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Jeff Madison et l'attaque des Mortcenaires
Jeff Madison et l'attaque des Mortcenaires
Jeff Madison et l'attaque des Mortcenaires
Livre électronique358 pages5 heures

Jeff Madison et l'attaque des Mortcenaires

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À propos de ce livre électronique

Ses capacités d’attrapeur de rêves lui ont sauvé la mise à plusieurs reprises, mais cette fois, les choses seraient-elles allées trop loin ? Quand Jeff Madison, l’attrapeur de rêves, est attaqué par une bête maléfique dans sa propre chambre, le garçon de treize ans bascule dans une autre dimension en essayant de s’en tirer. Soudain, il arrive sur une terre de feu, somptueuse et redoutable, le royaume de Torturra, où tout ondule dans les flammes, depuis la végétation jusqu’à l’eau.

Pour ne rien arranger, Zorka la sorcière louve est de retour et son intérêt pour le sang de Phoebe, l’amie de Jeff, ne connaît plus de limites. En même temps, la terrible Wiedzma traque le garçon et ses capacités spéciales d’attrapeur de rêves. Ensemble, les deux sorcières concoctent un plan : les créatures sinistres que l’on appelle les mortcenaires vont les aider à capturer Jeff et Phoebe.

C’est sans compter sur le métamorphe, Nequam, qui prend l’apparence de Jeff afin de persuader Phoebe de le suivre dans le lointain royaume... Comment leur ami Rhed, les guerriers sandustiens et la gentille sorcière Angie, ainsi que les dragons, vont-ils réagir à cela ?

« Félicitations pour ce nouveau tome exceptionnel ! Il est absolument génial. Plein de chaleur, d’imagination et bourré d’action. Je crois qu’il est encore meilleur que les deux premiers, mais c’est difficile à dire, car tous sont brillants. Vous racontez une merveilleuse histoire ! » - Maya Fowler-Sutherland.

LangueFrançais
Date de sortie27 mai 2019
ISBN9781945709142
Jeff Madison et l'attaque des Mortcenaires
Auteur

Bernice Fischer

Best-selling Teen & Young Adult Fantasy Author and 2015 Voice ArtsTM Awards Nominee for "Best Voiceover" children's Audiobook narration for Jeff Madison and the Shimmers of Drakmere (Book 1). http://sovas.org/2015-nominees/Bernice grew up reading all sorts of books and believes that the best stories happen in books as they so rarely happen in real life, for they allow you to enter a world of fantasy and imagination needed to survive the reality of today.Bernice likes to laugh, and hopes that her readers enjoy a good breeze of humor, for her books are written with an impish, yet barely-suppressed humor that peeks out at odd moments.Finding voices for her book's characters is one of the most inspiring events Bernice experiences as a writer. She believes that the magic of dialogue can sweep readers away from their everyday lives, transporting them through time and space to a kingdom she has created.The talented voice actor, Matt Wolfe, narrator of her 2015 Voice Arts Awards nominated audiobook, has given each character a different voice, thereby creating a movie in the listener's head.Bernice's descriptive writing style, compelling dialogue and riveting action make this book "a page turner" "a must read" for fans of young adult fantasy, adults and children alike!To learn more about her books go to: http://BerniceFischer.com

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    Aperçu du livre

    Jeff Madison et l'attaque des Mortcenaires - Bernice Fischer

    Table des matières

    Copyright

    Dédicace

    Remerciements

    Chapitre 1

    Chapitre 2

    Chapitre 3

    Chapitre 4

    Chapitre 5

    Chapitre 6

    Chapitre 7

    Chapitre 8

    Chapitre 9

    Chapitre 10

    Chapitre 11

    Chapitre 12

    Chapitre 13

    Chapitre 14

    Chapitre 15

    Chapitre 16

    Chapitre 17

    Chapitre 18

    Chapitre 19

    Chapitre 20

    Chapitre 21

    Chapitre 22

    Chapitre 23

    Chapitre 24

    Chapitre 25

    Chapitre 26

    Chapitre 27

    Chapitre 28

    Chapitre 29

    Chapitre 30

    Chapitre 31

    Chapitre 32

    Chapitre 33

    Chapitre 34

    Chapitre 35

    Chapitre 36

    Chapitre 37

    Chapitre 38

    Chapitre 39

    Chapitre 40

    Chapitre 41

    Chapitre 42

    Jeff Madison

    Titre original: Jeff Madison and the Rise of the Dreamons

    Traduction: Laure Valentin

    Première édition 2018

    Jeff Madison et l’attaque des Mortcenaires

    ISBN 978-1-945709-14-2

    Copyright © 2018 Bernice Fischer

    BerniceFischer.com

    Tous droits réservés. Aucune partie de cette publication ne peut être reproduite, stockée dans un système d’extraction d’informations, ou transmise, sous quelque forme ou par quelque moyen que ce soit, sans la permission écrite préalable de l’auteur.

    Édité par James Thayer et Maya Fowler-Sutherland

    Illustration de couverture par Darko Tomic – paganus

    LIMITATION DE RESPONSABILITÉ

    Tous les noms et les personnages figurant dans cette œuvre sont fictifs. Toute ressemblance avec des personnes réelles, vivantes ou mortes, ne serait que pure coïncidence.

    À Benji

    Une étoile si éclatante

    Qu’elle brille même dans la lumière

    Merci à…

    Darko Tomic – paganus, pour cette couverture magique, une capacité formidable à transformer les mots en images saisissantes. Ces mortcenaires sont exactement comme je les avais imaginés.

    Maya Fowler-Sutherland, d’avoir verni cette histoire jusqu’à la faire étinceler.

    André, d’être mon centre de gravité en m’encourageant sans relâche à viser au-delà de la lune et des étoiles. Merci d’avoir donné vie à l’histoire en allemand.

    Angie, qui m’autorise à voyager sur son affreux sofa rose avec ces binocles magiques…

    1

    — Réveille-toi ! Jeff, réveille-toi ! Bouge, mon garçon ! Tu dois bouger !

    Jeff ouvrit brusquement les yeux. Il se redressa en position assise et plaqua les mains sur ses oreilles. La voix retentissait toujours et il tourna la tête d’un côté et de l’autre. Le cœur battant, il se rendit compte qu’il n’était pas dans sa chambre, mais dans un vaste espace vide. Son lit avait disparu. Il était assis sur un plancher lisse. Le froid le saisit, telle une vague d’eau glaciale. Se levant sur ses pieds nus, Jeff plissa les yeux dans le noir.

    Il se mordit la lèvre. Bon sang, mais que se passait-il ? Où était-il ?

    Il s’était endormi dans sa chambre, et pourtant il se réveillait dans cet endroit étrange et obscur. Les yeux mi-clos, il essayait de percer les ténèbres pour savoir où il était. Pas de murs, pas de plafond. Il ne voyait absolument rien.

    Jeff fit un pas avant de bondir sur le côté, brusquement frappé à la mâchoire. De la bave et du sang giclèrent hors de sa bouche. Il tomba au sol et grimaça en sentant le goût sur sa langue. Un filet chaud coulait le long de son menton. Jeff entendit un frémissement à proximité et il essaya de rouler dans la direction opposée, mais un autre coup le percuta dans les côtes. L’air fut expulsé de ses poumons. Incapable de reprendre sa respiration, il se pelotonna, ramenant ses genoux contre sa poitrine. Les coups pleuvaient de tous les côtés à la fois. Il avait l’impression d’être passé à tabac par un gang de voyous.

    Il avait envie de crier et de hurler, mais il n’y avait personne pour l’aider. Il était pris au piège dans cet espace vide, malmené comme un punching-ball. 

    La même voix qui avait tonné dans sa tête quelques secondes auparavant se fit à nouveau entendre :

    — Lève-toi. Tu dois te mettre debout. Lève-toi, Jeff ! Viens vers ma voix.

    Elle était si autoritaire, si exigeante, qu’il leva la tête et roula à l’écart des coups. Il se hissa sur ses genoux. Quelqu’un était là pour l’aider. Il devait simplement suivre le son de sa voix. En titubant, il serra les poings et se mit à agiter les bras dans toutes les directions, mais ses coups ne rencontraient que l’air environnant. Jeff essaya de tourner sur lui-même sans interrompre ses moulinets, espérant frapper quelque chose. Ses côtes protestaient et ses yeux brûlaient à cause du sang qui ruisselait sur son front. Il n’avait pas fait un pas quand quelque chose le heurta dans le dos, le projetant en avant. Il s’étala de tout son long et, emporté par son élan, glissa sur le sol les bras tendus. Une fois de plus, les coups s’abattirent sans ménagement sur ses bras et ses jambes.

    La voix flotta comme un brouillard jusqu’à lui.

    — J’arrive. Tiens bon, mon garçon. J’arrive.

    Jeff ignorait qui lui parlait, et pourtant cette voix lui était familière. Il savait qu’il perdait le combat, tressaillant et gémissant à chaque nouveau coup. Il était difficile de lutter contre l’invisible. En tout cas, quelle qu’elle soit, cette chose empestait. Cette odeur, impossible à identifier, lui donnait des haut-le-cœur. Ses yeux s’embuèrent. Jeff restait roulé en boule, protégeant sa tête et son torse du mieux possible avec ses bras et ses jambes. Il ferma les yeux de toutes ses forces.

    Lorsqu’il tendit l’oreille pour entendre la voix, elle lui parut de plus en plus faible.

    — Ne partez pas, attendez, revenez, gémit-il.

    Une bourrasque lui ébouriffa les cheveux, comme si une porte s’était ouverte et qu’une brise s’y était engouffrée. Les ténèbres s’éclaircirent et l’atmosphère fut illuminée par une douce lueur jaune. Soudain, les coups cessèrent. Jeff leva la tête et fit la grimace en se redressant à nouveau sur ses genoux. Aussitôt, il étouffa un cri. Une pointe de douleur venait de traverser sa cage thoracique. Les mains sur son flanc, il se leva péniblement et jeta un regard circulaire à la recherche de son agresseur, tendant une main pour éviter les coups.

    Jeff recula en vacillant lorsqu’un guerrier lui apparut, aux prises avec un monstre. Il ne l’avait encore jamais vu auparavant, mais l’éclat violet dans les yeux de l’homme lui révéla sa nature. Seuls les guerriers sandustiens avaient des yeux d’une telle couleur. La bête contre laquelle il se battait avait tout d’une créature sortie de l’enfer.

    Elle dépassait en taille le guerrier qui s’était interposé devant lui. Le corps grisâtre se mouvait en ondulant, la peau tendue et étirée comme si quelque chose cherchait désespérément à surgir. Ses grandes ailes de cuir battaient lentement. Des serres crochues apparaissaient au-dessus des jointures de ses doigts, à l’endroit où le cartilage rejoignait les ailes. Ses yeux étaient ronds, comme deux trous noirs dénués de lumière et de reflets. Sa tête était difforme, bardée de dents tranchantes, et sa gueule si large et si béante qu’elle semblait remonter jusque derrière son crâne. Ses dents étaient jaunes et une substance noire gélatineuse coulait de sa bouche. Jeff fronça le nez lorsque l’odeur fétide l’atteignit en pleine figure. Le monstre avait une langue brune qui pendait sur le côté, comme s’il haletait, et qui s’enroulait sur elle-même tel un doigt lui faisant signe d’approcher. Le regard de Jeff alternait entre le monstre et le guerrier.

    Ce dernier était bâti comme un lutteur et portait une veste noire qui accentuait la musculature de son torse. Il avait l’air cruel et sa peau était d’un noir d’ébène qui luisait dans la faible lueur de la porte entrebâillée. Au lieu d’utiliser la poudre argentée scintillante capable, comme Jeff le savait, de prendre n’importe quelle forme y compris celle d’une arme, le guerrier combattait à mains nues. Il bondit et tournoya dans les airs, assénant sur le monstre coups de pied et de poing. La créature frappa l’homme de ses ailes, tentant de le mordre et de le griffer, enfonçant les serres dans sa chair. Jeff recula.

    — Franchis cette porte ! lui lança le guerrier, à bout de souffle, sans interrompre l’acharnement de ses poings.

    Jeff avait fait deux pas laborieux lorsqu’il se rendit compte que le grand guerrier qui avait intercepté la bête agressive combattait toujours. Il se retourna et balaya la pièce du regard.

    Je connais cet endroit. C’est mon simulateur, songea-t-il, fébrile. Que puis-je faire ? Je ne suis pas censé attraper des rêves !

    Au cours de sa dernière aventure, il avait pris conscience d’une chose : chaque fois qu’il pénétrait dans son simulateur pour attraper un rêve, il libérait un monstre de sa prison magique sans le savoir. Ainsi, tant que les guerriers et les anciens sandustiens n’avaient pas capturé les monstres pour rendre à nouveau son simulateur inoffensif, il avait l’interdiction formelle d’attraper des rêves.

    Il se retourna en entendant les bruits de combat. Le guerrier venait d’être projeté à terre dans un grognement, le dos cambré. Je dois faire quelque chose si nous voulons sortir d’ici. Je ne l’abandonnerai pas alors qu’il est venu m’aider.

    Lorsque Jeff ferma les yeux, des images lui apparurent. Il en prit une et tourna les talons. Sourd à la douleur dans ses bras et ses côtes, il lança le lourd filet en direction du monstre. Le filet tournoya dans un cercle paresseux, fendant l’air avant de se poser sur la créature comme une couverture pesante. La bête se contorsionna en agitant ses ailes, mais plus elle se débattait, plus ses serres s’emmêlaient. Elle se balançait en poussant des hurlements stridents, sifflant et inspirant bruyamment par ses narines dilatées.

    Jeff rejoignit en titubant le guerrier étendu à terre. Lui agrippant un bras, il s’arc-bouta pour tenter de l’aider à se relever. Le guerrier grommela, mais se leva péniblement, suivant le mouvement de Jeff. Comme deux marins ivres se soutenant l’un à l’autre, ils chancelèrent en direction de la porte. Jeff avait du mal à respirer. Du sang ruisselait sur son visage et chaque parcelle de son corps protestait. Les jambes du guerrier se dérobèrent et Jeff céda sous son poids mort. Heureusement, ses genoux tenaient bon. Il parvint à redresser le guerrier.

    Pitié, ne tombe pas, pitié, ne tombe pas, songea Jeff en peinant sous le poids, s’efforçant de rallier la porte entrouverte. Il touchait presque leur évasion du doigt.

    Son cœur se serra quand il entendit le filet se déchirer. Le grondement redoubla de fureur. Oh, zut, se dit-il.

    Le guerrier trébucha et s’effondra au sol, entraînant Jeff avec lui. Abandonnant le corps inerte de l’homme, il se retourna pour affronter le monstre gémissant. La bête avançait, sa tête oscillant à l’horizontale. Un sourire sinistre et impatient barrait son affreux visage. Si elle avait réussi à vaincre le guerrier solide étendu à ses pieds, inconscient, quel espoir lui restait-il ? 

    Réfléchis. Réfléchis ! Je dois ralentir cette bête ! Il ferma les yeux et, par la pensée, passa ses images en revue. Mais il ne trouva rien qui puisse arrêter le monstre.

    Il faut le ralentir, donnez-moi quelque chose pour le ralentir, hurla-t-il aux images dans sa tête. Des rayons de lumière lui vinrent à l’esprit. Au désespoir, il s’en empara.

    Lorsqu’il ouvrit les yeux, ce fut pour constater qu’il avait un étrange pistolet dans les mains.

    Oh, waouh… un pistolaser steampunk ! Jeff regardait son arme, hébété. Le monstre était presque sur lui ! Il appuya sur la détente et un rayon de lumière fluorescente fusa en direction de la créature, l’engloutissant comme une boule de gaz rotative. Les lumières étaient multicolores, un imbroglio de jaune éclatant, d’orange vif, de bleu électrique et de tons citron vert. Elles s’agrippèrent au monstre, se changeant en filets vaporeux qui s’enroulèrent autour de lui comme des fumerolles. Plus il se débattait et plus la brume se condensait, fusionnant jusqu’à former une seule masse indistincte. La créature contrariée rejeta la tête en arrière et poussa un cri perçant, incapable de bouger. Le guerrier était toujours inconscient à ses pieds lorsqu’elle commença à se cabrer, lacérant le nuage. Fou de joie, Jeff braqua de nouveau son arme laser sur la bête et tira un autre rayon nébuleux.

    — C’est le moment de partir, grommela-t-il en attrapant le guerrier.

    Il essaya de le hisser sans prêter attention à la douleur dans ses côtes. Mais le guerrier était si lourd que Jeff parvint uniquement à lui soulever un bras. Les talons fermement plantés dans le sol, il le tira et le guerrier se mit à glisser. Avec acharnement, Jeff le traîna en direction de la porte jusqu’à sentir le halo doré tout autour de lui. Dans son dos, le monstre tempêtait en essayant toujours de se démêler du brouillard tenace. Jeff trébucha sur le corps du guerrier et il l’enjamba afin de le pousser tant bien que mal hors de la salle des rêves. Il était brutal, mais il s’en fichait. L’heure n’était pas aux précautions. Cette chose les poursuivait. Jeff parvint à sortir en même temps que le guerrier inconscient et referma la porte à deux mains. Il guetta le déclic d’un verrou, mais comme rien ne se produisait, il s’écarta de la porte. Le monstre pouvait-il quitter la pièce ?

    Jeff tira le guerrier par le bras.

    — Viens ! Il faut partir !

    L’homme remua et tenta de se lever. Son bras pesant sur les épaules, Jeff le dirigea à l’écart de la porte. Jetant un coup d’œil autour de lui pour savoir où ils se trouvaient, il gémit. Au-delà des arbres, un vaste pré était moucheté de curieuses silhouettes en pierre : ils étaient au nord du cimetière de Little Falls qui longeait la lisière. Il était loin de chez lui. Jeff entendit un grondement derrière lui et il se mordit la lèvre. Zut… Le monstre les avait suivis à l’extérieur. Ils avaient de gros ennuis et il n’y avait personne en vue.

    Jeff adossa le guerrier contre une stèle couverte de mousse aux inscriptions effacées. L’homme soupira comme s’il s’agissait d’un coussin moelleux. Se laissant aller contre la pierre, il essaya d’ouvrir ses yeux gonflés. Sa voix était basse et grave :

    — Jeff, va-t’en. Laisse-moi.

    — Hors de question !

    Le garçon tourna vivement la tête à la recherche d’une arme de fortune, mais le seul objet disponible était un long bâton fin. Clignant frénétiquement des paupières pour ajuster sa vue, il regarda fixement l’orée du bois. Les lampadaires qui éclairaient les allées du cimetière ne projetaient pas leur lumière jusqu’à la forêt. Sous les yeux de Jeff, l’obscurité sembla bouger entre les arbres. Il fronça le nez en sentant un doux parfum de jasmin dans le vent et il secoua la tête, comme pour dissiper cette senteur fleurie qui lui donnait envie d’inspirer à pleins poumons et d’en oublier l’approche du monstre.

    Prêt pour le prochain assaut, Jeff s’avança. Il faisait encore noir, mais pas autant que dans la pièce. Au moins, maintenant, il pouvait voir ce qu’il combattait. L’aube légère colorait le ciel rose. Du coin de l’œil, il vit le guerrier se retenir à la pierre tombale pour se mettre debout. Que pouvait-il faire ?

    — Ne bouge pas, marmonna Jeff.

    — Tu ne peux pas affronter ça tout seul !

    Le guerrier tressaillit quand ses genoux faiblirent, et il s’agrippa de plus belle à la stèle.

    Jeff ne répondit pas. Il plissa les yeux dans la pénombre pour essayer de distinguer la silhouette du monstre dans l’obscurité de la nuit.

    Il arrive. Une ombre se rua vers lui et il brandit son bâton. D’un pas de côté, il esquiva le monstre tout en assénant violemment son arme. L’adversaire se pencha avant de le frapper sur le crâne, l’envoyant voler à la renverse. Jeff s’étala sur le dos, les quatre fers en l’air, et resta étendu, les yeux vers le ciel nocturne. Les étoiles se brouillèrent et il entendit la créature hurler à la mort, comme pour annoncer sa victoire.

    — Capturer cet attrapeur de rêves était plus facile que prévu !

    La voix était grave et gutturale, presque surnaturelle.

    Sans se laisser entraver par ses côtes endolories, Jeff s’assit et essuya le sang sur son menton. Ils étaient fichus. Il ne pouvait rien faire pour se défendre ni protéger le guerrier toujours cramponné à la pierre tombale. Il refusait de mourir assis ou allongé sur le dos. Il affronterait ce que le sort lui réservait.

    Les genoux instables de Jeff manquaient se dérober sous son corps. En approchant, le monstre battit lentement ses ailes de cuir, produisant un froissement de feuilles sèches. Sa langue entrait et sortait de sa bouche, comme s’il savourait déjà sa victoire.

    — Laisse le garçon tranquille. Prends-moi à sa place, dit le guerrier dans un souffle.

    Il avait toujours du mal à se lever et ses yeux violets avaient perdu leur éclat.

    Le monstre partit d’un grand éclat de rire, un bruit qui noua le ventre de Jeff, puis il tonna :

    — Oh, mais je te prendrai aussi !

    2

    La vaste salle dégageait une odeur de terre et de moisissure, comme si elle était située en sous-sol. Bien qu’elle soit plongée dans l’ombre, une faible lueur dorée se reflétait sur les parois et le plafond, projetée par les torches enflammées rivées le long des murs. Une substance grisâtre aux allures de fumée s’élevait du sol, comme si les pores de la pièce sécrétaient une brume trouble.

    Les créatures dissimulées sous leurs longues capes grondaient, claquant des mâchoires et se crachant au visage tout en flottant à travers la pièce dans un bruissement continu. Entremêlées, elles semblaient se disputer l’espace disponible tels des serpents au fond d’une crevasse. Les mortcenaires glissaient au-dessus du sol, se heurtant les uns aux autres avant de siffler en changeant de direction. La cape de l’un des mortcenaires se détacha, révélant un entrelacs de fines veines rouges sur son torse. Les chuintements et les postillons redoublèrent, comme si les créatures étaient furieuses de rester dans un espace confiné.

    Un sifflement sinistre s’éleva par-dessus le vacarme et tout mouvement cessa dans la pièce, comme si les ondes sonores avaient pétrifié la horde de mortcenaires en contrebas. Ils variaient en forme et en taille. Pour un observateur extérieur, placé au-dessus de la mêlée, cela ressemblait à un attroupement de personnes vêtues de longues toges et de capuches dissimulant leurs traits. On aurait dit des moines réunis pour un rituel secret. La masse récalcitrante s’arrêta et regarda le mortcenaire menaçant qui avait réclamé leur attention.

    Le mortcenaire en surplomb flottait légèrement au-dessus du sol, baigné d’un halo rouge. Il s’appelait Uzas. Il s’était élevé à la position de chef quand la méchante sorcière louve, Zorka de Drakmere, avait libéré les mortcenaires de leurs prisons éternelles par un sortilège. Elle parlait directement au travers d’Uzas, l’utilisant comme un vaisseau. 

    Zorka était la vieille sorcière louve maléfique aux longs cheveux gris que Jeff avait délivrée d’une prison magique par inadvertance, alors qu’il cherchait à attraper un rêve lors de sa dernière aventure. Sa libération involontaire était un cauchemar pour Jeff et ses amis. Zorka était aussi effroyable qu’elle était hideuse. Elle vidait ses victimes de leur sang, les transformant en morts-vivants condamnés à la servir pour l’éternité.

    Ce n’était pas de sa propre initiative qu’Uzas était devenu chef. D’ailleurs, il ignorait pourquoi Zorka l’avait choisi. Peut-être avait-elle perçu sa capacité à infliger la douleur. Toutefois, il s’en réjouissait, car cela lui donnait une position de pouvoir sur tous les mortcenaires, une position qu’il adorait. Elle les avait libérés dans le noir afin d’accomplir une certaine quête qu’elle avait tissée dans un sortilège. La quête consistait à chercher et capturer l’attrapeur de rêves, rien de très compliqué. Or tant que cette mission ne serait pas réalisée, ils demeuraient soumis au bon vouloir de Zorka. Et aussi méchants qu’ils soient, aucun des mortcenaires ne souhaitait cela… pas même Uzas.

    Zorka avait essayé d’enlever l’une des amies de Jeff, Phoebe, afin d’utiliser son sang pour obtenir l’immortalité. Heureusement, l’affreuse mégère avait été capturée et enfermée de force dans une prison magique par les sorcières Angie et Wiedzma, et les deux dragons Watroc et Azghar.

    Uzas ignorait comment, pourquoi et pendant combien de temps elle resterait sous les verrous, mais sa voix avait toujours le pouvoir de les atteindre.

    Suspendu au-dessus du sol, Uzas regarda les mortcenaires rassemblés en contrebas. Ces derniers avaient été emprisonnés par des guerriers dans de nombreux royaumes lorsqu’on les avait surpris en train de perpétrer des atrocités. Le nombre de détenus n’avait cessé d’augmenter au fil des décennies. Le garçon en avait délivré quelques-uns par erreur en attrapant des rêves, mais le reste avait été libéré par le sortilège de Zorka.

    Il leva les bras et la toge rouge qui l’enveloppait comme un épais rideau de velours se retroussa, dévoilant ses mains décharnées à la peau grise et fine. Aussitôt, les claquements et les crachats cessèrent. Il prit la parole d’une voix caverneuse.

    — Mortcenaires, l’heure est venue où le sortilège abandonnera sa mainmise sur nous, nous laissant forger notre chemin dans les ténèbres vers la liberté. Les mortcenaires appelés pour capturer l’attrapeur de rêves doivent revenir victorieux. En offrant le garçon à Zorka, la sorcière louve, nous scellerons notre liberté.

    Un froissement se fit entendre et la foule oscilla comme un seul corps en apprenant cette nouvelle.

    — Puisque nos destins dépendent de la capture de l’attrapeur de rêves, pourquoi la mission a-t-elle été réalisée en secret ? demanda un mortcenaire en contrebas. Pourquoi n’avons-nous pas été inclus dans les projets, Uzas ?

    Il répondait au nom de Zlo et son expression faciale était cachée par sa capuche, baissée sur ses yeux comme s’il cherchait à éviter de croiser ceux d’Uzas.

    Le chef cligna lentement des paupières en regardant les mortcenaires. Sa supériorité l’enthousiasmait, mais des commentaires de ce genre pouvaient être considérés comme un signe de mutinerie. Rien n’empêchait l’un des mortcenaires de le défier pour prendre le pouvoir. Seule la connexion qu’il partageait avec Zorka et sa capacité à infliger une douleur intense protégeaient sa position. C’était le moment idéal pour montrer à ces misérables mortcenaires ce qu’il advenait de ceux qui le provoquaient.

    — Dorénavant, on m’appellera Seigneur militaire des Mortcenaires.

    Uzas baissa la main jusqu’à ce que son long index jauni désigne Zlo.

    — Toi, tu seras mon chef de guerre. Tu feras respecter ma volonté auprès de nos amis et nos ennemis.

    Il propagea vers lui une vague de souffrance et de peur, esquissant un sourire satisfait lorsque Zlo tressaillit et tomba à genoux, les mains écartées sur le sol devant lui.

    Uzas donna une nouvelle impulsion et Zlo s’effondra par terre à plat ventre, inconscient. Après quoi, Uzas regarda autour de lui, laissant un sourire monter lentement sur son visage tandis que les autres mortcenaires reculaient avec méfiance. Certains mirent un genou à terre comme pour montrer qu’ils l’acceptaient en tant que chef redouté et incontesté. Même s’il avait le pouvoir d’infliger la douleur par l’émission d’énergie, ce pouvoir n’avait jamais été très fort. Jusqu’à présent, il n’avait réussi à causer rien de plus qu’une migraine. S’il n’était pas prudent, l’énergie pouvait se retourner contre l’envoyeur et lui infliger la migraine en question. Il sentait que son pouvoir s’était développé depuis que Zorka communiquait avec lui. À présent, il était capable de le diffuser à volonté et en diverses quantités. Il adorait cela et caressait ce pouvoir jusqu’à le maîtriser, le manier par la seule autorité de sa volonté. Certes, il avait essayé de diriger son pouvoir vers Zorka, mais cette faible tentative avait fait rire la sorcière. Elle lui avait renvoyé la douleur dans une vague si forte qu’il était resté prostré pendant des heures, en proie aux plus terribles tremblements.

    — Ce n’est pas le moment de tergiverser et d’élaborer des plans. Nous devons agir vite, car le temps est essentiel. L’attrapeur de rêves est protégé. Nous devons attendre le retour des autres mortcenaires.

    3

    Une lumière vive explosa dans le ciel nocturne, juste devant Jeff, si éblouissante qu’il dut mettre sa main en visière devant ses yeux. Alors que des étincelles tombaient en crépitant sous forme de pluie, une silhouette se matérialisa. Jeff remarqua une cape, qui se gonflait et claquait derrière elle sous le souffle de la détonation.

    Les contours de deux guerriers apparurent, jambes pliées en posture de combat. Sans perdre plus de temps, l’un d’eux répondit au monstre :

    — Et moi ? Crois-tu que tu peux me prendre aussi ?

    Les yeux du guerrier irradiaient d’un éclat violet.

    Jeff prit une grande inspiration et son cœur se mit à cogner dans sa poitrine, avec une telle force qu’il crut bien exploser de joie en reconnaissant la voix. C’était Madgwick, le guerrier sandustien qui avait partagé de nombreuses aventures périlleuses avec lui. Ils s’étaient rencontrés alors que le petit frère de Jeff avait été enlevé et emmené au château de Drakmere. Ils avaient réussi à secourir son frère, mais Rhed, le meilleur ami de Jeff, avait été adopté par un clan d’arbres et avait commencé à se transformer. Il était donc retourné à Drakmere afin de trouver un remède pour Rhed. Madgwick l’avait suivi et, une fois de plus, avait volé à son secours.

    Il ne reconnaissait pas le second guerrier. Jeff se laissa tomber à genoux et s’éloigna aussi vite que le lui permettaient ses douleurs et ses élancements. Rejoignant le guerrier noir toujours agrippé à la stèle, il se retourna pour assister au combat. Son bâton était bien serré dans ses mains au cas où Madgwick aurait besoin d’aide.

    Le monstre parut étonné par la brusque apparition des guerriers, qui brandissaient leurs armes scintillantes. Avec une synchronisation parfaite, ils encerclèrent l’ennemi.

    Madgwick ouvrit les poings et

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