L’exploration de La Pérouse (1785-88): rendue publique en 1797 par le général Millet Mureau
Par Pierre Bérard
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À propos de ce livre électronique
L’expédition était une volonté de Louis XVI, « roi-géographe », lecteur des voyages de Cook. Il l’a confiée à La Pérouse, soucieux de la santé de ses équipages, avec un esprit ouvert sur le monde. On a reçu à Versailles 3 ans de rapports valorisants par le commandant, d'autres officiers et des savants rattachés à leurs académies. La « Convention » les a reconnus et a voté les crédits d’envoi de secours, puis de publication des rapports du voyage. Son coordinateur désigné, le Gal du génie Millet Mureau, en sera la vraie source. Cet ouvrage nous présente cette magnifique conquête transpacifique en mettant en exergue les belles rencontres faites par le protagoniste.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Après 40 ans de carrière dans le domaine maritime, Pierre Bérard, une fois en retraite, continue d’effectuer des recherches car il est séduit par ce qu’il y a d’important sur le sujet dans le Tarn, notamment au XVIIIe siècle. Il participe largement à l’animation du musée La Pérouse d’Albi consacré à la marine ancienne, et à la réalisation de cette exploration dont le programme a été fixé par le roi.
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Avis sur L’exploration de La Pérouse (1785-88)
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Aperçu du livre
L’exploration de La Pérouse (1785-88) - Pierre Bérard
Préface
Pierre Bérard, marin, albigeois, érudit, aura eu l’inépuisable passion de mieux faire connaître notre célèbre concitoyen. Il a suivi Jean-François Galaup de La Pérouse sur toutes les mers, dans toutes les archives, les comptes-rendus, la correspondance, les rapports, les rôles d’équipage, mais aussi à travers le temps.
De nombreux livres ont été consacrés à l’illustre navigateur. Chacun a « son » La Pérouse, sa lecture de cette part de notre Histoire, sa vision d’une aventure imaginée, reconstituée ou prolongée dans le mystère des eaux de Vanikoro. Toutes ces visions se complètent et alimentent nos propres rêves.
Pierre Bérard est parti d’un point de vue différent, il ne parle pas de lui mais décrit, analyse et explique la vie de Jean-François Galaup de La Pérouse, son métier d’officier de Marine du roi.
Pierre Bérard a la volonté de mieux nous faire appréhender l’homme La Pérouse, son environnement historique mais surtout de nous faire retrouver la dimension maritime de la France qui est une partie de son universalité.
Officier de Marine lui-même, homme fait d’une seule pièce, notre auteur suit son cap soigneusement documenté et nous l’apprécions pour cela. Il a probablement, plus que d’autres, le souci du mot juste, le respect de l’architecture marine et des multiples savoir-faire, l’attention à la technique, la perception de l’importance de la mission et de sa réussite.
L’expédition dans l’Océan Pacifique avait été confiée à l’Albigeois Jean-François Galaup de Lapérouse par Louis XVI car « il méritait sa confiance par ses talents, ses connaissances, son caractère ». Le roi en avait tracé le plan tout en autorisant des changements chaque fois que « cela serait jugé convenable car il convient de prendre conseil de la circonstance et du moment » comme le rappelait en 1788 le Secrétaire d’État à la Marine César Henri de La Luzerne.
Les objectifs à atteindre étaient multiples : Il s’agissait de compléter la cartographie mondiale, mais également sur le plan politique d’entretenir des rapports avec les colonies espagnoles du Pacifique. Sur le plan militaire, l’observation des défenses, de l’artillerie et des troupes affectées aux pays où les navires faisaient escale était au programme. Les volets économiques et commerciaux avec le commerce des peaux de loutres ont fait l’objet de rapports. À travers les informations recueillies par le général du génie Louis-Marie de Milet de Mureau qui avait été chargé par la Convention de rassembler toutes les informations parvenues en France sur la mission de La Pérouse, chacun peut relever l’attention qui était portée aux hommes, à la santé des équipages, à leur ravitaillement en vivres…
Même si je l’indiquais précédemment, il convient d’éviter de projeter sur la personnalité de Jean-François Galaup de La Pérouse, nos curiosités, nos points d’intérêt actuels, il est difficile de ne pas faire un parallèle entre le XVIIIe siècle et la géopolitique du XXIe siècle.
Nous sommes dans un moment de basculement du monde Occidental vers l’Indo-Pacifique et très loin de la vision du monde de 1494 lorsque le pape Alexandre VI partageait le Nouveau Monde entre l’Espagne et le Portugal ou du XVIIIe quand les royaumes de France et d’Angleterre rivalisaient dans les mers.
La France n’était pas arrivée la première dans le Pacifique. Louis XV et Louis XVI nous ont offert une deuxième chance.
Le voyage de Monsieur de La Pérouse a l’immense mérite d’avoir croisé les regards, les connaissances, un peu à la manière, toutes proportions gardées, de Bonaparte à l’occasion de sa campagne d’Égypte en réunissant scientifiques et artistes.
Très souvent nous portons sur notre pays un regard autocentré. L’actualité contemporaine nous oblige à regarder vers l’Indo-Pacifique comment en son temps Jean-François Galaup de La Pérouse a illustré la volonté de notre monarchie de penser plus loin.
Je ne saurais trop remercier Pierre Bérard de nous faire ainsi parcourir le temps et les mers.
En ses annexes, l’ouvrage nous propose une synthèse de l’itinéraire du voyage de La Pérouse et un rappel des différentes explorations maritimes à travers les siècles.
M. Philippe Bonnecarrère
Sénateur du Tarn
Préambule
Histoire de la publication de millet Mureau
Pour qu’un voyage de découverte officiel soit pris en compte dans la construction de la géographie maritime mondiale, il faut une publication de synthèse écrite des informations parvenues au gouvernement pendant le voyage. Elles ont été fournies par La Pérouse et quelques autres cadres du voyage, essentiellement envoyées aux autorités (ministres Castries puis La Luzerne), et au confident de La Pérouse, le directeur des services de la Marine Fleurieu qui informent ensuite le roi Louis XVI (1754-1793), concepteur du voyage, de sa réalisation. Il reste aussi à Versailles, Rochefort et Brest une trace des préparatifs de ce voyage qui s’est déroulé au départ de Brest à partir du début août 1785.
Des rapports réguliers, en principe adressés au Ministre de la Marine, mais avec beaucoup plus de détails personnels fournis par La Pérouse à Fleurieu, sont parvenus à Versailles à partir des ports lointains occupés par des nations maritimes européennes, qui connaissaient l’existence de cette mission. Le dernier courrier de La Pérouse, qui indiquait ses objectifs finaux, a été convoyé normalement par les Anglais, qui venaient de s’installer à Sydney en mars 1788, documentation qui est parvenue à Versailles fin 1788.
Le prochain contact de La Pérouse avec l’île de France était prévu en novembre 1788, et le retour en France au début de l’été 1789.
C’était précisément l’époque où commencent les troubles de la révolution et la prise de pouvoir par le Tiers État à l’Assemblée Nationale. Le roi demeurant désormais à Paris était encore consulté jusqu’à sa fuite en Allemagne, interrompue par son arrestation à Varennes en avril 1791. Elle lui a fait perdre toute influence jusqu’à son exécution en janvier 1793. L’inquiétude sur le sort de l’expédition devenait justifiée à l’automne 1789, et on savait que La Pérouse n’avait pas rejoint l’Île-de-France où vivait encore son beau-père.
Ce n’est qu’en février 1791 (au moins 2 ans de perdus pour convenir d’une action) que l’Assemblée Nationale a décidé par décret de la mission d’Entrecasteaux à la recherche de l’expédition dans la zone australienne, départ qui a lieu début octobre 1791, mobilisant plus de 1 million de £ de crédits, pour rechercher des épaves et des rescapés éventuels. Cette expédition a été gâchée par de fausses informations, la mort de ses deux chefs, et la déclaration de guerre avec la Hollande, qui contrôlait l’Indonésie.
L’Assemblée Nationale décidait peu après, en avril 1791, la publication des rapports de voyage de Lapérouse déjà parvenus à Versailles, couvrant l’essentiel de sa mission, coordonnée par un rédacteur à rechercher, et de financer le résultat de son travail pour une impression à l’imprimerie nationale. Mais tout le problème a été de trouver un rédacteur volontaire de bon niveau, en principe dans la Marine. En particulier de Fleurieu, qui avait été un des grands organisateurs du voyage de La Pérouse, et avait aussi été quelques mois ministre de la Marine avant de donner sa démission, s’est récusé, comme d’autres candidats pressentis.
Ce sera tardivement le général du génie Milet Mureau au Ministère de la Guerre, qui ne connaissait pas la Marine, mais avait des aptitudes littéraires et une formation de haut niveau, qui s’en chargera ; et ce n’était pas à plein temps, car il avait simultanément d’importantes fonctions au ministère de la Guerre, avec les nombreux combats en cours en Europe. Mais il a dû collecter d’abord les documents (rapports, lettres, images, cartes et plans) dans diverses archives civiles et militaires des ministères, auprès des académies, de l’observatoire et du jardin des plantes, et aussi à Brest et Rochefort. Une assez luxueuse édition en 4 volumes, avec en plus un Grand Atlas de cartes et d’images, est parue à l’imprimerie nationale en 1797, détaillée au chapitre suivant. Elle a été très rapidement doublée d’éditions bon marché pour le grand public reprenant le texte de cette version officielle du récit, reproduit plus ou moins complètement, et rapidement suivi de traductions étrangères, notamment à partir de celles de Londres.
Si ce travail initial de qualité n’avait pas été fait, les archives seraient tombées dans leur circuit normal en attente d’exploitation, mais La Pérouse ne ferait probablement pas partie des grands explorateurs du Pacifique, si elles avaient été exploitées trop tardivement. L’occasion aurait pu être vers 1830 à l’occasion de la découverte des épaves, mais l’intérêt pratique du voyage serait devenu atténué suite à de nouvelles explorations et occupations de terrain, et sa publication plus probablement faite par des éditeurs privés, avec des traductions inexistantes, ou moins nombreuses. Curieusement c’est beaucoup plus tard en 1985, pour le bicentenaire du départ de La Pérouse à Brest, qu’une exploitation de qualité des archives existantes s’est manifestée (Mmes Gaziello, Dunmore et Brossard). Le présent ouvrage rend d’abord hommage au travail initial de Millet Mureau, dont le fond et la méthode n’ont jamais été contestés, mais auquel il manque l’appréciation des ministres du roi, qu’on préférait occulter.
Bien que ce général ait consacré un volume entier aux préambules et préparatifs, il paraît utile de compléter cette nouvelle publication par une introduction sur La Pérouse l’albigeois et sa belle-famille établie à l’Île-de-France, pour situer le personnage. Comme le rédacteur n’était pas marin, ou qu’il a considéré que les manuels d’hydrographie de l’époque étaient une source suffisante d’information, il n’a parlé ni des navires ni de la vie des marins ni des instruments nautiques auxquels sont ici consacrés quelques développements. Une annexe du présent livre résume aussi des sujets maritimes connexes et intéressants, contemporains de l’époque du voyage.
Millet Mureau n’a pas pu connaître, 40 ans après le naufrage, la localisation des épaves, qui ont permis de situer de façon assez précise les circonstances de la fin du voyage. Leur analyse a aussi paru un utile complément au voyage proprement dit.
De plus le courrier public et privé acheminé aux escales de l’expédition a été déficient, et on indique ici la fin de voyage envisagée par La Pérouse, très différente de la modification qu’on lui a demandé de faire la veille de son départ de Petropavlovsk.
Chapitre I
Récit du voyage de La Pérouse
par Millet Mureau
Ce document est une réponse partielle à une question souvent posée par Louis XVI, cette expédition évanouie qu’il avait voulue lui étant toujours restée un sujet de préoccupation, même après la fin de la monarchie absolue. Mais ce n’était peut-être pas son souci jusqu’à ses derniers moments, comme certains se plaisent à l’imaginer, et il devait alors avoir d’autres pensées existentielles et familiales prioritaires avant d’être conduit à l’échafaud.
Ce voyage inachevé serait tombé dans l’oubli, faute d’informations sur son organisation et ses acquis, sans l’œuvre de Millet Mureau, un général du Génie, ayant aussi des aptitudes littéraires, qui a accepté pendant la Révolution la tâche de synthèse et la publication de toutes les informations parvenues à Versailles qui concernent l’essentiel du voyage. Ce travail avait été proposé en priorité à des marins, l’amiral de Rosily, puis à Fleurieu, officier de Marine, principal haut fonctionnaire responsable du ministère de la Marine qui avait participé de façon étroite à la préparation du voyage, et avait même été quelques mois ministre de la Constituante. Tous deux s’étaient excusés, sachant qu’il était difficile de décrire des faits et opinions sans déplaire aux nouveaux maîtres.
Pourtant Fleurieu sera l’auteur du récit de voyage (1790-92) du navire de commerce Le Solide 23 m de long, 300 tx, rapide et doublé de cuivre, 50 h d’équipage, commandé par Etienne Marchand, successeur de La Pérouse en Alaska, et ayant collecté comme lui des peaux de loutre. Millet Mureau précise cependant dans son introduction qu’il a toujours cherché à bénéficier du concours de Fleurieu, le considérant comme une grande référence pour l’expédition confiée à La Pérouse.
Son nom de famille est Louis Marie Antoine DESTOUF, baron de Millet de Mureau. Né à Toulon en 1751 dans une famille noble, il est admis en 1769 à l’école du Génie de Mézières (qui précède l’école Polytechnique). Il sera d’abord militaire dans le Génie, puis homme politique dans l’Assemblée nationale constituante comme député de Toulon, où il participe à divers comités et se fait remarquer par sa modération qui paraît quelquefois suspecte aux meneurs de la révolution. En 1792 il commande l’artillerie et le génie dans l’armée des Alpes, mais il est assez rapidement remplacé pour ses opinions trop « raisonnables ».
C’est alors qu’il est affecté au ministère de la Guerre dans sa spécialité d’ingénieur militaire de haut niveau qu’il accepte la coordination du rapport de voyage de La Pérouse, en raison de ses aptitudes littéraires et peut être aussi pour s’éloigner un peu de la vie politique et militaire. Il le publiera à l’imprimerie nationale en l’an V (1797) sous le nom de Louis Millet Mureau. Son nom sera internationalement connu au titre de nombreuses adaptations et traductions de cet ouvrage. Nommé général de brigade en 1796, il aidera beaucoup Massena au ministère de la Guerre, malgré la pénurie des moyens disponibles, en le dotant du nécessaire pour redresser une situation militaire critique dans les Alpes. Puis il fera quelques mois l’intérim du ministre de la Guerre, après la démission de Bernadotte.
Quand cette époque troublée se termine, avec la prise en mains du pays par Napoléon, il obtient en 1802 la préfecture de Corrèze à Tulle, où il restera 8 ans. Napoléon le nommera baron d’empire en 1809, avec attribution d’armoiries, ce qui reconfirmera sa noblesse d’origine. Après la chute de Napoléon, il sera envoyé en Corse par Louis XVIII comme commissaire du roi, et il y sera bien accueilli. Il décédera à Paris en 1825 à 74 ans. Sa fille, née à Toulon, mariée en Normandie, deviendra un peintre de fleurs reconnu.
La synthèse des informations du voyage réalisée par Millet Mureau, accompagnée de commentaires de sa part, occupera 4 gros volumes et un atlas, comprenant cartes et images. C’est une édition grand format, assez luxueuse, mise en forme par l’imprimerie nationale. On retrouvera 1200 exemplaires disponibles au prix de 80 £ l’exemplaire (soit un bon salaire mensuel) au moment où il était question vers 1800 d’en faire don à la veuve de La Pérouse qui préférera une pension fixe ; l’essentiel de l’édition est parti vers les services publics et bibliothèques françaises et étrangères.
Le premier volume du compte rendu de voyage est un texte de présentation qui contient à titre complémentaire un récit du voyage récent d’essai hors saison d’été du pilote espagnol Maurel entre les Philippines et San Blas au Mexique en 1780-81. La Pérouse en avait obtenu une copie à Manille, ce dont il avait avisé Versailles comme source d’information dans l’exploration du Pacifique (pages 275 à 277), ainsi qu’un rapport de l’expédition du même pilote espagnol Maurel sur les côtes d’Alaska en 1779.
Une image contenant texte, livre, intérieur Description générée automatiquementLe plan de l’ouvrage sur l’exploration de La Pérouse, outre une préface du rédacteur de 15 pages et un discours préliminaire de 50 pages traitant notamment du problème de la normalisation internationale des mesures, comprend les textes officiels de préparation, décret, mémoires du roi en 5 parties (plan du voyage, objets politiques et de commerce, recherche scientifique, conduite à tenir avec les « sauvages », et avec l’équipage), et des notes géographiques et historiques de complément. Il y a ensuite la correspondance de coordination du ministre de la Marine avec l’académie des sciences, la société de médecine et le jardin des plantes de Buffon. Enfin sont abordés des problèmes pratiques : corruption de l’eau de boisson en tonneaux, conservation des plantes, objets de traite pour échanges, instruments et documentation scientifique embarqués.
Le deuxième et le troisième volume contiennent le texte mis en forme du récit envoyé par La Pérouse lors de ses escales jusqu’en Australie. Outre quelques modifications pour être « politiquement correct », le rédacteur commente par d’assez nombreux renvois en bas de page, dont certains sont intéressants. Il y a également en fin de volume 3 des tables de renseignements chaque jour à midi de la latitude et longitude et aussi des indications sur le magnétisme et la météo tels que relevés par les deux navires de l’expédition, au moins pour ceux qui sont parvenus en France.
Le dernier volume IV comprend une série de rapports particuliers sachant que les études principales devaient être remises à La Pérouse avant l’arrivée à Brest pour les soumettre à la lecture préalable du ministre de la Marine (mais elles ont été perdues à Vanikoro). Sont parvenus à Versailles :
– Exploration du pic de Ténériffe en août 1785 (Lamanon et Mongés) : altitude, minéraux ;
– Habitants de l’île de Pâques par le Dr Rollin (comportement, maladies) ;
– Géographie de l’île de Pâques (par Bernizet, géographe) ;
– Psychologie et pathologie des Indiens américains par le Dr Rollin ;
– Études d’insectes du Pacifique par la Martiniére ;
– Habitants de Sakhaline : Dr Rollin ;
– Monneron : évocation sommaire des aspects militaires de défense de la Trinité à Monterey, centre espagnol de haute Californie.
– Mémoire de La Pérouse sur Manille et Formose ;
– Lamanon : étude sur les poulettes de Tartarie (eaux froides) et les cornes d’Ammon (eaux tropicales) ;
– La Pérouse : la traite des peaux de loutre et de castor (étude parvenue) ;
– Diverses lettres aux autorités (La Pérouse pour l’essentiel, de Langle Dagelet, Lamanon, la Martiniére) ;
– Mémoire d’étude météo des flux d’air près de l’équateur par Lamanon ;
– Lianes du Chili (on n’en possède que le dessin), commentées ultérieurement en France par un membre de l’Institut à Paris.
Ce volume est complété de la page 273 à 309 par une table générale des matières pour l’ensemble des 4 volumes (personnes citées, noms géographiques, termes particuliers). Cette édition luxueuse de grand format (atlas original 46x63 cm), dont un exemplaire a été offert par le ministre de la Marine à la ville d’Albi, s’est très mal vendue en raison de son prix élevé et a été rapidement doublée par une édition de format octavo en 4 volumes (publication de l’éditeur parisien Plassan en 1798). Une édition en français de vulgarisation ne comprenant qu’une carte réduite du voyage et quelques illustrations, en un seul gros volume avec l’essentiel du texte du voyage proprement dit, est également parue à Leipzig en 1799, et est probablement l’initiative d’un émigré maritime français qui n’habitait pas nécessairement dans la ville de l’imprimeur (Coblence ?).
On notera la parution en 1831 chez Arthus-Bertrand d’une « relation du voyage de La Pérouse » par Barthelemy de Lesseps, un des rares cadres survivants du voyage, après qu’il ait expertisé à Paris en 1828 les objets collectés à Vanikoro par le capitaine Dillon. Il était, à cette époque, consul général de France à Lisbonne. Il a utilisé le texte de base de Millet Mureau, expurgé de certains aspects techniques, et augmenté de quelques rares précisions personnelles. Une réédition en sera faite en 2004 par Pôles d’images à Barbizon (77 630).
Les ouvrages de vulgarisation en français seront nombreux : on peut en particulier noter le « prix des écoles » maintes fois republié par l’éditeur Valentin. Ils se réfèrent tous, ainsi que les traductions étrangères, au récit de voyage, tel que l’a présenté Millet-Mureau. Le milieu du XIXe a aussi été une période féconde pour des publications de 5 à 10 volumes (notamment celle de Dumont d’Urville, lui-même explorateur) résumant des voyages exotiques, dont le public était très friand. Enfin on peut citer le rôle et les publications des sociétés de géographie coordonnant et publiant les comptes-rendus des explorations maritimes et terrestres de l’époque. La Société de géographie de Paris a rendu hommage à La Pérouse en 1888, avec une grande exposition et la publication de « l’ouvrage du centenaire », qui contient notamment un choix de lettres, essentiellement familiales, et quelques documents inédits intéressants, complétant la documentation de Millet Mureau.
Les éditions anglaises de traduction sont importantes, non seulement par la diffusion mondiale de cette langue, mais par l’apport de ce pays à cette découverte des océans, notamment par Cook, référence de La Pérouse. Elles s’intéresseront aussi au voyage terrestre de B. de Lesseps en Sibérie. Elles ont souvent servi de base à la traduction du voyage à partir de l’anglais dans d’autres pays européens, principalement nordiques.
– Édition à Londres 1799. Elle comprend trois volumes de texte (la traduction des volumes 2 et 3 de Millet Mureau) éditée sans préciser le nom du traducteur, et publié en 3 volumes. Le premier volume, en plus du portrait de La Pérouse en tête, comprend 4 planches de cartes et des vues, le 2e volume 26 planches, et le 3e 12 planches.
– Autre édition à Londres 1799, considérée comme la référence pour une diffusion ultérieure dans d’autres pays anglophones, imprimeur Hamilton, commandité par différents libraires, dont Robinson et deux autres à Londres, Edward & Payne. Cette édition comprend deux volumes de texte et est accompagnée d’un atlas d’assez grand format, comme c’est le cas dans l’édition française. Cet atlas en anglais un peu colorisé est conservé à la British Library et ne peut être communiqué que sous forme de microfilms.
– Édition de 1807 – en trois volumes (le deuxième volume de 422 pages couvrant de l’Île de Pâques au Kamchatka), d’après la relation établie par Millet Moreau, illustrée par des cartes et plans dans un volume séparé, imprimé à Londres pour les éditeurs Lackington, Allen et Co. C’est l’édition la plus complète, qui reprend une partie des commentaires de Millet Mureau, et celle qui est la plus connue aux États-Unis. Mais il devient assez facile d’obtenir une réédition chez Abebooks.com, libraire de livres rares et anciens reproduits à Delhi par phototypie, pour une diffusion anglophone mondiale.
On voit donc le rôle essentiel dans la diffusion des découvertes de La Pérouse joué par cette publication de Millet Mureau, origine de presque toutes les informations, conjointement avec des documents familiaux qui replacent La Pérouse dans son contexte, car c’est aussi un enfant d’Albi, et même un jeune marié, après de très longues fiançailles un peu particulières. Mais Millet Mureau a pris quelques arrangements avec les textes transmis par La Pérouse pendant son voyage pour éviter de montrer une trop grande soumission au roi déchu et le texte original a été rétabli en 1985 par les historiens Dunmore et Brossard dans un bel ouvrage commenté, également publié par l’imprimerie nationale.
L’objet de ce livre est de souligner certains aspects particuliers peu connus pour compléter le récit de l’exploration La Pérouse. On trouvera ci-après un résumé des suggestions de normalisation évoquées par Millet Mureau :
Plaidoyer pour une normalisation cartographique
Tous les pays européens sont d’accord pour une normalisation, à condition que ce soit la leur. Pour la latitude, liée à l’axe de rotation de la Terre et à la distance angulaire au-dessus ou au-dessous de l’équateur, comptée de 0° à 90° Nord/Sud, il y a peu de problèmes d’interprétation. Mais l’une des données géographiques les plus anciennes est celle du « méridien origine ». En effet depuis que l’on sait que la terre est ronde, comme le soleil ou la lune, n’importe lequel des demi-cercles passant par les pôles de rotation peut être un « premier méridien », et en France on apprécie particulièrement celui de l’observatoire de Paris. Pourtant Louis XIII avait réuni en 1634 une conférence internationale, qui en reprenant une proposition de normalisation ancienne de Ptolémée (an 150 AD) qui pensait déjà à la terre ronde, fait adopter pour méridien origine celui passant à la pointe Ouest de l’île de Fer aux îles Canaries, ce qui met tous les pays maritimes de l’époque dans les longitudes Est. La cartographie de Louis XV, et de son ministre de la marine Maurepas, utilise encore ce méridien, avec graduation de 0 à 360° vers l’Est, ou de 0° à 180° vers l’Est ou l’Ouest, l’origine étant à 17° 40 à l’ouest de Greenwich et donc 20° E à Paris. Mais c’est le méridien de Greenwich avec des longitudes vers l’Est ou l’Ouest qui finira par s’imposer comme référence en 1888, avec l’écrasante domination mondiale maritime anglophone. On utilise sous Louis XVI le méridien de Paris, à 2°20 à l’Est de Greenwich et tout le monde publie alors des cartes avec son propre méridien, notamment les Espagnols avec celui de Madrid.
Le général Millet Mureau, dont la synthèse de la cartographie autour de La Pérouse a eu beaucoup à connaître de problèmes de raccordement des mesures. Il en parle dans son « discours préliminaire (page XXV) qui plaide comme tout le monde pour un accord international sur le « méridien universel », mais la Révolution française n’attire pas l’adhésion des autres monarchies européennes. Il s’étend sur d’autres considérations plus secondaires, la longitude Ouest ou Est de 180°, ou de 360°, mais dans quel sens vers l’Est ou l’Ouest ? Il y ajoute un plaidoyer pour le système décimal, préconisant un cercle de 400 « degrés », lié à un jour de 10 h, heure elle-même divisée en 100 minutes.
On finira par obtenir l’essentiel, le méridien de référence, mais le système sexagésimal convient bien aux marins de tous les pays, attachés aux mesures d’angle en degrés, divisés en 60 minutes d’arc. Un quart de cercle terrestre mesure 10 000 km (d’où la définition initiale du mètre), qui vaut 90° x60 minutes d’arc = 5400 minutes. Le mille marin correspondant à une minute d’arc soit 10 000 000 mètres : 5400 minutes = 1852 m sur terre pour chaque minute d’arc du globe terrestre ; le nombre de minutes d’arc terrestre parcouru en une heure donne la vitesse du navire en nœuds. Il faut souligner le succès d’une normalisation bienvenue dans toutes les marines, comme indiqué sur les cartes de marine Belin (1764) de 20 lieues au degré de 60 minutes, soit la lieue marine de 60 : 20 = 3 minutes d’arc x 1,85 km = 5, 55 km, alors que les lieues terrestres sont très variables, même entre provinces d’une même nation.
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La projection du flamand Mercator se fait sur un cylindre tangent à l’équateur, qui est ensuite déplié, les cercles de latitude étant des droites de plus en plus espacées en allant vers