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Chacun son tour (Pas de paradis sans... l'enfer, vol. 7)
Chacun son tour (Pas de paradis sans... l'enfer, vol. 7)
Chacun son tour (Pas de paradis sans... l'enfer, vol. 7)
Livre électronique459 pages6 heures

Chacun son tour (Pas de paradis sans... l'enfer, vol. 7)

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À propos de ce livre électronique

Le Grand Maître intervertit les rôles de David et de Greg Arsh. Pendant que David a autorité sur lui, Greg Arsh démontre quel élève hors du commun il peut être, même pour son propre fils. David et maître Arsh en profitent pour redonner à monsieur Drayber la faculté de penser et de choisir librement, faculté qu’il avait perdue après avoir passé de nombreuses années avec un tokmak, cloporte de la planète Gekihen, dans son cerveau. David aide à décider ce qui doit être fait du double en provenance d’une autre dimension de Gabriel. Et lorsque Greg Arsh retrouve son autorité auprès de lui, David se prépare pour son épreuve d’accession, qui lui permettra de mettre un terme à sa formation et d’obtenir le titre de maître de la Communauté des planètes. Angel, la fille de David et de Mily vient au monde.

LangueFrançais
Date de sortie30 avr. 2020
ISBN9782924400074
Chacun son tour (Pas de paradis sans... l'enfer, vol. 7)
Auteur

Danielle Tremblay

FRANÇAIS :Danielle Tremblay complète ses études collégiales en informatique au Cégeg de Chicoutimi en 1973. Elle possède également deux attestations d’études collégiales du Cégep de Jonquière, l’une en techniques de la documentation (1984), l’autre en techniques de micro-informatique (1994). De 1984 à 2012, année de sa retraite, elle travaille comme technicienne en bibliothèque pour diverses institutions à Chicoutimi, dont les neuf dernières années au Conseil national de recherches du Canada. Elle a remporté en 1981 le concours littéraire La Plume saguenéenne dans la catégorie science-fiction pour sa nouvelle «Cosmose», le second prix du concours du meilleur texte de trois pages du module des lettres de l’Université du Québec à Chicoutimi en 1988 et le premier prix de ce même concours en 1989 pour «La Lettre d’adieu». En 2011, elle gagne le premier prix du concours littéraire de science-fiction Ascadys avec sa nouvelle «Adam et Ève». L'année suivante, elle publie son premier roman, «Pas de paradis sans... l’enfer» tome 1. Depuis, elle n'a pas cessé d'écrire sous son vrai nom et sous un nom de plume.--------------ENGLISH:Danielle Tremblay completed her college studies in computer science at Cégeg de Chicoutimi in 1973. She also holds two attestations of collegial studies from the Cégep de Jonquière, one in documentation techniques (1984) and the other in microcomputer techniques (1994). From 1984 to 2012, the year of her retirement, she worked as a library technician for various institutions in Chicoutimi, including the last nine years at the National Research Council of Canada. In 1981, she won the literary competition La Plume saguenéenne in the science fiction category for her short story "Cosmose", the second prize in the competition for the best three-page text at the Université du Québec à Chicoutimi in 1988 and the first prize in the same competition in 1989 for "La Lettre d'adieu". In 2011, she won the first prize in the Ascadys science fiction literary competition with her short story "Adam et Ève". The following year, she publishes her first novel, "Pas de paradis sans... l'enfer" volume 1. Since then, she hasn't stopped writing under her real name and a pen name.

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    Chacun son tour (Pas de paradis sans... l'enfer, vol. 7) - Danielle Tremblay

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    Published by Danielle Tremblay at Smashwords

    Copyright 2015 Danielle Tremblay

    ISBN: 978-2-924400-07-4

    Table des matières

    Droits d'auteur

    Chapitre 1. Demande spéciale du Grand Maître

    Chapitre 2. Mon élève nommé Greg Arsh

    Chapitre 3. Suite de l’interrogatoire

    Chapitre 4. Les rats

    Chapitre 5. Le sort de Gabriel en question

    Chapitre 6. Servitude publique

    Chapitre 7. Discussion avec le Grand Maître

    Chapitre 8. Punition

    Chapitre 9. À mon tour

    Chapitre 10. Les oiseaux et le synthétiseur vocal

    Chapitre 11. Don

    Chapitre 12. Maître Zhang

    Chapitre 13. Entraînement physique

    Chapitre 14. Sipho

    Chapitre 15. Lisa

    Chapitre 16. Questions d’automatisation

    Chapitre 17. Difficultés de négociation

    Chapitre 18. Maître Zhang et Sipho

    Chapitre 19. Moïra

    Chapitre 20. Damien et monsieur Drayber : l’arrivée

    Chapitre 21. Début du travail bureaucratique de monsieur Drayber

    Chapitre 22. Liberté de pensée et de choix

    Chapitre 23. Tokmak et androserviteur

    Chapitre 24. Gabriel numéro 2

    Chapitre 25. Le Kipas

    Chapitre 26. Rencontre avec Don

    Chapitre 27. Dans la chambre de Maître Mestari

    Chapitre 28. Révélation du Grand Maître

    Chapitre 29. Mon frère Don

    Chapitre 30. Greg et Monsieur Drayber

    Chapitre 31. Tâches et apprentissages

    Chapitre 32. Fin de l’inversion d’autorité

    Chapitre 33. Reprise de pouvoir et le dragon de Zatvor

    Chapitre 34. Réflexion

    Chapitre 35. L’histoire de Maître Mestari

    Chapitre 36. Explications

    Chapitre 37. Confiance

    Chapitre 38. Ma vie à Éden

    Chapitre 39. Cours de pilotage en conditions extrêmes

    Chapitre 40. Données historiques sur un sauvetage

    Chapitre 41. Problèmes de sécurité

    Chapitre 42. Débuts difficiles pour Nicole

    Chapitre 43. Tireur

    Chapitre 44. Incendie

    Chapitre 45. Nestor et ses amis

    Chapitre 46. Ala

    Chapitre 47. La fin de ma formation et des ennuis pour Don

    Chapitre 48. Rencontre avec Dennis

    Chapitre 49. Rencontre de maître Arsh et de Dennis

    Chapitre 50. Retour de Dennis

    Chapitre 51. Entraînement de Dennis

    Chapitre 52. Chez la consule Dreki

    Chapitre 53. Formation érotique

    Chapitre 54. La naissance d’Angel

    Chapitre 55. Max et Isila

    Chapitre 56. Paternité

    Chapitre 57. Visite familiales

    Chapitre 58. Préparation à l’épreuve d’accession

    Autres tomes de cette série

    Chapitre 1. Demande spéciale du Grand Maître

    Cet après-midi-là, j’assiste à l’un de mes cours quand mon com sonne. Avant de le désactiver, je regarde qui appelle. Je ne le désactive pas. Je me lève pour aller répondre à Maître Mestari dans le corridor. Pourquoi faut-il que ce soit toujours dans le groupe d’un enseignant qui ne tolère pas qu’on prenne des messages en classe que j’en reçois que je ne peux pas refuser ? En passant, je montre qui m’appelle au prof, qui ne me faisait pas les yeux doux.

    – Bonjour, Monseigneur ! le salué-je avant même d’être sorti de la salle.

    – Peux-tu te rendre dans un endroit tranquille, que nous puissions parler sans être espionnés ?

    – Oui, Votre Majesté, j’y suis, lui dis-je, en entrant dans un petit local de réunion vide, qui se trouve presque en face de celui où je me trouvais.

    – Déjà ?!

    – Oui, c’est l’avantage d’être membre de la garde. On a accès presque partout.

    – C’est vrai. David, je voudrais savoir : pourquoi m’appelles-tu toujours « Monseigneur » ?

    – Parce que je crois sincèrement que vous êtes l’un des plus grands seigneurs à avoir existé. Vous êtes probablement même LE plus grand seigneur de tous les temps. Il y a eu des rois et des chefs d’État sur toutes les planètes de la Communauté et il y a eu d’autres Grands Maîtres avant vous, mais personne n’a encore eu d’autorité sur autant de gens et pour aussi longtemps que vous. Permettez-moi de vous dire bien humblement que je pense que, non seulement vous méritez d’être toujours à ce poste, mais vous êtes digne du titre de seigneur, Votre Majesté.

    Il grogne. Je lis dans son esprit que c’est un grognement de satisfaction.

    – Mais si ça vous déplaît que je m’adresse à vous en ces termes, je ne le ferai plus, Maître.

    – Si tu es sincère et ne m’appelles pas ainsi par dérision, je n’ai pas d’objection à ce que tu continues.

    – Je n’oserais jamais me moquer de vous, Monseigneur. D’ailleurs, je ne vois même pas sur quel point je pourrais plaisanter.

    – Tu en as vu bien plus que la plupart et d’autres ont pourtant trouvé de nombreux sujets de moqueries.

    – Joso a reconnu avoir agi comme un imbécile. Quant aux autres, j’aime mieux ne pas savoir qui ils sont de peur de m’impatienter envers eux si je les rencontrais.

    Il rit un peu.

    – Tu me fais tellement penser à Greg parfois. Cette tête de muldyr.

    – Qu’est-ce qu’un muldyr ?

    – Tout ce qui compte à ce sujet, c’est que les muldyrs ont la tête très dure. Greg t’a-t-il parlé de ce que je voulais te demander ?

    – Il m’a seulement dit que vous aviez l’intention d’intervertir nos rôles pour plusieurs semaines, Monseigneur.

    – T’a-t-il expliqué pourquoi ?

    – Il m’a raconté qu’il avait choisi de vous désobéir lorsque vous lui avez ordonné d’opérer Gabriel pour le transformer en quelque chose comme un androserviteur.

    – Cet orgueilleux semble croire qu’il sait mieux que moi ce qui est préférable à ce sujet. Je n’admets pas qu’il conteste mon jugement. Qui plus est, il refuse obstinément d’obtempérer bien qu’après avoir mis le kipas à Gabriel, nous ayons vu toutes sortes de violence dans son futur, comme l’explosion de nombreuses bombes. J’ai même menacé Greg de renvoi s’il s’entêtait. Il a répondu qu’il ne pouvait pas faire ça. Mais moi, ce que je n’arrive pas à faire, c’est à le chasser. Il est l’un des meilleurs éléments qu’ait eus la Communauté. Je trouve que ce serait une grande perte.

    Les raisons qu’il me donne ne sont pas ses motivations réelles. L’idée de se défaire de son seul élève le peine infiniment. Il ne peut pas s’imaginer en train de lui dire qu’il le met à la porte. Alors, il a décidé de lui offrir une chance. Et je suis l’outil devant permettre à mon maître de prouver sa valeur.

    – Il t’a demandé si tu accepterais de prendre la charge de ses élèves si jamais il disparaissait ou mourait, n’est-ce pas ?

    – Oui, Monseigneur.

    – Il m’a raconté que tu lui as répondu que ce serait un grand honneur. Je crois donc que toute occasion pour toi de t’exercer à ce rôle te sera profitable. Quant à cet orgueilleux et ce lâche, se retrouver sous l’autorité de l’élève à qui il a le plus reproché l’orgueil et la lâcheté devrait le remettre à sa place, lui rappeler qu’il n’est pas au-dessus des autres, de personnes. Comprends-tu ?

    Son ton de voix est très impatient, même colérique.

    – J’avoue avoir du mal à l’imaginer agissant avec orgueil ou lâcheté, Monseigneur. Mais si vous croyez devoir lui donner une leçon, je suis prêt à faire ce que vous voulez.

    – Je lui ai accordé deux jours pour régler les affaires qui doivent l’être en urgence et pour préparer l’arrivée de monsieur Drayber. Après-demain, tu peux le laisser terminer son entraînement matinal puis tu prendras sa place à son bureau et occuperas sa charge durant autant de semaines que tu jugeras nécessaire pour lui faire comprendre clairement ce qu’il risque en s’entêtant à me désobéir.

    Je lis dans son esprit qu’en réalité, il espère que je réussirai à convaincre mon maître de se soumettre. Maître Mestari ne voudrait pas se ridiculiser en gardant son élève alors qu’il l’a menacé de renvoi s’il passait outre à son ordre. Pour lui, respecter sa parole est une question d’honneur et de fierté. Pourtant, son cœur lui commande de n’en rien faire, car il aime mon maître comme son propre fils.

    – Je comprends, Monseigneur. Je vais m’efforcer de vous donner satisfaction à tous les deux, si possible. Et je ne peux que vous donner raison : le mettre à la porte serait une perte terrible. Il est peut-être le meilleur élément que la C.P. possède.

    – Essaie de demeurer objectif, David. Je sais que tu l’aimes au moins autant que je l’aime. C’est une tâche très difficile dont je t’ai chargé, mais je suis trop directement impliqué et beaucoup trop débordé pour m’en occuper moi-même, comprends-tu ?

    Le fait qu’il m’avoue son amour pour son élève, lui qui n’utilise jamais ce mot d’ordinaire, me révèle à quel point il est troublé par la désobéissance de mon maître.

    – Oui, Votre Majesté. Je ferai de mon mieux pour garder la tête froide.

    – Bien. Je suis confiant, David. Malgré toutes les critiques que Greg a pu t’adresser, je pense que tu es, toi aussi, un excellent élément.

    – Merci, Monseigneur. Puis-je vous poser une question ?

    – À quel sujet ?

    – Monsieur Drayber.

    – Que veux-tu savoir ?

    – L’aide que lui apportera mon maître, ou plutôt « mon élève », risque de l’occuper pas mal, considéreriez-vous d’un bon œil que je lui accorde tout le temps nécessaire pour faire ce qu’il doit à ce sujet ?

    – Oui, c’était prévu comme ça. S’il avait rempli ses fonctions habituelles, il n’aurait sans doute pas été très disponible pour lui. Dans sa nouvelle situation, il le sera un peu plus. Et peut-être comprendra-t-il que je n’ai rien contre le fait de permettre aux gens de garder ou de retrouver leur libre arbitre, que ce n’est pas parce que je suis un tyran que j’ai une telle exigence au sujet de Gabriel.

    – Je sais, Monseigneur, avec certitude, qu’il ne vous a jamais considéré comme un tyran.

    Maître Mestari grogne encore un peu.

    – Je sais bien, mais j’avoue que son attitude… Il lui était déjà arrivé de discuter mes ordres. Ce qui m’a grandement contrarié. Mais c’est la première fois qu’il s’oppose aussi systématiquement à ma volonté. Je ne m’y attendais pas. Quoi qu’il en soit, David, fais-moi au moins un rapport hebdomadaire. Si tu crois nécessaire ou même juste utile de me parler, n’hésite pas à communiquer avec moi. Si je suis pris, laisse-moi un message, je te rappellerai.

    Il affirme que lorsque mon maître discute ses ordres, cela le contrarie ; mais j’ai découvert dans son esprit que son élève ne le faisait jamais sans de solides raisons. En fait, Maître Mestari respecte Greg pour son bon jugement et son audace. Très peu osent contredire le Grand Maître, même quand il se trompe. Et la plupart du temps, on le fait à tort et à travers, comme ce clown de Joso, ou pas du tout. Que mon maître remette parfois ses idées ou ses choix en question peut certes le contrarier, mais Maître Mestari ne l’en estime que davantage de risquer d’affronter son courroux pour le bien de tous.

    – Merci, Monseigneur.

    – C’est moi qui te remercie, David.

    Il a raccroché sans même me saluer. Il ne l’avait pas fait non plus au début de la conversation. Cette attitude me fait penser à celle de quelqu’un d’autre. Je retourne en classe en souriant.

    – L’un des élèves se moque de moi.

    – « Monseigneur » ? Qui appelles-tu « Monseigneur », ton maître ? Es-tu lèche-cul à ce point ?

    – Ça suffit, Jerry ! lui lance le prof.

    – Lèche-cul, insiste Jerry.

    – Jerry. Celui qui voulait lui parler était le Grand Maître, lui dit le prof.

    Cette révélation cloue le bec de Jerry, qui me regarde différemment. Je ne lui accorde pas la moindre attention. Je risque de me retrouver dans de bien plus étranges situations pendant les prochaines semaines.

    Je mène pour deux autres journées la calme petite vie que je craignais de vivre encore trois ans, la vie tranquille d’un étudiant ordinaire. Même Mily ne me fait pas d’histoires. Elle semble bien accueillir l’idée de mon renversement de rôle avec mon maître. Je me demande si sa bonne disposition d’esprit durera aussi longtemps que cette interversion.

    Chapitre 2. Mon élève nommé Greg Arsh

    Deux jours plus tard, immédiatement après mon entraînement, je me rends au bureau de mon maître. Il est en train de prendre sa douche dans la pièce voisine. Je ne l’y dérange pas. Je m’assois bien tranquillement dans son fauteuil en attendant qu’il revienne dans la pièce principale.

    En me voyant, il se met aussitôt en posture d’attente de l’autre côté de son propre bureau. Magnifique ! Pas la moindre hésitation non plus dans son esprit ; aucun doute sur la nécessité de ce renversement de rôle. Il l’accepte totalement. Même cette porte qu’il ouvre toute grande pour moi dans son esprit m’en dit long sur ses intentions et sur son acceptation.

    Je m’adosse au haut dossier de son fauteuil, les mains jointes derrière la tête, et le regarde en souriant. Je sens la douce caresse de son esprit dans le mien.

    – Non. Pas de ça tant que durera ce changement de rôles, dis-je.

    – Bien, Monsieur, répond-il en se retirant de mon esprit.

    Je sais avec certitude qu’il n’est plus en moi. Ce n’est pas qu’une question d’absence de sensation, c’est une absence de toute volonté de résistance dans son esprit.

    Je me lève et lui fais signe de la main de me suivre dans l’autre pièce. Si je ne lui ordonne pas oralement de m’y accompagner, ce n’est pas pour ménager mes effets, mais parce que le souffle me manque. Devoir traiter mon propre maître comme on traite un élève indiscipliné me serre les entrailles. Je ne suis pas encore certain d’avoir la trempe qu’il faut pour assumer correctement un tel rôle. Mais je ne peux pas rester plusieurs semaines sans lui adresser un seul mot.

    – Va dans le cercle et attends-moi pendant que je prends ma douche.

    Je me suis entraîné, mais ne me suis pas rafraîchi. Je le fais sans me presser. Lui, il attend bien sagement en se demandant s’il aurait déjà commis une erreur, quelque chose pour me déplaire, si c’est la raison pour laquelle il se trouve dans le cercle. L’idée de m’avoir peut-être déplu l’attriste. Aucune simulation. Il est sincèrement désolé à l’idée de n’avoir peut-être pas fait assez vite pour finir sa douche, pour se mettre en posture d’attente ou pour me suivre ici. Il se demande s’il aurait dû aller dans le cercle sans que je le lui demande ou s’il aurait dû se mettre à genoux devant moi.

    Pourtant, il s’est donné la peine de me permettre l’accès à cette pièce sans que j’aie à indiquer mon code de la garde. Je suis sûr qu’il m’a donné le même accès à tous les locaux et à tous les fichiers auxquels je pourrais avoir besoin d’accéder pendant les prochaines semaines. Il a fait ses préparatifs très méticuleusement. Mais il est là, dans le cercle rouge, à craindre de m’avoir déjà déplu.

    J’étire ma douche parce que les larmes me montent déjà aux yeux tellement son attitude déférente me touche. Je ne veux pas qu’il voie mes larmes. Quand je sors de la douche, je lui demande d’aller me chercher une serviette et un nouvel uniforme.

    – Mets celui-ci dans la chute à linge sale, ordonné-je.

    Il sort du cercle pour répondre à mon exigence. Lorsqu’il revient avec l’uniforme et la serviette, il me les tend. Je lui dis de déposer l’uniforme sur un petit chariot flottant entre les deux douches et de m’essuyer avec la serviette. Il s’y met sans attendre. Il semble même prendre plaisir au mélange de douceur et de fermeté de ses gestes. J’imagine qu’il a déjà dû avoir ce même comportement envers Maître Mestari. Je profite de ce qu’il finit de m’essuyer pour plonger dans ses pensées, dans ses souvenirs de servitude.

    Je le vois beaucoup plus jeune, aidant Madame Zulu à se préparer à un événement important. Elle sort de douche, dans toute sa magnificence. Il la regarde comme on regarderait une déesse. Mais cet événement la rend nerveuse et elle fait montre d’impatience envers lui. Il ne lui en veut pas. Il l’aide aussi bien qu’il peut. Il essaie même de la rassurer. Il lui adresse les plus beaux compliments du monde. Alors qu’il est à genoux, l’aidant à enfiler le pied dans une chaussure, elle lui effleure les cheveux. Il frissonne. Je le vois aussi aider le Grand Maître de la même manière qu’il le fait pour moi maintenant. Je vois ses yeux se poser là où devrait se trouver le sexe du Grand Maître. Il a la même réaction que moi dans la même circonstance : un mélange de tristesse et d’affection envers son maître, ainsi que le désir intense de le connaître davantage pour pouvoir mieux l’aider qu’en l’essuyant à sa sortie de la douche. Il révère Maître Mestari. Ce n’est certainement pas par manque de respect qu’il a refusé de lui obéir, mais parce qu’il manquerait gravement à sa propre conscience, à ses principes, à son principe numéro un : toujours laisser l’autre libre de ses choix.

    En voulant le forcer à obéir, Maître Mestari lui dit qu’il ne partage pas dans tous les cas le principe du libre arbitre, ce qui peine Greg. Mon nouvel élève serait extrêmement malheureux s’il devait être chassé, pas juste parce qu’il perdrait tout ce qui compte à ses yeux, pas juste parce qu’il serait forcé de demeurer loin de ses chers enfants et de son maître révéré, mais parce que ce dernier ne l’aurait pas compris, l’aurait mal jugé. Mais si Maître Mestari veut qu’il parte, il partira. Je lis cette absolue détermination dans son esprit.

    Il continue de m’essuyer avec tellement de respect dans ses gestes et ses pensées que je me sens comme un roi à sa sortie de la douche. Mais je lui retire la serviette pour m’essuyer les cheveux moi-même. Je lui ai presque arraché la serviette des mains, ce qui l’a fait sursauter et a aussitôt suscité en lui un malaise. Je vois son visage déconfit, malheureux de n’avoir pas su effectuer cette petite tâche à mon entière satisfaction et de ne pas pouvoir avoir le plaisir de la terminer. Il pense que ses rêveries l’ont sans doute déconcentré et qu’il doit avoir fait ce qu’il n’aurait pas dû par mégarde. Je ne démens pas ses craintes.

    – Dans le cercle. Tout nu, lui dis-je sèchement.

    Il s’y rend, presque dos voûté, et se dévêt. Il plie rapidement, mais soigneusement son uniforme et le place à ses pieds. Lorsqu’il se redresse, il a l’air triste, si malheureux de m’avoir déplu. Sa réaction me donne envie d’aller vers lui et de le serrer dans mes bras, de le consoler, de lui demander pardon de la brusquerie de mon geste et de lui dire quel bon élève il est, mais je m’en abstiens, comme je m’abstiens de verser les larmes qui veulent encore jaillir. Je ne savais pas que je trouverais cette tâche si difficile. Je ne savais pas qu’on peut davantage souffrir à éprouver ses élèves qu’à être éprouvé par ses maîtres. Comment vais-je réussir à tenir plusieurs semaines dans ces conditions ?

    Il a pris la posture d’attente et me suit du regard. Je pourrais presque dire qu’il me dévore des yeux. Il ne manque, j’en suis sûr, aucun de mes gestes, aucune des mimiques de mon visage. Ne pouvant pas lire mes pensées, il se satisfait tant bien que mal de ce qu’il voit, de ce qu’il sent.

    Je termine d’essuyer mes cheveux et de me vêtir. Je lance la serviette dans la chute à linge comme je l’ai vu tant de fois le faire. Je suis moins précis que lui, manquant sans doute d’entraînement. La serviette est à moitié suspendue à l’extérieur de la chute. Je vais ensuite appuyer sur la commande au sol pour faire descendre les poignées au-dessus de lui. Je fais « oui » de la tête pour lui signifier qu’il doit y mettre les mains. J’appuie de nouveau sur la commande et je fais remonter les poignées juste assez pour que seule l’extrémité de ses gros orteils effleure le sol, le forçant à une lutte constante pour conserver les jambes dans le même écartement dans lequel elles se trouvaient quand il avait les pieds à plat par terre.

    Quel magnifique élève on m’a prêté ! Il est dans une forme physique parfaite. L’intensité électrique de son regard, posé sur moi, me transmet le même message que son esprit : « Demandez-moi ce que vous voulez ». Il est, je le sens, je le sais, prêt à tout pour me satisfaire.

    Je me mets à le questionner sur son passé et sur ce qu’il croit être son futur.

    – Dans tout ce que tu as vécu, quel est ton plus beau souvenir ? le questionné-je.

    Il réfléchit un peu, mais les mêmes images reviennent et tourbillonnent dans sa tête.

    – La renaissance de Don, Monsieur.

    – Parle-m’en. Réponds-moi en détail. Explique-moi ce que tu as ressenti.

    – Sa mort…

    Il s’interrompt, cherchant son souffle et les mots pour continuer. Son visage est déjà inondé de larmes. Ce qui me donne à nouveau envie de pleurer moi aussi. Ce souvenir m’est également très sensible, à la fois douloureux et heureux.

    – Il me semblait que tout ce pour quoi j’avais vécu, toutes mes raisons d’exister avaient disparu avec lui. Je…

    Il lève les yeux vers moi et me regarde si tendrement.

    – Le monde venait de s’éteindre. J’ai cru qu’il ne se rallumerait jamais. Et… vous lui avez redonné vie. J’avais si peur que ce ne soit pas lui, que ce ne soit que son corps habité par… une partie de vous ou par maître Mizori. J’avais peur que ce puisse être Don, mais seulement en partie, qu’il ne soit plus entièrement là, pas tout à fait le même.

    – Je comprends, dis-je. J’ai craint les mêmes choses. Quand as-tu compris qu’il était bien là, tout entier, le même Don qu’il était avant l’explosion ?

    – Quand il a ri. Son rire !

    Il sourit, puis se met à sangloter. Malgré ses sanglots, il ne change pas d’un millième de millimètre sa posture, pourtant instable et difficile à tenir. Il se calme et reprend son souffle.

    – Ce rire était trop semblable au sien pour que ce ne soit pas le sien. Il était bel et bien vivant, dis-je pour le pousser à continuer.

    – Oui, Monsieur. Mon petit-fils était vivant, grâce à vous. Et moi aussi, j’ai senti que je reprenais vie. Merci, infiniment !

    Je lis en lui toute l’émotion que son récit a provoquée. C’est chaud et lumineux, si intense ! Il y repense et revit pour moi ces instants inoubliables.

    – Et madame Zulu ?

    – Oui, Monsieur. Mzimba Zulu était ma déesse, mon soleil. Je l’admirais, l’idolâtrais presque. Elle m’a tellement donné. Et le jour de ce bal, elle était nerveuse, car on voulait l’honorer, la féliciter pour toutes ses années d’excellent travail comme grande maîtresse. Même le Grand Maître de l’époque s’était déplacé. Elle s’était vêtue de sa plus belle robe. Il faisait un temps splendide, ensoleillé, avec une douce et fraîche brise. Des tables avaient été dressées à l’extérieur, de la musique gaie et entraînante jouait. Elle a dansé dans sa belle robe blanche et dans le soleil. Elle était si heureuse ! On lui a offert ce bouquet, celui que j’ai dû détruire. Elle l’a lancé en l’air en tourbillonnant et elle a failli tomber en essayant de le rattraper. Je l’ai retenue en l’entourant d’un bras et j’ai aussi saisi au vol le bouquet de mon autre main. J’ai continué de la faire tourbillonner dans la musique. Elle a dit en souriant : « Mon prince charmant, mon jeune sauveteur ! » Je lui ai souri. J’ai gardé ce souvenir au fond de mon esprit et de mon cœur, car quelques semaines plus tard, au retour de ma mission sur Achantis, elle mourait. Cette fête était le dernier et le plus beau souvenir que j’ai gardé d’elle.

    Il pleure encore, mais plus doucement. Le souvenir de sa belle dame Zulu est resté dans sa mémoire comme un bouquet de fleurs magnifique, impérissable et indestructible. Elle tourbillonnera toujours en lui, vêtue de sa belle robe blanche, dans le soleil couchant.

    – Et le plus terrible souvenir ?

    – Les mêmes, Monsieur. La mort de Don et celle de madame Zulu. Mais si je devais considérer comme un seul et même souvenir la mort de tous ceux que j’ai aimés, je dirais la mort de mes proches en général. Celle de mon père, qui n’a été auprès de moi que le temps que j’apprenne à le respecter et à l’aimer. Celle de tous mes élèves que j’ai envoyés en mission et qui ne sont pas revenus pèse très lourd sur mon âme, de plus en plus lourd. Je sais bien qu’il faut que quelqu’un remplisse ces missions-là, comme toutes les autres missions plus faciles, mais…

    Il penche la tête et je vois qu’il pleure encore. Puis il continue de m’ouvrir son cœur.

    – Frances, Gabriel, tous les autres, c’étaient mes enfants chéris. Je ne peux tout simplement pas faire ça à Gabriel, même si ce n’est pas celui que nous avons connu, il aurait pu devenir celui que nous avons connu s’il était né et avait grandi ici. Il a vécu une jeunesse terrible. On a torturé et assassiné ses parents devant lui pour l’endurcir alors qu’il n’était qu’un tout petit garçon. Je l’ai vu dans son esprit. Comment... Comment pourrais-je ajouter à ses souffrances ? Comment pourrais-je faire de lui une machine ? Je ne le peux pas. Je souffre de ne pas pouvoir satisfaire mon maître, mais je préférerais mourir que d’infliger ça à Gabriel. Je dois à NOTRE Gabriel, à sa mémoire, de refuser, même si je dois être renvoyé pour avoir désobéi.

    Il a en ce moment dans le regard toute la souffrance, mais aussi toute la détermination du monde. Quand il a regardé Gabriel, le sosie de celui que nous avons connu, il a vu celui qui est allé si courageusement parler avec lui devant les caméras de son renvoi et de son départ pour Vikirana. Comme il l’a vu à ce moment-là, il le revoit à travers mes yeux sortir de l’astroport pour se rendre d’un pas décidé à l’astronef qui le conduirait à une mort affreuse, sans doute. Puis il a disparu et son double est apparu. Mais sosie ou non, ce Gabriel-ci n’a pas demandé à être ce qu’il est devenu. Il porte en lui tout ce qui a fait de notre Gabriel cet ange gardien que tout le monde voyait en lui. Qui dit qu’il ne pourrait pas le devenir ? Qui dit qu’on ne pourrait pas lui faire comprendre que tout ce qu’on lui a appris n’est que terribles mensonges et infernales illusions ? Ne pourrait-on pas lui inculquer de nouvelles valeurs ?

    Mon maître, mon nouvel élève pose sur moi un regard qui dit : « Me comprenez-vous ? » Il se demande aussi comment il se fait qu’il n’ait pas réussi à convaincre Maître Mestari de ne pas transformer Gabriel en robot.

    – Maître Mestari n’a pas connu notre ange gardien, notre Gabriel.

    Mes paroles le retournent sens dessus dessous, mais je continue quand même.

    – Il ne sait pas toute l’affection, tout l’amour qu’il suscitait. Il ne sait pas comme il était généreux et courageux. Ton maître ne voit pas toute la douleur que l’idée d’infliger un tel traitement à celui qui lui ressemble tant te cause. Il voit seulement les risques que nous fait courir ce monstre assoiffé de violence qui a pris les traits de Gabriel et il veut nous éviter ces dangers possibles. Comment vivrais-tu ça, Greg, si on envoyait Gabriel sur Zatvor et qu’il s’en évadait pour aller mettre d’autres planètes à feu et à sang ? Si ses idées eugénistes le poussaient à assassiner des innocents parce qu’il les jugerait imparfaits, faibles et nuisibles à la pureté de l’espèce et au progrès de la société. Comment te sentirais-tu si tu voyais des enfants exploser à cause de ses bombes ou si Maître Mestari était assassiné par lui ?

    – Puis-je parler librement, Monsieur ?

    – Oui, vas-y.

    – Pourquoi est-ce que la seule solution pour lui faire comprendre qu’il n’a pas droit de vie et de mort sur qui bon lui semble serait de le transformer en androserviteur ? Et pourquoi est-ce que ce devrait être à moi de faire ça ?

    – Parce que c’est ce que le Grand Maître a décidé et parce que tu es son élève et que c’est à toi qu’il le demande. Parce qu’en général, les élèves font confiance à leurs maîtres et leur obéissent. En tout cas, c’est ce que mon maître m’a appris.

    Il me sourit tristement, mais je lis dans son esprit qu’il croit que mon maître aurait dû m’apprendre à d’abord obéir à ma conscience avant de lui obéir à lui. On voit les choses autrement quand on est de l’autre côté du miroir, on dirait.

    – Quelle différence est-ce que ça ferait que cette transformation soit ton œuvre ou celle d’un autre ? En refusant, ne dis-tu pas à tous que tu t’en laves les mains ? Si tu sais que ce sera fait de toute manière, ne devrais-tu pas à la mémoire de Gabriel d’être celui qui lui infligera, quoi qu’il t’en coûte et avec tout le respect et l’amour que tu ressens pour lui, cette terrible métamorphose ?

    Mes paroles le frappent en plein cœur. Il se remet à sangloter. Je lui laisse le temps de retrouver son calme.

    – Dans cet autre univers, d’où vient le sosie de Gabriel, n’est-ce pas toi qui as créé la méthode pour que les conditionnements ne fonctionnent pas, pour qu’ils n’aient pas prise sur l’esprit de ceux à qui on les inflige ?

    – Oui. C’est ce que j’ai vu dans l’esprit de son sosie.

    – En sais-tu assez sur cette méthode pour pouvoir défaire ce qu’elle a fait ? Ne serait-ce pas possible de trouver une nouvelle façon de réveiller en Gabriel ce qu’on a tenté d’annihiler ? Notre Gaby était si bon que je ne peux pas croire qu’il n’y ait rien qui lui ressemble dans son sosie. Peut-être que son double s’est créé une armure pour ne pas trop souffrir de ce qu’on lui a fait subir, de toutes les horreurs qu’il a vécues. Toi qui as su transformer des machines en humains ne saurais-tu pas transformer un démon en ange gardien ?

    – Je ne sais pas, Monsieur. J’aimerais pouvoir transformer celui-ci en celui-là, mais je ne sais pas si c’est possible ni si je le pourrais. Il se retrouverait peut-être écartelé entre ses anciennes et ses nouvelles valeurs, encore plus instable qu’il ne l’est en ce moment. Et ce n’est pas ce que Maître Mestari attend de moi de toute manière. Il veut que je transforme un humain en machine.

    – Réfléchis-y quand même. Peut-être te viendra-t-il une idée de génie. Sinon, c’est toi qui seras écartelé entre la volonté de ton maître et la tienne.

    Il va y penser. Tant qu’il est sous ma tutelle, le Grand Maître ne fera rien à Gabriel. Si mon nouvel élève trouvait quelque chose d’utile, peut-être arriverait-il à le convaincre d’essayer sa méthode.

    – Quelle est la chose que tu regrettes le plus dans tout ce que tu as fait par le passé ? le questionné-je encore.

    – Tout dépend de ce que vous voulez dire par « regretter », Monsieur. Si vous voulez dire regretter, comme on regrette quelque chose qu’on aurait aimé garder, mais qu’on a perdu, ou si vous voulez signifier quelque chose qu’on n’aurait pas dû faire et pour quoi on a des remords.

    – Les deux.

    – Alors, je regrette la perte de ma maîtresse et celle de tous mes enfants disparus. Je regrette de ne pas

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