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Markind Epsilon Eridani Poussières
Markind Epsilon Eridani Poussières
Markind Epsilon Eridani Poussières
Livre électronique276 pages4 heures

Markind Epsilon Eridani Poussières

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À propos de ce livre électronique

Il suffit parfois de si peu pour que tout bascule. Une seconde, un pas, un souffle et tout peut disparaître. Le rêve se mue en cauchemar. Le désespoir s’efface devant la ténacité. La création, un espoir, un nouvel horizon.
Après avoir percé le milieu interstellaire, le Markind Epsilon Eridani offre à l’humanité un nouvel avenir. L’ensemencement se déroule sans heurt sur la planète Saruan-c. Sa nature est riche, fertile et pleine de surprises. Eran, un jeune botaniste, découvre sa beauté étonnante et fatale. Un endroit où les plus beaux fruits de la création peuvent s’épanouir. Un vent nouveau se lève pour tous, l’annonce d’une tempête à venir… ou d’un nouvel horizon ?
Ce qu'ils pensent :
"Je viens de terminer ce livre et j’ai littéralement embarqué avec Eran dans cette aventure. La lecture est très agréable de par la fluidité de l’écriture et l’originalité de l’histoire. On s’attache aux personnages et la découverte de cette planète étonnante a piqué ma curiosité. J’ai passé un très beau moment de lecture, bravo et merci." Maryline Q.
"Les deux premiers livres de la saga Markind, c'est gigantesque et précis, c'est une aventure à travers la galaxie et c'est ultra haletant, j'ai adoré, j'ai été embarqué dans un voyage loin loin loin, je vous les recommande !" Bryan L.
"Encore un moment de lecture passionnant! Non redondant avec le 1ier livre de la saga, on va de nouveau de surprises en surprises, d’événements en événements, et de découvertes en découvertes :) Il est certain que l’auteur ne manque pas d’imagination, et on veut le laisser faire!! Merci!" Un lecteur / Une lectrice

LangueFrançais
Date de sortie24 juil. 2020
ISBN9798890084132
Markind Epsilon Eridani Poussières

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    Aperçu du livre

    Markind Epsilon Eridani Poussières - Philippe Ruaudel

    Du même auteur

    Romans

    Lignée Markind 55 Cancri

    Markind 55 Cancri : Vaisseau mère

    Nouvelles

    Markind Moments : Entrepôt

    Table des matières

    Du même auteur

    REMERCIEMENTS

    Introduction

    1. Hurlements

    2. Refuge

    3. Contact

    4. Peur bleue

    5. Surface

    6. Évacuation

    7. Errances

    8. Curiosité

    9. Création

    10. Archivés

    11. Spaciemens

    12. Mémorial

    13. Nature

    À PROPOS DE L’AUTEUR

    REMERCIEMENTS

    En écrivant ces quelques lignes, je me remémore l’ensemble de ceux qui m’ont soutenu dans cette belle aventure qu’est l’écriture.

    Je n’oublierai jamais mes premiers lecteurs dont les retours ont chassé les doutes et les peurs des premiers instants.

    Une tendre pensée à ma mère dont l’avis aiguisé prime toujours.

    Merci à mon épouse, sans qui le manuscrit serait encore en phase corrective.

    Merci à la ville de Dieppe qui m’a offert, sans retenue, un espace de liberté.

    Avant-propos

    Dans l’état des connaissances scientifiques de l’humanité du XXIème siècle, il existe entre deux cents et quatre cents milliards d’étoiles dans notre galaxie, la Voie lactée. On y dénombre un minimum de cent milliards de planètes gravitant autour de ces astres.

    Pour certains, ce sont autant de lieux à scruter, à étudier et à cartographier en y posant des sondes.

    Pour d’autres, ce sont autant de terres où poser le pied.

    Pour moi, humble auteur, ce sont autant de mondes où poser mes mots.

    L’univers devient un terrain de jeu idéal pour développer des intrigues, placer mes personnages dans des situations incroyables et créer des êtres fantastiques. Les aventures de la saga Markind s’étaleront dans le temps et l’espace, comme lui, sans limite. Là où l’œuvre de ma plume se stoppera, l’imaginaire d’un d’entre vous la prolongera.

    Ensemble, emplissons de nos rêves l’immensité interstellaire.

    Introduction

    Chaque endroit de la Terre, le berceau de l’humanité, a été conquis, scruté, modifié, répertorié. Puis l’Homme a logiquement lancé son dévolu sur les astres qui le narguaient depuis des millénaires dans les cieux. Pleine d’arrogance, l’humanité a dépensé sans compter en chair, en monnaie, en ressources nécessaires pour combler son appétit.

    En 2120, elle peut se targuer d’annoncer que l’on naîtra désormais autre part que sur la Terre ou sur son orbite. Mars devient un nouveau berceau. Elle devient également un nouveau champ de bataille où les nations mourantes sont supplantées par les firmes terriennes les plus puissantes, ayant même perdu leur caractère multinational. Planter un drapeau pour revendiquer une possession est totalement désuet. Ce qui prime est, sous couvert d’universalité, de disposer de la gestion d’une ressource ou de sa distribution.

    Les générations d’humains se succèdent parfois dans la souffrance et les difficultés d’avoir quitté le si doux cocon terrien. Cependant, l’humanité s’adapte socialement aux contraintes de la vie martienne. Au XXIVème siècle apparaît l’Homme de Mars. Né d’on ne sait où, le terme est attribué à un éditorialiste terrien qui l’utilise dans un beau papier, après un séjour en immersion dans les centres de vie commune martiens. En soi, rien de bien différent, comparé aux Terriens. Rien, physiquement parlant au départ, puis cette fraction de l’humanité invente et utilise « l’humaniformation », une technique de bioingénierie avancée. Désormais, après avoir adapté la société et les esprits, on forge la chair pour vivre sur Mars. Les Terriens abhorrent cette technique. La pression terrienne s’accentue de plus en plus sur ces femmes et hommes descendants des premiers colons, rejetés.

    Pour les Terriens, il s’agit d’un nouvel Âge d’or. Les ressources, issues de l’exploitation de la ceinture d’astéroïdes principale, font de Mars un lieu de négoce incontournable. En parallèle, la terraformation de Mars engloutit les fortunes, les ressources pour faire oublier le terme de « planète rouge ». On la rêve bleue, verte, terrienne.

    Les Hommes de Mars, descendants des esprits les plus aiguisés et téméraires, ne partagent pas ces mêmes idéaux. Ils ont gardé le souvenir de l’impact de l’Homme sur son berceau, que beaucoup souhaitent fuir. Les tensions s’accroissent au fil des générations. Jusqu’au XXVIIIème siècle, les émeutes se succèdent. Elles sont réprimées durement par les Terriens. Les Hommes de Mars courbent l’échine. Ils rêvent. Ils s’imaginent affranchis. Affranchis des desiderata terriens. Ils comprennent que leur avenir n’est pas terrien, pas martien. Il est humain. Il leur faut un nouveau berceau. Mais pour renaître, il faut un nouvel ensemencement.

    Dans l’ombre des Terriens, cette fraction de l’humanité imagine, cogite, invente. Enfin, un événement fortuit, la découverte des bulles de Lemer, leur permet de créer un outil qui les amène à fendre le tissu interstellaire. Des années plus tard, le premier markind voit le jour. Il emmènera une première lignée d’humains vers un avenir incertain, mais offrant plus d’espérance. Ne faisant pas table rase du passé et pour ne pas répéter ses erreurs, la mémoire humaine prendra part au voyage. Œuvre secrète d’une branche des Hommes de Mars, les archivistes, l’Encyclopedia Humanis représente le passé cultivé des humains.

    Une première lignée humaine comptant trois cents membres d’équipage et futurs colons s’élance dans l’obscurité de l’espace en quête de la lumière d’une nouvelle étoile, 55 Cancri-A du système 55 Cancri, pour germer. Pour leur plus grand bonheur, ils parviennent à destination et peuvent ensemencer leur nouveau monde : Harriot-a, un satellite naturel de la géante gazeuse 55 Cancri-f, appelée Harriot, dans la nomenclature terrienne.

    Au XXXIIème siècle, une nouvelle lignée Epsilon Eridani voit le jour avec le départ du deuxième markind, depuis Harriot-a, vers le système Epsilon Eridani. Après avoir ensemencé, avec succès, la planète Daucus, le Markind Epsilon Eridani, chargé de rêves et d’espoirs humains, se dirige vers le système Saruan, six cents ans plus tard.

    1. Hurlements

    Mes enfants, vous ne serez jamais seuls.

    Il y aura toujours le souvenir.

    Eran, Maître de Saruan-c

    Le vent faisait battre la bâche à intervalles réguliers. Elle fermait une partie de l’ouverture naturelle donnant sur le canyon. Le claquement bruyant et répété tira Eran de son sommeil. Il se leva machinalement, une fois de plus, pour replacer la lourde pierre qui la maintenait en place. Au passage, il jeta un coup d’œil rapide à l’extérieur. Le vent soufflait toujours puissamment. Ce ne sera pas encore une journée à mettre mon nez dehors, pensa-t-il, résigné, en se recouchant sur son frêle matelas. Il se gratta nerveusement le visage. Sa barbe brune de plusieurs jours, qu’il portait à contrecœur, le démangeait. Malgré tout, elle lui donnait une impression de maîtrise sur le temps qui s’écoulait. Une fois rasée, elle rouvrirait sur un nouveau cycle. Tout en essayant de trouver une position plus confortable, Eran était à l’écoute des bruits environnants. Il finit par se rendormir.

    Cet endroit de Saruan-c, deuxième planète du système Saruan, était balayé régulièrement par des vents plus ou moins forts. Mais dans la configuration étroite du canyon, ils se montraient accélérés, et, en conséquence, violents. Inlassablement, ils charriaient un sable fin qui pouvait altérer le matériel et gêner les hommes. Cela faisait plus d’une semaine qu’Eran vivait reclus sur le flanc de la paroi d’une partie de canyon étroit. Cet endroit faisait d’ailleurs plus penser à un boyau. Cependant, au-delà de trois kilomètres, il s’ouvrait sur une largeur beaucoup plus importante. Eran avait trouvé refuge dans une poche rocheuse naturelle. L’humanité avait privilégié ce type d’habitat depuis ses débuts sur sa planète d’origine, la Terre. Une fois de plus, ce schéma se répétait à une distance gigantesque.

    Le pupitre d’information mobile, appelé plus communément PIM, généra une légère lumière bleutée qui s’accentua pour éveiller son porteur, suivie d’une légère vibration. Mais Eran était déjà réveillé, il regardait le plafond irrégulier de sa chambre de fortune. Il passa la main par réflexe sur l’appareil, le regard perdu dans ses pensées. Il les laissait envahir son esprit sans filtre. C’était, depuis de longues années, bien avant qu’il embarque sur le Markind Epsilon Eridani, une de ses méthodes pour éveiller son esprit. Ainsi, les idées fusaient dans sa tête : s’alimenter en eau, vérifier les réserves, manger juste ce qu’il faut pour tenir la journée, vérifier son matériel, effectuer des petites tâches de maintenance, s’alimenter, vérifier l’état de son environnement et sa sécurité, observer le canyon à la recherche d’une accalmie météorologique, programmer une éventuelle sortie.

    D’un geste souple, il se releva sur sa couchette et passa ses mains dans ses cheveux longs d’un noir de jais. Il attrapa un ruban joliment décoré pour les attacher d’un geste rapide et précis. Un mouvement répété de nombreuses fois. Pourtant peu pratique pour le port d’un casque ou d’autres équipements, cette longueur de cheveux lui plaisait. Cela lui rappelait ses premières années sur Daucus, sa planète d’origine. En effet, sur cet astre colonisé par l’humanité depuis quelques générations, il était devenu de coutume de laisser pousser les cheveux des enfants. Pour les plus jeunes d’entre eux, le moment de les coiffer était souvent synonyme de courses-poursuites avec les parents. Une des raisons rapportées sur cet usage était le souhait de gommer la différence entre filles et garçons dans leurs premières années. Tôt ou tard, leur corps s’occuperait de les différencier. Pourtant, certains jeunes adolescents daucusiens jouaient d’une apparence androgyne. Eran avait pris part à cette mode. Il en gardait encore l’aspect. Sans réelles formes, il était mince et grand. L’humaniformation, opérée sur le Markind Epsilon Eridani durant son voyage, avait renforcé ses traits. Cette technique de bioingénierie visait à modifier les Hommes pour s’adapter à la vie sur une nouvelle planète. Pour Saruan-c, les modifications avaient été légères et peu visibles. Elles touchaient en priorité la façon dont le corps assimilerait l’atmosphère dense de leur nouvel environnement. L’amélioration tenait aussi à un métabolisme plus efficace dans la gestion de l’énergie. La terraformation avait été bannie par l’humanité, trop coûteuse en ressources et trop destructrice pour la faune et la flore locale.

    Le jeune homme enfila sa combinaison légère. Elle réagit aussitôt à l’état de son porteur. Sa couleur afficha son statut. Le vert couvrit ses manches, indiquant sa spécialité : la biologie et plus précisément, la botanique par une feuille jaune stylisée sur sa poitrine et ses épaules. Les combinaisons, depuis leur développement sur Mars, étaient devenues comme des secondes peaux. Il en existait de plusieurs sortes, s’adaptant aux besoins de leur porteur. Chaque Markind ajoutait des fonctionnalités et améliorait ses capacités. Concentré de haute technologie, il s’agissait d’une belle réussite de coopération humaine qui alliait légèreté et sécurité et contribuait grandement à la réussite des colonisations planétaires successives.

    Au fond de son habitat précaire, un établi improvisé lui donnait un semblant de chez soi. On y retrouvait une partie du matériel nécessaire à la survie des colons en expédition. Divers ustensiles pour se restaurer étaient posés à côté du nettoyeur. Il attrapa un gobelet qu’il remplit avec précaution à partir des deux larges bidons d’eau potable posés à sa droite. La première sera bientôt terminée. Je vais devoir utiliser plus fréquemment le recycleur d’eau, réfléchit rapidement Eran.

    Chaque colonisation de planète avait poussé les humains à être économes et rigoureux dans leur gestion de l’eau et des matériaux. Ces rudiments étaient enseignés à tous, et ce, dès le plus jeune âge. Chaque déchet produit était aussitôt réutilisé et passé au recycleur. Il en existait deux types : l’un pour les liquides et un autre pour les éléments solides. Eran ne disposait que du recycleur de liquide. Les recycleurs des éléments solides étaient volumineux et gourmands en énergie. Cependant, les dernières avancées technologiques acquises par les ingénieurs sur Daucus avaient permis de réduire leur taille. Désormais, les transporteurs, ces véhicules tout-terrain destinés aux colons, en étaient équipés.

    Une fois avalée son eau rafraîchissante, il passa son gobelet sous le nettoyeur. Cet appareil à pulsions soniques et émission d’ultraviolets évitait la prolifération d’agents pathogènes. Ensuite, il vérifia les quantités de vivres restants. Son rationnement était fructueux. Il pourrait encore tenir une bonne dizaine de jours. Devant cette bonne nouvelle, il se laissa tenter par son péché mignon. Une purée fraîche de canneberges des hauts plateaux daucusiens. Il programma le synthétiseur. Aussitôt, sur son PIM s’afficha le temps nécessaire à la confection de son plat. Différentes statistiques à l’écran montraient qu’il frôlait l’addiction. Mais il aimait tant ce goût sûr et amer. Il avait découvert cette baie lors de ses études en botanique sur Daucus. Depuis, il pouvait difficilement résister à cette friandise pour son palais.

    En attendant, il avala une galette énergétique, beaucoup moins savoureuse à son goût, et retourna vers l’ouverture sur le canyon. La pierre tenant la bâche avait encore roulé. Il pesta en la remettant en place. Au passage, il jeta un coup d’œil prudent dehors. Le vent soufflait un peu plus fort qu’à l’accoutumée. Il sentit son moral baisser d’un cran. Le ciel était pourtant clément. Les rayons matinaux de l’étoile Saruan commençaient à pénétrer dans le canyon, révélant de superbes nuances orangées sur les parois rocheuses. Il remarqua quelques plantes sur la façade opposée se positionner pour profiter au maximum de cette source d’énergie. Elles se protégeaient des vents dominants dans les quelques niches et recoins à leur disposition. « Héliotropisme » ; ce mot fusa dans son esprit. Cette capacité étonnante qu’ont les plantes cherchant à capter la lumière de leur étoile avait une valeur universelle à ses yeux. Il aimait, lui aussi, cette sensation de douce chaleur que donnait sans retenue Saruan. Mais il faudrait patienter jusqu’à la fin de l’après-midi pour y goûter. Les vibrations de son pupitre d’information mobile le tirèrent de sa rêverie. Le synthétiseur avait terminé la préparation de son plat favori.

    À l’origine développés sur Mars, les synthétiseurs de nourriture avaient révolutionné la manière de s’alimenter d’une partie de l’humanité. Cette technologie avait mis un terme à l’asservissement animal à destination de l’alimentation humaine. En conséquence, elle libérait, en partie, l’Homme dans ses volontés de conquérir d’autres lieux dans l’univers. Il était en effet impensable d’emporter toute une ménagerie pour se nourrir. Cela avait une conséquence non négligeable. Les humains avaient subi des changements profonds de métabolisme et du réseau gastrique et entérique. Ils mangeaient bien moins que leurs ancêtres terriens mais cela leur profitait plus. Leur appétit avait changé d’horizon.

    Pourtant, Eran devait conserver des traces de ce passé bien lointain. Il salivait d’avance devant le bol rempli de la friandise qu’avait libéré la machine. Il y plongea ses longs doigts et se régala tout en plissant de plaisir ses yeux en amande.

    Après avoir vérifié le matériel et compilé les données dans son PIM, Eran sentit de nouveau poindre une vague de mal-être. Il utilisa aussitôt les techniques acquises lors de ses séances de préparation dans le centre de l’ensemencement de Nassine, la capitale de Daucus. Cependant, bien qu’elles fussent efficaces à plusieurs reprises, il sentait qu’elles touchaient à leurs limites. À quoi bon, je suis seul, pensa Eran. Telle une pulsion émanant du plus profond de son être, il hurla. Puis surgit un rire nerveux. Puis, il hurla de nouveau. Il sentait des larmes rouler sur ses joues. La digue avait cédé. Il s’effondra. En pleurs, il atteignit difficilement sa couchette. Enfin, il se recroquevilla, parcouru de soubresauts. Cette crise eut raison de ses forces. Aussitôt, sa combinaison afficha des flèches jaunes afin d’indiquer un changement d’état de santé.

    Ces vêtements de haute technologie étaient souples et légers. Ils agissaient comme des régulateurs médicaux pour leurs porteurs. Capables de prouesses médicales, les combinaisons vérifiaient en permanence l’équilibre biochimique de leur hôte. Dans le cas d’Eran, elle remarqua le désordre qui provoquait les tremblements. En corrélation avec la position allongée d’Eran, les systèmes médicaux intégrés diffusèrent une légère dose de calmants. En conséquence, la sédation endormit le jeune homme épuisé.

    À son réveil, la journée était déjà bien avancée. Il se dépêcha de s’occuper à diverses tâches pour ne pas retomber dans le même état d’esprit. Il faut que je me change les idées, je vais revérifier l’ensemble des cellules d’énergies, s’ordonna-t-il. Il s’attela à la tâche avec un zèle que son décurion aurait apprécié. Il chassa aussitôt son image de son esprit.

    « Quatre et non six ! » dit-il soudain tout haut.

    Comment avait-il pu commettre une erreur si évidente ? La référence qu’il utilisait depuis son arrivée et son installation dans cette partie du canyon était fausse. Il avait surestimé ses capacités et rentré la mauvaise valeur lors de son installation dans son refuge. Il prit de nouveau son contacteur et l’appuya rapidement sur chaque conteneur énergétique. Cela ne faisait plus aucun doute. Elles contenaient chacune seulement quatre cellules. Ce constat changeait beaucoup de choses. Il fallait revoir sa consommation à la baisse. Ainsi, une sortie pour rejoindre le transporteur devenait probablement nécessaire plus tôt que prévu. Des conteneurs énergétiques devaient encore y être disponibles. D’un autre côté, ces derniers jours, le fait de rester dans son refuge à flanc de falaise lui pesait de plus en plus. Mais la situation météorologique n’était pas en sa faveur. Les puissants vents contrecarraient quotidiennement ses plans.

    Saruan-c avait tous les atouts nécessaires à l’implantation de l’humanité à sa surface. Cependant, son atmosphère montrait, çà et là, des perturbations perpétuelles et difficilement prévisibles. Il en résultait sur une grande partie de la planète des masses d’air s’entrechoquant avec violence et resserrant les isobares en quelques heures. Finalement, le vent faisait partie intégrante de la vie saruannaise. Les accalmies étaient grandement appréciées par les colons, qui en profitaient, notamment, pour réaliser les diverses opérations de maintenance. Un problème s’ajoutait pour Eran. Le canyon provoquait une accélération du vent et le chargeait en particules. Sous-équipé pour les affronter, Eran devait prendre son mal en patience. Pourtant, l’état de ses réserves d’énergie ne permettait pas d’attendre trop longtemps. La prochaine accalmie serait la bonne. En attendant une hypothétique sortie, Eran continua son inventaire minutieux. Ses appareils étaient dans un bon état général, ce qui le rassura sur le moment. En effet, ses efforts n’étaient pas vains, il prenait un soin particulier à protéger son équipement de la poussière charriée par le vent qui s’infiltrait par l’ouverture principale de son refuge. Malgré toute son attention, elle parvenait à passer par la bâche qui couvrait l’unique issue.

    Il s’équipa de son rasoir de fortune pour s’atteler à la tâche importante du jour : se raser. Lentement, il fit glisser la lame du couteau. La sensation était désagréable au possible. Il parvenait péniblement en serrant les dents à couper sa courte barbe par petites touffes successives. Régulièrement, il frottait énergiquement sa mâchoire de plus en plus meurtrie. Il répéta l’opération à plusieurs reprises. Du temps, il en disposait. Personne ne viendrait le déranger. De son côté, la combinaison ne réagissait pas. La douleur n’était pas assez forte pour la faire entrer en action. Il termina sa séance de coupe. Puis ramassa et stocka les déchets pour les proposer à un recycleur de solides ultérieurement. Bien qu’encore sensible, il ne sentait plus la démangeaison que sa barbe avait provoquée à son réveil. Il pointa son PIM en direction de son visage pour observer le résultat. Il était sans appel : affreux. Le noir de sa pilosité n’aidait en rien.

    « On repassera pour l’esthétique. Au moins, je ne me suis pas coupé », dit-il tout haut en parlant à son image.

    Les rayons de Saruan s’estompaient peu à peu, replongeant le canyon dans un crépuscule nouveau. Les jeux de couleurs étaient féériques. Un bleu profond, où commençaient à scintiller quelques étoiles, se détachait sur la surface orangée du canyon. Pourtant, c’était le moment de la journée qu’il redoutait le plus. En effet, la faune locale s’activait toujours au crépuscule saruannais. Il se prépara rapidement une galette énergétique et se désaltéra. Il sentait une certaine frayeur monter en lui. Une crainte ancienne, profonde, ancrée depuis son plus jeune âge. À partir de son pupitre d’information mobile, il régla de nouveau les détecteurs. Ils l’avertiraient en cas d’approche d’un animal quelconque.

    Les colons du camp embryonnaire Alpha, tête de pont entre le Markind Epsilon Eridani et Saruan-c, avaient déjà établi un beau recensement de la faune et de la flore de leur nouvel environnement. La nature s’était montrée généreuse sur cette planète. Les formes et les couleurs variaient entre les différentes espèces. La végétation était luxuriante avec des configurations inédites. Saruan-c offrait un magnifique terrain de jeu aux biologistes de tout rang. D’ailleurs, Eran, en tant que botaniste de sa décurie, était aux anges dans les premiers temps de la colonisation. La faune présentait aussi une grande variété. Cependant, certaines espèces se montraient particulièrement agressives. Dans ces conditions, les cubes d’armements avaient été déployés dès les premiers instants. La mort de plusieurs colons avait marqué profondément la toute jeune colonie dans sa chair. En conséquence, des parois infranchissables pour ces bêtes féroces avaient été dressées tout autour du camp. Il fallait

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