À propos de ce livre électronique
Sur les pas d'Isabelle Massieu en Indochine
Première Européenne venue seule en Indochine en 1897, Isabelle Massieu (1844-1932) s’est prise de passion pour les voyages aux alentours de la cinquantaine et parcourt l’Asie en tous sens. En pirogue ou à cheval, l’infatigable aventurière chemine à travers la jungle, de Luang Prabang à Vientiane, et se laisse séduire par les légendes et les mœurs laotiennes, dont elle admire l’authentique liberté.
Récit publié dans la Revue des deux mondes en 1900 sous le titre Le haut-Laos et le Mékong.
Une expédition surprenante et entraînante au gré des légendes locales
EXTRAIT
C’est à Xieng Sen que j’ai définitivement quitté les territoires britanniques pour entrer dans nos possessions françaises de l’Indochine en descendant le Mékong jusqu’à Luang Prabang. Un pittoresque sentier me permettra ensuite d’éviter le grand coude que fait le fleuve à Pak1-Lay et d’arriver en dix jours à Vientiane, ce qui constitue le « record » de la vitesse. Puis, tour à tour, une succession de bateaux me mènera jusqu’à Savannakhet, nouvelle création française, en face de Ban-Mouk, au-dessus des grands rapides de Kemmarat ; de là, par une large tranchée en forêts clairières, vers la chaîne annamitique, franchie par la brèche d’Aï-Lao, j’arrive au grand pénitencier d’Annam ; enfin Maï-Lane et la rivière de Quang-Tri : tel est l’itinéraire dont les principales étapes m’ont conduite à Hué, la capitale d’Annam.
A PROPOS DE LA COLLECTION
Heureux qui comme… est une collection phare pour les Editions Magellan, avec 10 000 exemplaires vendus chaque année.
Publiée en partenariat avec le magazine Géo depuis 2004, elle compte aujourd’hui 92 titres disponibles, et pour bon nombre d’entre eux une deuxième, troisième ou quatrième édition.
A PROPOS DE L’AUTEUR
On sait peu de choses sur Isabelle Massieu. Elle est née en 1844 en France. C'est une exploratrice, photographe et écrivain. Aux alentours de la cinquantaine, elle se prend de passion pour les voyages et parcourt l'Asie en tous sens. On ignore si elle remplissait des missions secrètes pendant ses voyages ou si elle voyageait de façon désintéressée. Elle décède en 1932.
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Avis sur Le Laos
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Aperçu du livre
Le Laos - Isabelle Massieu
HAUT LAOS ET MÉKONG
I. – DE XIENG SEN À LUANG PRABANG
C’est à Xieng Sen que j’ai définitivement quitté les territoires britanniques pour entrer dans nos possessions françaises de l’Indochine en descendant le Mékong jusqu’à Luang Prabang. Un pittoresque sentier me permettra ensuite d’éviter le grand coude que fait le fleuve à Pak¹-Lay et d’arriver en dix jours à Vientiane, ce qui constitue le « record » de la vitesse. Puis, tour à tour, une succession de bateaux me mènera jusqu’à Savannakhet, nouvelle création française, en face de Ban-Mouk, au-dessus des grands rapides de Kemmarat ; de là, par une large tranchée en forêts clairières, vers la chaîne annamitique, franchie par la brèche d’Aï-Lao, j’arrive au grand pénitencier d’Annam ; enfin Maï-Lane et la rivière de Quang-Tri : tel est l’itinéraire dont les principales étapes m’ont conduite à Hué, la capitale d’Annam.
J’arrivai donc à Xieng Sen, en pays français, au commencement de février 1897, et l’on comprendra aisément la grande satisfaction que j’ai ressentie, après quelques mois passés en pays étranger, de retrouver un compatriote en la personne d’un aimable officier de marine, isolé depuis un an sur le haut Mékong et dont j’ignorais la présence en ce lieu. Nul n’était venu, d’ailleurs, depuis ce temps, le visiter ni le troubler dans les travaux qui avaient pour but de mener le La Grandière à la hauteur de Muong-Sing.
Nous passons ensemble toute une journée en promenades et en fêtes, et dès le matin nous partons avec des coolies armés de coupe-coupe, sabres laotiens, pour débroussailler la route qui mène au grand Tât². Du haut de son mamelon, la vieille pagode domine tout le pays de Xieng Sen. Peu de villes comptent autant de ruines perdues dans la grande brousse. On a compté soixante-quinze pagodes dans l’enceinte de la ville et soixante-cinq dans le voisinage. On aperçoit de-ci, de-là, des vestiges dorés et sculptés, de nombreuses statues de Bouddha entassées, abandonnées sous la végétation envahissante. Ce sont des Bouddha-Niouen, aux longues oreilles. Les plus beaux sont si lourds qu’il est impossible au collectionneur de céder à la tentation.
Le soir, il y a grand boun, concert laotien, auquel se presse toute la population, très curieuse de contempler la « madame Française » qui a traversé les pays hantés, les grandes forêts infestées de fauves et la plaine des pirates, toute la région où ce doux peuple n’oserait se rendre qu’en troupe. Aussi, le soir, sur les kenh, les harpes laotiennes, à tuyaux de bambou de deux et trois mètres de longueur, ou sur les flûtes en bambou des Khas-Moussouk, pirates descendus du nord, improvise-t-on des strophes en mon honneur, tandis que nous devisons du Laos, du Mékong et des rapides qui m’attendent. La musique laotienne, douce et un peu monotone, est beaucoup plus harmonieuse que la musique annamite, toujours criarde. Chanteurs-improvisateurs et musiciens viennent faire boun (fête) à la voyageuse, comme ils le feraient à tout autre personnage qu’ils voudraient honorer. Celui-ci d’ailleurs, pas plus que les assistants, n’est obligé de les écouter : on cause, on rit, on s’amuse ; c’est boun enfin, et c’est tout ce qu’il faut. La partie la plus originale de ce que nous appelons pompeusement le concert, c’est le duo, improvisé comme tous les chants laotiens, entre un jeune homme et une jeune fille. Ils sont assis à terre, comme tout l’auditoire. Ils s’approchent dans des mouvements de balancement, avec des gestes accompagnés de chants, tournent à demi l’un autour de l’autre, agitant dans leurs mains de minuscules petites bougies, qui éveillent une ressouvenance de feux follets, et donnent à ce jeu une grâce, une originalité qui n’est pas sans charmes.
Le lendemain, je quittais la large plaine de Xieng Sen, où le Mékong se répand superbement et baigne l’île Isabelle, gracieusement baptisée de mon nom par le lieutenant Simon, le chef savant et distingué de la mission hydrographique du haut Mékong. Il est d’usage sur le haut Mékong que toute pirogue qui porte un Français arbore notre drapeau ; et c’était pour moi une joie enfantine et une petite fierté de songer que nos trois couleurs flottaient une fois de plus dans ces hautes régions ! Je me souvenais d’une émotion analogue éprouvée au Liban : chaque Européen a coutume d’y abriter sa tente sous son drapeau national ; et lorsque, au premier jour, en arrivant à l’étape, j’ai aperçu nos trois couleurs battant au vent pour une humble femme, je crois vraiment que les larmes me sont venues aux yeux. Ce sont là joies de voyageur et d’autant plus intenses qu’on est plus loin et plus seul.
Aussitôt sortis de la plaine de Xieng Sen, les rapides, les kengs, comme on les nomme, commencent et se succèdent. Le Keng-Pakantoun, qui m’a été signalé comme le plus grand des rapides de cette première journée, me serait difficile à reconnaître parmi les autres, si un petit monument commémoratif ne le distinguait. Un fils de roi de Vientiane est mort en ce lieu, dans un combat contre les Hos ; et sur une grosse pierre, à peu près à l’état de nature, dressée à côté de pierres semblables, est représenté un personnage debout, en haut-relief grossièrement sculpté.
Le soir même j’arrivais à Xieng Khong. Sur la rive française, le village de Ban³-Houé-Saï, en face de Xieng Khong, est pittoresquement perché sur une éminence. De très loin, on croirait voir une ville fortifiée importante, dressée sur sa falaise, en un coude du fleuve ; et, à mesure qu’on approche, on ne distingue plus que quelques maisons, dont l’une porte le pavillon français. C’est celle du commissaire du gouvernement, dont le commissariat est maintenant transféré à Vien⁴-Poukha, à dix journées dans l’intérieur. Notre drapeau flottait également au-dessus de Xieng Khong, sur la rive droite. Une douzaine de femmes khas, tout habillées de bleu foncé, le coupe-coupe ou le bâton à la main, couraient, à la queue leu leu, montant et descendant allégrement la haute berge. Je les prenais pour de gentils miliciens.
Le commissaire, M. Marolles, m’attendait, tout fier d’une récente capture faite la veille au soir, et qu’il avait bien voulu me réserver. C’était, au fond d’un large puits de six mètres de profondeur, un magnifique tigre de la plus grande taille, qui, chose extraordinaire sur le haut Mékong, avait, la semaine précédente, enlevé un jeune milicien de garde au petit poste de la résidence. Effaré de son exploit, il avait traversé le feu avec sa proie, et, s’étant brûlé, il l’avait lâchée. Sans grandes blessures apparentes, l’infortuné milicien n’en était pas moins mort dans les trois jours. Un petit cochonnet avait été placé comme appât dans cette fosse recouverte de branchages. Le tigre, pris au piège, s’était trouvé si penaud de sa chute, qu’après quelques bonds verticaux effrayants, il n’avait pas même pensé à manger le cochonnet. Il l’avait pris pour oreiller ;
