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Pause théâtrale
Pause théâtrale
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Livre électronique259 pages3 heures

Pause théâtrale

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À propos de ce livre électronique

Isabel Marak Flores est une actrice sérieuse.
Lorsqu’un agent lui suggère de se présenter à des auditions de publicités, Isabel refuse. Elle ne s’abaisserait quand même pas à paraître dans des publicités télévisuelles pour promouvoir des désodorisants à l’odeur de cupcakes.
Toutefois, lorsque ses parents lui annoncent qu’ils n’ont pas les moyens de lui payer ses cours à l’Académie des Arts dramatiques de New York, institution reconnue dans le monde entier qu’elle rêve tant de réquenter, la proposition de cet agent ne lui paraît plus si mauvaise. Isabel doit seulement s’assurer que sa nouvelle flamme n’en sache rien ; autrement, il refuserait peut-être d’être son Roméo...
Lorsqu’Isabel décroche le contrat d’une publicité qui ne devrait être diffusée qu’au Japon, tout semble parfait. C’est alors qu’elle découvre que la boisson dont elle a fait la promotion sera également vendue en Amérique — et que, par conséquent, son visage figurera sur les panneaux d’affichage ainsi que dans les revues, et que la publicité passera en boucle encore et encore à la télévision.
Une actrice sérieuse peut-elle apprendre à se détendre et à profiter de la vie au cours d’une brève pause théâtrale ?
LangueFrançais
Date de sortie13 août 2014
ISBN9782897339272
Pause théâtrale
Auteur

P. G. Kain

P.G. Kain lives in New York City, where he is the chair of Contemporary Culture and Creative Production in Global Liberal Studies at New York University.

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    Aperçu du livre

    Pause théâtrale - P. G. Kain

    théâtrales.

    REMERCIEMENTS

    Habituellement, je n’apprécie guère les remerciements qu’un auteur adresse à toutes les personnes qu’il a rencontrées. Cela dit, j’aimerais commencer par remercier les Phéniciens, qui ont inventé l’alphabet.

    Par ailleurs, je tiens à remercier mes nombreux amis qui m’ont soutenu et encouragé, concrètement ou non. Je remercie (en ordre d’apparition) Beth (Sofia et Ruby), Rebekah, Shari, Sara, Justin, Pam, Carley, Chris, Loins, Olivia, Kate, Lyn, Greta et Meline. Merci à ma famille, à Judi et à Matt, pour tout votre amour et votre soutien.

    Merci à mes correspondantes adolescentes, Julia DeVillers et Barbara Dee, pour leur point de vue et leur camaraderie. Merci à toi, Taylor Morris, mon meilleur ami du monde littéraire, pour les étonnants commentaires dont tu m’as fait part à propos de ce manuscrit, pour ta générosité sans bornes, ainsi que pour ta capacité infinie à écouter mes jérémiades.

    Merci à toi, William, d’être mon ami ; ton amitié m’est précieuse.

    Merci à ma merveilleuse agente, Alyssa Eisner Henkin, pour ta sagesse et ton charme. Merci à vous tous chez Simon & Schuster/Aladdin, qui avez travaillé à la concrétisation de ces livres, notamment à Jessica Sonkin Handelman, à Carolyn Swerdloff, à Lydia Finn, à Annie Berger, à Alyson Heller et à Liesa Abrams. Merci à toi, mon éditrice, Fiona Simpson, pour ton soutien à la fois généreux et enthousiaste, et ce, du début jusqu’à la toute fin de ce projet. Merci à toi, Kate Angelella, pour avoir mis en branle toute cette aventure.

    Je n’aurais jamais pu adresser ces remerciements sans penser à la personne la plus importante : TOI. Je te remercie de bien vouloir lire ce livre. Et si tu l’as déjà lu, c’est que tu as sans doute lu les différents tomes de la série Pauses publicitaires et qu’ils t’ont plu. J’en suis vraiment très heureux. Je suis grandement reconnaissant aux lecteurs qui m’écrivent. Je réponds à tous les courriels que je reçois. Je t’invite à consulter le site www.tweenink.com pour découvrir mes projets en cours. Tu peux aussi m’envoyer un courriel à l’adresse suivante : pg@tweenink.com.

    Chapitre 1

    — Ce n’est pas Nicole, la coupable ; c’est moi !

    À ce moment, l’intensité de ma voix sembla à elle seule faire vibrer tout l’espace autour de moi. Avec difficulté, j’avalai ma salive avant de sortir le couteau détrempé de faux sang de la poche de ma robe en vichy bleu afin de le brandir bien haut devant moi, à la vue de tous. Les spectateurs en avaient le souffle coupé. Je regardai la lumière réfléchir sur le bout de plastique luisant avant de le lancer sur la table.

    — J’ai tué Harriet Conners parce qu’elle connaissait mon secret, dis-je aussi calmement que si j’étais en train d’annoncer une faible probabilité de pluie pour le lendemain.

    Puis, ça me revint à l’esprit. J’écarquillai les yeux, regardant le couteau qui avait atterri sur la table comme s’il s’agissait d’un cobra s’apprêtant à attaquer. Je regardai les acteurs autour de moi, puis je criai :

    — J’ai tué Harriet Conners parce qu’elle savait ce qui s’était passé ! Elle savait ce qui s’était passé sur la balançoire à bascule !

    Je m’agenouillai. Je commençai à verser quelques larmes discrètement, puis je me mis à pleurer de plus en plus ; enfin, je devins complètement hystérique avant de m’effondrer à plat ventre sur le sol. J’entendais les commentaires horribles des gens autour de moi, qui venaient d’apprendre ce qui s’était réellement passé. Alors que je déversais un torrent de larmes, mon corps, lui, s’agitait sur le sol, tout comme l’aurait fait un morceau de lard fumé dans une poêle à frire brûlante. Je donnai des coups de poing et des coups de pied partout autour de moi avant de me remettre à genoux. Puis, je criai le plus fort que je le pus :

    — C’est moi la coupable. J’AI TUÉ HARRIET CONNERS !

    Un grand silence régna par la suite, une tension presque palpable saturant l’espace et les gens.

    Puis, j’entendis un grincement familier au-dessus de ma tête. Sans même lever les yeux, je sus qu’il s’agissait du lourd rideau de velours rouge qui descendait sur la scène. Je continuai de pleurer jusqu’à ce que la bordure dorée touche le sol. Je versai même un dernier gros sanglot. À ce moment même, j’entendis le plus beau son à mes oreilles : les applaudissements. Même si l’épais rideau assourdissait les applaudissements frénétiques, je percevais bien que le public était en délire.

    L’éclairage minutieusement ajusté pour mettre en évidence le drame qui se jouait sur la scène fit alors place à l’éclairage des lampes fluorescentes qui permettait aux acteurs de mieux voir ce qui se passait autour d’eux. L’entracte ne durait que 15 minutes ; le décor d’une salle de classe devait maintenant prendre l’allure d’une salle d’audience.

    Je me pressai vers les coulisses pour que l’équipe technique puisse transformer le décor de la scène.

    Tout en essuyant de mes yeux les larmes artificielles, je me rendis bien compte que de vraies larmes les suivaient de près. Je ne pouvais pas croire que je jouais ce personnage pour la dernière fois.

    Pendant les trois derniers mois, j’avais tenu le rôle de Kimberly Ann Fortunato, une jeune fille qui mentait, trompait et tramait des machinations pour dissimuler l’assassinat de sa meilleure amie, Harriet Conners, qui était devenue sa pire rivale. Cette pièce de théâtre, intitulée La balançoire à bascule, était présentée off-Broadway¹. Au départ, nous devions interpréter cette pièce seulement au mois de juillet ; toutefois, les critiques dithyrambiques avaient fait en sorte que nous avions pu prolonger les représentations jusqu’au début du mois de septembre. Mes interprétations avaient souvent fait l’objet d’éloges particuliers. Un critique de théâtre avait même déjà écrit ceci : « Isabel Marak Flores a offert une interprétation à la fois puissante et sincère. À voir absolument. » J’avais imprimé cette critique pour ensuite la ranger dans mon cahier de souvenirs de théâtre. C’était le rêve de toute actrice de recevoir une telle critique.

    Certes, le théâtre était un travail d’équipe. Comme tout le monde sans exception, de la costumière au metteur en scène, participait à la magie qui se produisait sur scène, aucun comédien ne pouvait s’attribuer le mérite du succès d’une pièce de théâtre. C’était un travail d’équipe et, en quelque sorte, c’était l’aspect que je préférais du théâtre : faire partie de tout un groupe d’artistes qui créent quelque chose de beau et de significatif pour le public. Qui plus est, je trouvais merveilleux de voir mon travail apprécié. J’étais particulièrement heureuse que le critique de théâtre ait qualifié mon interprétation de sincère. Pour un acteur, c’était le plus beau compliment qu’il était possible de recevoir. Jouer ne consistait pas seulement à faire semblant dans un quelconque costume. La personne qui joue doit s’approprier le personnage. Il faut à la fois de la discipline, du dévouement et une attitude sérieuse pour arriver à bien incarner un personnage. Comme mon rêve était de devenir une actrice renommée des productions de Broadway, chacun des rôles que je jouais me rapprochait de plus en plus de mon idéal.

    Je ne disposais que d’un court laps de temps entre le premier et le deuxième acte. En plus de devoir changer de costume, je devais faire mes exercices vocaux et ma méditation. Si le premier acte prenait fin avec mes aveux bien expressifs, le deuxième acte me permettrait vraiment de mettre mes talents théâtraux à l’épreuve. Je devais donc à faire mon entrée sur scène.

    — Isabel, tu as été fantastique. C’était ta meilleure interprétation jusqu’à ce jour, me dit Timothy Jackson tandis que je me rendais en coulisse, en direction de ma loge, située à l’étage supérieur du balcon.

    M. Jackson était le metteur en scène. C’était lui qui m’avait offert d’incarner le rôle de Kimberly. Il avait même reçu deux prix Tony. Il avait commencé à faire des spectacles en solo au Lincoln Center et, depuis quelques années déjà, le public lui donnait toujours une ovation debout. Je respectais beaucoup M. Jackson, et je lui étais très reconnaissante de croire en moi.

    — Je vous remercie, M. Jackson, lui répondis-je. J’apprends beaucoup de vous, lorsque vous assurez la mise en scène des pièces dans lesquelles je joue.

    — Eh bien, j’espère que tu continueras d’apprendre, me répondit-il.

    — Que voulez-vous dire ? lui demandais-je tandis que nous continuions à marcher vers les loges situées à l’étage.

    Avant que M. Jackson puisse répondre à ma question, Hilda, la femme chargée de l’équipe des costumes, de la coiffure et du maquillage, nous interrompit :

    — Je suis désolée, M. Jackson. Je dois faire un chignon à Isabel pour la scène de la salle d’audience.

    Comme l’entracte ne durait pas suffisamment longtemps pour que nous puissions prendre le temps de nous asseoir pour nous faire coiffer et maquiller convenablement, Hilda agrippait les acteurs au passage, là où elle le pouvait, pour faire ce qu’elle avait à faire. Dans les coulisses, c’était toujours le chaos ; néanmoins, c’était toujours le genre de chaos quelque peu organisé que j’adorais.

    — Oh, bien sûr, allez-y, Hilda, lui répondit M. Jackson tandis que nous nous arrêtions au pied de l’escalier qui menait aux loges. Je ne devrais probablement rien te dire avant la fin de la présentation de ce soir. Je ne voudrais surtout pas exacerber le trac du soir de la dernière représentation.

    Hilda s’approcha derrière moi pour me brosser les cheveux. Pour ma part, je ne pouvais m’empêcher de me demander ce que M. Jackson tentait de me dire.

    — Tout va bien ? lui demandai-je. Aurais-je fait quelque chose de mal ?

    — Oh, non, non. Tout va bien, au contraire. Tu n’as rien fait de mal du tout. En fait, tu fais tout correctement. Tu fais même vraiment tout correctement.

    Hilda donna un dernier coup de brosse à mes cheveux, puis elle les torsada pour faire un long chignon serré qu’elle attacha à l’aide de quelques épingles à cheveux avant de pulvériser un peu de laque à l’arrière de ma tête. M. Jackson regardait tranquillement s’effectuer la transformation.

    — Tu es maintenant prête, Isabel, dit Hilda. Va maintenant les épater tous.

    Elle s’interrompit avant de poursuivre.

    — Oh, mais un instant. En fait, tu les as déjà tous épatés.

    Elle rit de sa propre blague avant de se dépêcher de préparer un autre acteur pour le deuxième acte.

    M. Jackson et moi montâmes l’escalier qui menait à ma loge. Une fois arrivée à l’étage, je regardai la scène. Une équipe entière s’affairait au changement du décor. Quelques hommes fixèrent des cordes aux murs de la salle de classe et, à la suite d’un rapide signal, ils hissèrent les murs au-delà du balcon, là où se trouvaient les loges, jusqu’aux chevrons du toit. Puis, ils prirent les faux murs de la salle d’audience, qui étaient accrochés au-dessus de la scène, et les firent descendre doucement à côté des faux murs de la salle de classe, comme deux navires qui se croisent dans la nuit. Les membres de l’équipe chargée des décors levèrent les bras en l’air pour annoncer l’arrivée du nouveau décor, puis ils l’installèrent de façon sécuritaire. Parfois, je me disais que le rideau aurait dû rester levé pendant l’entracte pour que le public puisse voir la charge de travail nécessaire à un changement de décor. À mon avis, c’est le travail le plus précis et le plus exigeant qui se fait sur scène et, comme mes parents me le rappellent souvent : « Là où se trouve la beauté, l’art n’est pas loin ».

    — Isabel, m’interpella M. Jackson. Je voudrais te dire quelque chose d’assez important.

    — Permettez-moi d’abord de récupérer dans ma loge le collier que je dois porter dans le deuxième acte.

    Mon personnage devait mâcher la chaîne de son collier pendant son procès. Après quelques semaines de répétition intense, j’avais développé instinctivement cette étrange particularité pour mon personnage.

    Comme j’ouvrais rapidement la porte de ma loge, j’invitai M. Jackson à y entrer :

    — Entrez, M. Jack…

    Cependant, aussitôt que j’aperçus ce qu’il y avait à l’intérieur de ma loge, je me figeai.

    — Comment diable… ?

    Je ne finis même pas ma phrase. Je fermai rapidement la porte en espérant que M. Jackson n’avait pas vu ce que je venais de voir.

    — Est-ce que tout va bien ? me demanda M. Jackson.

    — Oh, oui, tout va très bien, lui répondis-je, espérant trouver rapidement une excuse pour réussir à le tenir hors de ma loge. C’est que je viens de me rappeler cette vieille superstition selon laquelle il ne faudrait jamais laisser un metteur en scène entrer dans sa loge le soir de la dernière représentation ; apparemment, ça porterait malheur.

    M. Jackson inclina la tête d’un côté, puis il me regarda d’une drôle de façon pendant un moment.

    — Je pensais connaître toutes les superstitions théâtrales, mais je dois avouer que je n’avais jamais encore entendu parler de celle-là, finit-il par dire.

    Je ris nerveusement, espérant qu’il n’insiste pas pour entrer dans ma loge.

    — De toute façon, tu dois terminer de te préparer, lança M. Jackson. Normalement, je ne voudrais pas te distraire avec quoi que ce soit, mais je tiens à m’assurer que tu aies le temps de rencontrer quelqu’un de très important après la représentation. Il faut absolument que je te voie avant que tu te rendes à la soirée organisée pour tous les membres de la troupe. Tu n’oublieras pas, n’est-ce pas ?

    Avant que je ne puisse demander à M. Jackson de qui il s’agissait, Sean, le régisseur — qui était sûrement né avec un casque émetteur-récepteur sur la tête —, passa devant nous sans modifier son rythme de marche.

    — Le deuxième acte commence dans 10 minutes, mademoiselle Isabel, lança-t-il au passage.

    — Dix minutes, je vous remercie, lui répondis-je.

    Au théâtre, le protocole exigeait de remercier le régisseur chaque fois qu’il nous rappelait l’heure qu’il était.

    — Je ferais mieux de retourner à mon siège, lança M. Jackson. Merde ! Je sais que tu seras épatante.

    Il descendit l’escalier au pas de course et, pendant un moment, je voulus me lancer à sa poursuite pour savoir qui était cette personne si importante qu’il voulait absolument que je rencontre ; toutefois, je me rappelai qu’il avait failli voir ce qui se trouvait à l’intérieur de ma loge. Je disposais maintenant de moins de 10 minutes pour m’occuper de ce qui s’y trouvait, ainsi que pour faire mes exercices vocaux et ma méditation avant de retourner sur scène pour le deuxième acte.

    1. N.d.T.: Les productions Off Broadway ne font pas partie des pièces de théâtre ou des comédies musicales jouées dans chacun des 40 grands théâtres professionnels, de 500 places et plus, le plus souvent situés dans le Theater District de Manhattan.

    Chapitre 2

    J’ouvris la porte de ma loge juste assez pour pouvoir y entrer, mais sans que qui que ce soit puisse apercevoir ce qui s’y trouvait à l’intérieur, puis je m’assurai de bien la refermer.

    — Chernique ! m’exclamai-je à la fois assez fort pour qu’elle sache que j’étais paniquée et pas trop fort, puisqu’il ne fallait surtout pas que les autres personnes dans les coulisses m’entendent. Que fais-tu ici ?

    — Est-ce la façon d’accueillir sa meilleure amie ?

    — Tu sais que tu n’es pas censée te trouver dans les coulisses.

    — Je suis déjà venue dans les coulisses de nombreuses fois. Quel est le problème, aujourd’hui ? me demanda-t-elle, en agitant sa main vers moi, comme elle regardait son reflet dans mon miroir.

    D’une manière désinvolte, elle sortit mon rouge à lèvres de ma trousse de maquillage et le testa sur le dos de sa main.

    — Après la représentation, Chernique. Après ! Je croyais t’avoir déjà dit que Lorraine avait eu des ennuis pour avoir permis à son petit ami de lui tenir com­pagnie dans les coulisses pendant l’entracte. Que se passerait-il si l’un des membres de la troupe t’apercevait ? Que se serait-il passé si M. Jackson t’avait vue ?

    En m’adressant à Chernique de cette façon, je ne dramatisais pas. Loin de là. Aucune personne n’était autorisée à entrer dans les coulisses pendant une représentation. Certes, j’avais déjà vu des adultes enfreindre la règle, mais les personnes âgées de moins de 18 ans qui travaillaient aux côtés des adultes devaient, elles, se conformer aux règles ; autrement, les adultes se mettaient à les traiter comme des enfants. Comme je ne voulais pas être traitée comme une enfant, je respectais toutes les règles à la lettre. Cependant, ma meilleure amie, Chernique, se permettait d’outrepasser tous les règlements auxquels il lui plaisait de contrevenir.

    — Comment as-tu pu franchir la porte réservée aux membres de la troupe ? lui demandai-je. Je n’ai jamais eu le courage de le faire moi-même.

    — Ne sais-tu pas encore à quel point je suis adorable ? Qui dirait « non » à une adorable petite fille de Trinidad aux joues rebondies comme les miennes ? demanda Chernique en souriant d’une manière qui mettait parfaitement en valeur son joli visage rond.

    Si sa présence dans ma loge ne m’avait pas autant inquiétée, j’aurais ri.

    — Comment pourrais-je rester avec le reste du public quand cette soirée pourrait bien être l’une des plus importantes de ta vie entière ? riposta Chernique.

    — N’exagère pas, rétorquai-je en sortant le collier de la boîte de velours bleu marine dans laquelle je l’avais rangé.

    — Écoute-moi. Je sais que personne ne peut affecter mieux que toi un air désinvolte et décontracté, mais, en ce moment même, tu devrais plutôt être en train de paniquer. Tu aurais dû recevoir la lettre hier. Je ne pouvais vraiment pas attendre jusqu’à la fin de la pièce pour savoir ce qui se passe. Tu rêves de ça depuis…

    Chernique eut du mal à trouver le mot juste, puis elle poursuivit.

    — Eh bien, je ne sais pas trop depuis quand, mais tout ce dont je suis certaine, c’est que c’est la seule chose dont tu as vraiment envie.

    Elle avait raison. J’avais voulu étudier à l’Académie des arts dramatiques de New York dès l’instant où j’avais appris qu’elle existait. Les élèves de l’Académie devaient suivre les mêmes cours que tous les autres élèves, comme l’algèbre et l’anglais, mais ils consacraient également une partie de leur journée à apprendre les rudiments du théâtre : le jeu, les mouvements, la voix, etc. Presque tous les meilleurs acteurs du monde avaient commencé leur carrière à l’Académie. Les lauréats d’Oscars, de Tonys, de Seggermans avaient tous étudié à l’Académie ; en outre, tous ces acteurs qui avaient remporté des prix prestigieux vantaient les mérites

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