Découvrez des millions d'e-books, de livres audio et bien plus encore avec un essai gratuit

Seulement $11.99/mois après la période d'essai. Annulez à tout moment.

Sous écran total: Du mythe de l’homme augmenté à la cyberaddiction
Sous écran total: Du mythe de l’homme augmenté à la cyberaddiction
Sous écran total: Du mythe de l’homme augmenté à la cyberaddiction
Livre électronique253 pages2 heures

Sous écran total: Du mythe de l’homme augmenté à la cyberaddiction

Évaluation : 0 sur 5 étoiles

()

Lire l'aperçu

À propos de ce livre électronique

Écrans d’ordinateurs, téléphones, télévisions, écrans de contrôle… Ils nous réveillent, nous accompagnent tout au long de la journée, nous bordent. Promesse tenue ? Ils garantissent l’accès à un monde meilleur, en sécurité, une porte ouverte sur un univers intarissable et illimité. Pourtant, ces dernières années ont été le théâtre d’une escalade de dérapages croissants ; violences, isolements, effractions dans nos intimités, pertes de repères. Au premier rang des victimes ; nos enfants. Mais tout de suite après, toute la société… salariés, aînés, indépendants…
Mais nous sommes nous interrogés sérieusement sur l’impact du recours exponentiel à ces écrans dans la transformation de nos comportements, les changements profonds de nos usages et les mutations qu’ils engendrent dans nos interactions avec nos semblables ?
Entre progrès, bénéfices, dépendances, servitudes ou addiction, Karine, psychothérapeute, et Elvire, consultante en ressources humaines, nous font voyager dans les espaces numériques qui accueillent nos existences. Elles posent nos regards sur ces outils du quotidien, observent les coulisses, ouvrent les yeux des lecteurs sur les bienfaits et les menaces d’une vie sous écran total, et essayent d’en comprendre les ressorts pour nous permettre de vivre avec, en conservant liberté et en protégeant nos santés mentales d’un scandale sanitaire et d’un délitement du socle de nos sociétés : l’humain et le sens.
LangueFrançais
Date de sortie25 janv. 2024
ISBN9782312141473
Sous écran total: Du mythe de l’homme augmenté à la cyberaddiction

Auteurs associés

Lié à Sous écran total

Livres électroniques liés

Histoire pour vous

Voir plus

Articles associés

Catégories liées

Avis sur Sous écran total

Évaluation : 0 sur 5 étoiles
0 évaluation

0 notation0 avis

Qu'avez-vous pensé ?

Appuyer pour évaluer

L'avis doit comporter au moins 10 mots

    Aperçu du livre

    Sous écran total - Karine De Leusse Schirtzinger

    cover.jpg

    Sous écran total

    Karine de Leusse Schirtzinger

    et Elvire Daudigny del Fondo

    Sous écran total

    Du mythe de l’homme augmenté à la cyberaddiction

    LES ÉDITIONS DU NET

    126, rue du Landy 93400 St Ouen

    © Les Éditions du Net, 2023

    ISBN : 978-2-312-14133-6

    À nos enfants, pour leur merveilleux soutien, leur amour.

    Prologue

    Nées à une époque où l’on composait les numéros de téléphone à sept chiffres sur un cadran mécanique, nous pourrions appartenir au groupe des derniers des Mohicans qui vivent « déconnectés » de l’univers numérique. Et pourtant, comme 92 % des Français (source Arcep), Internet fait partie de nos vies.

    Dans nos foyers, au bureau, sur la table du salon, dans la poche, dans un sac, en poste fixe, portable, tablette, ou petit objet de 150 à 250 grammes, les écrans sont devenus des prolongements de nous. Customisés, décorés et organisés par nos soins, ils sont les amis indispensables qui répondent instantanément à toutes nos demandes. Ils nous réveillent, nous chantent une berceuse pour nous endormir, ils mesurent nos pas et nous invitent à nous lever pour rompre la sédentarité. Ils nous géolocalisent, nous guident, prévoient, organisent notre temps, nous alertent, nous distraient, veillent sur nous, nous donnent accès à des droits, nous permettent d’échanger avec d’autres humains ou de l’Intelligence artificielle (que l’on nomme communément IA).

    « Deux ans après la crise sanitaire, 52 % des Français majeurs estiment mieux maîtriser les outils numériques » Source Arcom 2022. À marche forcée, nous avons appris, renforçant la dépendance de nos organisations et nos existences à l’ensemble des outils que nous utilisons quotidiennement. Le chaos qui secoue nos vies à la moindre panne sur les réseaux, témoigne de la fragilité de notre écosystème. Nous confions, voire déléguons nos destinées à une technologie complexe. Seuls quelques élus informaticiens en maîtrisent réellement le fonctionnement. Nous ne sommes que des utilisateurs. Les services proposés par l’industrie du numérique sont tels que nous consentons à leur offrir nos datas en contrepartie, à déposer à leurs pieds les maillons des chaines qu’ils assembleront pour mieux nous retenir. Le cœur de nos vies s’est lié intimement à ce monde virtuel.

    Les apports sont nombreux et indiscutables ; personne n’imagine un retour en arrière. Pourtant, comme tout progrès nous avons observé, dans nos familles comme dans nos vies professionnelles, des dérapages et dangers. « Perte de repères, grande détresse, solitude, addiction, infobésité ». Ces phénomènes sont communs à nos deux sphères.

    Karine et moi avons travaillé à l’écriture d’un ouvrage permettant à chacun d’observer, analyser, prendre du recul et se protéger de certaines applications qui peuvent nuire à notre bien-être, notre santé mentale, voire nous plonger dans une dépendance aliénante. Nos métiers nous conduisent à mesurer l’incidence majeure de nos changements d’usages sur notre civilisation. Il ne s’agit pas de science-fiction mais bien de notre actualité contemporaine, notre vie aujourd’hui, ici et maintenant.

    Après un rappel sur les ressorts de l’addiction, nous vous proposerons de visiter les coulisses de l’industrie du numérique. Quels leviers active-t-elle pour nous « fidéliser » jusqu’à parfois nous assujettir ?

    Dans un second temps, nous passerons en revue les grandes familles d’applications en nous interrogeant sur leurs bienfaits mais également les risques inhérents à certaines utilisations. Un premier volet sera consacré à l’espace privé, le second à notre vie sociale.

    Enfin, nous vous soumettrons des réflexions, analyses, hypothèses et questions ouvertes.

    Nous faisons le vœu que ce livre vous apporte une grille de lecture simple et vous fasse poser un regard différent sur la promesse des petites icônes qui prétendent n’être qu’amies.

    Karine et Elvire

    Présentation des auteures

    Karine de Leusse Schirzinger, Psychothérapeute clinicienne spécialiste en cyberaddiction. « J’ai constaté que des dérives majeures s’immisçaient au cœur de la vie des parents et adolescents que je reçois en consultation. Des parents qui se sentent démunis et destitués de leur autorité parentale, et des adolescents en quête de nouveaux codes, de repères et d’identités comme il est de passage lors de cette période de transition. A ce tandem s’ajoutent des écrans prêts et parfaitement configurés pour proposer un ailleurs irrésistible. Un ménage à trois infernal sous le toit familial. »

    Elvire Daudigny del Fondo, Consultante en Ressources Humaines, « Je suis témoin d’un grand bouleversement dans les entreprises. La multiplication des outils numériques, la digitalisation des process et de la communication ainsi que la banalisation du télétravail ont plongé les salariés dans un environnement parfois très douloureux. Leur mauvaise utilisation ou le détournement qu’il en est fait contribuent à une souffrance au travail grandissante ».

    PREMIÈRE PARTIE :

    Décryptage

    Mieux comprendre l’addiction

    Analyse des mécanismes activés dans le cadre de la cyberaddiction

    ADDICTION ET MÉTABOLISME : VOLET MÉDICAL

    Pour bien parler et traiter du sujet de l’addiction, il nous semble essentiel de distinguer entre dépendance et addiction. Sans être synonymes, ces deux notions sont étroitement liées.

    La dépendance est la conséquence d’un déséquilibre du fonctionnement neurologique à la suite d’une consommation régulière d’une substance psychoactive ou d’un produit non psychoactif. C’est ce déséquilibre qui provoque l’envie de consommer à nouveau cette substance psychoactive ou ce produit afin de retrouver son état « normal » sans ressentir les effets négatifs et de mal-être du manque.

    L’addiction est le degré supérieur de la dépendance. Il s’agit d’une incapacité pour l’individu à ne pas consommer la substance ou le produit sans substance malgré la connaissance des effets négatifs et/ou morbides qui s’ensuivront. La personne est vulnérable face aux signaux de plaisir envoyés par les neurotransmetteurs dans son cerveau qui génèrent chez elle des comportements compulsifs, incontrôlés et irraisonnés. Au fur et à mesure, le plaisir de l’individu n’est plus la priorité, il tente de calmer ses anxiétés et instabilités émotionnelles par la consommation immédiate.

    Le système de récompense : pour comprendre ce que nous nommons le circuit de récompense, attardons-nous sur 2 expériences ; l’une en 1957, la seconde dans les années 2010.

    Les neurobiologistes s’interrogeaient déjà sur la notion de plaisir au siècle dernier. Les résultats d’une célèbre expérience furent publiés en 1954. « Olds et Milner », deux chercheurs américains, ont mis en évidence que des rats sur le crâne desquels avaient été disposées des électrodes, avaient appris à appuyer sans relâche sur une pédale délivrant un courant électrique à la pointe de l’électrode leur procurant du plaisir. Après l’apprentissage, les rats ne cessaient d’appuyer sur la pédale… jusqu’à en mourir.

    « En appuyant sur un levier, le rat peut stimuler lui-même cette région de son cerveau, à l’origine de la sensation de plaisir. Une fois que le rat a découvert comment s’administrer une sensation de plaisir, il s’auto-stimule sans arrêt, ne prenant même plus le temps de manger. La stimulation directe de ce circuit est donc tellement puissante que l’animal en oublie ses besoins fondamentaux. C’est exactement ce qui se passe avec la prise de drogues ». Par Sandrine Beaudin découverte du circuit de la récompense : Olds & Milner, 1954.

    Les chercheurs ont été obligés de couper le circuit électrique pour les sauver. De faible intensité, le courant ne présentait pas de danger. Mais les rats cessaient de s’alimenter et de boire tant le courant leur procurait de plaisir. Les scientifiques ont ainsi mis en évidence que « la stimulation de certaines aires cérébrales entraînait une satisfaction si intense qu’elle faisait perdre toute sensation de faim et de soif ».

    Dans les années suivantes, la conjonction des connaissances en anatomie, neurobiologie comportementale et neuropharmacologie ont défini une entité dénommée « circuit de la récompense ». Les progrès de l’imagerie cérébrale ont mis en évidence des débits sanguins cérébraux chez l’Homme lorsque le plaisir, qu’il soit d’origine émotive, sensorielle ou sexuelle, était présent.

    Dans les années 2000, une équipe canadienne a établi que les désactivations observées dans les deux zones principales concernées par l’addiction (l’amygdale et le cortex entorhinal) correspondent à une disparition de la vigilance vis-à-vis du monde extérieur.

    Les recherches de neuroimagerie illustrent donc l’existence de structures cérébrales activées par le plaisir, quelle qu’en soit l’origine, et expliquent les comportements de l’individu sous addiction.

    Quelques décennies plus tard, une seconde expérience nous permet d’approfondir le sujet. Wolfram Schultz à Fribourg en Suisse étudie les réactions de singes éveillés.

    Elle se décompose en 3 phases :

    1. Administration aléatoire d’une goutte de jus de pomme (récompense) qui entraîne, après environ 200 ms, une augmentation de l’activité du neurone dopaminergique{1}. Ce processus, inné, est dans ce cas dû, entre autres, à la présence de sucre dans le jus de pomme et signale à l’organisme une source d’énergie.

    2. Après apprentissage de l’association « lumière qui s’allume → goutte de jus de pomme », le neurone dopaminergique s’active juste après le stimulus lumineux et non plus après la récompense. Notons que le temps écoulé entre l’allumage de la lumière rouge et l’arrivée de la goutte de jus de pomme n’est que légèrement supérieur à une seconde, un temps nécessairement court pour que l’association stimulus-récompense puisse avoir lieu.

    3. Cette fois, le singe ne reçoit plus de jus de pomme après le stimulus lumineux. Ce dernier est cependant toujours associé à l’activation du neurone dopaminergique. En revanche, une seconde et demie après le stimulus lumineux, juste après le moment où la goutte de jus de pomme aurait dû être reçue, le neurone dopaminergique devient silencieux pendant une centaine de millisecondes.

    Finalement, après conditionnement, le neurone dopaminergique signale l’erreur de prédiction de la récompense, c’est-à-dire la différence de valeur entre la récompense attendue et la récompense obtenue. Les neurones dopaminergiques indiqueraient ainsi par leur baisse d’activité l’existence d’un manque et représenteraient un signal incitant à compenser ce dernier.

    Auteur(s)/Autrice(s) : Pascal Combemorel, d’après Schultz et coll., 1997.

    Cette troisième phase est surprenante. Chez un singe qui a compris qu’il existait un lien entre la lumière rouge et le jus de pomme, on observe que lorsque le jus de fruits n’est plus délivré, l’activité des neurones à dopamine chute quasi instantanément quand la récompense attendue ne vient pas. Les chercheurs proposent l’idée que cette absence momentanée d’activité des neurones à dopamine provoque un mal-être. Chez l’humain, cela correspondrait à une douleur, une frustration, une perte ou un abandon.

    Ces deux expériences nous informent sur le mécanisme de l’addiction. Non seulement on comprend qu’un circuit de récompense nait de l’utilisation de certaines substances (ou dans le cas de notre étude, des applications qui peuvent nous procurer du plaisir « gagner » une partie, recevoir des compliments, jouir de privilèges au travers d’un avatar…), mais que pour accéder à ce plaisir, le cerveau baisse la garde, et se montre moins vigilant. L’individu a conscience du risque qu’il court, mais préfère ce scénario à celui qui pourrait occasionner la sensation de frustration. Il s’expose volontairement ainsi aux menaces extérieures.

    Le système de la récompense n’est pas le seul impacté dans l’addiction puisque les circuits de la mémoire et apprentissage, du contrôle et de la motivation se trouvent affectés et jouent un rôle essentiel.

    Si la dépendance n’entraîne pas forcément l’addiction, l’addiction elle est toujours conséquente à une dépendance. Avec l’addiction, le cerveau subit des perturbations complexes de ses mécanismes entraînant une perte de contrôle du comportement. On la classe dans les maladies neurologiques.

    Les différentes addictions :

    On distingue deux types d’addiction :

    ➔ addiction liée à une substance ;

    ➔ addiction liée à des produits sans substance.

    Quand l’individu n’arrive plus à maîtriser son rapport à la substance ou l’objet (et dans notre cas, nous parlons du produit numérique), dès qu’il souffre de ne pas pouvoir « consommer », nous sommes en présence d’une addiction.

    Le processus addictif est plus ou moins rapide. Les individus concernés vont augmenter progressivement la fréquence et la quantité de leur consommation. Il est important de préciser que nous évoquons les sujets souffrant d’une pathologie, tous les consommateurs ne sont pas concernés car fort heureusement, tout le monde ne devient pas « accro ».

    Précisons que l’addiction est une maladie du système nerveux face à laquelle nous ne sommes pas tous égaux en fonction de nos gènes, de l’environnement dans lequel nous évoluons et de notre histoire (chocs émotionnels, traumatismes).

    Le rôle du cerveau est bien entendu central dans le processus d’addiction et des troubles qui en découlent. Le mécanisme, fondement lié au système de récompense, est perturbé par la consommation qui démultiplie la sensation de plaisir. Il s’agit parfois aussi d’un dysfonctionnement initial du cerveau qui ne régule pas correctement son système de récompense.

    Dans le premier cas, le cerveau va recevoir une récompense qu’il n’attendait pas. Il provient d’un comportement particulier ou de contenu spécifique. Le cerveau va alors « graver » la conséquence positive de ce comportement et en redemandera. Le système de récompense devient hypertrophié, l’addiction entretenant au niveau du cerveau un dysfonctionnement du système dopaminergique.

    La dépendance, prémices de l’addiction, révèle toujours une insatisfaction, un vide. La consommation vient « remplir », de façon transitoire, ce vide. Le lien entre dépendance et addiction est bien le fruit de l’histoire d’un manque. On parle alors de la mise en place

    Vous aimez cet aperçu ?
    Page 1 sur 1