La fin du crépuscule
« Un voyage se passe de motif. Il ne tarde pas à prouver qu’il se suffit à lui-même. On croit qu’on va faire un voyage… mais bientôt c’est le voyage qui vous fait ou vous défait… »
Nicolas Bouvier, L’Usage du monde
Elle avait décidé de passer l’hiver en plein jour. Fini l’obscurité! Elle voulait du soleil. Et pour cela, il lui fallait partir.
C’était à son retour de la vallée du Vatnsdalur que l’idée avait germé dans son esprit. Elle venait d’y passer dix jours, en selle du matin jusqu’au soir, à sillonner les hautes terres à la recherche des derniers chevaux égarés. Pas simple de les rassembler pour les ramener jusqu’au corral où ils passeraient l’hiver. Tout comme elle, eux aussi redoutaient la saison sombre. Elle l’avait lu dans leurs grands yeux de nuit. Dans le rythme désordonné de leur (1) quand ils tentaient de fuir le piège qui doucement se refermait sur eux. Oui, c’était là, dans le bus qui la reconduisait vers son petit appartement de la rue Digranesvegur, qu’elle avait pris sa décision :
