L'école laisse des souvenirs; la vie laisse des cicatrices
Par Tony Engel
()
À propos de ce livre électronique
En savoir plus sur Tony Engel
Rien ne va jamais comme on voulait Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationVous n'en mourrez pas Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluation
Lié à L'école laisse des souvenirs; la vie laisse des cicatrices
Livres électroniques liés
La belle de Caux Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationAu temps des cataplasmes: 1944-1968, la France d'avant la télé Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe Double Jardin Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe Petit Mariole Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationPèlerinage Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationMes années d’esclavage et de liberté Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationGuérillera: Les larmes de cristal Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe conflit de l'an 2040: Roman d'anticipation Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationJe ne vais rien te cacher. Lettres à Georges Anglade: Lettres à Georges Anglade Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe pas suivant: De vie en vie, comprendre, apprendre, évoluer Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationL’Amour plus fort que la guerre Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationMoi aussi: Du surfait à l’authenticité du soi Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationImpressions d'Afrique: Marginales - 238 Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationJ'ai cru voir un coin de ciel bleu: Survie d'une mère et son fils après la guerre Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationÀ rebours: un roman de Joris-Karl Huysmans Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationUne journée sans histoires Évaluation : 5 sur 5 étoiles5/5L'instituteur impertinent: Récit de vie Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLoup solitaire - tome 1: Faudra-t-il se souvenir de tout ? Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationElles n'avaient pas le temps Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLa terrasse des égarés Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationDans les ventres d'acier Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLes Victimes de la coutume: Drame Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLa vie simple Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationJuliane: Autobiographie romancée Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationA Rebours Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationZoubeïda: Roman Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationLe fictionnaire éphémère Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationAndré Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationL’Horreur allemande Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluationTrois nouvelles de la traversée du monde Évaluation : 0 sur 5 étoiles0 évaluation
Avis sur L'école laisse des souvenirs; la vie laisse des cicatrices
0 notation0 avis
Aperçu du livre
L'école laisse des souvenirs; la vie laisse des cicatrices - Tony Engel
L’école laisse des souvenirs
La vie laisse des cicatrices
Tony Engel
L’école laisse des souvenirs
La vie laisse des cicatrices
Essai
Les Éditions Chapitre.com
123, boulevard de Grenelle 75 015 Paris
Du même auteur
Rien ne va jamais comme on voulait. LEN, 2013.
© Les Éditions Chapitre.com, 2015
ISBN : 979-10-290-0283-0
Tout ce que nous savons
Nous l’avons inventé
Mais les dieux nous écoutent
Et gardent le silence
Ils sont tout à côté
Séparés par l’absence
Tournant autour de nous
Tels de grands oiseaux fous
Quand le vent sulfureux
De leurs ailes nous frôle
Nous vacillons soudain
Flamme atteinte par la flamme
Et nous nous consumons
En un flot de symboles
Qui nous fait oublier
Tout ce que nous savons
Marcel Béalu.
1
Un début à tout
Ah ! Que le monde est grand à la clarté des lampes !
Aux yeux du souvenir que le monde est petit !
Charles Baudelaire.
Il y a très longtemps.
Au-dehors, une crise économique venait d’éclater, qui allait faciliter le passage d’une guerre mondiale à l’autre. Ignorant tout cela, bien à l’abri dans le cocon familial, j’ai eu le temps d’ouvrir les yeux sur la vie, de me réconcilier avec elle, de vouloir ensuite explorer le monde du dehors, d’apprendre à me méfier de ses apparences pour en découvrir les écueils, les faiblesses et les avantages, de commencer ainsi -sans trop m’en rendre compte encore- à me construire un monde intérieur.
Après avoir longtemps fait du bruit bien loin à l’Est, cette nouvelle guerre est arrivée, pendant la nuit, sans même réveiller mon village si paisible en ce nouveau printemps. Les apparences n’avaient pas changé, mais pour le regard, rien n’était plus comme d’habitude. Avant même d’être comprise comme un signe : -ce qui arrive va durer, mais n’est rien face à ce qui se passera encore après ces remous !- la guerre était déjà plus loin, vers l’ouest, traînant derrière elle des soldats qui marchaient d’un pas régulier, en doubles files interminables, là où l’herbe longe le bord des routes que le macadam n’avait pas encore envahies.
Seuls les chemins de traverse appartenaient encore au village, que la route venait de couper en deux. À intervalles réguliers, ces files de soldats encadraient des chariots, tous semblables, tirés par des chevaux plus élégants, plus alertes que ceux de chez nous. Le bruit saccadé, mais comme trébuchant parfois, des sabots se mêlait aux cris brefs des oiseaux. Ce jour-là, après la traite du matin, aucune charrette, traînée par le chien de la ferme, ne s’en allait vers la laiterie. La guerre avait occupé l’espace et le temps.
Vers midi, la longue marche des soldats s’arrête. Après des commandements à peine audibles, ils se dispersent lentement dans les prairies environnantes et, alignés par groupes de dix environ, déposent leurs armes, leurs sacs à dos couverts d’une peau de vache, puis se mettent à manger des tranches d’un pain très noir. Au bout d’une demi-heure ils se remettent en files au bord de la route et repartent vers l’ouest.
Ces soldats étaient encore dans leur patrie : mon village faisait partie de cette terre qui avait été enlevée à leurs parents vingt ans auparavant, après l’autre guerre. Pour avoir longtemps espéré ce qui venait d’arriver, le village les accueillait en amis, mais ils restaient indifférents à ce qui se passait autour d’eux. Sans doute savaient-ils -mieux que nous, gamins qui, sans trop chercher à comprendre, regardions des uniformes plutôt que des visages- ce qu’est vraiment cette guerre qu’ils allaient rejoindre.
Dans le village, seuls les plus jeunes, qui ne connaissaient du passé que les souvenirs de leurs parents, manifestaient, entre eux, une joie bruyante et superficielle. Quelques-uns, plus rares, savaient depuis longtemps que cela allait arriver ; restés dans l’ombre, ils y avaient même parfois aidé, et prenaient maintenant des airs graves, comme pour montrer qu’ils portaient, eux aussi, une part du prestige qu’une mère-patrie retrouvée faisait rayonner ; il me faudra longtemps pour comprendre que cette fierté devait se montrer, afin de masquer la servitude volontaire, l’autre face de cette même médaille.
Les plus âgés -surtout les vétérans de la guerre précédente- retrouvaient leur patrie ; ils n’avaient vécu les conséquences sociales et politiques de leur ancienne défaite que de loin, et n’avaient pas été malheureux ; sans avoir l’impression d’être délivrés d’une servitude, ils pouvaient renouer avec leurs jeunes années ; cela leur suffisait.
Bien rares étaient ceux qui avaient regardé au-delà des apparences : cette patrie n’était plus vraiment celle qu’ils avaient connue jeunes. Prise en otage par un pouvoir qu’ils ne voyaient encore que de loin, elle ne venait pas leur apporter la liberté, ni le retour à des traditions rassurantes. Soucieuse d’effacer son absence des vingt dernières années, elle mettait en place, chez nous, les fondements de cette autre violence, sournoise, qui avait, depuis des années déjà, investi