Découvrez des millions d'e-books, de livres audio et bien plus encore avec un essai gratuit

Seulement $11.99/mois après la période d'essai. Annulez à tout moment.

Sang de pirate Tome 2: Tempêtes
Sang de pirate Tome 2: Tempêtes
Sang de pirate Tome 2: Tempêtes
Livre électronique469 pages7 heures

Sang de pirate Tome 2: Tempêtes

Évaluation : 0 sur 5 étoiles

()

Lire l'aperçu

À propos de ce livre électronique

Convaincu que le meilleur moyen de passer inaperçu c'est de vivre à la vue de tous, Maksim découvre enfin Armoryle, où il s'engage à bord d'un navire marchand. Son but : découvrir Alstrass et devenir navigateur pour enfin récupérer les trésors de Sax. Mais d'attaques pirates en escales houleuses, sa quête s'annonce beaucoup plus ardue qu'il ne le croyait.

Loin de la convoitise de Grévec, Tiss tente de s'adapter à son nouveau monde, si différent du sien. Mais l'appel d'Alstrass gronde en elle autant que son désir de vengeance. Trouvera-t-elle le moyen de rentrer ou sera-t-elle à jamais prisonnière d'Hulmia, mais surtout de ce qu'elle est ?
LangueFrançais
ÉditeurDe Mortagne
Date de sortie7 oct. 2015
ISBN9782896624539
Sang de pirate Tome 2: Tempêtes

En savoir plus sur Elisabeth Tremblay

Auteurs associés

Lié à Sang de pirate Tome 2

Titres dans cette série (4)

Voir plus

Livres électroniques liés

Fantasy pour vous

Voir plus

Articles associés

Catégories liées

Avis sur Sang de pirate Tome 2

Évaluation : 0 sur 5 étoiles
0 évaluation

0 notation0 avis

Qu'avez-vous pensé ?

Appuyer pour évaluer

L'avis doit comporter au moins 10 mots

    Aperçu du livre

    Sang de pirate Tome 2 - Elisabeth Tremblay

    Shedd

    - 1 -

    lstrass

    Sur le pont, la bataille fait rage. Le choc des armes et les cris de douleur s’entremêlent. Dans la cabine du capitaine, où Aliyo et Kélanie sont enfermées, Aliyo se plaque les mains sur les oreilles, tremblante. Elle ne veut plus rien entendre. Kélanie passe en trombe devant elle. Entre ses doigts, deux des fioles remplies hier avec l’aide des hommes noirs de l’île. Aliyo tressaille : la coupure dans son cou semble soudainement brûler et les yeux lui piquent. Elle cligne des paupières, tout en secouant la tête pour chasser les souvenirs qui affluent. Elle essaie de se concentrer sur Kélanie, pour aussi oublier l’abordage et les pirates. Que va faire sa protectrice ?

    Un carreau de la fenêtre, sur le mur du fond, vole en éclats sous le coup de poing de Kélanie, qui arrache ensuite les bouchons de cire des fioles. Aliyo comprend. Et crie :

    – Non, ne fais pas ça ! J’ai peur des tempêtes. On va mourir !

    – On n’a pas le choix. C’est notre seule chance de ne pas finir entre les griffes des pirates, Aliyo. La tempête les fera sûrement fuir.

    Au moment où Kélanie tend le bras par le trou, la porte de la cabine s’ouvre brusquement. Un pirate ! Il voit tout et hurle :

    – Qu’est-ce que tu fais là ?

    Il se précipite sur Kélanie, sabre brandi. Recroquevillée de terreur, Aliyo voit la main vide de sa protectrice. Elle a jeté les fioles à la mer ! Kélanie dégaine son sabre.

    – Ah, une femme qui pense savoir se battre ! ricane le pirate. Je vais te donner une leçon, ma jolie.

    Il ne sait pas à qui il a affaire ! songe Aliyo. Elle va le découper en morceaux !

    Les lames s’entrechoquent. L’homme, atteint au bras d’un revers rapide, lâche un juron et riposte de plus belle. Mais le navire tangue brusquement et il est déstabilisé. Kélanie en profite pour porter un coup sûrement fatal. Aliyo voudrait se réjouir, mais elle se rend compte que le navire bouge de plus en plus. Le vent siffle par le carreau brisé. Elle se tapit dans son coin : la tempête se lève.

    - 2 -

    le de Sable, sud de la Nouvelle-Écosse (Hulmia)

    – Automne 1897

    Depuis l’aube, le brouillard recouvre l’île de Sable, comme il le fait quelque cent vingt-cinq jours par an. Il commence à peine à s’effilocher, ici et là, lorsque Russell revêt son épais manteau et enfile ses bottes pour délaisser la chaleur confortable de la station de sauvetage numéro trois. Sortir dans l’humidité pénétrante de cette fin d’octobre est la dernière chose dont il a envie, mais il n’a guère le choix. Un seul manquement à la patrouille par ce temps pourrait être fatal pour les survivants d’un navire échoué.

    Debout sur le seuil, il jette un coup d’œil autour de lui en soupirant. Il n’aperçoit qu’un bout de la toiture de l’écurie, un peu plus loin à sa droite, une centaine de pieds du chemin qui conduit à la station de sauvetage principale, à sa gauche, de même qu’une fraction de mer devant lui.

    – Pourvu que cette purée de pois se dissipe rapidement, grogne-t-il entre ses dents, sinon je ne serai pas rentré avant la nuit.

    Tout en se dirigeant vers l’écurie, Russell continue à marmonner. Il est habituellement d’humeur joyeuse, peu importe la température, le climat et les inconvénients de la vie quotidienne sur ce croissant de sable à cent soixante-deux milles de la civilisation la plus proche, mais il n’a nulle envie de sourire aujourd’hui : tout va de travers depuis la visite, la semaine précédente, du bateau à vapeur assurant le ravitaillement des gardiens. Comme souvent à cette saison, l’équipage a apporté non seulement de la farine, du porc salé, de la mélasse et du riz, mais aussi la grippe. Tout le monde l’a bien entendu attrapée, lui y compris, et la routine s’en est trouvée chamboulée. Des cinq stations de sauvetage de l’île, deux ont désormais des gardiens alités jusqu’à ce qu’ils aillent mieux, ce qui oblige les autres à se partager les vingt-six milles du territoire de patrouille, pour le couvrir d’une pointe à l’autre. Pour sa part, il a hérité de la portion est, jusqu’au-delà du phare.

    Il pousse la porte de la petite écurie en toussant, une toux longue à apaiser. Il songe à rebrousser chemin pour mettre de l’eau à chauffer : une tasse fumante, au goût prononcé de gin, lui ferait le plus grand bien. Il regrette de ne pas y avoir pensé plus tôt. Un hennissement le ramène à l’obligation de faire son travail d’abord. Il caresse les naseaux du cheval avec affection. Il l’a lui-même capturé au sein des hardes sauvages de l’île, pour ensuite le dompter.

    – Hé, Drake, tu as bien récupéré après ta sortie de ce midi ? Parce que celle de ce soir risque d’être aussi longue. John a encore téléphoné pour nous confier son trajet. Le pauvre est bouillant de fièvre, à ce qu’il paraît.

    Le cheval piaffe pour manifester son impatience de sortir au grand air.

    – Tu seras moins enthousiaste quand tu constateras qu’on ne voit toujours pas à trente pieds devant soi. Sans compter que ça s’est rafraîchi…

    Drake secoue sa crinière, vraisemblablement pour exprimer son désaccord. Russell lui flatte l’encolure avant de placer la selle sur son dos.

    – J’oublie trop souvent que tu es né ici et que cet affreux climat ne te dérange pas.

    Le cheval hennit de nouveau tandis que son cavalier glisse un pied dans l’étrier pour se hisser. Dès que Russell saisit les rênes, ils se mettent en marche, empruntant le sentier qui longe les berges du nord. Pendant que Drake suit la piste qu’il connaît par cœur, en laissant peu de traces de sabots dans le sable fin, Russell scrute les percées dans le brouillard, cherchant à repérer un possible navire échoué. Il tend aussi l’oreille, au cas où des cris de détresse lui parviendraient à travers le mugissement incessant des vagues.

    Le dernier naufrage remonte au mois d’avril, s’ajoutant aux quelque trois cents déjà répertoriés. Depuis plus de trois siècles, rares sont les années où aucun navire n’est venu s’enfoncer dans les bancs de sable, dont la configuration ne cesse de changer au gré des courants marins. Mais rares aussi sont celles où plus d’un bateau s’est enlisé. Russell formule une prière silencieuse pour que 1897 n’en soit pas une.

    Lorsqu’ils arrivent en vue du phare de l’est, le brouillard achève de se dissiper et le vent est pratiquement tombé. Russell a son premier sourire de la journée. Il lui faudra moitié moins de temps que prévu pour compléter sa patrouille. Avec un peu de chance, le soleil commencera à peine à baisser quand il pourra se réchauffer, les pieds sur la bavette du poêle. Il se penche pour murmurer la bonne nouvelle à Drake, avant de tirer sur les rênes pour faire demi-tour.

    Aux trois quarts du chemin entre la quatrième et la troisième stations, il entend le tonnerre gronder. Surpris, il lève les yeux vers le ciel. Des nuages sombres et menaçants s’amoncellent à grande vitesse. Il aurait pourtant juré que l’horizon était désormais bien dégagé, dans toutes les directions, quand il a amorcé son retour. Drake et lui vont devoir se presser davantage s’ils ne veulent pas rentrer trempés. Heureusement, la mer ne laisse entrevoir aucun navire au loin. Russell pousse sa monture au galop.

    Il a à peine couvert mille pieds quand le vent prend de la vigueur, soulevant le sable pour le disperser. Par réflexe, il remonte le foulard qu’il porte autour du cou pour se protéger la bouche et le nez, tout en plissant les yeux pour éviter que les grains de sable n’y pénètrent. Un nouveau coup de tonnerre retentit. Le ressac s’amplifie.

    J’ai jamais vu le temps se gâter si vite, même sur cette île de misère.

    La pluie commence à tomber, drue. Il arrête sa monture et se laisse glisser à ses côtés pour se soustraire aux bourrasques, de plus en plus violentes. Un vacarme assourdissant lui emplit les oreilles pendant de longues minutes tandis qu’un mélange d’eau et de sable cingle la moindre parcelle de peau à découvert. Voilà sept ans qu’il est là, et il n’a jamais rien vu de tel. Pourvu qu’aucun navire n’ait été dans les environs quand cet enfer s’est déclenché !

    La nature s’apaise aussi subitement qu’elle s’est emballée. Lorsque Russell rouvre les yeux, la pénombre n’est due qu’au jour qui décline, le ciel du crépuscule est de nouveau clair. Il contourne sa monture pour jeter un coup d’œil inquiet à l’horizon. Qui sait si un grain de cette violence n’a pas été chercher un bateau, loin au large ?

    Russell se mord les lèvres en constatant soudain que sa crainte était fondée : plus loin devant, un deux-mâts est échoué sur le flanc.

    Il voit cependant, en s’approchant avec Drake, que le navire n’est pas couché à mi-chemin de la marée montante, mais semble plutôt à moitié enfoncé dans le sable.

    – Comment peut-il s’être enlisé si vite ?

    La question lui échappe, mais il n’a pas le temps de s’attarder à sa surprise : il faut songer à secourir les survivants. Il regagne en hâte sa station, d’où il contacte par téléphone les membres de l’équipe de sauvetage en état de lui donner un coup de main. Lynch, depuis la grande station, confirme qu’il va le rejoindre avec le canon porte-amarre, mais les sept ou huit milles à parcourir ne lui permettront pas d’arriver rapidement. Il sera trop tard si le vent reprend : les vagues de la marée montante auront envahi le navire, déjà en très mauvaise posture. Ça s’annonce mal. Russell décide de tenter une approche seul, tandis que la mer le permet encore. Georges et Neil le rejoindront sur place.

    De retour sur les lieux, il se dirige vers l’épave, un rouleau de corde sur l’épaule et une lampe à la main, en appelant à plusieurs reprises :

    – Ohé, y a quelqu’un ?

    Pas de réponse. Il détaille le bateau, surpris. On dirait qu’il a été attaqué avec violence. Le mât de misaine est déchiqueté à mi-hauteur, le bastingage, fracassé à quelques endroits et un trou béant s’ouvre dans la coque sous la ligne d’eau, près de la poupe. Comment ce navire peut-il avoir essuyé un tel assaut en période de paix maritime ? Et où est l’attaquant ?

    À soixante pieds de son but, il ralentit l’allure, se méfiant par habitude des sables, qui ne semblent toutefois pas du tout mouvants. Pourquoi, alors, le navire s’est-il tellement enfoncé ? C’est à n’y rien comprendre. Tout en réfléchissant, Russell continue d’avancer et crie une nouvelle fois :

    – Ohé, y a quelqu’un ?

    Silence. Maintenant tout près, Russell tente de lire le nom du navire. Peine perdue, il n’arrive pas à déchiffrer les caractères. Il fixe un instant la proue. Une espèce de serpent à tête de poisson y est sculpté. Une murène ? Serait-ce le nom du navire ? La Murène ? Et d’où vient-il ? Perplexe, il se détourne et déroule la corde. Une fois lancé, le crochet qui la termine se fixe à la rambarde, puis Russell monte à bord, à la recherche de survivants… et de réponses. Il lui reste à peine une heure avant que la marée montante l’oblige à utiliser une embarcation pour regagner la terre ferme.

    En posant le pied sur le pont incliné d’au moins quinze degrés, il ne peut réprimer un frisson. Des lambeaux de voiles déchirées claquent malgré la brise faible et les poulies grincent, comme mues par des mains invisibles. Des tonneaux ont roulé pour terminer leur course en désordre contre le bastingage, certains brisés ; des traces d’impacts marquent le bois et il y a du sable partout. Mais aucun signe de survivants.

    – Ohé, du bateau !

    Toujours rien. Avec appréhension, sa lampe à la main, Russell s’approche de l’écoutille puis descend l’escalier pour inspecter la cale et l’entrepont. Peut-être que des survivants s’y terrent, apeurés.

    Personne. Des hamacs vides, des sacs de nourriture éventrés et trempés, un baril d’alcool défoncé, des armes abandonnées çà et là, des canons dont les ancrages sont sur le point de céder et, ici aussi, du sable en grande quantité. Russell s’apprête à remonter quand il a l’impression d’entendre marcher sur le pont, au-dessus.

    – Y a quelqu’un ?

    Pas de réponse. Il grimpe en vitesse puis regarde autour de lui. Toujours personne. Il a dû confondre les craquements de la charpente avec ceux du pont. À l’horizon, le soleil achève de descendre.

    – C’est bizarre que Neil et Georges ne soient pas encore là…

    Il ne faut pas si longtemps pour arriver de la grande station, à moins que le chariot transportant le canon porte-amarre n’ait eu des problèmes et que les deux hommes aient dû aider Lynch.

    Et dire qu’on n’en aura probablement même pas besoin.

    Si ça continue comme ça, il aura fini avant que quiconque se pointe et n’aura déniché aucun survivant. Il se dirige vers l’arrière, où se trouvent normalement les cabines. En chemin, il lève les yeux vers le gaillard : pas de roue à l’emplacement de la barre, il ne reste qu’un moignon de bois déchiqueté. Le navire était condamné à s’échouer, quoi que son équipage ait pu tenter.

    Un instant plus tard, il pousse une des deux portes entrebâillées devant lui.

    Oh, my God !

    Un corps gît, à quelques pas du seuil. Du sang encore frais dessine de longues coulées vers le mur de gauche. Le cœur battant la chamade, Russell a un mouvement de recul. Il met un moment à se reprendre, en détaillant l’homme étendu sur le dos. La plaie est bien évidente sur le côté, mais ce qui le frappe surtout, ce sont ses vêtements. Les habits rappellent l’accoutrement des pirates d’autrefois : bandana, foulard ceinturant la taille, chemise de coton, hautes bottes de cuir et anneau d’or, visible à une oreille. La main droite tient encore un sabre d’abordage tandis que la gauche, ensanglantée, est refermée sur la crosse d’un pistolet. Russell doit faire un effort pour se détourner et examiner le reste de la pièce.

    Un second corps est affalé sur le bureau, devant la fenêtre qui couvre presque en entier le mur du fond. Il l’interpelle à mi-voix, incertain, espérant une réaction. En vain. Quand il s’approche, un détail attire son attention, un détail qui le fige quelques secondes. Ce n’est pas possible, il doit rêver ! Il ferme les paupières puis les rouvre. Non, ça n’a pas changé.

    Lentement, il fait le tour du meuble, puis se penche sur le corps, l’estomac noué. Il a soudain peur de le toucher. Et si ça n’était pas mort ? Si ça l’attaquait soudain ? Il n’a que sa lampe à la lumière vacillante pour se défendre !

    Il tend la main pour tâter le poignet gauche, peinant à contrôler ses tremblements. Pas de pouls. Il laisse échapper un soupir de soulagement. Quoi qu’il ait sous les yeux, ça ne peut plus lui faire de mal ! Après un moment, il s’enhardit pour effleurer du doigt l’une des deux cornes vrillées dont la base disparaît dans l’épaisse chevelure bouclée. Il la tire ensuite un peu vers lui, en priant qu’elle se détache. Mais la tête suit le mouvement. Il essaie à nouveau, en tirant plus fort : même résultat.

    Abasourdi, il dépose la lampe sur le bureau et s’oblige à fouiller la chevelure. Non, ces cornes n’ont pas été ajoutées par fantaisie : elles ont poussé directement sur le crâne et l’une d’elles est cassée aux deux tiers de sa longueur. Il se signe tout en s’efforçant de rester calme. Ça ne peut pas être le diable qui est là, sous ses yeux. C’est mort ! Il serre les dents en marmonnant :

    – Il doit bien y avoir une explication logique à tout ça !

    Il se redresse pour examiner la scène plus en détail.

    Les doigts gauches de la créature tiennent une plume effilée. En gouttant sur le papier, l’encre a fait une tache de la taille d’une pièce de monnaie au haut de la page. Il n’y a pas de sang sur le bureau ni sur le journal.

    Russell fronce les sourcils tout en basculant le cadavre encore chaud sur la chaise. La chemise est imbibée de sang depuis l’épaule droite jusqu’à la taille. Pas besoin de chercher bien loin pour comprendre que l’homme près de la porte et la créature se sont battus. Une créature qui ressemble beaucoup à une femme : les courbes de la poitrine, les longs doigts fins, les traits du visage d’une rare beauté, même dans la mort.

    Avec des cornes.

    Dépassé, Russell soupire. Peut-être trouvera-t-il des réponses dans le journal. Il hésite toutefois entre vérifier s’il y a quelqu’un dans la cabine adjacente et lire la courte inscription, celle que la morte a jugé plus important de transmettre que de s’occuper de soigner ses blessures. Sa curiosité l’emporte. Il approche la lampe. Déception : ce n’est ni l’anglais de son quotidien ni le français de son enfance en Acadie. Les signes ressemblent plutôt à ceux inscrits sur la coque. Il referme le journal, le serre sous son bras. Il le rapportera à terre en espérant qu’un de ses collègues puisse l’aider. Ensuite, il le confiera au capitaine du prochain bateau de ravitaillement pour qu’il le remette au gouvernement. C’est la procédure à suivre pour la majorité de ce que l’équipe de sauvetage récupère à bord des épaves.

    Alors qu’il fait demi-tour, il s’accroche dans le cadavre, qui glisse. Il tente de le rattraper, mais ne réussit qu’à renverser la chaise. Entraîné dans la chute, il évite de se retrouver coincé sous la créature, mais il lâche un juron en s’étalant lui-même sur le sol.

    Il s’appuie à l’aveuglette pour essayer de se relever et pose la main sur ce qu’il prend pour un anneau. Il tressaille : la main droite de la créature a été remplacée par un crochet.

    Avec une grimace, Russell finit de se redresser. Une bourse en cuir à demi remplie se trouve sur le plancher, non loin de là. Elle doit provenir du cadavre. Il la fourre dans sa poche : peut-être la monnaie lui indiquera-t-elle l’origine du navire ? Son regard s’arrête alors sur les pieds de la créature. Il manque une botte.

    Un bout de patte poilue terminé par un sabot fourchu émerge des culottes.

    Russell respire profondément. Longuement, et à plusieurs reprises. Jusqu’à ce que son cœur retrouve un rythme normal, que son imagination cesse de s’emballer, que son corps ne tremble plus. Après tout, que peut-il craindre d’un cadavre ?

    Il s’empresse néanmoins de récupérer la lampe et le journal, puis quitte la cabine à la hâte. Il passe à peine le seuil quand il reconnaît la voix de Neil.

    – Russ, tu es là-haut ?

    Il fait presque nuit. Il s’approche du bastingage et aperçoit une lumière, plus loin sur la grève. La marée a beaucoup monté et ses collègues se tiennent à la limite de celle-ci, à deux cents pieds.

    – Oui ! crie-t-il en retour pour couvrir le ressac sur la coque. Il me reste à vérifier une cabine. Je n’ai trouvé personne ailleurs.

    – Dépêche-toi, sinon il faudra utiliser la bouée pour te ramener.

    – Compris…

    Russell laisse le journal près de la corde à crochet et retourne vers le gaillard d’arrière. Avec une certaine appréhension, il pousse l’autre porte. Aussitôt la lampe tendue dans l’embrasure, il sursaute et recule d’un pas : une fillette est assise sur une paillasse, dans l’angle des murs. Il se reprend vite et s’approche pour saisir la gamine. Pas le temps de prendre mille précautions pour ne pas l’effrayer. En le voyant, elle s’est recroquevillée en serrant dans ses bras maigres ce qui ressemble à un coffret. Elle n’oppose toutefois aucune résistance quand il la soulève pour l’amener sur le pont ; seul son corps tremblant témoigne de sa peur.

    – J’ai trouvé une fillette… Envoyez le câble pour la bouée !

    Une quinzaine de minutes plus tard, installée dans la bouée-culotte, la petite quitte le navire pour rejoindre le reste de l’équipe de sauvetage. Russell la suit. Une fois à terre, il raconte à ses compagnons ce qu’il a découvert – sauf la partie sur les cornes et les pattes fourchues. Tous sont d’accord : la gamine, qui doit avoir huit ou neuf ans, restera avec lui jusqu’au matin, ce qui lui évitera une trop longue chevauchée vers la station principale après sa pénible expérience de la journée. Qui sait de quoi elle peut avoir été témoin ! De toute façon, les autorités ne seront pas prévenues avant le lendemain.

    Russell se hisse en selle. Neil l’aide à installer la fillette devant lui. Elle se laisse faire, son coffret plaqué contre sa poitrine.

    – On se retrouve après le déjeuner.

    En réponse, Neil hoche la tête, puis Russell s’élance dans la nuit.

    La fillette a mis longtemps à s’abandonner au sommeil. Elle a fermé les yeux depuis peu quand la lune atteint son apogée. Assis dans un fauteuil qu’il a tiré près de la paillasse, Russell attend d’être certain qu’elle dort profondément, puis il se lève pour récupérer le coffret, qu’elle serre toujours. Elle a refusé de le lui remettre à son arrivée, en secouant la tête avec obstination, tout comme elle a refusé de parler, de boire ou de manger. Elle s’est à nouveau appuyée dans l’angle des murs, dans la même position où il l’a trouvée sur le navire, et n’a pratiquement pas bougé, même lorsqu’elle n’a plus été en mesure de combattre la fatigue.

    Russell s’assoit à la table, quelques pas plus loin. Il dépose le coffret sur la surface encore encombrée de la vaisselle du dîner, repousse son assiette sale pour se donner de l’espace. Il n’a rien avalé depuis. Il hausse les épaules. Dès qu’il est trop occupé, il oublie de manger. Après un bref détour par le garde-manger, il reporte son attention sur le coffret. Peut-être renferme-t-il quelques indices à propos du navire et de ses étranges occupants. Plus tôt dans la nuit, avec le journal, il n’a pas eu de chance. Il l’a feuilleté lentement, sans parvenir à en déchiffrer le moindre symbole ou le plus petit dessin. Tout lui a paru étranger. Comme ce qu’il a découvert sur le navire lui paraît complètement fou. Dès qu’il ferme les yeux, il revoit le pirate baignant dans son sang et la diablesse aux longs cheveux bouclés. Il se secoue pour chasser ces images qui s‘imposent de nouveau.

    D’environ six pouces sur huit, le coffret en bois n’est pas très lourd et la serrure n’offre aucune résistance. Dedans, il y a un carnet relié en cuir et, dessous, une demi-douzaine de compartiments rembourrés. Seulement quatre sont occupés par ce qui semble des flacons cachetés de cire. Il hausse les sourcils tout en tirant le plus gros de son alvéole pour l’examiner. À l’intérieur, des volutes de fumée bougent sans cesse. Il les observe, perplexe : qu’est-ce que c’est que ça ?

    Un visage se dessine dans la brume emprisonnée.

    Sorcellerie !

    Il laisse échapper le flacon, le rattrape de justesse, mais heurte le coffret au passage, l’envoyant se vider sur le plancher. Une des fioles se brise. Les éclats de verre baignent dans un liquide bourgogne ressemblant à du sang. Consterné, Russell serre la fiole aux volutes dans son poing.

    – Merde !

    Il cherche les deux dernières. Elles ont roulé sur le bois usé du plancher pour s’immobiliser, intactes, près du lit. Il s’élance pour les ramasser quand une petite main le devance. La fillette s’est réveillée. Il s’arrête et lève les yeux. Elle ne se préoccupe pas de lui. Son regard balaie la pièce, comme pour repérer quelque chose. Sûrement la quatrième fiole. Sans trop savoir pourquoi, il la lui tend.

    La fillette éclate en sanglots.

    - 3 -

    uébec (Hulmia) – Février 2005

    Assise sur son lit, Tiss se tourne vers le miroir de sa commode. Pour la millième fois au moins, elle observe son reflet avec attention. Ses deux yeux sont identiques : même pupille un peu petite, même gris des jours de pluie. Presque impossible, pour qui ne connaît pas la vérité, de deviner que son œil droit a été remplacé par une prothèse en acrylique. Au pire, certains peuvent croire qu’elle louche un peu. Comme chaque fois qu’elle y songe, elle ne peut s’empêcher d’y toucher, pour vérifier qu’elle est bien en place. Elle a encore un peu peur de la perdre soudainement, même si Paul lui a assuré que c’était peu probable. Elle soupire en se détournant. Parfois, elle préférerait porter un eye-patch, comme celui qu’elle a vu sur le visage d’un des amants de Monia, des années auparavant. Ou encore rien du tout, comme Jack, le pirate qui lui a permis de s’échapper du navire de Grévec. Elle n’aime pas l’idée de rendre sa blessure invisible aux yeux des gens, comme si elle n’existait pas. Cela lui donne l’impression d’essayer de renier son passé, de douter de sa réalité. Et elle ne veut pas. Des scènes reviennent à sa mémoire, de brèves images de Monia heureuse, ou de sa mort cruelle.

    Elle secoue la tête. Elle ne peut pas oublier. Ce qui la ramène à son désir paradoxal de s’adapter. Elle pousse un nouveau soupir. Arrivée depuis quelques mois au Québec, elle s’est résignée : elle n’est plus sur Alstrass. Elle a été obligée d’admettre que son passage dans la tempête et les sables mouvants l’a propulsée dans un autre monde, un monde dont elle n’avait entendu parler qu’une fois et dont elle ignorait tout, si ce n’est qu’il est peuplé d’humains. Cette réalité acceptée – avait-elle eu le choix ? – elle s’est faite rapidement à son nouvel environnement, à sa nouvelle vie, à ce langage qui ressemble si peu à ceux qu’elle a appris.

    Par la fenêtre, elle fixe le fleuve qui coule en contrebas, rappel constant de son amour de la mer, de l’eau. De sa vie présente, si différente de la précédente aussi. Dans ces circonstances, dire qu’elle s’adapte, c’est un peu beaucoup. Elle essaie plutôt de donner l’impression de s’adapter : cela lui assure une certaine tranquillité. Si elle se laissait vraiment aller à exprimer tout ce qui se passe en elle, ce qu’elle vit réellement et ce qu’elle affronte chaque jour, elle soulèverait des questions, Johanna et Paul essaieraient de l’aider davantage, et ça n’en finirait plus. Elle ne veut se confier à personne, encore moins attirer plus d’attention sur elle. Et, pour ça, il faut absolument entretenir chez les autres l’illusion que tout va pour le mieux.

    Elle est tirée de ses pensées par une porte qui claque au rez-de-chaussée. Elle jette un coup d’œil vers le réveil. Seize heures trente. C’est Johanna qui rentre de la clinique dentaire où elle est hygiéniste quatre jours et demi par semaine. La cinquième journée, le vendredi, elles la passent ensemble à partir de midi. Tiss sourit à cette idée. Elles se consacrent à des activités qui sont censées l’aider à découvrir une autre facette de son pays d’accueil, faciliter son intégration. Ce n’est pas déplaisant, quoique parfois très déconcertant. Ça lui change également les idées, après qu’elle a passé des heures et des heures en tête à tête avec son professeur, à essayer de rattraper ses nombreuses années sans scolarité. Ici, tous les enfants vont à l’école ! Sur Alstrass, elle n’a même jamais entendu ce mot. Mais il y a tant de choses qu’elle ignorait d’Alstrass aussi.

    Les marches de l’escalier de bois franc conduisant à l’étage craquent sous les pas de Johanna. Tiss s’empresse de glisser ses carnets sous son oreiller avant de reprendre le livre documentaire qui repose un peu plus loin sur la couette. Elle en a toujours un à portée de la main. Celui d’aujourd’hui parle des volcans. Sous le regard borgne de son chat Jack, elle en retire le signet, déposé la dernière fois au milieu du chapitre sur le Vésuve, et fait juste à temps semblant d’être plongée dans la lecture. Johanna apparaît dans l’embrasure de la porte.

    – Tu as passé une belle journée, ma grande ?

    Tiss lève les yeux avec un sourire.

    – Oui. Et, en plus, j’ai ma soirée à moi, j’ai terminé mes devoirs.

    Du doigt, elle désigne le manuel de mathématiques du primaire et le paquet de feuilles brochées qui l’accompagnent, en ajoutant :

    – Monsieur Ruel dit que je progresse à pas de géant. Bien sûr, il a dû m’expliquer c’est quoi, des géants.

    – Est-ce qu’il y en avait, dans les livres d’histoires de ton enfance, des géants, Tiss ?

    Johanna a posé la question d’une voix douce, un peu curieuse.

    Non, mais il y avait bien pire. Et bien plus réel.

    Tiss secoue la tête et répond, comme d’habitude, en changeant de sujet. Elle espère que Johanna acceptera la diversion sans insister. Elle ne veut pas parler de son enfance. Personne ne la croirait.

    – Non. Je n’avais jamais entendu parler d’humains aussi grands avant aujourd’hui. Mais j’ai trouvé ça vraiment intéressant. Qu’est-ce que tu as prévu pour demain ?

    – On ira à l’aquarium. Si tu n’as pas changé d’avis.

    De nouveau ce ton discrètement curieux. Tiss retient un énième soupir. Si elle veut éviter d’inquiéter Johanna, elle n’a d’autre choix que d’affirmer qu’elle est toujours d’accord avec la proposition. Elle répond avec un enthousiasme feint :

    – Bien sûr que je veux y aller ! J’avais juste oublié que ça fait déjà un mois que je vais nager à la piscine tous les dimanches. Je croyais que l’aquarium, c’était pour vendredi prochain.

    – C’est vrai que le temps passe vite depuis que tu es avec nous ! J’ai l’impression que c’est hier que tu t’installais dans cette chambre, alors que ça remonte à plus de cinq mois.

    Cinq mois. À la fois une éternité et si peu de temps. Tiss est stupéfaite de constater comme sa vie a changé, mais, au moins, elle n’est plus en danger permanent. Personne ne la recherche dans ce nouveau monde. Ça lui fait du bien de ne plus se sentir traquée, de pouvoir vivre à la vue de tous. Par contre, pour d’autres raisons que sur Alstrass, la crainte de voir ses origines découvertes est encore là. Ici, elle ne pourrait les expliquer. Les spécialistes s’interrogent toujours sur ses omoplates ondulées et la membrane particulière, au fond de ses narines. Des premières mondiales, semble-t-il. Sa queue faunesque a soulevé beaucoup moins d’interrogations, puisque le phénomène est connu. Lorsque Johanna s’est extasiée sur la blondeur de la repousse désormais apparente dans ses cheveux auburn, Paul a souligné que deux de ses patients en avaient une identique. Dans ce monde, la mèche ne s’accompagne toutefois d’aucun pouvoir particulier ; on lui en aurait sûrement parlé.

    – Tu me parais bien songeuse, tout à coup. Tu es certaine, pour l’aquarium ? Je peux appeler le docteur Anderson et lui dire…

    Tiss se rattrape aussitôt :

    – Je ne pensais pas à l’aquarium, mais à la piscine. Tu crois que je pourrais suivre les cours pour être sauveteur ? Annabelle dit que je pourrais sûrement travailler pour la Ville ensuite.

    – Sauveteuse, la reprend Johanna avec un sourire. Pourquoi pas ? Et puis, ça te donnerait une belle occasion de rencontrer d’autres jeunes de ton âge. On en parlera avec Paul au souper.

    – Est-ce qu’il pourrait venir avec nous, demain ? Je sais que c’est un peu tard pour le demander, parce qu’il doit avoir beaucoup de rendez-vous, mais… J’aimerais vraiment ça qu’il soit là. Surtout que c’est son idée, l’aquarium.

    Tiss a remarqué que Johanna et Paul aiment beaucoup être ensemble avec elle lors de ces sorties éducatives.

    – S’il ne peut pas se libérer, on pourrait remettre la sortie à samedi et aller au cinéma à la place ? Qu’est-ce que tu en penses ?

    Tiss s’empresse d’accepter. Johanna est contente :

    – Parfait ! Bon, j’ai le souper à préparer, moi.

    Dès que les escaliers ne craquent plus, Tiss chuchote à Jack :

    – Ouf ! Je ne savais plus quoi dire pour éviter qu’elle me parle encore du docteur Anderson !

    Elle dépose son livre et se laisse aller à la renverse sur le lit. Elle n’aime pas le psychologue que les services sociaux ont recommandé à ses parents adoptifs, mais elle préfère ne pas le leur confier. On leur en proposerait sûrement un autre de toute façon, qu’elle n’aimerait sans doute pas davantage. Comment peut-on apprécier quelqu’un qui pose tout le temps des questions auxquelles on ne veut surtout pas répondre ?

    Au début, elle s’en est tirée en prétextant ne pas comprendre ses phrases trop compliquées ; plus tard, en prétendant avoir oublié tout ce qui s’était passé avant son sauvetage. Le docteur a appelé ça un choc post-traumatique : ça pourrait prendre de quelques mois à des années avant que les souvenirs reviennent. Elle s’est retenue de lui riposter que lesdits souvenirs ne reviendraient jamais – pas pour qu’elle les lui raconte en tout cas ! Elle n’a pas la moindre envie qu’on la déclare malade dans sa tête si elle dévoile la vérité. Elle a bien vu, et lu, dans les innombrables livres d’images empruntés à la bibliothèque, qu’ici, sur Hulmia – sur terre –, ce qu’elle a connu n’existe pas, ou n’existe plus.

    Si elle intégrait tranquillement à sa nouvelle vie des éléments qui pourraient l’aider à se remémorer son passé ? a alors suggéré le psychologue. Un par mois. Dans un premier temps, il a simplement demandé qu’elle continue la rédaction de ses carnets commencés à l’hôpital d’Halifax. Ceux-ci resteraient bien sûr personnels, mais elle y consignerait peut-être des éléments ou des bribes d’événements dont elle aurait ensuite envie de discuter. Elle s’est bien gardée de le détromper.

    En récupérant les deux cahiers à spirale sous son oreiller, Tiss secoue la tête, à la fois amusée et agacée par toutes ces machinations. Son regard passe longuement de l’un à l’autre, sans qu’elle puisse se décider à en ouvrir un. Elle se tourne finalement vers le placard. Sur la tablette, à côté de la boîte contenant le pantalon rescapé de la traversée et les trois dés en pierre de viverne, il y a deux piles. La première, moins volumineuse, regroupe les carnets renfermant ses états d’âme et le récit de tout ce qui s’est produit dans sa vie depuis son arrivée au large de l’île de Sable. Elle l’a d’abord rédigé dans un français très rudimentaire, puis de plus en plus élaboré ; c’était une façon pour elle de se prouver sa détermination à s’adapter à son nouveau monde. Ça l’est toujours.

    Les carnets de la seconde pile sont rédigés selon son humeur, dans l’une ou l’autre des cinq langues d’Alstrass, pour qu’elle ne les perde pas. Ils contiennent tout ce qu’elle se rappelle, dans les moindres détails. Son enfance sur l’île, ses pouvoirs, Monia et tout ce qu’elle lui a confié, son savoir, les informations sur les trésors de Sax, dont elle a dessiné la carte de mémoire, Grévec et ses pirates, son séjour sur le navire, l’autre Kaléïde, Dref, Jill… Tout. En aura-t-elle besoin un jour ou s’assure-t-elle seulement que son passé ne disparaîtra pas, en lui faisant plus tard douter qu’il ait même existé ? Une chose est toutefois certaine : le docteur Anderson n’y mettra jamais le nez et n’en entendra jamais parler.

    Elle caresse le dos de Jack. Quand elle a commencé à écrire, elle se disait que ce serait peut-être la meilleure façon de tourner la page. Alstrass continuerait à vivre, mais sans elle. Et ailleurs qu’en elle. Le temps semble toutefois vouloir lui prouver le contraire.

    Le chat ronronne pour manifester son contentement. Jack, c’est le second « élément » ajouté à son environnement

    Vous aimez cet aperçu ?
    Page 1 sur 1