez puissant pour gérer du temps réel et afficher un jeu. Cette impasse technique n’ôte pas l’intérêt pour le projet aux deux concepteurs.

    Data General Nova, © Jeff Keyzer, CC.

    « Et si nous simulions le fonctionnement de Spacewar ? Ne pourrions-nous pas recréer le jeu de façon analogique ? » De cette interrogation essentielle, la réponse devient alors évidente. Tout serait plus simple et moins coûteux. Évidemment, il faudra probablement consentir quelques simplifications. Il n’y aura qu’un seul joueur qui aura pour mission de tirer sur deux soucoupes volantes. L’étoile centrale à gravitation progressive demeurera présente et ajoutera ce supplément de risque propre à Spacewar.

    À l’été 1971, Ted et Nolan disposent d’un jeu complet. Comme pour toute entreprise, il faut trouver du financement. Ils contactent Nutting Associates. Cette petite société avait créé une machine de QCM pour l’entraînement des soldats de l’U.S. Navy. Les frères Nutting décidèrent alors d’adapter cette machine pour les salles d’arcade et la baptisent « Computer Quizz ». Elle aura même un certain succès. Bill Nutting accepte le projet et recrute Nolan Bushnell pour lancer son adaptation de Spacewar. Le jeu est baptisé « Computer Space » et sort en novembre 1971.

    Le premier ordinateur de l’espace n’en est donc pas un, contrairement à Galaxy Game qui avait fait ses débuts sans suite deux mois avant.

    Computer Space, écran, domaine public.

    Aucun des nombreux étudiants de Stanford qui se pressent sur la machine ne s’en soucie. Pour un « dime », ils s’imaginent participer au rêve américain de conquête spatiale qui se nourrit de science-fiction. Le tube cathodique de l’écran apporte cette profondeur qui fait rêver. La machine sort de l’esprit du concepteur et recrée un univers dans celui des joueurs. Il est très sommaire, mais l’imagination du joueur compense.

    Si le jeu est connu pour n’avoir eu qu’un succès modéré, il faut le placer en perspective des productions qui vont suivre. Force est de reconnaître que Computer Space a beaucoup plu. Mille cinq cents exemplaires ont été construits et représentent une belle entrée en matière dans l’univers du jeu vidéo d’arcade. Sorti du contexte du joueur élève ingénieur, il est clair que la machine est encore trop complexe pour des gens qui ne connaissent que la radio, la télévision et les flippers. Aussi bon entrepreneur qu’est Nolan Bushnell, il comprend qu’il n’a pas pensé au public moyen, qui représente l’essentiel des joueurs. Le jeu est trop complexe, il faut quelque chose de plus intuitif. Le jeu vidéo est passé de l’ordinateur à la borne d’arcade.

    Brown Box

    À cette même époque, Ralph Baer (1922-2014) est ingénieur en chef chez Sanders Associates, un contractant de l’armée américaine. En 1966, il imagine la possibilité de créer un périphérique dédié au jeu pour le téléviseur familial. Ralph se lance dans la conception d’un prototype baptisé « Brown Box » en raison de sa forme et du bois sombre qui la compose. Après plusieurs prototypes, la dernière boîte intègre une série de jeux : une poursuite pour deux joueurs, un ping-pong vu de dessus et du tir sur cible, qui utilise un petit fusil jouet spécialement modifié. En mars 1967, il présente son projet à la direction de Sanders. L’accueil est plus que mitigé. Un tout petit crédit lui est malgré tout accordé. À la fin de l’année, le câblo-opérateur Teleprompter Corp. semble être intéressé par le projet, mais ne donne pas suite. Ralph Baer ne sait alors plus comment la Brown Box pourrait être diffusée. Sanders enterre ce projet trop novateur.

    La Brown Box, prototype de l’Odyssey, © George Hotelling, Flickr, CC.

    Odyssey

    Au début de la décennie, Ralph Baer réussit à concrétiser commercialement son projet Brown Box. Son employeur, Sanders Associates est parvenu, après plusieurs années de recherches, à signer un partenariat avec Magnavox, le fabricant de téléviseurs. En janvier 1971, Baer et ses ingénieurs vont présenter la console aux instances de Magnavox. Ces derniers adhèrent au concept et lancent la création de la console familiale de salon telle qu’on la connaît. Son design est dans l’esprit de leur électronique grand public. Ils la baptisent tout d’abord la console « Skill-O-Vision », puis « Odyssey ». Il y avait peut-être l’esprit du HAL 9000, le « personnage » de fiction du film 2001 Odyssée de l’Espace de Kubrick. C’est en fait le système informatique central embarqué du vaisseau Discovery One. En route vers Jupiter, il trace un signal émis par un monolithe découvert sur la Lune… Le film était sorti en 1968.

    Magnavox Odyssey, © RS.

    Magnavox agrémente la console avec de nombreux accessoires, cartes, billets, jetons, inspirés des jeux de société. Le jeu vidéo est balbutiant et se cherche. Des films colorés à placer sur le téléviseur sont fournis en deux tailles et améliorent le rendu de l’image. Les sept jeux de la Brown Box passent à douze et se retrouvent sous la forme de petites cartouches, même si elles ne contiennent pas d’électronique. Ce ne sont que des configurations de pistes qui permettent de paramétrer le fonctionnement de la console. Le célèbre fusil est proposé à travers l’extension Shooting Gallery et quatre jeux supplémentaires.

    À partir de mai 1972, le constructeur décide de présenter ce jeu pour téléviseur à la presse et aux revendeurs. Ainsi, le 24 mai, un show est organisé à l’Airport Marina de Burlingame, près de San Francisco. Dans le public, Nolan Bushnell signe le registre des visiteurs et découvre l’Odyssey et son Ping-Pong

    Cette console avant-gardiste va connaître un succès américain mesuré. La production est lancée en janvier 1972. Magnavox lance de grandes campagnes marketing. Quatre-vingt-cinq mille Odyssey sont vendues en 1972, et environ vingt mille fusils. Mais les consoles sont distribuées exclusivement dans le réseau Magnavox, et l’acheteur peut facilement croire qu’il faut disposer d’une télé-vision de la même marque pour en profiter. Cela freine sûrement les ventes, et la console sombre dans l’oubli deux ans plus tard. Le pionnier du jeu vidéo familial n’y croit plus.

    Syzygy

    De son côté, Nolan comprend le potentiel du jeu de ping-pong, d’une simplicité absolue et à la prise en main facile. Deux joueurs se renvoient la balle. Avec son partenaire Ted Dabney, ils décident de quitter Bill Nutting pour évoluer directement avec leur propre structure créée en 1969, Syzygy. Ce terme barbare et néanmoins astronomique désigne une conjonction astrale de trois corps célestes sur une même ligne. Le 27 juin 1972, conscients que ce nom est déjà utilisé par une société de couvreurs, ils enregistrent la société Atari, un terme issu du jeu de Go. Ils s’établissent alors au 2962, Scott Boulevard à Santa Clara, en Californie. Leur premier contrat sera la réalisation d’un jeu de voiture pour Bally. Ils embauchent leur premier ingénieur pour l’occasion. C’est Al Alcorn, que Ted et Nolan connurent en tant que stagiaire, alors qu’ils travaillaient chez Ampex.

    Pong

    Al Alcorn reçoit pour premier travail de développer un équivalent du Ping-Pong de l’Odyssey. Il recrée le jeu avec zèle et l’améliore sensiblement. La balle rebondit suivant un angle variable lié au point d’impact sur la raquette. Au bout de quelques échanges, la balle accélère. Ces petits détails ajoutent à la qualité du gameplay. Bushnell le trouve vraiment convaincant et pense qu’il s’agit d’un bon produit qu’il faut commercialiser.

    Atari Pong, © RS.

    Rapidement, un prototype est construit. Pour effectuer un test en réel, Bushnell et Alcorn installent cette machine en août 1972

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