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Plan de vol modifiable
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Livre électronique249 pages3 heures

Plan de vol modifiable

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À propos de ce livre électronique

J’interceptai l’alignement de piste à une vingtaine de miles de l’aéroport de Havre-Saint-Pierre. Je procédai pour un atterrissage sur la piste 08 en effectuant une approche classique avec descente par palier. La météo était mauvaise. Dès que je pus, je plongeai pour atteindre le minimum d’altitude permis. Là, je m’écarquillai les yeux afin de voir la piste à travers le rideau de brume. J’apercevais le sol par intermittence sous l’avion, mais je ne voyais rien devant. La piste se rapprochait. Il ne restait plus que quelques secondes avant la remontée. Soudainement, elle apparut, mais j’étais presque au-dessus du seuil. Et la piste était courte…

De Montréal à Natashquan et de Wabush à Halifax, suivez les péripéties d’un pilote professionnel sur un avion corporatif. Découvrez un monde fascinant où la routine au travail n’existe pas. Des anecdotes de pilotes, par un pilote, mais pas seulement pour les pilotes!  


À PROPOS DE L'AUTEUR


Natif de Causapscal, dans la vallée de la Matapédia, Frédéric Veilleux travaille quatre années comme pilote professionnel au début des années 2000 et obtient sa licence de pilote de ligne. Il continue sa carrière d’aviateur en acceptant un poste de commandant de bord sur un avion corporatif. Par la suite, il met son expérience au bénéfice de l’organisme Sérabec, qui effectue des missions aériennes de recherche et sauvetage. Aujourd’hui propriétaire de son propre avion, ses aventures d’aviateurs sont loin d’être terminées…

LangueFrançais
ÉditeurTullinois
Date de sortie21 févr. 2022
ISBN9782898091001
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    Aperçu du livre

    Plan de vol modifiable - Frédéric Veilleux

    Autre publication de Frédéric VEILLEUX

    2012 Histoire d'un Pilote Trois Lunes Éditions

    Remerciements

    Merci à mon meilleur ami Julien et à sa mère Carole, pour la franchise et la justesse de leurs commentaires sur mon manuscrit :

    Merci à mes parents, Carol et Diane, et mes deux frères, David et Simon, sur qui je peux compter en toute circonstance;

    Merci à mes trois enfants, Ludovic, Maxime et Benjamin. Être votre père est ma plus grande fierté.

    Par-dessus-tout, merci à ma conjointe Kathy. Merci d’être à mes côtés et de m’épauler dans tous mes projets, aussi farfelus soient-ils. Tu es le pilier de ma vie sans lequel je ne serais pas ce que je suis.

    Je t’aime.

    Finalement, merci à vous, chers lecteurs, de m’avoir encouragé !

    Fred

    Préface

    Pierre HARVEY est éditeur du magazine Aviation Québec.

    Ce dernier est paru pour la première fois en 1997 sous le nom « Journal Aviation Québec », le Magazine Aviation est une revue spécialisée québécoise sur l’aviation. Abordant autant l’actualité que les sujets techniques en passant par les anecdotes de pilote et les conseils pratiques, ce périodique est un magazine complet fait par des pilotes pour des pilotes!

    Déconcerté et flatté, voilà comment je me sentais un beau soir du début avril, lorsque Frédéric me proposa d’écrire la préface de son nouveau livre. Malgré une longue carrière comme éditeur du « Magazine Aviation », et nombre d’article paru sous ma plume, c’était la première fois qu’on me demandait de signer une préface. J’ai accepté avec grand plaisir.

    Ce livre ne raconte pas l’histoire d’un pilote de guerre; et ce n’est pas non plus le récit d’une catastrophe aérienne. L’auteur n’a pas fait les manchettes suite à un scandale ou à un acte héroïque. Il s’agit simplement d’un homme, un pilote professionnel, qui nous raconte sa passion de l’aviation à travers une série d’anecdotes inédites et captivantes. 

    Bien que l’auteur possède sa licence de pilote de ligne, il n’a pas travaillé pour un gros transporteur. Il était plutôt pilote corporatif au niveau régional, dans les provinces de l’Est du Canada, et c’est ce monde qu’il nous fait découvrir. Avec en plus, un chapitre final qui plaira assurément à tous les pilotes privés. Bref, ce livre est différent de la plupart des autres livres sur le métier de pilote qu’on peut trouver.

    S’inscrivant dans la lignée du premier livre de Frédéric « Histoire d’un Pilote », paru en 2010, tout aussi divertissant et bien vulgarisé, ce deuxième tome plaira à tous les amateurs d’aviation, qu’ils soient pilotes ou non.

    Bonne lecture !

    Pierre Harvey

    Prologue

    L’avion fonce à plus de 450 km/h en cette soirée de janvier. Il fait nuit noire, bien qu’il ne soit que 18 heures. En palier à 23 000 pieds, je supervise l’autopilote qui dirige l’avion. Le ciel au-dessus de moi est dégagé, et je peux apercevoir les étoiles. Sous l’avion, c’est le contraire. Une épaisse couche nuageuse culmine vers 15 000 pieds et se poursuit presque jusqu’au sol. Les prévisions météo annoncent un plafond de 1 000 pieds avec une visibilité de trois miles. Amplement suffisant pour un atterrissage sans problème.

    Le contrôleur aérien m’autorise à entamer ma descente pour Wabush, porte d’entrée du Labrador. La gravité aidant, la vitesse augmente encore et atteint les 500 km/h. Malheureusement, on m’avise qu’un avion venant de Montréal arrivera quelques minutes avant moi; je dois donc prévoir un délai pour l’approche. Je ramène les manettes de puissance vers l’arrière pour ralentir ma machine. Quelques minutes plus tard, je reçois une autorisation pour un circuit d’attente de dix minutes à 6 000 pieds. Je stabilise l’avion et je procède tel qu’il m’a été demandé.

    Dehors, de gros flocons de neige humide s’écrasent sur le pare-brise. La température, anormalement chaude, est de huit ou dix degrés sous zéro, une température idéale pour la formation de givrage et effectivement, je vois une couche de glace s’épaissir sur le bord de l’aile. J’actionne les boudins de dégivrage à plusieurs reprises pour m’en débarrasser, avec plus ou moins de succès. Rien d’inquiétant pour le moment, mais il ne faudrait pas que cette attente dure trop longtemps.

    Alors que je consulte ma carte d’approche, une alarme sonore retentit soudainement dans le cockpit. Électrisé, je lève instantanément les yeux vers le panneau d’avertissement. Un voyant rouge est allumé, ainsi que le gros voyant master alarm. Je presse sur ce dernier pour stopper l’alarme et je regarde le système fautif. L’autopilote s’est débranché. C’est ennuyant, mais c’est moins grave qu’une panne de moteur.

    L’avion s’incline doucement vers la gauche. Je reprends le contrôle manuel et replace l’avion sur la trajectoire d’attente. J’essaie de réenclencher l’autopilote à deux reprises, sans succès. Ensuite, je serre le câble de connexion situé sous le manche. En serrant fort, l’autopilote reprend du service, mais il rend l’âme aussitôt que je relâche la pression. Inutilisable.

    Qu’à cela ne tienne, je peux piloter en manuel sans problème. Toutefois, un appel du contrôleur avec le dernier bulletin météo vient compliquer la situation : plafond descendu à 400 pieds et visibilité à moins d’un mile dans les averses de neige. La charge de travail vient d’augmenter considérablement. Ce qui apparaissait comme une approche relativement facile s’est mué en beau défi en moins de trois petites minutes.

    Sur les ailes, la glace s’épaissit sans que je puisse y remédier. J’envisage d’en aviser le contrôleur afin d’obtenir la priorité pour l’atterrissage, lorsque ce dernier communique enfin avec moi pour me donner l’autorisation d’approche. Je complète mon dernier tour d’attente et je manœuvre pour intercepter l’alignement de la piste, et ensuite l’alignement de descente. Dans le même temps, je configure l’avion pour l’atterrissage en réduisant la vitesse et en abaissant les roues. 

    Je m’efforce de maintenir les aiguilles de guidage parfaitement au centre de l’instrument tout en surveillant mon altitude, ma vitesse et la foutue glace. À 2 000 pieds, j’allume les phares d’atterrissage, mais la neige est si épaisse qu’elle agit comme un miroir et annule presque entièrement l’éclairage. Je dois l’éteindre complètement pour ne pas risquer d’être aveuglé.

    Plus je me rapproche du sol, plus le faisceau de l’alignement est étroit et plus les corrections sur les commandes doivent être délicates. Un vrai travail de chirurgien. C’est très difficile à faire lorsqu’il faut en même temps scruter l’extérieur pour trouver la piste, car je suis seul aux commandes. À 500 pieds du minimum, je commence à apercevoir un halo lumineux. La tentation est grande à ce moment de quitter les instruments et de poursuivre en visuel, mais la référence n’est pas encore assez claire, et je replonge mes yeux dans les instruments.

    Je suis descendu au minimum, et c’est l’instant de vérité. Je n’ai pas plus de trois secondes pour apercevoir la piste. Dans le cas contraire, je remonte et retourne à Sept-Îles. Fébrile, je jette un coup d’œil et je la vois, droit devant l’avion, pile où elle devait être. Elle se rapproche rapidement. J’ai tout juste le temps de rallumer le phare d’atterrissage que déjà, je coupe la puissance pour arrondir. L’adrénaline retombe avec le toucher des roues.

    Tout en roulant sur le tarmac, je pense aux quatre personnes assises dans le terminal, impatientes de rentrer chez elles. Elles seront déçues, car il est impensable que je reparte ce soir. Avec un autopilote kaput et cette neige gorgée d’eau qui colle aux ailes, il est hors de question de redécoller maintenant. La forte intensité de cette chute de neige n’était pas prévue, sinon je ne serais pas venu ce soir. Par chance, on prévoit un dégagement pendant la nuit, et nous devrions pouvoir rentrer chez nous au matin. Heureusement, car je ne tiens pas plus qu’eux à demeurer coincé ici.

    Les passagers accueillent la nouvelle sans trop se plaindre. Avec ce temps, ils devaient s’y attendre un peu. Ils saisissent leurs bagages et se préparent à retourner à leur maison de compagnie. L’un d’eux me propose de monter avec eux. Une chambre est libre dans la maison; je pourrai y dormir. Cela épargnera des frais d’hôtel. Je prends mon sac de vol et je grimpe à l’arrière du gros Ford F350.

    La neige redouble d’intensité, et le vent se met de la partie. Un temps à ne pas faire voler un avion, et je me félicite de ma décision. Nous mettons une bonne quinzaine de minutes à rejoindre la maison, pourtant située à moins de quatre kilomètres seulement, dans la ville de Labrador City. Aucun son dans la maison. Tout le monde dort ou est parti travailler. On me désigne une chambre, puis mes compagnons s’éclipsent chacun dans la leur. Je rejoins la mienne au sous-sol, simplement meublée, mais propre et confortable.

    Je remonte pour manger mon lunch, que j’avais prévu déguster en vol sur le voyage de retour. Ensuite, je me rends dans le salon pour regarder la télévision. Elle ne fonctionne pas. Comme il fait trop mauvais pour sortir à l’extérieur, je me résous à redescendre à ma chambre. Je m’étends sur le lit, mais il est trop tôt pour que je m’endorme.

    Les moments de ce genre sont propices à la réflexion, seul, étendu sur un lit, sans aucun moyen de divertissement ni personne à qui parler. Mes pensées divaguent. Enfants, ma conjointe, magasin, avion, voyage, etc. Puis, un flash me vient à l’esprit. Une nouvelle idée de projet. Une idée d’abord saugrenue, mais qui fait son chemin tranquillement dans mon cerveau. Écrire un nouveau livre, afin de parachever l’histoire de mon premier ouvrage.

    C’est à cet instant précis que se situe le commencement de cette nouvelle aventure littéraire. Plusieurs mois s’écouleront avant que je ne commence à coucher mon histoire sur papier, et sans doute plusieurs années avant de voir le produit fini. Mais la graine de l’inspiration vient de réapparaître en moi; je ne la lâcherai pas…

    Introduction

    Au moment où je termine l’écriture de ces lignes, je viens d’avoir 40 ans. Je suis diplômé en pilotage d’aéronef du Centre québécois de formation aéronautique à Chicoutimi, détenteur d’une licence de pilote de ligne, père de trois garçons et propriétaire d’une magnifique épicerie située à Causapscal, dans la vallée de la Matapédia.

    Cet ouvrage constitue la suite de mon premier récit. L’action se déroule 12 ans plus tard et comme toujours, tout est véridique. C’est le parcours d’un homme qui croyait en avoir terminé avec l’aviation, mais qui s’aperçoit finalement que celle-ci est indispensable à son bonheur; au point qu’il est prêt à faire toutes les acrobaties nécessaires pour tenter de marier harmonieusement sa famille, ses amis, son commerce et l’aviation commerciale.

    Entrepreneur et pilote d’avion professionnel? Comment réussir à concilier deux métiers en apparence inconciliables? Ce n’est pas toujours facile, mais possible. Pendant quatre années, tout en gérant mon entreprise, j’ai été commandant de bord sur un avion d’affaires turbopropulsé (King Air 90) pour une compagnie privée du Nouveau-Brunswick. Et aujourd’hui, je vole toujours régulièrement, bien que sur d’autres ailes…

    L’ingrédient essentiel pour que cela marche est la passion. Je suis passionné par tout ce que je fais. La passion est la principale qualité d’un entrepreneur, peu importe le domaine d’activité. Elle l’est également pour un pilote. J’adore servir un client, aider un employé ou préparer une commande de bière . Mais aussi, j’adore échanger ce bureau contre un cockpit d’avion et me rendre à Montréal, Halifax ou Wabush.

    La passion n’est pas la seule qualité commune nécessaire à chacun de ces deux métiers. La détermination, le constant désir de performer et de s’améliorer, un bon jugement et une bonne capacité de réaction face à une situation imprévue en sont d’autres exemples.

    J’ajouterais aussi le goût du risque. Sans être masochiste, je dois admettre que j’aime me compliquer la vie. « Vaincre sans défi, c’est triompher sans gloire » est l’une de mes devises. En voici une autre : « La facilité rend la vie ennuyante; la complexité rend la vie excitante. » En général, je ne recherche pas spontanément la facilité. Je suis toujours en quête de nouveaux défis et j’adore le sentiment que l’on éprouve à réussir quelque chose compliqué et difficile. C’est très valorisant, et l’on en est d’autant plus fier par la suite.

    -o0o-

    L’engagement personnel total sans égard au nombre d’heures travaillées fait également partie de cette liste. Ce point met toutefois les deux métiers en complète opposition. Comment en effet être disponible 7 jours sur 7 au magasin et l’être en même temps pour un charter 24 heures sur 24? La planification étourdissante qui en résulte donne le vertige. Mes journées peuvent ressembler à ceci : aller porter les enfants à la garderie le matin, travailler au magasin l’avant-midi, partir le midi pour faire un aller-retour à Wabush et revenir à temps pour le bain des enfants avant le dodo.

    La loi de Murphy étant ce qu’elle est, je reçois souvent un call pour un vol quand cela rushe au magasin, et il arrive souvent un problème au magasin quand je suis en vol. Comme il est impossible de prévoir l’imprévisible, c’est ici qu’il faut du bon monde pour épauler, ainsi qu’un téléphone cellulaire fiable!

    Néanmoins, dans l’ensemble, les désavantages sont largement compensés par le plaisir que j’éprouve à pouvoir accomplir mes deux passions. Ma recette gagnante est d’avoir de bons gérants de rayon débrouillards, une équipe d’employés fiable, un chef-pilote qui accepte mes restrictions de disponibilité, et surtout, une conjointe et des enfants compréhensifs, prêts à vivre avec toutes les contraintes que peut entraîner l’occupation de deux emplois exigeants.

    L’entrepreneuriat demeure mon métier numéro 1, ma vocation si je peux dire, mais piloter un avion est pour moi un excellent moyen de « changer le mal de place », comme on dit en bon québécois. Et même si techniquement, il s’agit d’un deuxième emploi, à mes yeux, c’est un divertissement exaltant.

    Chapitre 1

    Le métier de pilote d’avion était mon premier choix de carrière. Ce fut le domaine dans lequel j’étudiai et travaillai pendant les quatre premières années de ma vie sur le marché du travail. En 2004, je changeai de secteur pour devenir entrepreneur à part entière. Jusqu’en 2012, où je recommençai à piloter professionnellement à temps partiel.

    Le lecteur pourra se demander avec raison pourquoi il y a un trou de huit ans dans ma carrière d’aviateur. Comment et pourquoi en suis-je venu à laisser tomber l’aviation en 2004 alors que je venais d’obtenir ma licence de pilote de ligne? Un retrait que je croyais définitif à l’époque. Mon premier livre, Histoire d’un pilote, répond à cette question, mais je vais en faire ici un bref aperçu.

    À la suite de la perte de mon travail de commandant de bord chez Air Saint-Laurent, en mars 2003, je fis plusieurs tentatives pour me replacer ailleurs. En temps normal, les pilotes expérimentés ayant 1 800 heures de vol ou plus, comme je l’étais, sont relativement recherchés. En atteignant ce plateau, les jeunes pilotes peuvent obtenir leur licence de pilote de ligne et ainsi s’ouvrir les portes des niveaux supérieurs de l’aviation. Ils peuvent alors postuler pour des compagnies aériennes importantes comme Jazz ou Air Inuit.

    Le travail est alors beaucoup plus facile, mieux organisé et bien rémunéré. Le jeune pilote peut désormais bâtir son avenir sur des bases solides et réfléchir à des achats importants comme une maison, ou encore à avoir des enfants. Ses années de « vaches maigres » sont derrière lui. Ou, pour reprendre une expression de mon précédent ouvrage, il a mangé son entrée de « bol de merde » et peut maintenant s’attaquer au plat principal.

    Je comparais ainsi une carrière en aviation à un souper trois services au restaurant. Le premier service, ce sont les petites compagnies aériennes locales et régionales, où les conditions de travail sont dures, et les pilotes sous-payés. C’est le « bol de merde ». Le deuxième service est déjà beaucoup mieux, avec des compagnies solides qui font du vol régional et national. Le troisième service, ce sont les transporteurs internationaux. Là, les conditions de travail sont excellentes, et le pilote est grassement payé. Et il le mérite!  

    L’aviation a toujours été un domaine cyclique de hauts et de bas. Par contre, un événement inattendu allait plonger le monde de l’aviation en pleine crise. Cet événement se produisit le 11 septembre 2001. Ce jour-là, comme tout le monde le sait, une bande d’islamistes radicaux déroutèrent des avions de ligne avec lesquels ils allèrent se planter dans les tours jumelles de New York. Ces événements épouvantables auront des répercussions négatives importantes sur le monde du transport aérien. Les fermetures de compagnies aériennes se succédèrent par dizaines. Des centaines de pilotes se retrouvèrent au chômage ou durent retourner au niveau inférieur pour gagner leur vie et eurent ainsi droit à un deuxième « bol de merde »…

    À l’automne 2003, au moment où je cherchais un emploi, les effets néfastes du 11 septembre se faisaient encore sentir dans le petit monde de l’aviation. Mes chances d’obtenir un travail dans une compagnie de 2e niveau étaient très réduites, ces dernières reprenant les pilotes qu’elles avaient dû licencier avant de songer à en engager de nouveaux.

    Néanmoins, je reçus quelques offres, des postes de commandant de bord sur bimoteur léger dans des endroits comme Havre-Saint-Pierre, Blanc-Sablon, et même Kuujjuaq. Le même type de travail que j’avais accompli depuis les trois dernières années. Dur physiquement, sans assistance ou presque, dans des avions plus ou moins navigables, pratiquement sans chauffage l’hiver, sans climatisation l’été, dans des endroits éloignés au climat difficile, et le tout pour un salaire de misère. Au début de ma carrière, j’aurais sauté sur l’occasion; mais là, j’en avais mon voyage (!) et je déclinai poliment chacune de ces offres.  

    -o0o-

    Cette phase de transition pendant laquelle je me questionnais sur mon avenir dura, comme je l’ai dit plus haut, jusqu’au printemps 2004. À ce moment, je me suis dit : « C’est fini pour moi. » Bien que réfléchie, cette décision fut loin d’être aisée à prendre. Je trouvais particulièrement dommage de mettre fin à ma carrière alors que le pire était derrière moi. Hélas, en raison de la situation générale du marché, le « pire » risquait de se prolonger encore pendant de nombreux mois (ou même quelques années), et il était hors de question pour moi de manger un autre « bol ». Je suis un gars ambitieux. J’étais impatient de bâtir ma vie, d’acheter une maison, de faire des voyages, d’avoir des enfants et de réaliser mes rêves.

    En outre, un autre élément majeur entra en ligne de compte et pesa pour beaucoup dans ma décision. Mon père possédait une épicerie de petite dimension. Il voyait l’âge de la retraite approcher et commençait sérieusement à se questionner par rapport à sa relève. Pour moi, c’était une occasion séduisante, et je me voyais très bien reprendre les rênes du commerce.

    Étant une entreprise familiale, le magasin a toujours fait partie de ma vie. Très jeune, j’y allais avec mon père pour l’aider. Il me confiait de petites tâches simples, qui paraissaient importantes à mes yeux. Mon père me donnait un magnifique « un » dollar en papier avec lequel je filais au dépanneur acheter des cartes de sport ou des bonbons. Au fur et à mesure que je grandissais, j’y allais plus fréquemment, et je fus bientôt en mesure de fournir du travail utile. Le jeu était devenu un travail. 

    Adolescent, je travaillais quelques soirs par semaine, et parfois la fin de semaine, si je n’avais pas de hockey. Comme mon père, je touchais à tout. Viande, fruits et légumes, surgelés ou caisse selon les besoins. Je me débrouillais partout, et mon père me confiait de plus en plus de responsabilités. J’adorais cela et j’y allais le plus souvent possible. Mes parents en étaient bien contents. Au lieu de traîner dans les rues, leur fils s’occupait du magasin, acquérant des compétences très utiles qui ne s’apprenaient pas à l’école.

    Peut-être me voyaient-ils alors comme leur relève? Ils auraient facilement pu me rentrer cette idée dans la tête et me pousser dans cette voie. Au contraire, ils m’ont toujours encouragé à performer à l’école afin d’avoir le choix du métier que je

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