Russie: Sous les cendres, l'empire
Par Alain Délétroz
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À propos de ce livre électronique
À PROPOS DE L'AUTEUR
Observateur politique assidu de la Russie où il a longtemps vécu, Alain Délétroz était souvent invité à commenter l’actualité dans les médias russes avant la guerre en Ukraine. Passionné de culture russe, son affection pour cet immense pays a guidé son écriture.
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Aperçu du livre
Russie - Alain Délétroz
MOT DE L’ÉDITEUR
« Ce petit livre n’est pas un guide. » Cette phrase répétée dans les présentations de nos ouvrages, parce qu’elle nous tient particulièrement à cœur et résume parfaitement l’état d’esprit de notre collection, devrait s’accompagner d’un complément d’information : ces livres sont écrits par les auteurs à une période donnée. Mais avec l’intention de brosser le portrait le plus juste de l’âme des pays, des régions ou des villes, nos petits livres ambitionnent, par définition, de dépasser l’actualité. Chaque volume de L’âme des peuples, parce qu’il s’écarte du superflu pour se consacrer à l’essentiel, a pour vocation de rester pertinent et de garder sa saveur malgré l’actualité, les changements de gouvernements et l’évolution des circonstances.
Écrire ces lignes à propos de Les cendres de l’empire, notre petit livre sur la Russie publié en 2014, sonne comme un avertissement. La guerre déclenchée en Ukraine, le 24 février 2022, par Vladimir Poutine, matérialise tous les changements survenus dans cet immense pays depuis des années. Des changements que notre auteur Alain Délétroz, russophone passionné, avait alors presque tous décelés et signalés : l’effroyable volonté de revanche engendrée par le sentiment d’humiliation né de la disparition de l’ex-URSS et de l’héritage soviétique anti-occidental ; la montée inexorable de l’autoritarisme version Poutine… et toujours, l’incontournable nostalgie impériale, qui nourrit au Kremlin tous les fantasmes de puissance. Les cendres. L’empire. Tout est juste dans cet ouvrage qui n’est pas un guide, mais un formidable éclaireur sur la réalité sociale, nationale, géopolitique de la Russie de 2022.
Nous avons donc fait le choix de vous livrer telle quelle cette nouvelle édition, avec le plein accord de l’auteur. Parce qu’elle raconte la Russie comme elle est. Au plus profond. Parce qu’elle dit l’ambivalence du peuple russe, à la fois humilié et humiliateur. Parce que la Russie, surtout, doit se comprendre en dehors de la mécanique aujourd’hui infernale de la guerre en Ukraine, ce pays dont Sébastien Gobert nous dresse par ailleurs un fascinant portrait dans notre collection. Lire Sous les cendres, l’empire, c’est enfin refuser les exagérations et les approximations des commentaires d’actualité. Ce petit livre dit l’âme de la Russie. C’est pour cela qu’il mérite plus que jamais d’être lu aujourd’hui.
Richard Werly, août 2022
AVANT-PROPOS
Pourquoi la Russie ?
Bien des années plus tard, une image remonte dans ma mémoire, aussi vivante que si tout cela était arrivé hier. Chaque fois que je retrouve les trottoirs d’une grande ville russe en hiver, le même souvenir m’assaille. Chaque fois que je hume l’air froid à pleins poumons, que mes yeux sont attirés par la démarche raffinée de jeunes femmes emmitouflées dans de tendres fourrures sibériennes ou que mes narines sont chatouillées, sur l’escalator d’une station de métro, par les effluves de graisse à moteur typique des chemins de fer russes, c’est ce premier hiver en Russie qui renaît.
Décembre 1991 : j’arrive en Union soviétique pour effectuer un séjour linguistique dans le terrible hiver russe. La famille qui me reçoit a organisé une petite fête en mon honneur pour la Noël catholique, qui se célèbre quinze jours avant la Nativité orthodoxe russe. L’appartement, d’une seule pièce, à la fois chambre à coucher, salon et salle à manger, suffoque sous une épaisse fumée de tabac. Le gel glace les vitres. Les premiers toasts commencent à réchauffer les estomacs et les cœurs. Et voilà qu’apparaît, sur l’écran de la télévision posée dans un coin de la pièce, le visage contracté du président de l’URSS qui annonce la dissolution de la grande Union.
Les insultes pleuvent. « Idiot, traître, tu as détruit notre pays ! Dégage ! » Puis, devant mes supplications, le silence finit par s’installer, ponctué encore de quelques exclamations de mépris, mais à mi-voix. La piètre allure de Gorbatchev, qui semble au bord des larmes, finit par faire son effet. Un lourd silence suit l’intervention présidentielle. Puis, un convive fait le plein des verres de vodka, lève le sien et s’exclame : « Allons, buvons à notre avenir radieux sans l’Union soviétique ! »
Les visages et les itinéraires des convives de cette soirée continuent à m’habiter. La plupart d’entre eux allaient sombrer dans la misère. Le jeune adolescent frêle, au bord des larmes tant l’émotion lui étreignait la gorge lorsqu’il me parlait des fleurs et des baies rouges dans le jardin de sa datcha au printemps, serait, trois ans plus tard, condamné à dix ans de camp à régime sévère pour association de malfaiteurs : l’une des fameuses « mafias russes » l’avait recruté… La violence économique, structurelle et criminelle dans laquelle allaient basculer la plupart des sociétés issues de l’Union soviétique ne nous apparaissait absolument pas, ce soir-là, comme l’horizon immédiat de la chute du communisme. À la fin de cette soirée, je décide de me rendre sur la place Rouge en compagnie d’Olga, une jeune fille de mon âge, aussi discrète que belle. C’est la nuit, il neigeote. Le drapeau tricolore russe a déjà remplacé le drapeau rouge de l’ex-URSS sur la coupole du Kremlin. La place étale ses pavés blanchis, désespérément vide. Idem pour les rues adjacentes ou la place du Manège, en contrebas. Qu’importe la fin de l’empire ! À l’évidence, les Russes préfèrent rester blottis dans la chaleur de leurs appartements plutôt que d’aller manifester sous les murs du Kremlin. Pas d’émotion. Pas de joie libératrice. Pas de désespoir non plus, face à un avenir plus qu’incertain.
Je suis fasciné. La rapidité avec laquelle il a été mis fin à l’Union soviétique et le fatalisme des Russes m’impressionnent. La majorité d’entre eux semblent fort bien s’accommoder de la disparition de ce pays si puissant sur la scène mondiale, mais qui a fonctionné comme une véritable machine destructrice des cultures et des individus à l’intérieur de ses frontières. Je me souviens, sur cette place Rouge vide et glaciale, de l’émotion qui me saisit alors. Nous restons là, prostrés, à regarder la relève de la garde du mausolée de Lénine, à scruter ces soldats élancés dans leurs uniformes impeccables, jambe à angle droit dans un pas de l’oie au ralenti, en un dernier hommage au fondateur de l’URSS dont le tombeau ne serait bientôt plus gardé que par de simples miliciens. Les funérailles de la deuxième grande puissance du monde sont aussi tristes que glaciales. Olga, s’appuyant contre moi, murmure